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01/07/2008 | FRANCE | N°07BX00334

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 01 juillet 2008, 07BX00334


Vu I la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 février 2007 sous le numéro 07BX00334, présentée pour Mme Jacqueline X, demeurant ..., par Me Domercq, avocat ;

Mme X demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du 19 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Pau n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Dax à réparer les préjudices qu'elle a subis à la suite d'une intervention chirurgicale du 28 novembre 2000 ;

2°) à titre principal, de porter le montant de l'inde

mnité que le centre hospitalier de Dax a été condamné à lui payer de la somme de 10...

Vu I la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 février 2007 sous le numéro 07BX00334, présentée pour Mme Jacqueline X, demeurant ..., par Me Domercq, avocat ;

Mme X demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du 19 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Pau n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Dax à réparer les préjudices qu'elle a subis à la suite d'une intervention chirurgicale du 28 novembre 2000 ;

2°) à titre principal, de porter le montant de l'indemnité que le centre hospitalier de Dax a été condamné à lui payer de la somme de 10.000 euros à celle de 128.800 euros et, à titre subsidiaire, à la moitié de cette somme, cette indemnité devant porter intérêt au taux légal à compter de l'enregistrement de sa requête introductive de première instance ;

3°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Dax à lui verser une somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Dax aux dépens, incluant les frais d'expertise ;

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Vu II la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 30 avril 2007 sous le numéro 07BX00956, présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES représentée par son directeur, par Me Bost, avocate ;

La CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Pau du 19 décembre 2006 en ce qu'il a limité à un montant de 245,07 euros la somme que le centre hospitalier de Dax a été condamné à lui verser en remboursement de ses débours ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Dax à lui payer une somme de 2.168,71 euros en remboursement des débours exposés en lien avec les conséquences de l'intervention du 28 novembre 2000 et celle du 4 janvier 2001 ;

3°) de condamner le centre hospitalier de Dax à lui payer une somme de 722,90 euros en application de l'article L.376-1, alinéa 5, du code de la sécurité sociale ;

4°) de condamner le centre hospitalier de Dax à lui payer une somme de 400 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu l'arrêté du ministre de la santé, de la jeunesse et des sports et du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, en date du 7 décembre 2007, relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L.376-1 et L.451-1 du code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2008,

le rapport de M. Verguet, premier conseiller ;

les observations de Me Moutier pour Mme X ;

et les conclusions de Mme Viard, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées de Mme X et de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;

Considérant que Mme X a été opérée le 28 novembre 2000 et le 4 janvier 2001 dans le service de chirurgie orthopédique du centre hospitalier de Dax, sous endoscopie, pour un syndrome du canal carpien de la main droite ; qu'elle a été victime d'une lésion de quatre fascicules du nerf médian droit, dont deux ont été sectionnés ; qu'il en est résulté une perte de sensibilité de quatre doigts ; que ces troubles se sont compliqués d'un syndrome algo-dystrophique affectant le poignet droit ; que Mme X et la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES demandent la réformation du jugement du Tribunal administratif de Pau du 19 décembre 2006 en ce qu'il a limité à respectivement 10.000 euros et 336,07 euros les sommes que le centre hospitalier de Dax a été condamné à leur payer ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier de Dax :

Considérant que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES, en invoquant le moyen tiré de ce qu'elle serait fondée à obtenir la condamnation du centre hospitalier de Dax à lui rembourser l'ensemble des frais qu'elle a exposés en cas de condamnation en appel de celui-ci à réparer intégralement les préjudices subis par Mme X, ne s'est pas bornée à reprendre ses écritures de première instance ; que, dès lors, la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier de Dax doit être écartée ;

Sur la responsabilité :

Considérant, d'une part, qu'il ne résulte pas de l'instruction que le choix de la technique endoscopique aurait été contre-indiqué dans le cas de Mme X, dont la main ne présentait pas de particularité anatomique ; que, d'autre part, s'il ressort du rapport de l'expert désigné par les premiers juges que les instruments utilisés en chirurgie endoscopique sont à l'origine de la section de deux fascicules du nerf médian et de contusions de deux autres fascicules, il n'est pas établi que le chirurgien aurait, lors de la première intervention, manipulé ces instruments en méconnaissance des règles de l'art médical ; que, nonobstant l'aggravation des lésions de la patiente constatée à l'issue de la seconde intervention, l'expert n'a pas relevé de faute médicale ; qu'il résulte du rapport d'expertise que si l'algodystrophie constatée en mai 2001 est en relation avec les dommages subis par la patiente, cette complication est survenue en dehors de toute faute ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal n'a pas retenu de faute médicale à l'encontre de l'établissement hospitalier ;

Considérant que Mme X soutient que si elle avait été correctement informée des risques présentés par la technique endoscopique, elle aurait choisi l'autre technique opératoire, dite à ciel ouvert ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment d'une étude de l'agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé sur la comparaison de ces deux techniques chirurgicales, que si celles-ci présentent globalement la même efficacité et la même sécurité d'utilisation, la chirurgie sous endoscopie présente un risque spécifique de section du nerf médian ; que ce risque, en l'absence d'urgence rendant impossible l'information préalable, devait être porté à la connaissance de la patiente ; que l'hôpital n'ayant pas établi avoir informé Mme X, ce manquement est de nature à engager sa responsabilité ;

Considérant que la faute commise par le centre hospitalier a entraîné pour Mme X une perte de chance de se soustraire au risque qui s'est réalisé ; que la réparation du dommage résultant de cette perte de chance doit être fixée à une fraction des différents chefs de préjudice subis ; que, compte tenu du rapprochement entre, d'une part, les risques de section du nerf médian inhérents à l'intervention par voie endoscopique et d'autre part, les risques encourus en cas d'opération à ciel ouvert, cette fraction doit être fixée à la moitié ;

