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20/11/2007 | FRANCE | N°06BX00037

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 20 novembre 2007, 06BX00037


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 9 janvier 2006 sous le n°06BX00037, présentée pour la REGION GUYANE, dont le siège est 66 avenue du Général de Gaulle à Cayenne (97 300), représentée par le président du conseil régional, par Me Sagne ;

La REGION GUYANE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°992571 et n°00277 du 10 novembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Cayenne l'a condamnée à verser à la société de travaux Amazonie Guyane (Stag) la somme de 686 020 euros en réparation du préjudice résultant de l'exécution du marc

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 9 janvier 2006 sous le n°06BX00037, présentée pour la REGION GUYANE, dont le siège est 66 avenue du Général de Gaulle à Cayenne (97 300), représentée par le président du conseil régional, par Me Sagne ;

La REGION GUYANE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°992571 et n°00277 du 10 novembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Cayenne l'a condamnée à verser à la société de travaux Amazonie Guyane (Stag) la somme de 686 020 euros en réparation du préjudice résultant de l'exécution du marché conclu le 11 mars 1998 pour la reconstruction d'un établissement de formation agricole à Macouria et l'a condamnée à supporter la charge des dépens pour un montant de 32 453,81 euros ;

2°) avant dire droit, d'enjoindre à la société Stag de produire, dans un délai de trente-cinq jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir :

- les bilans, comptes d'exploitation, comptes de résultats des années 1993 à 1998,

- la déclaration de cessation de paiement remise au Tribunal de commerce de Cayenne au début de l'année 2000,

- les contrats de travail de chacun des salariés intervenus sur le chantier du 15 avril à octobre 1998,

- les fiches de salaires pour cette même période, avant et pendant l'immobilisation du chantier,

- l'indication des chantiers réalisés avant et pendant l'immobilisation,

- les DDASS et déclarations à la Caisse générale de sécurité sociale,

- la liste des matériels de l'entreprise,

- la liste détaillée du matériel et localisation,

- la date et la valeur d'achat,

- les contrats de location,

- les contrats d'entretien ;

3°) de rejeter la demande de la société Stag devant le tribunal administratif, ou subsidiairement, de prononcer un partage des responsabilités à 50 % ;

4°) d'être relevée et garantie de toute condamnation qui serait prononcée contre elle par la SARL Durag, par la société Lbtpg, le cabinet Ponthius et Dupouy, le bureau Apave et leurs assureurs ;

5°) de condamner la société Stag à lui verser la somme de 400 000 euros à titre reconventionnel ;

6°) d'ordonner la compensation des sommes allouées à chacune des parties ;

7°) de fixer les dépens par moitié à la charge de chacune des parties ;

8°) de condamner la société Stag à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 octobre 2007,

le rapport de M. Cristille, premier conseiller;

les observations de Me Bouard pour la Société de Travaux Amazonie de Guyane ;

et les conclusions de Mme Viard, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la REGION GUYANE demande à la Cour d'annuler le jugement du 10 novembre 2005 du Tribunal administratif de Cayenne en tant que par ses articles 1 à 3, celui-ci l'a, d'une part, condamnée à verser à la société Stag, entreprise générale de bâtiment, la somme de 686 020 euros en réparation du préjudice résultant de l'exécution du marché négocié, conclu le 11 mars 1998 pour un montant global et forfaitaire de 8 658 318,35 euros (56 794 845,28 francs), en vue de la reconstruction de l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Macouria, a, d'autre part, mis à sa charge les dépens de première instance, enfin l'a condamnée à payer, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2500 euros à la société Stag ; qu'elle appelle en garantie la SARL Durag, la société LBTPG, le cabinet d'architectes Ponthius et Dupouy, le contrôleur technique Apave et leurs assureurs en raison des missions respectives qui leur incombaient ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise ordonnée le 5 juillet 1999, que, lors de la délivrance de l'ordre de service n°1 du 13 mars 1998, correspondant à la première tranche ferme de travaux d'un montant de 8 264 905 euros (54 214 225,28 francs), aux conditions de délai de 18 mois, le terrassement du terrain n'était pas achevé ; que, le 15 avril 1998, en raison de l'incapacité de la plate-forme d'accueillir les travaux, la société Stag a été avisée, par ordre de service n°2, de l'arrêt du chantier et de l'interruption du décompte du délai contractuel d'exécution, mais qu'elle n'était pas dispensée de la poursuite des études des plans d'exécution ; qu'après la réalisation d'études de sol complémentaires et un re-compactage du terrain, le maître de l'ouvrage et l'architecte ont demandé à la société Stag de débuter l'exécution des travaux par ordre de service n°5 du 29 octobre 1998 ; que, par courrier du 14 juin 1999, la société Stag a informé le conseil régional de ce qu'elle ajournait l'exécution des travaux en raison des pertes financières subies et de l'absence de perspective de règlement des problèmes techniques soulevés ;

Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que la société Stag a, le 14 juin 1999, ajourné l'exécution du chantier alors même que le maître de l'ouvrage lui avait expressément demandé de poursuivre les travaux ; qu'ainsi et à supposer même que la REGION GUYANE n'ait pas correctement exécuté ses obligations contractuelles, cette circonstance n'était pas de nature à dispenser la société Stag d'exécuter ses propres obligations contractuelles ; que cet ajournement doit être regardé comme une décision unilatérale de résiliation ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que les difficultés matérielles rencontrées par l'entreprise Stag dans l'exécution du marché sont dues à la nature du terrain d'assiette de la construction ; que la société Stag, qui était implantée localement et avait soumissionné lors d'un premier appel d'offres infructueux, ne pouvait ignorer à la date à laquelle elle a signé le marché en litige que les études de sol n'étaient pas achevées ni que les plates-formes devant servir de base à la construction de l'établissement n'avaient été pas réceptionnées ; qu'en outre, dès lors qu'elle avait la charge des études d'exécution des travaux qui lui étaient confiés, ladite société n'était pas dans l'impossibilité d'anticiper les difficultés liées aux travaux de terrassement ; qu'ainsi les difficultés pour asseoir les fondations de l'ouvrage à raison de la nature du sol n'étaient pas imprévisibles pour elle au moment de la signature du contrat et n'ont pas apporté aux conditions de réalisation du marché des modifications de nature à ouvrir à la société un droit à indemnisation ; que, compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, la société Stag doit être regardée comme ayant implicitement accepté d'effectuer les travaux au prix et dans les conditions convenues, nonobstant les risques de surcoût et les complications liés à la nature du sol ; que, par suite, d'une part, la faute grave que la société Stag a commise en abandonnant le chantier et, d'autre part, l'imprudence de ladite société qui a signé le contrat, tout en n'ignorant pas les risques auxquelles elle s'exposait sont de nature à exonérer la REGION GUYANE de toute responsabilité dans les difficultés rencontrées par la société Stag dans l'exécution de ce marché et dans le préjudice qu'elle a subi ; qu'il suit de là que les conclusions de la REGION GUYANE tendant à être relevée et garantie par la SARL Durag, la société Lbtpg, le cabinet d'architectes Ponthius et Dupouy et le contrôleur technique Apave ont perdu leur objet ; qu'il n'y a pas lieu d'y statuer,

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que la REGION GUYANE est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cayenne l'a condamnée à verser à la société Stag une indemnité de 686 020 euros en réparation du préjudice résultant de l'exécution du marché conclu le 11 mars 1998 ; que dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu de mettre les frais d'expertise exposés en première instance à la charge de la société Stag ;

Sur les conclusions indemnitaires de la REGION GUYANE :

Considérant que si la société Stag, en abandonnant de sa propre initiative le chantier, a commis une faute, cette circonstance n'est pas, en l'absence par la REGION GUYANE d'une résiliation du contrat, de nature à autoriser la requérante à présenter à l'encontre de la société Stag des conclusions reconventionnelles du fait qu'elle a été contrainte de procéder à un deuxième appel d'offre et de contracter à un coût supérieur au marché initial du 11 mars 1998 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la REGION GUYANE n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cayenne a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de condamner la société Stag à verser à la REGION GUYANE la somme de 1 300 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Les articles 1, 2 et 3 du jugement n°992571 et n°00277 du Tribunal administratif de Cayenne en date du 10 novembre 2005 sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par la société Stag devant le Tribunal administratif est rejetée.

Article 3 : Les frais d'expertise de première instance, taxés et liquidés à la somme de 32 453,81 euros, sont mis à la charge de la société Stag.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions d'appel en garantie présentées par la REGION GUYANE.

Article 5 : Le surplus de la requête de la REGION GUYANE est rejeté.

Article 6 : La société Stag versera à la REGION GUYANE une somme de 1 300 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

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06BX00037


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 06BX00037
Date de la décision : 20/11/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DUDEZERT
Rapporteur ?: M. Philippe CRISTILLE
Rapporteur public ?: Mme VIARD
Avocat(s) : SAGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2007-11-20;06bx00037 ?
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