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28/10/2008 | FRANCE | N°07BX00701

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 28 octobre 2008, 07BX00701


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 30 mars 2007, présentée pour M. et Mme Alain X, agissant tant en leur nom personnel qu'en leur qualité de représentants légaux de leur fille mineure Célia X et demeurant ensemble ..., par Me Moreau ;

M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401376, en date du 15 février 2007, par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Limoges à leur verser des indemnités d'un montant total de 44 251,14 euros en répar

ation des conséquences dommageables du décès, à l'accouchement, le 4 avril 2...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 30 mars 2007, présentée pour M. et Mme Alain X, agissant tant en leur nom personnel qu'en leur qualité de représentants légaux de leur fille mineure Célia X et demeurant ensemble ..., par Me Moreau ;

M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401376, en date du 15 février 2007, par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Limoges à leur verser des indemnités d'un montant total de 44 251,14 euros en réparation des conséquences dommageables du décès, à l'accouchement, le 4 avril 2003, de leur enfant Geoffrey ;

2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Limoges à leur verser des indemnités de 24 251,14 euros pour M. Alain X, 18 000 euros pour Mme Agnès X, et 8 000 euros pour Célia X ;

3°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Limoges à supporter les frais des expertises médicales ordonnées par le tribunal administratif de Limoges, et à leur verser la somme de 2 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 septembre 2008 :

- le rapport de M. Pouzoulet, président-assesseur,

- les observations de Me Journaud pour M. et Mme Alain X,

- et les conclusions de M. Vié, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X, dont la grossesse s'était déroulée sans incident notable, a été admise à la maternité du centre hospitalier universitaire de Limoges le 4 avril 2003 afin d'y mettre au monde l'enfant qu'elle portait ; qu'il a été procédé à son accouchement par césarienne le même jour à 19 heures 43, l'enfant, Geoffrey X, étant cependant mort-né ; que M. et Mme X, agissant tant en leur nom personnel qu'en leur qualité de représentants légaux de leur fille mineure Célia, relèvent appel du jugement, en date du 15 février 2007, par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Limoges au versement d'indemnités d'un montant total de 44 251,14 euros en réparation des conséquences dommageables de ce décès ;

Sur la recevabilité des conclusions d'appel de M. X :

Considérant que M. X réclamait en première instance le paiement d'une indemnité de 18 251,14 euros ; qu'il chiffre désormais ses prétentions, devant la cour, à 24 251,14 euros, sans justifier d'une aggravation de son préjudice depuis que le jugement attaqué a été rendu ou de dommages dont il n'était pas alors en mesure de faire état ; que ses conclusions d'appel sont dès lors, à concurrence de 6 000 euros, irrecevables ;

Sur la demande présentée au nom de Célia X :

Considérant que, par jugement avant dire droit du 2 février 2006, le tribunal administratif a rejeté comme irrecevables les conclusions à fin d'indemnité présentées par M. et Mme X au nom de leur enfant mineur Célia ; que les requérants ne contestent pas l'irrecevabilité qui leur a été opposée ; que dès lors les moyens invoqués à l'encontre de ce jugement sont sans portée utile et les conclusions de M. et Mme X tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Limoges à verser à Célia X la somme de 8 000 euros doivent être rejetées ;

Au fond :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des rapports des deux expertises ordonnées par le tribunal administratif de Limoges, en référé puis par le jugement susmentionné du 2 février 2006, que le monitorage mis en place dès l'installation de Mme X en salle de travail, vers 16 heures 30, a révélé des ralentissements tardifs et le caractère peu oscillant du rythme cardiaque du foetus ; que si ces anomalies, d'interprétation difficile, étaient par elles-mêmes peu évocatrices d'une souffrance foetale, celle-ci devait en revanche être évoquée à 18 heures 10, au vu de la coloration méconiale du liquide amniotique s'écoulant de la poche des eaux alors artificiellement rompue par la sage-femme ; qu'en dépit de ce signe alarmant, qui lui imposait, sinon d'extraire immédiatement l'enfant, du moins de procéder aux examens complémentaires -mesure du pH, oxymétrie du pouls ou analyse de l'électrocardiogramme foetal- qui eussent confirmé l'hypoxie, le médecin obstétricien en charge de la parturiente s'est maintenu dans l'expectative, et n'a décidé de recourir à la césarienne qu'à 19 heures 35, au constat d'une bradycardie sévère engagée quelques minutes plus tôt ; que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, ce retard de diagnostic et d'intervention, qui a anéanti les chances d'éviter le décès de Goeffrey X, constitue une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Limoges ; qu'en revanche, eu égard à la situation d'urgence à laquelle les praticiens ont dû faire face lors de la brutale altération du rythme cardiaque du foetus, vers 19 heures 30, et à l'absence de toute alternative thérapeutique à l'extraction par césarienne, la responsabilité ainsi retenue ne saurait être aggravée par la circonstance que M. et Mme X n'ont pas été mis à même, par une information complète, de donner leur consentement éclairé à cet acte chirurgical, au demeurant étranger aux causes du décès de leur enfant ;

Considérant que, dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a fait perdre à celui-ci une chance d'éviter le dommage constaté, la réparation qui incombe à l'hôpital doit être évaluée à une fraction de ce dommage déterminé en fonction de l'ampleur de la chance perdue ; qu'en l'espèce, la cause de l'hypoxie foetale demeurant inconnue, il ne peut être tenu pour certain, comme le souligne l'expert désigné en exécution du jugement du 2 février 2006, qu'une césarienne pratiquée plus tôt aurait assuré la survie de Geoffrey X ; que, dans ces conditions, la réparation incombant au centre hospitalier universitaire de Limoges doit être fixée à la moitié des préjudices subis ;

Considérant qu'il sera fait une juste appréciation de la douleur morale éprouvée par M. et Mme X en l'évaluant, pour chacun d'eux, à 17.000 euros ; que M. X justifie par ailleurs, à concurrence de 251,14 euros, de frais d'obsèques facturés par le service funéraire de la ville de Limoges ; qu'en revanche, il n'établit pas avoir remboursé à M. Paul X les frais de sépulture exposés par ce dernier en produisant seulement une attestation de ce dernier ; qu'ainsi, et compte tenu de ce qui précède, les indemnités dues par le centre hospitalier universitaire de Limoges s'élèvent à 8 625,57 euros pour M. X et à 8 500 euros pour Mme X ;

Sur les frais des expertises :

Considérant que les frais des deux expertises ordonnées par le tribunal administratif de Limoges, d'un montant de, respectivement, 700 et 799 euros, doivent être mis à la charge du centre hospitalier universitaire de Limoges ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner le centre hospitalier universitaire de Limoges à verser à M. et Mme X, ensemble, une somme de 1 300 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges n° 0401376 du 15 février 2007 est annulé.

Article 2 : le centre hospitalier universitaire de Limoges est condamné à verser à M. Alain X et à Mme Agnès X des indemnités de, respectivement, 8 625,57 euros et 8 500 euros et à ces derniers une somme de 1 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les frais des deux expertises ordonnées par le tribunal administratif de Limoges taxés et liquidés aux sommes respectives de 700 euros et 799 euros sont mis à la charge du centre hospitalier universitaire de Limoges.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 07BX00701


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 07BX00701
Date de la décision : 28/10/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme FLECHER-BOURJOL
Rapporteur ?: M. Philippe POUZOULET
Rapporteur public ?: M. VIE
Avocat(s) : MOREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-10-28;07bx00701 ?
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