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09/06/2009 | FRANCE | N°07BX02034

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 09 juin 2009, 07BX02034


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 2 octobre 2007, et le mémoire complémentaire, enregistré le 4 janvier 2008, présentés pour la SOCIETE ANTILLAISE DE PRESSE ET D'IMPRESSION, ayant son siège Zone industrielle de Californie Lotissement La Trompeuse à Le Lamentin (97232), par Me Dagnon ;

La SOCIETE ANTILLAISE DE PRESSE ET D'IMPRESSION demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0300223 en date du 6 septembre 2007, par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de droit additionnel à l

'octroi de mer qui lui ont été réclamés au titre des années 1999, 2000 et 2...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 2 octobre 2007, et le mémoire complémentaire, enregistré le 4 janvier 2008, présentés pour la SOCIETE ANTILLAISE DE PRESSE ET D'IMPRESSION, ayant son siège Zone industrielle de Californie Lotissement La Trompeuse à Le Lamentin (97232), par Me Dagnon ;

La SOCIETE ANTILLAISE DE PRESSE ET D'IMPRESSION demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0300223 en date du 6 septembre 2007, par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de droit additionnel à l'octroi de mer qui lui ont été réclamés au titre des années 1999, 2000 et 2001 ;

2°) de lui accorder la décharge sollicitée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité instituant la communauté européenne ;

Vu la décision 89/688/CEE du conseil des communautés européennes du 22 décembre 1989 relative au régime de l'octroi de mer dans les départements français d'outre-mer ;

Vu la loi n° 84-747 du 2 août 1984 ;

Vu la loi n° 92-676 du 17 juillet 1992 modifiée relative à l'octroi de mer et portant mise en oeuvre de la décision du conseil des ministres des communautés européennes n° 89-688 du 22 décembre 1989 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2009 :

- le rapport de M. Pouzoulet, président assesseur ;

- et les conclusions de M. Vié, rapporteur public ;

Considérant que la SOCIETE ANTILLAISE DE PRESSE ET D'IMPRESSION fait appel du jugement du 6 septembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande en décharge des rappels de droit additionnel à l'octroi de mer qui lui ont été réclamés au titre des années 1999, 2000 et 2001 au motif que la demande avait été portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :

Considérant que l'article 1er de la loi du 17 juillet 1992, dans sa rédaction applicable aux faits du litige, dispose : Dans les régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de la Réunion, les opérations suivantes sont soumises à une taxe dénommée octroi de mer : 1° l'introduction de marchandises ; 2° les livraisons à titre onéreux par des personnes qui y accomplissent des activités de production ... ; 3° Les livraisons à titre onéreux par des personnes qui achètent en vue de l'exportation ou de la revente à d'autres assujettis à l'octroi de mer et qui remplissent les conditions prévues au 2 de l'article 3 ; qu'aux termes de l'article 13 de la même loi : Les conseils régionaux de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de la Réunion peuvent instituer un droit additionnel à l'octroi de mer applicable à tous les produits. L'assiette de ce droit additionnel est la même que celle de l'octroi de mer. Son taux est fixé par le conseil régional et ne peut excéder 2,5 % .../ Les règles fixées au présent titre s'appliquent au droit additionnel à l'octroi de mer/ Le produit du droit additionnel constitue une recette de la région ; que l'article 15 prévoit : I. - En ce qui concerne les opérations visées au 1° de l'article 1er et au 1 bis de l'article 5, l'octroi de mer est perçu et contrôlé comme en matière de droits de douane. /Les infractions sont instruites et jugées comme en matière de douane. II. - En ce qui concerne les opérations visées aux 2° et 3° de l'article 1er, l'octroi de mer est constaté, contrôlé et recouvré comme en matière de taxe sur la valeur ajoutée avec les sûretés, garanties, privilèges et sanctions applicables à cette taxe, nonobstant les dispositions de l'article 379 du code des douanes. /Les réclamations sont présentées, instruites et jugées comme pour cette taxe. (...) ; qu'en vertu de l'article L. 199 du livre des procédures fiscales, les décisions rendues par l'administration en matière de taxes sur le chiffre d'affaires et qui ne donnent pas entière satisfaction aux intéressés peuvent être portées devant le tribunal administratif ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SOCIETE ANTILLAISE DE PRESSE ET D'IMPRESSION exploite une activité d'impression et d'édition de publications de presse ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, le service a constaté que la société aurait dû acquitter le droit additionnel à l'octroi de mer sur sa production de magazines ; que cette activité était au nombre des opérations visées au 2° de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1992 précité ; qu'en vertu des dispositions combinées de l'article 13 et du II de l'article 15 de la même loi, précitées, le droit additionnel à l'octroi de mer grevant la livraison de ces produits est constaté, contrôlé et recouvré comme en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'ainsi, le tribunal administratif a méconnu ces dispositions ainsi que celles de l'article L. 199 du livre des procédures fiscales en jugeant que la demande de la société avait été portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société devant le tribunal administratif de Fort-de-France ;

