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10/10/2008 | FRANCE | N°08BX01071

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, Juge des reconduites à la frontière, 10 octobre 2008, 08BX01071


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 16 avril 2008, présentée par le PREFET DE LA CORREZE et tendant à l'annulation du jugement en date du 17 mars 2008, par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges, d'une part, a annulé ses arrêtés du 14 mars 2008 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mounir X, ressortissant marocain et fixant le pays de renvoi, et, d'autre part, a condamné l'Etat à verser à M. X une somme de 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 16 avril 2008, présentée par le PREFET DE LA CORREZE et tendant à l'annulation du jugement en date du 17 mars 2008, par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges, d'une part, a annulé ses arrêtés du 14 mars 2008 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mounir X, ressortissant marocain et fixant le pays de renvoi, et, d'autre part, a condamné l'Etat à verser à M. X une somme de 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 septembre 2008 :

- le rapport de M. Dronneau ;

- et les conclusions de M. Gosselin, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par arrêtés du 14 mars 2008, le PREFET DE LA CORREZE a, d'une part, ordonné la reconduite à la frontière de M. Mounir X, ressortissant marocain et, d'autre part, fixé le Maroc comme pays de destination de l'intéressé ; que le PREFET DE LA CORREZE relève appel du jugement en date du 17 mars 2008, par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a annulé ces deux décisions ;

Sur la reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 4° Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire et s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois suivant l'expiration de ce titre » ; qu'aux termes de l'article R. 311-2 du même code : « La demande est présentée par l'intéressé dans les deux mois de son entrée en France. S'il y séjournait déjà, il présente sa demande : (...) 4° Soit dans le courant des deux derniers mois précédant l'expiration de la carte de séjour dont il est titulaire (...) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, ressortissant marocain entré en France le 2 mai 2002, a obtenu un titre de séjour en qualité de conjoint de Français, en septembre 2003, qui est venu à expiration le 28 septembre 2004 ; qu'ayant été écroué le 19 octobre 2004 à la maison d'arrêt d'Albi, il a été condamné, le 18 novembre 2006, par la cour d'assises du Tarn à cinq ans d'emprisonnement pour viol commis sur mineure de quinze ans et incarcéré au centre de détention d'Uzerche ; que l'intéressé ayant présenté, le 5 septembre 2007, une demande de renouvellement de son titre de séjour, le PREFET DE LA CORREZE a ordonné, par arrêté du 14 mars 2008, sa reconduite à la frontière sur le fondement de l'article L. 511-II 4° précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que si M. X fait valoir qu'il avait formulé une demande de renouvellement de titre de séjour, il résulte de ce qui précède que, faute d'avoir présenté valablement une demande de renouvellement de titre de séjour, il s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois suivant l'expiration de son titre de séjour et se trouvait, à la date de l'arrêté de reconduite à la frontière contesté, dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'article L. 511-II 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut prendre une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger ; que, dès lors, le PREFET DE LA CORREZE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a retenu que M. X avait formulé une demande de renouvellement de titre de séjour pour annuler l'arrêté contesté ;

Considérant qu'il appartient à la cour, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. X devant le tribunal administratif de Limoges ;

Considérant, en premier lieu, que les arrêtés contestés mentionnent les circonstances de droit et de fait qui les fondent ; que, par suite, ils sont suffisamment motivés ;

Considérant, en deuxième lieu, que si M. X expose qu'il a été convoqué à plusieurs reprises devant la commission du titre de séjour, que celle-ci ne s'est pas réunie et qu'elle n'a pas été saisie de son dossier, il ressort des pièces du dossier que le PREFET DE LA CORREZE, qui avait, en effet, envisagé d'expulser M. X à raison de la menace pour l'ordre public constituée par son comportement, a finalement renoncé à cette mesure pour prononcer la reconduite à la frontière de l'intéressé ; que, sauf les cas où le préfet envisage de ne pas délivrer un titre de séjour à un étranger qui peut y prétendre de plein droit, la commission du titre de séjour n'a pas à être consultée ; que, par suite, M. X ne saurait faire valoir utilement que l'arrêté de reconduite à la frontière dont il a fait l'objet n'a pas été précédé de la consultation de la commission du titre de séjour ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du même code : « Ne peuvent faire l'objet (...) d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 7° L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage (...) » ; que si M. X était marié avec une Française depuis au moins trois ans à la date de la décision ordonnant sa reconduite à la frontière, il est constant que l'intéressé était en instance de divorce et qu'il n'y avait plus communauté de vie entre les époux ; que, dès lors, ces dispositions ne faisaient pas obstacle à ce que le PREFET DE LA CORREZE ordonne sa reconduite à la frontière ;

Considérant, enfin, que M. X était en instance de divorce, n'avait pas d'enfant et n'était pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, la mesure de reconduite à la frontière n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, tel qu'il est protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'alors même que ses deux grands-pères ont servi la France durant la seconde guerre mondiale, qu'il est diplômé et s'est acquitté de la condamnation civile dont il a fait l'objet, la mesure de reconduite à la frontière n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA CORREZE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a annulé les arrêtés du 14 mars 2008 et à demander l'annulation dudit jugement ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges en date du 17 mars 2008 est annulé.

Article 2 : Les conclusions présentés par M. X devant le tribunal administratif de Limoges, et devant la cour sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

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No 08BX01071


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 08BX01071
Date de la décision : 10/10/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Michel DRONNEAU
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : SIFAOUI-BUISSON

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-10-10;08bx01071 ?
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