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20/12/2007 | FRANCE | N°05BX02292

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 20 décembre 2007, 05BX02292


Vu I°) la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 28 novembre 2005 sous le n° 05BX02292, présentée pour département de la Dordogne, représenté par le président en exercice du conseil général, par Me Phelip ;

Le département de la Dordogne demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Bordeaux n°0304276, en date du 29 septembre 2005, en tant qu'il l'a condamné à verser à Mme Monique X une indemnité de 12 195, 35 euros en réparation des conséquences dommageables d'un accident de la circulation survenu à Saint-A

ndré-d'Allas le 9 octobre 2002 sur la route départementale n° 47 ;

2°) de...

Vu I°) la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 28 novembre 2005 sous le n° 05BX02292, présentée pour département de la Dordogne, représenté par le président en exercice du conseil général, par Me Phelip ;

Le département de la Dordogne demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Bordeaux n°0304276, en date du 29 septembre 2005, en tant qu'il l'a condamné à verser à Mme Monique X une indemnité de 12 195, 35 euros en réparation des conséquences dommageables d'un accident de la circulation survenu à Saint-André-d'Allas le 9 octobre 2002 sur la route départementale n° 47 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X au Tribunal administratif de Bordeaux ;

3°) de condamner Mme X à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………….
Vu II°) La requête, enregistrée au greffe de la Cour le 2 décembre 2005 sous le n° 05BX02339, présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE, dont le siège est sis 50 rue Claude Bernard à Périgueux (24010 cedex), représentée par son directeur en exercice, par Me Favreau;

La CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Bordeaux n°0304276, en date du 29 septembre 2005, en tant qu'il n'a pas statué sur sa demande tendant à la condamnation du département de la Dordogne, d'une part, à lui verser la somme de 28 315, 08 euros en remboursement des prestations servies à Mme X à la suite de l'accident de la circulation survenu le 9 octobre 2002 ainsi que la somme de 2 202, 14 euros au titre des arrérages échus de la rente d'accident du travail dont bénéficie l'intéressée, d'autre part, à lui rembourser, au fur et à mesure de leur paiement, les échéances futures de ladite rente, ainsi que les frais médicaux futurs, sauf à s'en libérer par le paiement immédiat du capital représentatif de ces charges, soit respectivement 31 318, 09 et 8 175, 12 euros ;

2°) de condamner le département de la Dordogne à lui verser lesdites sommes, ainsi que celle de 760 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

3°) de condamner le département de la Dordogne à lui payer la somme de 160 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………….

Vu l'ensemble des pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 novembre 2007 :
- le rapport de M. Zupan, premier conseiller,
- les observations de Me Kaci pour Mme X,
- et les conclusions de M. Vié, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête n° 05BX02292, présentée pour le département de la Dordogne, et la requête n° 05BX02339, présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE, sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant que le département de la Dordogne demande à la Cour d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Bordeaux du 29 septembre 2005, en tant qu'il l'a condamné à verser à Mme Monique X une indemnité de 12.195,35 euros en réparation des conséquences dommageables d'un accident de la circulation survenu à Saint-André-d'Allas le 9 octobre 2002, sur la route départementale n° 47 ; que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE relève appel du même jugement en tant qu'il n'a pas statué sur ses droits ; que Mme X réclame quant à elle, par la voie de l'appel incident, l'augmentation de l'indemnité qui lui a été allouée en première instance ;

Sur l'appel de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 613-2 du code de justice administrative : « Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne » ; que l'article R. 613-3 du même code dispose : « Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction » ;

