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10/03/2008 | FRANCE | N°04BX02088

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 10 mars 2008, 04BX02088


Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 2004, présentée pour Mme Anne Rose Lucie X, demeurant ... ;

Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Basse-Terre en date du 14 octobre 2004, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 24 juin 1999 par laquelle le préfet de la région Guadeloupe a refusé de lui accorder un permis de construire aux fins d'édifier un bâtiment à usage d'habitation sur un terrain situé à Gustavia (Saint-Barthélémy) ;

2°) d'enjoindre au préfet, sous

astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre principal et en application de l'ar...

Vu la requête, enregistrée le 13 décembre 2004, présentée pour Mme Anne Rose Lucie X, demeurant ... ;

Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Basse-Terre en date du 14 octobre 2004, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 24 juin 1999 par laquelle le préfet de la région Guadeloupe a refusé de lui accorder un permis de construire aux fins d'édifier un bâtiment à usage d'habitation sur un terrain situé à Gustavia (Saint-Barthélémy) ;

2°) d'enjoindre au préfet, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre principal et en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui délivrer le permis de construire sollicité, à titre subsidiaire, et en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de prendre une nouvelle décision dans le délai d'un mois ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 février 2008 :
- le rapport de Mme Rey-Gabriac, premier conseiller ;
- les observations de Me Paul de la SCP Huglo-Lepage, avocat de Mme X ;
- et les conclusions de M. Pouzoulet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X, propriétaire d'une parcelle cadastrée AL 666 située sur le territoire de la commune de Gustavia à Saint-Barthélémy, a sollicité un permis de construire en vue de construire une maison destinée à devenir son habitation principale ; que ce permis lui a été refusé par une décision du préfet de la Guadeloupe du 24 juin 1999 prise sur le fondement de l'article R. 111-14-1 du code de l'urbanisme au motif que le projet serait de nature à porter atteinte aux espaces naturels et favoriserait une urbanisation dispersée, et sur le fondement de l'article R. 111-4 de ce même code au motif que le projet n'est pas desservi par une voie publique ou privée ; que Mme X fait appel du jugement du tribunal administratif de Basse-Terre qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce refus ;


Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, que si l'arrêté du préfet de la Guadeloupe du 25 mai 1999 produit par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, donne délégation de signature à M. Descombes, directeur départemental de l'équipement, en matière de permis de construire dans huit cas limitativement énumérés, le refus de permis de construire qui a été opposé à Mme X n'est pas au nombre de ces cas ; que, par suite, ni le directeur départemental de l'équipement ni a fortiori le chef de la subdivision de l'équipement ou son adjoint n'avaient compétence pour signer la décision de refus de permis de construire en litige ; que, dès lors, cette décision est entachée d'illégalité pour avoir été signée par M. Salondy, adjoint au chef de la subdivision de l'équipement pour les Iles du Nord, qui n'avait pas compétence pour ce faire ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-14-1 du code de l'urbanisme : « Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions sont de nature, par leur localisation ou leur destination : a) A favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants, en particulier lorsque ceux-ci sont peu équipés ; (…) » ; que l'article R. 111-4 du même code dispose : « Le permis de construire peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance ou à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles envisagé, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. Il peut également être refusé si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celles des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic (…) »

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que la parcelle de Mme X, située à flanc de colline, jouxte dans sa partie basse la partie urbanisée de Gustavia ; que, selon le plan établi par l'expert-géomètre mandaté par la requérante, dont la teneur n'est pas contestée par l'administration, cette parcelle est, dans sa partie basse, incluse dans la zone « U », regroupant les zones urbanisées et urbanisables, définie par le document dit « modalités d'application du règlement national d'urbanisme de Saint-Barthélémy » adopté en application de l'article L. 111-1-3, alors en vigueur, du code de l'urbanisme ; que le projet de construction qui a fait l'objet de la demande de permis de construire se situe dans la partie basse de ladite parcelle ; que, dans ces conditions, le projet n'était pas de nature, contrairement à ce qu'indique la décision litigieuse, à favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la préservation de la zone naturelle de Gustavia ; que, d'autre part, il ressort également des pièces du dossier que la parcelle d'implantation du projet est reliée à la voie publique par un chemin privé situé sur des parcelles appartenant à Mme X ; que la construction projetée serait ainsi desservie par une voie privée dont la largeur apparaît proportionnée à la desserte de cette seule habitation ; que, par suite, c'est à tort que le refus de permis contesté se fonde également sur la méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme ; que, dès lors, le refus de permis de construire en litige est également entaché d'illégalité pour être fondé sur des motifs erronés ;

Considérant que les autres moyens invoqués par la requérante ne sont, en revanche, pas de nature à entraîner l'illégalité du refus de permis en litige ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Basse-Terre a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus de permis de construire qui lui a été opposé le 24 juin 1999 ;


Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ;

Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de la Guadeloupe se prononce à nouveau sur la demande de permis de construire de Mme X ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Guadeloupe de statuer sur cette demande dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir la présente injonction d'une astreinte ;


Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, par application de ces dispositions, de condamner l'Etat à verser à Mme X la somme de 1 300 euros ;


DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Basse-Terre en date du 14 octobre 2004 est annulé.

Article 2 : Le refus de permis de construire opposé le 24 juin 1999 à Mme X par le préfet de la Guadeloupe est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Guadeloupe de se prononcer sur la demande de permis de construire de Mme X dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Mme X la somme de 1 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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No 04BX02088


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 04BX02088
Date de la décision : 10/03/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. POUZOULET
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS HUGLO-LEPAGE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-03-10;04bx02088 ?
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