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26/02/2009 | FRANCE | N°07BX00593

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 26 février 2009, 07BX00593


Vu la requête, enregistrée le 19 mars 2007, présentée pour la société SNDA TOUZALIN, société anonyme, dont le siège est ZI République III, 2 rue Louis Proust, BP 1112 à Poitiers Cedex (86061), par la société d'avocats Jurica ; la société SNDA TOUZALIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502667 du 18 janvier 2007 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés pour la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003 ;

2°) de prono

ncer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une ...

Vu la requête, enregistrée le 19 mars 2007, présentée pour la société SNDA TOUZALIN, société anonyme, dont le siège est ZI République III, 2 rue Louis Proust, BP 1112 à Poitiers Cedex (86061), par la société d'avocats Jurica ; la société SNDA TOUZALIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502667 du 18 janvier 2007 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés pour la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive n° 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 janvier 2009 :

- le rapport de Mme Jayat, président assesseur,

- et les conclusions de M. Lerner, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a notamment remis en cause la déduction, par la société SNDA TOUZALIN, concessionnaire automobile de la marque Toyota, de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat de véhicules dits de « courtoisie », prêtés gratuitement aux clients et de véhicules de démonstration ainsi que la taxe ayant grevé les dépenses d'entretien et d'équipement de ces véhicules ; que la société SNDA TOUZALIN fait appel du jugement du 18 janvier 2007 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la réduction des rappels de taxe qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003 en tant qu'ils procèdent du refus de cette déduction ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que, pour exclure le droit de la société à déduire la taxe ayant grevé les dépenses d'entretien des véhicules de démonstration, les premiers juges ont relevé qu'en application de l'article 241 de l'annexe II au code général des impôts, les services de toute nature afférents aux biens exclus du droit à déduction n'ouvraient, eux-mêmes, pas droit à déduction, que la société ne pouvait se prévaloir des dispositions de l'article 232 de la même annexe, abrogé au 1er janvier 1995 et que la doctrine administrative invoquée ne concernait pas les accessoires de véhicules non destinés à être revendus à l'état neuf ; que le jugement répond sur ce point à l'ensemble des moyens exposés par la société ;

Au fond :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

S'agissant de la taxe sur les véhicules de démonstration et de prêt :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 257 du code général des impôts : « Sont également soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : ... 8° Les opérations suivantes assimilées, selon le cas, à des livraisons de biens ou à des prestations de services effectuées à titre onéreux. 1. Sont assimilés à des livraisons de biens effectuées à titre onéreux : ... b) L'affectation par un assujetti aux besoins de son entreprise d'un bien produit, construit, extrait, transformé, acheté, importé ou ayant fait l'objet d'une acquisition intracommunautaire dans le cadre de son entreprise lorsque l'acquisition d'un tel bien auprès d'un autre assujetti, réputée faite au moment de l'affectation, ne lui ouvrirait pas droit à déduction complète parce que le droit à déduction de la taxe afférente au bien fait l'objet d'une exclusion ou d'une limitation ou peut faire l'objet d'une régularisation ; cette disposition s'applique notamment en cas d'affectation de biens à des opérations situées hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ... » ;

Considérant, d'autre part, que l'article 237 de l'annexe II au code général des impôts dispose que : « Les véhicules ou engins, quelle que soit leur nature, conçus pour transporter des personnes ou à usages mixtes, qui constituent une immobilisation ou, dans le cas contraire, lorsqu'ils ne sont pas destinés à être revendus à l'état neuf, n'ouvrent pas droit à déduction. Il en est de même des éléments constitutifs, des pièces détachées et accessoires de ces véhicules et engins » ;