Considérant que, devant le Tribunal administratif de Bordeaux, la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE, qui avait été régulièrement mise en cause, a exposé ses prétentions, pour la première fois, dans un mémoire parvenu au greffe de cette juridiction le 29 août 2005, soit après la clôture de l'instruction intervenue dans les conditions prévues par l'article R. 613-2 du code de justice administrative ; qu'elle ne conteste pas avoir reçu dès le 28 juillet 2005 un avis d'audience mentionnant les conditions dans lesquelles interviendrait cette clôture de l'instruction ; que le mémoire susmentionné se référant expressément au rapport de l'expertise ordonnée dans le cadre d'une procédure de référé à laquelle elle était partie, et indiquant lui-même que ce rapport avait été déposé dès le 1er février 2005, la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE ne soutient pas sérieusement avoir été privée de la possibilité d'établir le montant de sa créance par un prétendu défaut de communication dudit rapport ; que si elle soutient avoir antérieurement fait état, dès 2004, d'une créance alors provisoire chiffrée à 10 754, 21 euros, le mémoire établi à cet effet a été déposé dans le cadre de l'instance de référé-provision introduite par Mme X, constituant une procédure juridictionnelle distincte ; que son mémoire du 29 août 2005 ne contenant ni l'exposé de circonstances de fait nouvelles et déterminantes dont elle n'aurait pas été en mesure de faire état plus tôt et que le tribunal administratif n'aurait pu ignorer sans fonder son jugement sur des faits matériellement inexacts, ni l'exposé de circonstances de droit nouvelles ou que ledit tribunal dût relever d'office, les premiers juges n'étaient pas tenus de renvoyer l'examen du litige à une audience ultérieure, afin d'en prolonger l'instruction et permettre la prise en compte dudit mémoire ; que, contrairement à ce qui est soutenu, ils n'étaient pas davantage tenus de le faire en considération du troisième mémoire en défense du département de la Dordogne, communiqué le 22 août 2005 et qui, également exempt de faits ou moyens nouveaux, se bornait à répliquer aux dernières écritures de Mme X, concernant la démonstration de son préjudice matériel ; que le jugement attaqué n'est dès lors entaché d'aucune irrégularité ; qu'ainsi, les conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE doivent être regardées comme présentées pour la première fois en appel, et sont, par suite, irrecevables ;

Sur l'appel du département de la Dordogne et l'appel incident de Mme X :

En ce qui concerne la responsabilité :

Considérant que, le 9 octobre 2002, vers 18 heures, Mme X, qui empruntait pour les besoins de sa profession la route départementale n° 47 en direction de Périgueux et était parvenue au lieu-dit « les Andrevies », sur le territoire de la commune de Saint-André-d'Allas, a perdu le contrôle de son automobile alors qu'elle achevait de négocier un virage à gauche ; que son véhicule, privé de toute adhérence sur la chaussée, laquelle était mouillée, a dérapé en pivotant sur lui même avant de franchir l'accotement gauche et de basculer dans le ravin bordant la voie ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment des constatations effectuées par les services de la gendarmerie, dépêchés sur les lieux, que cet accident a été provoqué, non par la présence sur la chaussée d'une nappe d'eau, occasionnant un phénomène d'hydroplanage, mais par le caractère anormalement glissant de son revêtement, ancien et en mauvais état ; que ces constatations, qui font par ailleurs état de multiples accidents de même nature survenus antérieurement sur la même portion de voie, ne sont pas remises en cause par la note du chef de subdivision de la direction départementale de l'équipement de la Dordogne, dont se prévaut le département de la Dordogne, se bornant à indiquer que le revêtement en cause, réalisé 17 ans avant les faits litigieux, présente « une usure analogue à la plupart des chaussées empruntées », et à déplorer en termes généraux, pour le surplus, l'imprudence des conducteurs par temps de pluie ; qu'il est par ailleurs constant que le danger ainsi créé par l'état de la chaussée ne faisait l'objet d'aucune signalisation et n'avait donné lieu à aucune mesure limitant la vitesse autorisée ; que, dans ces conditions, et comme l'énonce à bon droit le jugement attaqué, les circonstances de l'accident révèlent un défaut d'entretien normal de la route départementale n° 47, de nature à engager la responsabilité du département de la Dordogne ;

Considérant, toutefois, que si Mme X circulait à une vitesse modérée et normalement compatible, eu égard aux conditions climatiques et à la sinuosité de la route, avec une chaussée convenablement entretenue, l'accident dont elle a été victime trouve également son origine dans l'usure très prononcée des pneumatiques de son véhicule, évaluée à 60% à l'avant et 70% à l'arrière par l'expert auquel son assureur a fait appel ; qu'ainsi, en circulant au volant d'un véhicule dont l'adhérence au sol, par temps de pluie, s'en trouvait nécessairement réduite, Mme X a elle-même commis une faute justifiant que soit laissé à sa charge un quart des conséquences dommageables de l'accident ;

En ce qui concerne la réparation des préjudices :

