La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/12/2007 | FRANCE | N°05BX01218

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 03 décembre 2007, 05BX01218


Vu la requête, enregistrée le 22 juin 2005 sous le n° 05BX01218, présentée pour la société en nom collectif LOISIRS 14, dont le siège social est 175 rue Saint Pierre et Miquelon à Yquelon (50700) ; la SNC LOISIRS 14 demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 28 avril 2005, par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Saint-Georges-d'Oléron à lui payer la somme de 3 074 553,37 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 8 janvier 2004 à raison du préjudice qu'elle estime

avoir subi à cause du refus implicite opposé à sa demande d'autorisation d...

Vu la requête, enregistrée le 22 juin 2005 sous le n° 05BX01218, présentée pour la société en nom collectif LOISIRS 14, dont le siège social est 175 rue Saint Pierre et Miquelon à Yquelon (50700) ; la SNC LOISIRS 14 demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 28 avril 2005, par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Saint-Georges-d'Oléron à lui payer la somme de 3 074 553,37 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 8 janvier 2004 à raison du préjudice qu'elle estime avoir subi à cause du refus implicite opposé à sa demande d'autorisation d'aménagement d'un terrain de camping ;

2°) de condamner ladite commune à lui verser la somme de 2 813 703,70 euros en réparation de son préjudice ainsi que celle de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………………………………..
Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 novembre 2007 :
- le rapport de Mme Boulard ;
- les observations de Me Grandon, avocat de la commune de Saint-Georges-d'Oléron ;
- et les conclusions de M. Pouzoulet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SNC LOISIRS 14 a projeté d'aménager, à usage de camping et de stationnement de caravanes, un terrain de plus de 7 hectares, situé sur le territoire de la commune de Saint-Georges-d'Oléron et inclus dans la zone NAE 1 du plan d'occupation des sols de cette commune ; qu'ayant également envisagé d'acheter ce terrain, elle a signé en 1999 une promesse de vente sous la condition suspensive de l'obtention d'un permis permettant de l'aménager en terrain de camping ; qu'après s'être heurtée à un refus exprès opposé par le maire de Saint-Georges-d'Oléron le 19 juillet 2000 à une première demande d'aménagement, la société a présenté une seconde demande portant sur un nombre de places plus réduit ; que cette nouvelle demande a fait l'objet d'une lettre qui l'avisait d'un délai d'instruction clos avant le 12 avril 2001 ; que ce même document l'informait tout à la fois de ce qu'à cette dernière date, elle serait titulaire d'une autorisation tacite et de ce qu'aucune autorisation tacite ne pouvait naître compte tenu des caractéristiques du projet ; que, par courriers des 11 juillet 2001 et 26 juin 2002, la société pétitionnaire a demandé au maire de Saint-Georges-d'Oléron de confirmer qu'elle était titulaire d'une autorisation tacite d'aménager ; qu'en l'absence de réponse à ses demandes, la société a saisi le tribunal administratif de Poitiers, après réclamation adressée à la commune de Saint-Georges-d'Oléron, de conclusions tendant à la condamnation de cette collectivité à l'indemniser des préjudices qu'elle soutenait avoir subis par sa faute ; que, par jugement du 28 avril 2005, le tribunal administratif a rejeté ces conclusions indemnitaires, en estimant, d'une part, que, compte tenu de son implantation dans une commune ayant fait l'objet d'un classement au titre des risques naturels et technologiques, le projet d'aménagement ne pouvait, par application des dispositions des articles R. 443-7-2 et R. 443-8-3 du code de l'urbanisme, faire l'objet d'une autorisation tacite et, d'autre part, que la réalité des préjudices invoqués par la société n'était pas établie ; que la SNC LOISIRS 14 fait appel de ce jugement ;


Sur la régularité du jugement :

Considérant que les premiers juges, après avoir exposé, dans leur décision attaquée, les raisons pour lesquelles la SNC LOISIRS 14 ne pouvait être regardée comme titulaire d'une autorisation d'aménagement tacite, relèvent « qu'à supposer même que le silence gardé par la commune soit constitutif d'une faute, celle-ci n'ouvre cependant pas droit à indemnité dans la mesure où la société requérante ne justifie pas d'un préjudice certain », tant au regard des frais engagés que de la perte de bénéfice résultant de la privation des produits de l'exploitation attendue du camping ; que, ce faisant, ils ont suffisamment motivé le rejet des prétentions indemnitaires de la société, dont l'accueil était subordonné à l'existence d'un préjudice, alors même qu'ils ne se sont pas prononcés sur la légalité des motifs du refus implicite opposé à sa demande d'autorisation d'aménagement ;


Au fond :

Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que le territoire de la commune de Saint-Georges-d'Oléron est inclus dans la zone de risque « feu » délimitée par le préfet de la Charente-Maritime, ce qui, par application des dispositions R. 443-7-2 et R. 443-8-2 du code de l'urbanisme, fait obstacle à la naissance d'une autorisation tacite à l'expiration du délai d'instruction ; que, si le courrier par lequel ce délai d'instruction a été porté à la connaissance de la SNC LOISIRS 14, comporte une contradiction en ce qu'il envisage une autorisation tacite tout en l'excluant par référence à une disposition du code de l'urbanisme au surplus non applicable en l'espèce, cette contradiction et cette référence erronée, pour regrettables qu'elles soient, n'ont pu faire naître une autorisation implicite, ni même être source de confusion pour la société, professionnelle de ce type d'opération et déjà régulièrement avertie de la procédure lors de l'instruction de sa précédente demande faite pour le même terrain ; que, dès lors que les dispositions précitées du code de l'urbanisme s'opposent à ce que l'autorisation d'aménagement puisse être obtenue de façon tacite, le silence gardé par le maire de la commune sur les demandes susmentionnées de la société en date des 11 juillet 2001 et 26 juin 2002 tendant à ce que soit constatée l'existence d'une autorisation tacite, a fait naître un refus implicite de procéder à un tel constat, lequel ne peut être illégal ; que ce refus n'est donc pas de nature à entraîner la responsabilité pour faute de la commune ;

Considérant, il est vrai, que le silence gardé par le maire de Saint-Georges-d'Oléron sur la demande d'autorisation elle-même s'analyse comme un refus implicitement opposé à cette demande ; que, ni devant les premiers juges, ni devant la cour, la commune de Saint-Georges-d'Oléron n'a fait connaître les motifs qui fondent ce refus, bien que, dans ses écritures, la société requérante l'ait invitée à le faire ; que ce refus doit, dès lors, être regardé comme reposant sur des motifs étrangers au droit de l'urbanisme ; que, si ce refus, tenu pour illégal, constitue une faute de service susceptible d'engager la responsabilité de la commune, il n'ouvre cependant droit à indemnité que dans la mesure où la société requérante justifie d'un dommage actuel, direct et certain ;

Considérant que la société requérante demande le remboursement des frais qu'elle soutient avoir engagés en vain ; que, toutefois, elle admet qu'elle ne les a pas payés, comme le lui ont déjà opposé les premiers juges ; que le moyen tiré par la société de ce que ces sommes auraient été comptabilisées et resteraient dues, à cause des difficultés financières qu'elle connaîtrait, n'est pas assorti de précision suffisante pour qu'elle puisse être regardée comme les ayant effectivement prises en charge ; que, par suite, les frais en cause, qui ne peuvent être regardés comme exposés par la société requérante, ne représentent pas un préjudice indemnisable ;

Considérant, s'agissant du manque à gagner que la SNC LOISIRS 14 prétend avoir subi à raison de « son activité locative », que le profit escompté de la location des emplacements repose sur des projections aléatoires, même si la société se prévaut de la réussite d'autres projets ailleurs ; que la circonstance qu'elle n'a pas, avant l'expiration, le 30 juin 2002, du délai de caducité de la promesse de vente dont elle était titulaire, demandé à la commune de lui faire connaître les motifs du refus implicite d'autorisation qui était né, révèle qu'elle n'avait pas une réelle volonté de poursuivre son projet ; qu'ainsi, la perte du bénéfice d'exploitation alléguée n'est ni actuelle ni certaine ; que, s'agissant du profit tiré de la vente de « chalets mobils homes », outre qu'il présente un caractère éventuel, il ne peut être regardé comme directement lié à l'autorisation d'aménagement ; que, par suite et sans qu'il y ait lieu d'ordonner l'expertise sollicitée par la société requérante, la perte de profit qu'elle invoque ne représente pas un préjudice indemnisable ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à ses conclusions, que la SNC LOISIRS 14 n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande indemnitaire dirigée contre la commune de Saint-Georges-d'Oléron ;


Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Saint-Georges-d'Oléron, qui n'est pas la partie perdante dans la présente affaire, soit condamnée à rembourser à la SNC LOISIRS 14 la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu de condamner la société requérante à rembourser les frais de cette nature exposés par la commune ;


DECIDE :

Article 1er : La requête de la SNC LOISIRS 14 est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Georges-d'Oléron présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

4
No 05BX01218


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 05BX01218
Date de la décision : 03/12/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Dominique BOULARD
Rapporteur public ?: M. POUZOULET
Avocat(s) : GRANDON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2007-12-03;05bx01218 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award