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14/10/2008 | FRANCE | N°07BX00081

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 14 octobre 2008, 07BX00081


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 11 janvier 2007, présentée pour M. Jean-Etienne X, demeurant ..., par Me Célénice, avocat au barreau de Fort de France ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 12 octobre 2006, par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 juin 2000 réduisant son temps d'enseignement des mathématiques en ce qu'elle constitue une sanction disciplinaire, ordonne à l'administration de le rétablir dans la plénitude de ses fonctions sous ast

reinte et condamne le recteur de l'académie de la Martinique à lui payer un...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 11 janvier 2007, présentée pour M. Jean-Etienne X, demeurant ..., par Me Célénice, avocat au barreau de Fort de France ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 12 octobre 2006, par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 juin 2000 réduisant son temps d'enseignement des mathématiques en ce qu'elle constitue une sanction disciplinaire, ordonne à l'administration de le rétablir dans la plénitude de ses fonctions sous astreinte et condamne le recteur de l'académie de la Martinique à lui payer une somme de 76 224, 50 € à titre de dommages et intérêts ;

2°) d'annuler la décision du 23 juin 2000 ;

3°) d'enjoindre à l'administration de le rétablir dans la plénitude de ses fonctions sous astreinte de 800 € par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 76 224,51 € à titre de dommages et intérêts ;

5°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 2 000 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le décret n° 64-217 du 10 mars 1964 modifié relatif aux maîtres contractuels et agréés des établissements d'enseignements privés sous contrat ;

Vu le code de l'éducation nationale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 septembre 2008 :

- le rapport de M. Dronneau, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Gosselin, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par lettre du 23 juin 2000, le recteur de l'académie de la Martinique a informé M. X, maître auxiliaire de l'enseignement privé, chargé de l'enseignement des mathématiques à l'institut martiniquais d'enseignement à Fort-de-France, que son service se réduirait pour la prochaine année scolaire à 9 heures dans les classes de premières littéraires et premières sciences et technologies tertiaires ; que l'intéressé relève appel du jugement en date du 12 octobre 2006, par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision, à ce qu'il soit enjoint à l'administration de le rétablir dans la plénitude de ses fonctions et à ce que l'Etat soit condamné à lui payer une somme de 76 224,50 € à titre de dommages et intérêts ;

Sur la recevabilité de la demande :

Considérant que si le recteur de l'académie de la Martinique, en réduisant par décision du 23 juin 2000 à 9 heures le temps de service de M. X, a agi sur proposition du directeur de l'établissement privé qui l'employait, celui-ci a repris à son compte l'avis de l'inspecteur pédagogique régional au terme de l'inspection dont avait fait l'objet l'enseignant le 12 mai 2000 ; que la décision du recteur de l'académie de la Martinique du 23 juin 2000 est une décision administrative faisant grief à M. X, quand bien même le directeur de l'institut martiniquais d'enseignement à Fort-de-France a pris une décision identique ; que, dès lors, M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Fort-de-France, en regardant cette décision comme une décision du chef de l'établissement, a rejeté sa demande comme irrecevable ; qu'il est, par suite, fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Fort-de-France ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er-1 du décret n° 64-217 du 10 mars 1964 modifié relatif aux maîtres contractuels et agréés des établissements d'enseignement privés sous contrat : « L'autorité académique est compétente pour conclure le contrat des maîtres et documentalistes ou pour accorder l'agrément des maîtres des établissements d'enseignement privés sous contrat. Elle est également compétente pour prononcer la résiliation du contrat ou le retrait de l'agrément » ; qu'aux termes de l'article 11-3 du même décret : « L'autorité académique, qui peut être saisie notamment par le chef d'établissement, peut, en cas d'insuffisance professionnelle dûment constatée, prononcer, après avis motivé de la commission consultative mixte académique ou départementale, la résiliation du contrat ou le retrait de l'agrément. (...) » ;

Considérant que M. X, maître auxiliaire, était bénéficiaire d'un contrat d'enseignement ; qu'il ressort des pièces du dossier que les rapports d'inspection dont il a fait l'objet ont révélé des difficultés professionnelles chroniques de l'intéressé dans l'exercice de ses fonctions ; que, notamment, par lettre du 8 juin 1998, l'inspecteur pédagogique régional, a préconisé que le service d'enseignement de M. X soit réduit pour lui permettre de suivre une formation professionnelle ; qu'à la rentrée de l'année 1998-1999, son service a effectivement été réduit à 9 heures et que M. X a effectué des visites de classes sous l'autorité d'un tuteur ; que, toutefois, l'intéressé soutient sans être utilement contredit, qu'à compter de janvier 1999, sa rémunération a été diminuée à due proportion de la réduction de service dont il avait fait l'objet ; que le recteur de l'académie de la Martinique ne saurait soutenir utilement que de telles mesures ne constitueraient que des mesures d'ordre intérieur qui ne feraient pas grief à l'intéressé ; que, notamment, la décision attaquée, qui procède à une officialisation de cette réduction de service accompagnée d'un changement d'attributions doit être regardée, dans les circonstances de l'espèce, non pas comme une sanction disciplinaire déguisée, ainsi que le soutient l'intéressé, mais, à raison de l'importance des mesures dont il a fait l'objet sans son accord et de la réduction de son salaire, comme une modification unilatérale de son contrat pour insuffisance professionnelle ; que si le recteur est compétent, en vertu des dispositions précitées du décret du 10 mars 1964, pour prononcer, en cas d'insuffisance professionnelle dûment constatée, la résiliation du contrat dont bénéficie un maître auxiliaire, aucune disposition législative ou réglementaire ne lui permet de procéder d'office à la réduction de moitié du service d'un maître et de diminuer sans son accord son salaire à due concurrence ; que, par suite, la décision contestée étant entachée d'excès de pouvoir, M. X est fondé à en demander l'annulation ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt implique que M. X soit rétabli dans toutes ses attributions ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au recteur de l'académie de la Martinique de rétablir M. X dans les attributions de son contrat initial, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette mesure de l'astreinte sollicitée ;

Sur les conclusions à fin de condamnation :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par lettre avec accusé de réception du 31 décembre 2001, M. X a saisi le recteur de l'académie de la Martinique d'une demande préalable d'indemnisation ; que, dès lors, ce dernier n'est pas fondé à soutenir que les conclusions à fin de condamnation de l'Etat, ne seraient pas recevables ;

Considérant qu'en réduisant d'office le temps de service et la rémunération de M. X dans les conditions ci-dessus rappelées, le recteur de l'académie de la Martinique a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; que, quand bien même l'insuffisance professionnelle de l'intéressé serait caractérisée et qu'en l'absence de service fait ce dernier ne saurait prétendre au versement des rémunérations dont il a été privé, M. X demeure fondé à demander la réparation des préjudices qu'il a subis ; que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation de ceux-ci, tous chefs de préjudices confondus, en fixant la réparation à laquelle M. X peut prétendre à la somme de 20 000 € ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à payer à M. X une somme de 1 300 € au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Fort-de-France en date du 12 octobre 2006, ensemble la décision du recteur de l'académie de la Martinique du 23 juin 2000, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au recteur de l'académie de la Martinique de rétablir M. X dans toutes ses attributions initiales dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat est condamné à payer à M. X une somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts.

Article 4 : L'Etat versera à M. X une somme de 1 300 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de M. X présenté devant le tribunal administratif de Fort-de-France et de sa requête est rejeté.

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No 07BX00081


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 07BX00081
Date de la décision : 14/10/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ZAPATA
Rapporteur ?: M. Michel DRONNEAU
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : CELENICE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-10-14;07bx00081 ?
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