Considérant que, pour remettre en cause la déduction pratiquée par la société requérante, l'administration s'est initialement fondée sur l'exclusion du droit à déduction prévue par l'article 237 précité de l'annexe II au code général des impôts ; que, tant devant le tribunal que devant la Cour, le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique a demandé que soit substituée à cette base légale, celle tirée de l'article 257, 8°, b précité du code général des impôts soumettant à la taxe sur la valeur ajoutée l'affectation aux besoins de l'entreprise des biens achetés ayant ouvert droit à déduction ; que l'administration est en droit, à tout moment de la procédure contentieuse, pour justifier une imposition, de demander qu'une base légale soit substituée à celle qui avait été primitivement invoquée, à la condition que cette substitution puisse être faite sans priver le contribuable des garanties qui lui sont reconnues en matière de procédure d'imposition et notamment de la faculté, prévue par les articles L. 59 et L. 59 A du livre des procédures fiscales, de demander la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, lorsque celle-ci est compétente pour connaître du différend relatif à une question de fait dont la solution commande le bien-fondé du nouveau motif invoqué par l'administration ; qu'en l'espèce, et dès lors notamment que le montant du chiffre d'affaires soumis à la taxe ne fait l'objet d'aucun désaccord, il ne résulte pas de l'instruction que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires aurait pu être saisie dans ce litige d'une question de fait dont aurait dépendu la taxation en application de l'article 257 précité du code général des impôts ; que la qualification d'immobilisations des véhicules dont s'agit au regard de l'application de la doctrine administrative, qui constitue une question de droit, ne dépendait, en tout état de cause, d'aucune question de fait sur laquelle les parties auraient été en désaccord ;

Considérant qu'ainsi que l'a jugé le tribunal, il résulte des dispositions précitées du code général des impôts et de son annexe II que les véhicules conçus pour transporter des personnes acquis à l'état neuf par les concessionnaires de marques automobiles sont exclus du droit à déduction lorsqu'ils sont affectés après leur achat à une autre destination que la revente en l'état et que les concessionnaires sont tenus, lorsqu'ils ont déduit la taxe ayant grevé l'acquisition d'un tel véhicule, de soumettre à la taxe sur la valeur ajoutée l'opération consistant à l'affecter aux besoins de l'entreprise autres que la revente à l'état neuf, ainsi que le prévoient les dispositions précitées de l'article 257 du code général des impôts ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration, sur le fondement des dispositions précitées, a rappelé la taxe afférente à l'affectation de véhicules, par la société SNDA TOUZALIN, au prêt et à la démonstration ;

Considérant que la société requérante soutient que la taxation litigieuse porte atteinte au principe de neutralité dès lors que cette taxation la prive du droit de déduire la taxe ayant grevé l'achat des véhicules ainsi que les dépenses de leur entretien et de leur équipement, alors qu'ayant, par la suite, vendu les véhicules dont s'agit comme véhicules d'occasion, elle a facturé la taxe sur la valeur ajoutée à ses clients et acquitté cette taxe, conformément aux dispositions du 3 de l'article 283 du code général des impôts selon lesquelles une personne est redevable de la taxe du seul fait qu'elle l'a facturée, sans pouvoir maintenant retrouver trace des clients pour émettre des factures rectificatives ; que, toutefois, ni l'absence susrappelée de droit à déduction de la taxe pour les opérateurs durant l'affectation des véhicules à la démonstration ou au prêt, ni l'exonération des ventes portant sur ces véhicules ne sont par elles-mêmes de nature à porter atteinte au principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée dès lors qu'elles ne créent aucune distorsion entre opérateurs concurrents ; que, par ailleurs, il résulte des objectifs de la directive du 17 mai 1977, interprétés par la Cour de justice des Communautés européennes, que le droit à déduction ne s'étend pas à un montant de taxe facturé à tort ; qu'enfin, il résulte expressément de l'article 21 de cette directive que la taxe est due par toute personne qui la mentionne sur une facture ou tout document en tenant lieu et que le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée implique seulement, dans ce cas, qu'une possibilité de régularisation ne dépendant pas du pouvoir discrétionnaire de l'administration fiscale soit laissée à l'émetteur de la facture ; que cette possibilité de régularisation doit être ouverte à celui-ci sans condition de bonne foi s'il a éliminé tout risque de perte de recettes fiscales ; que, dans le cas contraire, une telle possibilité peut être soumise à une condition de bonne foi ; que les dispositions de l'article 283 du code général des impôts ne sont pas incompatibles avec ces exigences, dès lors qu'elles n'excluent pas la possibilité de régulariser une facture mentionnant une taxe y figurant à tort ; que, par suite, et en l'absence d'une circonstance constitutive d'un cas de force majeure faisant obstacle à la régularisation de la situation, le moyen tiré d'une méconnaissance du principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée doit être écarté ;

