La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/03/2009 | FRANCE | N°08BX02006

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 05 mars 2009, 08BX02006


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 31 juillet 2008 sous le n° 08BX02006, présentée pour M. Firat X demeurant chez M. Y ..., par Me Cesso avocat ;

M. X demande à la cour :

- d'annuler le jugement en date du 10 juillet 2008, par lequel le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 30 janvier 2008 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

- d'annuler l'arrêté attaqué

;

- d'ordonner au préfet de la Gironde de lui délivrer une carte de séjour ;

- de co...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 31 juillet 2008 sous le n° 08BX02006, présentée pour M. Firat X demeurant chez M. Y ..., par Me Cesso avocat ;

M. X demande à la cour :

- d'annuler le jugement en date du 10 juillet 2008, par lequel le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 30 janvier 2008 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

- d'annuler l'arrêté attaqué ;

- d'ordonner au préfet de la Gironde de lui délivrer une carte de séjour ;

- de condamner l'Etat à verser à Me Cesso une somme de 2.000 euros au titre de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 2000-231 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 février 2009,

- le rapport de Mme Balzamo, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Zupan, rapporteur public ;

Considérant que M. X a fait l'objet le 30 janvier 2008 d'un arrêté par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé la Turquie comme pays de destination ; que par un jugement en date du 10 juillet 2008, le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ; que M. X interjette appel de ce jugement ;

Sur le refus de titre de séjour :

Considérant que l'arrêté préfectoral du 30 janvier 2008 en litige mentionne le nom, le prénom et la qualité de son signataire, M. Bernard Cagnault, directeur de la réglementation et des libertés publiques de la préfecture de la Gironde, régulièrement habilité par arrêté préfectoral du 19 septembre 2007, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de septembre 2007 ; que, par suite les moyens tirés de l'incompétence du signataire de cet arrêté et de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 doivent être écartés ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « la carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations d'ordre humanitaire ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. » ; que lorsqu'il est saisi d'une demande de titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code ; qu'il ressort au contraire des termes mêmes des dispositions de l'article L. 313-14 précité, qu'il appartient à l'étranger de faire valoir les motifs exceptionnels justifiant que lui soit octroyé un titre de séjour ; que M. X, qui avait sollicité un titre de séjour en qualité de réfugié et qui n'a pas présenté une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 précité, ainsi que se borne à le rappeler l'arrêté en litige, ne peut donc utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions à l'encontre du refus opposé à sa demande de titre de séjour ;

Sur l'obligation de quitter le territoire :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

Considérant que le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être utilement invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français qui ne fixe pas le pays de renvoi ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. » ;

Considérant que M. X soutient qu'il encourt des risques en cas de retour en Turquie du fait de son origine kurde et de l'appartenance de certains membres de sa famille au parti PKK ;

Considérant qu'il ressort des pièces produites par le requérant, dont le caractère probant n'est pas sérieusement contesté par l'administration, que M. X, qui appartient à la minorité kurde de Turquie, a fait l'objet, en raison de la participation des membres de sa famille au parti des travailleurs kurdes, de poursuites judiciaires et de tentatives d'arrestation de la part des autorités de son pays ; que M. X produit notamment un rapport d'audience du tribunal de Malatya du 10 octobre 2007 et un courrier de son avocat du 5 février 2008 prouvant qu'il est toujours recherché par les autorités de Turquie ; que, par suite, au regard des pièces produites, dont il ne ressort pas du dossier qu'elles aient été soumises à l'office français de protection des réfugiés et apatrides et à la cour nationale du droit d'asile, M. X doit être regardé comme établissant qu'en raison de son origine kurde et de ses activités tant en France qu'en Turquie, sa sécurité personnelle pourrait être gravement menacée en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi, le préfet de la Gironde n'a pu sans méconnaitre les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales fixer la Turquie comme pays de renvoi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 janvier 2008 fixant la Turquie, comme pays de renvoi ;

Sur les conclusions aux fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt qui rejette la requête de M. X en tant qu'elle concerne le refus de titre de séjour que lui a opposé le préfet de la Gironde, n'implique pas, alors même qu'il prononce par ailleurs l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi figurant dans l'arrêté contesté du 30 janvier 2008, que la cour ordonne au préfet de délivrer à l'intéressé un titre de séjour ; que les conclusions présentées à cette fin ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que M. X a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Cesso, avocat de M. X, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1.500 euros sur le fondement de ces dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement en date du 10 juillet 2008 du Tribunal administratif de Bordeaux, en tant qu'il rejette les conclusions de M. X tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Gironde en date du 30 janvier 2008 fixant le pays de renvoi, et la décision du préfet de la Gironde en date du 30 janvier 2008 fixant le pays à destination duquel M. X doit être renvoyé sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à Me Cesso une somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ledit avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

4

No 08BX02006


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08BX02006
Date de la décision : 05/03/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LEDUCQ
Rapporteur ?: Mme Evelyne BALZAMO
Rapporteur public ?: M. ZUPAN
Avocat(s) : CESSO

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2009-03-05;08bx02006 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award