Sur les droits à réparation de Mme X et le recours subrogatoire de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES :

Considérant qu'aux termes de l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi du 21 décembre 2006 relative au financement de la sécurité sociale pour 2007 applicable à la date de la présente décision : « Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droit conservent contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre./ Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l'assuré ou à ses ayants droit les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de l'accident dans les conditions ci-après./ Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent les préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel./ Conformément à l'article 1152 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée./ Cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice (...) » ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial :

Quant aux dépenses de santé :

Considérant que les lésions causées au nerf médian lors de la première intervention chirurgicale du 28 novembre 2000 ont nécessité une seconde opération le 4 janvier 2001 ; que, compte tenu de la perte de sensibilité de plusieurs doigts de la main droite et de l'apparition de douleurs au niveau du poignet et de l'épaule droits, il a été prescrit à Mme X un traitement médicamenteux, des séances de rééducation et des radiographies ; que les frais d'hospitalisation de la patiente pour la période du 4 au 6 janvier 2001, à hauteur de 1.225,35 euros, ainsi que les frais médicaux et de pharmacie en relation directe avec les complications liées aux lésions du nerf médian, à hauteur de 857,85 euros, ont été pris en charge par la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES ; que, compte tenu de la fraction du montant du préjudice mise à la charge de l'établissement hospitalier, il y a lieu d'accorder la somme de 1.041,60 euros à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES ;

Quant aux frais liés à la perte de revenus :

Considérant que Mme X a subi une invalidité permanente partielle de 35 % ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en le fixant à 45.000 euros ; que, compte tenu de la fraction du montant du préjudice mise à la charge de l'établissement hospitalier, il y a lieu d'accorder la somme de 22.500 euros à Mme X ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère personnel :

Considérant que l'expert a évalué les souffrances physiques à 3 sur une échelle de 7 ; que compte tenu de la durée et de la persistance des souffrances, il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice en le fixant à la somme de 5.000 euros ; que, compte tenu de la fraction du montant du préjudice mise à la charge de l'établissement hospitalier, il y a lieu d'accorder la somme de 2.500 euros à Mme X ;

Considérant que l'expert a évalué le préjudice esthétique à 2 sur une échelle de 7 ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en le fixant à la somme de 2 500 euros ; que, compte tenu de la fraction du montant du préjudice mise à la charge de l'établissement hospitalier, il y a lieu d'accorder la somme de 1.250 euros à Mme X ;

Considérant que compte tenu, d'une part, de la gêne rencontrée dans l'accomplissement des actes de la vie courante et, d'autre part, des activités artistiques et sportives auxquelles Mme X a dû renoncer, il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence incluant le préjudice d'agrément en les fixant à la somme de 10.000 euros ; que, compte tenu de la fraction du montant du préjudice mise à la charge de l'établissement hospitalier, il y a lieu d'accorder la somme de 5.000 euros à Mme X ;

Sur les intérêts :

Considérant, d'une part, que Mme X a droit à ce que la somme de 31.250 euros qui lui est accordée porte intérêts à compter du 30 septembre 2004, date de l'enregistrement de sa requête devant le Tribunal administratif de Pau ;

Considérant, d'autre part, que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES a droit aux intérêts de la somme de 1.041,60 euros à compter du 12 décembre 2007, date de l'enregistrement du mémoire dans lequel elle a présenté sa demande d'intérêts ;

Sur l'indemnité forfaitaire :

Considérant qu'aux termes de l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi du 21 décembre 2006 relative au financement de la sécurité sociale pour 2007 applicable à la date de la présente décision : « (...) En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget (...) » ; que ces montants ont été portés respectivement à 941 euros et 94 euros à compter du 1er janvier 2007 par l'arrêté susvisé du 7 décembre 2007 ; qu'il y a lieu, en application de ces dispositions, de mettre à la charge du centre hospitalier de Dax une somme de 941 euros ;

Sur le total des indemnités dues par le centre hospitalier de Dax :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la somme que le centre hospitalier de Dax a été condamné à verser à Mme X par le jugement attaqué doit être portée de 10.000 euros à 31.250 euros ; que la somme que l'établissement hospitalier a été condamné à payer à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES doit être portée de 336,07 euros à 1.982,60 euros ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Dax la somme de 1.300 euros au profit de Mme X et la somme de 500 euros au profit de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant, d'autre part, que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme X, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, la somme que réclame le centre hospitalier de Dax au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : L'indemnité que le centre hospitalier de Dax a été condamné à verser à Mme X en réparation des préjudices subis par celle-ci est portée à 31.250 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2004.

Article 2 : La somme que le centre hospitalier de Dax a été condamné à verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES, en remboursement de ses débours est portée à 1.041,60 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 12 décembre 2007.

Article 3 : La somme que le centre hospitalier de Dax a été condamné à verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES à titre d'indemnité forfaitaire est portée à 941 euros.

Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Pau du 19 décembre 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le centre hospitalier de Dax versera à Mme X une somme de 1.300 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le centre hospitalier de Dax versera à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES la somme de 500 euros que celle-ci réclame en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le surplus des requêtes de Mme X et de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES LANDES est rejeté.

Article 8 : Les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative, présentées par le centre hospitalier de Dax, sont rejetées.

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07BX00334,07BX00956


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 07BX00334
Date de la décision : 01/07/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DUDEZERT
Rapporteur ?: M. Hervé VERGUET
Rapporteur public ?: Mme VIARD
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS BOIZARD BOULET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-07-01;07bx00334 ?
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