Considérant que la société requérante ne peut utilement se prévaloir d'un projet de directive communautaire ;

S'agissant de la taxe sur les dépenses d'équipement et de réparation :

Considérant que, s'agissant des dépenses d'équipement et d'entretien des véhicules, l'administration invoque, comme fondement légal des impositions, l'article 261 du code général des impôts aux termes duquel : « Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : ... 3. (Biens usagés. Déchets neufs d'industrie et matières de récupération) : 1° a. sous réserve, le cas échéant, des dispositions des 13° et 15° de l'article 257, les ventes de biens usagés faites par les personnes qui les ont utilisés pour les besoins de leurs exploitations. Toutefois, l'exonération ne s'applique pas aux biens qui ont ouvert droit à déduction complète ou partielle de la taxe sur la valeur ajoutée lors de leur achat ... », ainsi que l'article 241 de l'annexe II audit code, lequel dispose que : « Les services de toute nature afférents à des biens, produits ou marchandises exclus du droit à déduction n'ouvrent pas droit à déduction » ; qu'il résulte de ces dispositions que les dépenses de réparation exposées en vue de la revente des véhicules de démonstration et de prêt, lesquels n'ouvraient pas droit à déduction de la taxe lors de leur achat, ne peuvent elles-mêmes ouvrir droit à déduction ; que les dépenses d'équipement des véhicules vendus, qui ne sont qu'accessoires à la vente desdits véhicules, se rattachent à une opération exonérée et ne peuvent pas davantage donner lieu à déduction ;

Considérant que, pour les motifs précédemment exposés, les moyens tirés d'une méconnaissance du principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée et d'un projet de directive communautaire doivent être écartés ;

En ce qui concerne l'application de la doctrine :

Considérant que si, par une instruction 3 D-6-86 du 5 juillet 1986 complétée par une instruction 3 D-10-86 du 12 septembre 1986, l'administration admet que les concessionnaires qui ont déduit la taxe lors de l'acquisition ne la reversent pas lorsque le véhicule est affecté à la démonstration dès lors que, lors de la revente, la taxe est acquittée sur la totalité du prix de vente, ces instructions, à les supposer encore en vigueur, ne visent que les véhicules de démonstration qui n'ont pas le caractère d'immobilisations ; qu'ainsi que l'ont relevé les premiers juges, les véhicules affectés par la société à la démonstration ont été conservés dans l'entreprise plus d'un an ; que, par suite, ils constituaient des immobilisations n'entrant pas dans le champ de la doctrine susrappelée ; que, s'agissant des véhicules dits « de courtoisie », mis à disposition des clients de la société et non utilisés en vue de promouvoir les ventes de biens de même nature, ils ne peuvent davantage être considérés comme des véhicules de démonstration entrant dans le champ de cette doctrine ;

Considérant que la réponse ministérielle à M. Larché, sénateur, du 28 mai 1987, est relative aux conditions dans lesquelles la remise d'articles à leurs clients par les concessionnaires automobiles est considérée comme une réduction de prix ou, au contraire, comme un cadeau au sens de l'article 238 de l'annexe II au code général des impôts, selon qu'ils figurent ou non sur la facture de vente ; que cette réponse ne comporte aucune interprétation du texte fiscal qui fonde en l'espèce les rappels de taxe ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société SNDA TOUZALIN n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société SNDA TOUZALIN au titre des frais d'instance exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société SNDA TOUZALIN est rejetée.

2

N° 07BX00593


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 07BX00593
Date de la décision : 26/02/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. BRUNET
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: M. LERNER
Avocat(s) : JURICA SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2009-02-26;07bx00593 ?
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