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15/04/2008 | FRANCE | N°06BX01766

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 15 avril 2008, 06BX01766


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 août 2006 et 26 février 2007 au greffe de la cour, présentés pour la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE, dont le siège est B.P. 35 à Saint-Palais (64120), représentée par son président en exercice, à ce dûment habilité par délibération du conseil communautaire, en date du 19 juillet 2006, par la SCP Noyer Cazcarra ;

La COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 mars 2006 par lequel le tribunal administratif de Pau l'a condamnée a verser

à M. et Mme X la somme de 110 000 € en réparation du préjudice qu'ils ont subi ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 août 2006 et 26 février 2007 au greffe de la cour, présentés pour la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE, dont le siège est B.P. 35 à Saint-Palais (64120), représentée par son président en exercice, à ce dûment habilité par délibération du conseil communautaire, en date du 19 juillet 2006, par la SCP Noyer Cazcarra ;

La COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 mars 2006 par lequel le tribunal administratif de Pau l'a condamnée a verser à M. et Mme X la somme de 110 000 € en réparation du préjudice qu'ils ont subi du fait des nuisances provoquées par la décharge d'ordures ménagères située sur la commune de Béhasque-Lapiste à proximité de leur propriété ;

2°) de rejeter les conclusions présentées par M. et Mme X devant le tribunal administratif de Pau ;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme X une somme de 2 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mars 2008 :
- le rapport de M. Gosselin, premier conseiller ;
- les observations de Me Lambert, avocat de la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE ;
- les observations de Me Soubrié, avocat de M. et Mme X ;
- et les conclusions de M. Valeins, commissaire du gouvernement ;


Considérant que, saisi par M. et Mme X d'une demande d'indemnité en réparation du préjudice qu'ils ont subi du fait du fonctionnement d'une décharge contrôlée d'ordures ménagères à proximité de leur domicile, le tribunal administratif de Pau, par jugement en date du 17 octobre 2002, a décidé que la responsabilité de la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE était engagée pour faute du fait de la méconnaissance des prescriptions d'exploitation de la décharge contenues notamment dans l'arrêté préfectoral du 31 juillet 1980, a écarté la responsabilité de ladite communauté de communes du fait des émanations de biogaz provenant de cette décharge, a rejeté la demande des requérants tendant à l'indemnisation du préjudice lié à la perte de la valeur vénale de leur propriété et ordonné une expertise afin de rechercher l'existence d'un lien de causalité entre l'état de santé de M. et Mme X et le fonctionnement défectueux de la décharge d'ordures ; que, par jugement du 28 mars 2006, le tribunal administratif a condamné la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE à verser à M. et Mme X la somme de 110 000 € en réparation du préjudice qu'ils ont subi ; que la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE fait appel de ce dernier jugement ;


Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'après avoir jugé que la responsabilité de la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE ne peut être recherchée qu'entre le 31 juillet 1980, date du premier arrêté préfectoral confiant la gestion de la déchetterie au syndicat intercommunal à vocation multiple du canton de Saint-Palais auquel a succédé la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE et fin 1993, année où les dépôts de pneus, d'huile de vidange et autres matériaux à forte teneur en éléments toxicologiques n'ont plus été acceptés, soit sur une période de quatorze ans, le tribunal administratif a évalué le préjudice de M. et Mme X en prenant en compte cette même période ; qu'ainsi, même si le jugement attaqué mentionne, par ailleurs, les feux permanents permettant la réduction du volume des ordures déposées entre 1970 et 1980, le jugement n'est pas, en l'espèce, entaché de contradiction de motifs ;

Considérant que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à chaque argument en défense, se sont prononcés sur l'ensemble des moyens invoqués par la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué manque en fait ;

