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01/04/2008 | FRANCE | N°06BX01380

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 01 avril 2008, 06BX01380


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 30 juin 2006, présentée pour M. Patrick X, demeurant ..., par Me Sutre, avocat ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 mai 2006 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande de retrait de la décision du recteur de l'académie de Poitiers prononçant à son encontre la sanction disciplinaire d'abaissement d'échelon et, d'autre part, au bénéfice de l'amnistie ;

2°)

de faire application de la loi d'amnistie du 6 août 2002 et de le dispenser de to...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 30 juin 2006, présentée pour M. Patrick X, demeurant ..., par Me Sutre, avocat ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 mai 2006 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande de retrait de la décision du recteur de l'académie de Poitiers prononçant à son encontre la sanction disciplinaire d'abaissement d'échelon et, d'autre part, au bénéfice de l'amnistie ;

2°) de faire application de la loi d'amnistie du 6 août 2002 et de le dispenser de toute sanction ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mars 2008 :
- le rapport de M. Gosselin, premier conseiller ;
- les observations de Me Sutre, avocat de M. X ;
- et les conclusions de M. Valeins, commissaire du gouvernement ;


Considérant que M. X, maître contractuel de l'enseignement privé, alors qu'il avait été désigné comme correcteur et président adjoint de jury au baccalauréat, a annoncé, par un communiqué de presse du 19 juin 2001, qu'il pourrait procéder à la rétention des notes de l'épreuve et a organisé le 22 juin 2001 une conférence de presse devant les médias locaux pour évoquer les difficultés qu'il rencontrait pour se faire intégrer dans la fonction publique ; que, par sommation d'huissier, le recteur l'a invité, sans succès, à restituer les copies notées qu'il a finalement remis aux forces de l'ordre le 26 juin 2001 ; qu'à raison de ces faits, il a fait l'objet, par arrêté du 15 octobre 2001 puis du 17 octobre 2003, d'une sanction d'abaissement d'échelon qui ont été chacune annulées pour vice de forme ; que, par un arrêté du 25 mars 2005, le recteur a infligé à M. X la même sanction que précédemment ; que, par un recours adressé au ministre de l'éducation nationale, l'intéressé a vainement demandé le bénéfice des dispositions de la loi d'amnistie du 6 août 2002 et le retrait de l'arrêté en date du 25 mars 2005 ; qu'il fait appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 3 mai 2006 qui a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions de rejet qui lui ont été opposées ;


Sur les conclusions tendant à l'application de la loi d'amnistie :

Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 : Sont amnistiés les faits commis avant le 17 mai 2002 en tant qu'ils constituent des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles. (...) Sauf mesure individuelle accordée par décret du Président de la République, sont exceptés du bénéfice de l'amnistie prévue par le présent article les faits constituant des manquements à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs ; que les faits ci-dessus rappelés, en raison de leur gravité particulière et de la publicité qui leur était donnée durant une période où les élèves subissaient les épreuves du baccalauréat, doivent être regardés comme constituant un manquement à l'honneur et sont, dès lors, exceptés du bénéfice de l'amnistie prévue par l'article 11 de la loi du 6 août 2002 ;


Sur la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet de la demande de retrait de l'arrêté du 25 mars 2005 :

Considérant que, si le recours gracieux introduit par M. X contre la décision le sanctionnant d'un abaissement d'échelon qui lui a été notifiée le 26 mars 2005, n'a été reçu par l'administration que le 7 juin 2005, soit postérieurement à l'expiration, le 27 mai 2005, du délai de recours contentieux qui courait contre cette décision, il ressort des pièces du dossier que ce recours gracieux a été posté le 25 mai 2005 ; qu'eu égard aux délais anormalement longs d'acheminement de ce courrier, le recours gracieux de M. X, qui a été remis en temps utile aux services postaux pour parvenir avant l'expiration du délai de recours contentieux, ne peut être regardé comme tardif ; qu'il suit de là que ce recours hiérarchique, dont l'administration n'a pas accusé réception et auquel elle n'a pas répondu, a pu suspendre le délai de recours contentieux dont l'intéressé disposait à l'encontre de la décision litigieuse ; que, dès lors, le tribunal administratif de Poitiers a, à tort, déclaré tardive la demande, enregistrée le 23 septembre 2005 au greffe du tribunal ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Poitiers ;

Considérant que les annulations des mesures disciplinaires frappant M. X ont été prononcées pour vice de procédure ; que les faits qui avaient conduit l'autorité administrative à sanctionner l'intéressé présentant le caractère de manquement à l'honneur, ainsi qu'il est dit ci-dessus, n'ont donc pas été amnistiés par la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ; que l'administration a donc pu légalement reprendre en raison de ces mêmes faits, la procédure disciplinaire à l'encontre de cet agent en saisissant le conseil de discipline du même rapport sur les agissements de M. X ; qu'en l'espèce, l'intéressé ne peut utilement soutenir que cette sanction intervient à l'issue d'une procédure anormalement longue ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'administration ait porté plainte devant le procureur de la République ; que le moyen tiré de ce que la procédure n'aurait pas respecté les droits de la défense en l'absence de mention à son dossier d'une telle plainte doit donc être écarté ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X a publiquement, en convoquant la presse, menacé l'administration de ne pas corriger les copies du baccalauréat et de retenir les notes ; qu'il a refusé d'obtempérer aux ordres de l'inspection d'académie et n'a mis fin à son chantage en rendant les copies corrigées que suite à l'intervention des forces de l'ordre ; que la circonstance que M. X ait finalement obtenu son intégration dans les cadres de l'enseignement public n'est pas de nature à retirer aux faits à raison desquels l'intéressé a été sanctionné leur caractère fautif ; que la gravité de ces faits dont la matérialité n'est pas contestée, et leur retentissement auprès des élèves ayant passé les épreuves, justifient une sanction ; que la circonstance que les menaces du requérant n'aient pas été mises à exécution et que les copies aient été corrigées à temps n'est pas de nature à établir que le recteur de l'académie de Poitiers aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la gravité du comportement de M. X en prononçant, par la décision du 25 mars 2005, la sanction d'abaissement d'échelon ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 3 mai 2006 doit être annulé et que la demande de M. X devant le tribunal administratif de Poitiers doit être rejetée ;


Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. X, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;


DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 3 mai 2006 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Poitiers est rejetée.

3
No 06BX01380


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. ZAPATA
Rapporteur ?: M. Olivier GOSSELIN
Rapporteur public ?: M. VALEINS
Avocat(s) : SUTRE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 01/04/2008
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 06BX01380
Numéro NOR : CETATEXT000018934897 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-04-01;06bx01380 ?
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