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10/03/2008 | FRANCE | N°05BX01906

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 10 mars 2008, 05BX01906


Vu la requête enregistrée au greffe le 16 septembre 2005, présentée pour la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA, dont le siège est Rua dos Murças - 68-3 Funchal Madiera (9000) au Portugal ;

LA SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 5 juillet 2005 qui n'a que partiellement fait droit à sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 1993, 1994 et 1995 et des pénalités y afférentes, en

ne lui accordant que la décharge des majorations pour mauvaise foi dont avaient...

Vu la requête enregistrée au greffe le 16 septembre 2005, présentée pour la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA, dont le siège est Rua dos Murças - 68-3 Funchal Madiera (9000) au Portugal ;

LA SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 5 juillet 2005 qui n'a que partiellement fait droit à sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 1993, 1994 et 1995 et des pénalités y afférentes, en ne lui accordant que la décharge des majorations pour mauvaise foi dont avaient été assorties ces impositions ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention franco-portugaise du 14 janvier 1971 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 décembre 2007 :
- le rapport de M. Margelidon, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Pouzoulet, commissaire du gouvernement ;


Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration a taxé d'office à l'impôt sur les sociétés au titre des années 1993, 1994 et 1995, à défaut de toute déclaration, la SARL Lacomte Leisure, qui exploite un terrain de camping dans le Lot et dont la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA, société de droit portugais ayant son siège social à Madère, détient 99,83 % des parts ; que l'administration a assujetti la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA à l'impôt sur les sociétés au titre desdites années à raison des revenus réputés distribués par la SARL Lacomte Leisure, qui correspondent aux montants de bénéfices retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés dû par cette dernière ; que la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA fait appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse qui ne lui a accordé que la décharge des pénalités dont étaient assorties ces impositions ;


Sur la procédure d'imposition :

Considérant que la notification des redressements envisagés à l'encontre de la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA a été adressée le 26 décembre 1996 à M. Fowkes, désigné dans cette notification comme le « représentant fiscal » de la société ; qu'il résulte de l'instruction que la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA, qui avait été mise en demeure par lettre du 23 avril 1996, conformément aux dispositions de l'article 223 quinquies A du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable, de désigner son représentant en France, n'a jamais répondu à cette invitation ; que la lettre du 15 novembre 1996 par laquelle le gérant de la SARL Lacomte Leisure a indiqué à l'administration le bénéficiaire des revenus réputés distribués par cette société, a désigné M. Fowkes en qualité de « mandataire légal » de la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA ; qu'il résulte également de l'instruction que M. Fowkes a été mandaté par cette dernière société pour signer en son nom les statuts de la SARL Lacomte Leisure ainsi que ceux de deux sociétés civiles immobilières elles aussi créées en France et également filiales de la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA ; qu'il est indiqué dans les statuts de l'une de ces sociétés civiles immobilières que M. Fowkes agit en qualité de gérant de la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA ; qu'il a été également le mandataire de celle-ci pour recevoir et détenir des sommes en France où il était alors installé ; qu'il a rédigé des contrats de location en son nom ; que la gestion des sociétés françaises filiales de la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA était assurée par la société en commandite simple Henry Fowkes ; qu'il ressort d'une lettre du 19 juin 1995 émanant de l'une des deux sociétés actionnaires de la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA que M. Fowkes était en réalité le dirigeant de cette société, dont il résulte de l'instruction qu'elle n'a eu d'activité qu'en France ; que, dans ces conditions, l'administration a pu à bon droit considérer que M. Fowkes avait la qualité de représentant en France de la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA ; que, par suite, la notification de redressement du 26 décembre 1996 a pu valablement être adressée à M. Fowkes en qualité de représentant fiscal en France de la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de ce que cette société n'a jamais reçu de notification de redressement doit être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 209 du code général des impôts : « I. Sous réserve des dispositions de la présente section, les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés d'après les règles fixées par les articles 34 à 45, 53 A à 57 et 302 septies A bis et en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions... » ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 4 de la convention franco-portugaise du 14 janvier 1971 : « 1. Au sens de la présente convention, l'expression « résident d'un Etat contractant » désigne toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue… (…) 3. lorsque, selon la disposition du paragraphe 1, une personne autre qu'une personne physique est considérée comme résident de chacun des Etats contractants, elle est réputée résident de l'Etat contractant où se trouve son siège de direction effective » ; que l'article 7 de la même convention stipule que : « 1. Les bénéfices d'une entreprise d'un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise n'exerce son activité dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. Si l'entreprise exerce son activité d'une telle façon, les bénéfices de l'entreprise sont imposables dans l'autre Etat, mais uniquement dans la mesure où ils sont imputables audit établissement stable. 2. Lorsqu'une entreprise d'un Etat contractant exerce son activité dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé, il est imputé, dans chaque Etat contractant, à cet établissement stable les bénéfices qu'il aurait pu réaliser s'il avait constitué une entreprise distincte exerçant des activités identiques ou analogues dans des conditions identiques ou analogues et traitant en toute indépendance avec l'entreprise dont il constitue un établissement stable » ; qu'aux termes de l'article 5 de la même convention : « 1. Au sens de la présente convention, l'expression « établissement stable » désigne une installation fixe d'affaires où l'entreprise exerce tout ou partie de son activité. 2. L'expression « établissement stable » comprend notamment : a. Un siège de direction (…) c. Un bureau (…) 4. Une personne agissant dans un Etat contractant pour le compte d'une entreprise de l'autre Etat contractant, autre qu'un agent jouissant d'un statut indépendant, visé au paragraphe 6, est considérée comme « établissement stable » dans le premier Etat si elle dispose dans cet Etat de pouvoirs qu'elle y exerce habituellement lui permettant de conclure des contrats au nom de l'entreprise, à moins que l'activité de cette personne ne soit limitée à l'achat de marchandises pour l'entreprise... 6. On ne considère pas qu'une entreprise d'un Etat a un établissement stable dans l'autre Etat contractant du seul fait qu'elle y exerce son activité par l'intermédiaire d'un courtier, d'un commissionnaire général ou de tout autre intermédiaire jouissant d'un statut indépendant, à condition que ces personnes agissent dans le cadre normal de leur activité ; 7. Le fait qu'une société qui est un résident d'un Etat contractant contrôle ou est contrôlée par une société qui est un résident de l'autre Etat contractant ou qui y exerce son activité (que ce soit par l'intermédiaire d'un établissement stable ou non) ne suffit pas, en lui-même, à faire de « une quelconque de ces sociétés un établissement stable de l'autre... » ; que l'article 11 de la convention précise que : « 1. Les dividendes payés par une société qui est un résident d'un Etat contractant à un résident de l'autre Etat contractant sont imposables dans cet autre Etat. 2. Toutefois, ces dividendes peuvent être imposés dans l'Etat contractant dont la société qui paie les dividendes est un résident et selon la législation de cet Etat, mais l'impôt ainsi établi ne peut excéder 15 % du montant brut des dividendes (…) 3. le terme de « dividendes », employé dans le présent article, désigne les revenus provenant d'actions, actions ou bons de jouissance, parts de mines, parts de fondateurs ou autre parts bénéficiaires à l'exception des créances, ainsi que les revenus d'autres parts sociales assimilés aux revenus d'actions par la législation fiscale de l'Etat dont la société distributrice est un résident (…) 4. Les dispositions des paragraphes 1 et 2 ne s'appliquent pas lorsque le bénéficiaire des dividendes, résident d'un Etat contractant a, dans l'autre Etat contractant dont la société qui paie les dividendes est un résident, un établissement stable auquel se rattache effectivement la participation génératrice des dividendes. Dans ce cas, les dispositions de l'article 7 sont applicables » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'objet social de la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA est la prestation de services de conseil économique, financier et fiscal ainsi que l'achat et la vente d'immeubles en vue de les revendre et la participation dans d'autres sociétés ; que cette société n'a aucune activité au Portugal ; que, si elle soutient qu'elle n'a pas non plus d'activité en France ni dans aucun autre pays d'ailleurs, il résulte de l'instruction qu'elle a créé en France, ainsi qu'il a été dit précédemment, deux sociétés civiles immobilières ainsi qu'une SARL se livrant à l'exploitation d'un camping et qu'elle a acquis des immeubles en France par l'intermédiaire de ces sociétés, notamment un immeuble à Toulouse par l'intermédiaire de la SCI Madrigal dont elle est associée à hauteur de 99 % ; qu'il résulte également de l'instruction, notamment de la lettre susmentionnée adressée à M. Fowkes le 19 juin 1995 par la société Madeira Management Companhia Limitada, que M. Fowkes, installé en France où il exerçait notamment une activité d'avocat au barreau de Toulouse, était en fait le seul responsable et dirigeant de la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA ;