Considérant, enfin, qu'en condamnant la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE à raison des fautes qu'elle a commises dans la gestion de la déchetterie, le tribunal administratif s'est nécessairement prononcé, pour l'écarter, sur le moyen d'ordre public tiré de ce qu'une collectivité publique ne peut être condamnée à ce qu'elle ne doit pas ; que, par suite, le jugement attaqué n'est pas irrégulier pour ne pas avoir soulevé d'office ce moyen ;


Sur l'exception de prescription quadriennale :

Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 : L'administration doit, pour pouvoir se prévaloir, à propos d'une créance litigieuse, de la prescription prévue par la présente loi, l'invoquer avant que la juridiction saisie du litige au premier degré se soit prononcée sur le fond ; que le jugement du 17 octobre 2002 du tribunal administratif de Pau, qui a commis un expert pour évaluer le lien de causalité entre la faute de la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE et le préjudice subi par M. et Mme X, a déclaré que les fautes commises par cette collectivité publique engageaient sa responsabilité et, par suite, s'est prononcé sur le fond ; que, dès lors, la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE, qui n'a pas régulièrement opposé la prescription avant ce premier jugement, ne saurait utilement s'en prévaloir devant le juge d'appel ;


Sur la responsabilité de la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE :

Considérant que le tribunal administratif de Pau s'est prononcé sur la responsabilité pour faute de la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE dans le jugement du 17 octobre 2002 ; que cette collectivité publique qui n'a pas attaqué ce jugement dans le délai d'appel, n'est plus recevable à contester les fautes retenues à son encontre et l'étendue de sa responsabilité à l'appui des conclusions contre le jugement ultérieur du 28 mars 2006 par lequel le tribunal administratif a statué sur le préjudice subi par M. et Mme X ;


Sur le préjudice :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, d'une part, le jugement du 17 octobre 2002 du tribunal administratif de Pau a écarté la responsabilité de la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE du fait des émanations de biogaz provenant de la décharge ; que, d'autre part, s'agissant de Mme X, l'expert indique qu'il n'existe pas de relation entre son affection respiratoire et la présence de la déchetterie proche de son domicile et, s'agissant de M. X, qu'une relation entre les symptômes et l'inhalation de fumées toxiques a pu exister en début de son histoire clinique, mais que la présence de la décharge ne parait pas être la cause de la symptomatologie actuellement rapportée par le patient ; que M. et Mme X ne sont affectés d'aucune incapacité permanente partielle ; que, dès lors, la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau s'est fondé sur les émanations de biogaz et sur l'existence d'un lien direct et certain entre les fautes commises entre 1980 et 1993 par la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE et les pathologies dont M. et Mme X sont atteints pour condamner cette collectivité publique à réparer ce chef de préjudice ;

Considérant toutefois que les troubles dans leurs conditions d'existence tenant aux fautes commises par la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE dont M. et Mme X font état tiennent aux odeurs résultant de l'absence de recouvrement des ordures dans les conditions prescrites, aux fumées des quelques incendies en résultant et aux écoulements des lixiviats dans le milieu naturel ; qu'il résulte de l'instruction que si les intéressés ne sont exposés aux vents provenant de la décharge que quelques jours par an, ils supportent en permanence, du fait de la proximité de leur habitation qui est située à environ 200 mètres du site, les nuisances résultant de l'activité de cette décharge ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en condamnant la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE à verser une somme totale de 55 000 € aux époux X ;


Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions susmentionnées de la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE et de M. et Mme X ;


DECIDE :


Article 1er : La somme que la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE a été condamnée à verser à M. et Mme X est ramenée à 55 000 €.

Article 2 : L'article 1er du jugement du 28 mars 2006 du tribunal administratif de Pau est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNAUTE DE COMMUNES AMIKUZE est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de M. et Mme X au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

4
No 06BX01766


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. ZAPATA
Rapporteur ?: M. Olivier GOSSELIN
Rapporteur public ?: M. VALEINS
Avocat(s) : SAGARDOYTHO

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 15/04/2008
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 06BX01766
Numéro NOR : CETATEXT000018802679 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-04-15;06bx01766 ?
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