Considérant que Mme X justifie de la destruction, dans l'accident, d'un tailleur d'une valeur de 610 euros ; qu'en revanche, elle n'établit pas, par la seule production d'une facture datée de mars 2005 et d'un devis non daté, que ledit accident aurait en outre occasionné la détérioration alléguée de sous-vêtements de marque et d'un médaillon serti de diamants ; qu'elle ne justifie pas davantage des frais de déplacements et de dossier dont elle fait état en termes imprécis ; qu'ainsi, l'indemnité due au titre du préjudice matériel doit être limitée à la somme susmentionnée de 610 euros ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée en référé par le président du Tribunal administratif de Bordeaux, que Mme X, âgée de 54 ans à l'époque de l'accident, et dont l'état de santé a été jugé consolidé à la date du 3 juin 2004, a subi une sévère contusion rachidienne, une fracture du sternum et un traumatisme crânien ; qu'elle conserve de ces lésions des séquelles fonctionnelles consistant en divers troubles de la statique vertébrale, occasionnant des dorsalgies chroniques et justifiant un taux d'incapacité permanente partielle de 9% ; que les troubles qu'elle subit dans ses conditions d'existence du fait de cette invalidité, y compris la gêne éprouvée dans les gestes de la vie courante jusqu'à la date de consolidation des blessures et le préjudice d'agrément, non sérieusement contesté, résultant des difficultés désormais éprouvées dans la pratique du tennis et du jardinage, doivent être évalués à la somme totale de 8 000 euros, dont la moitié au titre de la part physiologique desdits troubles, correspondant à l'atteinte portée à l'intégrité physique de la victime, au sens de l'article L. 454-1 du code de la sécurité sociale applicable aux accidents du travail ; que cette part physiologique devant être réputée, en l'espèce, entièrement compensée par la rente d'accident du travail servie à Mme X par la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE, seule la somme de 4 000 euros, représentant la part personnelle de ce poste de préjudice, doit être prise en compte en l'absence de conclusions recevables de ladite caisse ;

Considérant qu'il sera fait une juste appréciation des souffrances physiques endurées par Mme X, qualifiées de modérées à moyennes par l'expert (3,5/7), ainsi que du retentissement psychologique de l'accident, en les évaluant ensemble à la somme de 5 000 euros ; que le préjudice esthétique dont l'intéressée demeure atteinte, qualifié par ledit expert de « très léger » (1/7), doit quant à lui être évalué à 1 500 euros ;

Considérant que les conclusions de Mme X tendant à la compensation, à concurrence de, respectivement, 19 250 et 1 260 euros, d'une perte de revenus non couverte par les indemnités journalières qui lui ont été servies, et de charges afférentes à son assistance par une tierce personne durant son incapacité temporaire, ont été présentées pour la première fois en appel alors que ces préjudices, rapportés à la période antérieure à la consolidation de l'état de santé de la requérante, et qui ne procèdent donc pas d'une aggravation de celui-ci, étaient nécessairement connus avant que le tribunal administratif ne statue ; que lesdites conclusions sont dès lors irrecevables ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le montant total de l'indemnité devant être mise à la charge du département de la Dordogne au profit de Mme X, compte tenu du partage de responsabilité opéré, s'élève à 8 332, 50 euros ; qu'il y a lieu de ramener à ce montant la condamnation prononcée contre cette collectivité locale par l'article 1er du jugement attaqué ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le département de la Dordogne, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à Mme X et à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE les sommes que celles-ci réclament au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu de condamner la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE à verser au département de la Dordogne, sur le même fondement, une somme de 1 300 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à ses conclusions de même nature dirigées contre Mme X ;

DÉCIDE :


Article 1er : L'indemnité mise à la charge du département de la Dordogne par l'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Bordeaux n° 0304276 du 29 décembre 2005, au profit de Mme X, est ramenée à la somme de 8 332,50 euros.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Bordeaux n° 0304276 du 29 décembre 2005 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : La CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE versera au département de la Dordogne, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 300 euros.

Article 4 : La requête de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA DORDOGNE, le surplus des conclusions de la requête du département de la Dordogne et l'appel incident de Mme X, ainsi que les conclusions de celle-ci tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetés.

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N°s 05BX02292/05BX02339


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 05BX02292
Date de la décision : 20/12/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BONNET
Rapporteur ?: M. David ZUPAN
Rapporteur public ?: M. VIE
Avocat(s) : PHELIP

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2007-12-20;05bx02292 ?
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