Considérant qu'eu égard à ce qui précède, la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA doit être regardée comme n'ayant exercé d'activité qu'en France, où se trouve le siège de sa direction effective ; qu'ainsi, elle doit être regardée comme une entreprise exploitée en France au sens des dispositions précitées de l'article 209-I du code général des impôts ; qu'il en résulte que les bénéfices qui ont pu lui être distribués par des sociétés françaises sont imposables à l'impôt sur les sociétés en application de la loi fiscale française ; que les stipulations de la convention fiscale franco-portugaise ne font pas échec à cette imposition dès lors, d'une part, que la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA a en France le siège de sa direction effective de sorte qu'en vertu de l'article 4-3 précité de cette convention, elle doit être réputée résident de l'Etat français, d'autre part, qu'elle n'a pas d'établissement stable au Portugal, de sorte que trouvent à s'appliquer les stipulations précitées de l'article 7-1 de la convention en vertu desquelles les bénéfices d'une entreprise d'un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat sauf pour la part de ses bénéfices qui se rattachent à l'activité d'un établissement stable dont elle disposerait dans l'autre Etat ; qu'eu égard à ce qui vient d'être dit, la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA ne peut utilement se prévaloir ni des stipulations précitées de l'article 5-7 de la convention franco-portugaise, ni de ce que les distributions en litige ne sont pas au nombre des dividendes visés à l'article 11 précité de cette convention ;

Considérant que les redressements régulièrement notifiés à M. Fowkes en tant que représentant de la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA le 26 décembre 1996 n'ont pas donné lieu à observations de la part de cette société ; que la lettre adressée le 15 novembre 1996 par le gérant de la SARL Lacomte Leisure à l'administration, laquelle n'était en tout état de cause pas tenue de mettre en oeuvre l'article 117 du code général des impôts, désigne clairement comme bénéficiaire des revenus réputés distribués par cette société « M. Fowkes en qualité de mandataire légal de la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA » ; que cette société était actionnaire à hauteur de 99,83 % de la SARL Lacomte Leisure ; que, par suite, c'est à juste titre que la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA a été assujettie à l'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices distribués par la société Lacomte Leisure en conséquence des redressements de ses bénéfices ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté le surplus de sa demande ;


Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, ne saurait être condamné à verser à la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;


DECIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE MADRIGAL SERVICOS LIMITADA est rejetée.

2
No 05BX01906


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe MARGELIDON
Rapporteur public ?: M. POUZOULET
Avocat(s) : GALES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 10/03/2008
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 05BX01906
Numéro NOR : CETATEXT000018623923 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-03-10;05bx01906 ?
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