Considérant en premier lieu qu'aux termes de l'article 1er de la décision 89/688/CEE : D'ici au 31 décembre 1992 au plus tard, les autorités françaises prennent les mesures nécessaires pour que le régime de l'octroi de mer actuellement en vigueur dans les départements d'outre-mer soit applicable indistinctement, selon les principes et modalités énoncés aux articles 2 et 3, aux produits introduits et aux produits obtenus dans les régions ; que l'octroi de mer visé par la décision communautaire était alors régi par les articles 38 et suivants de la loi n° 84-747 du 2 août 1984 ; que l'article 39 de la loi prévoyait qu'un droit additionnel , dont l'assiette était la même que celle de l'octroi de mer, pouvait être institué par les conseils régionaux ; que, par la décision 89/688 précitée, le conseil des communautés européennes a autorisé les autorités françaises à exonérer, totalement ou partiellement, selon les besoins économiques, les activités locales de l'application du nouvel octroi de mer pour une période de temps ne dépassant pas en principe dix années, et confié à la commission européenne la tâche de contrôler la conformité au droit communautaire du nouveau régime de la taxe prévoyant des exonérations limitées ; que, tel qu'il a été institué par la loi du 2 août 1984 comme par la loi du 17 juillet 1992 précitée, le droit additionnel à l'octroi de mer doit être regardé, non comme une taxe distincte de l'octroi de mer, mais comme une majoration de taxe qui se distingue de ce dernier par son affectation particulière aux budgets des régions ; que, puisque le droit additionnel n'était qu'un élément du régime de l'octroi de mer appréhendé par la décision 89/688, le conseil des communautés européennes n'avait donc pas à prévoir des dispositions spécifiques relatives au droit additionnel ; qu'ainsi la décision 89/688 n'a pas entendu exclure de son champ d'application le droit additionnel en litige mais a seulement imposé aux autorités françaises la mise en conformité avec le droit communautaire, et avant le 31 décembre 1992, non seulement de l'octroi de mer, mais encore du droit additionnel à l'octroi de mer ; qu'en application de l'article 2 de la décision 89/688, le droit additionnel a d'ailleurs été soumis au contrôle de la commission européenne au même titre que l'octroi de mer lui-même ; que la circonstance qu'une taxe telle que le droit additionnel prévu par l'article 39 de la loi du 2 août 1984, alors conçu exclusivement comme une taxe d'effet équivalent à un droit de douane additionnel, a été ultérieurement regardée comme incompatible avec le traité par la cour de justice des communautés européennes dans un arrêt du 7 novembre 1996, Société Cadi Surgelés e.a. (affaire C-126/94, point 29) est sans influence sur la portée de la décision 89/688 et la conformité au droit communautaire du nouveau droit additionnel à l'octroi de mer régi par la loi du 17 juillet 1992 ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la perception du droit additionnel en litige n'aurait pas été autorisée par la décision 89/688 doit être écarté ;

Considérant en deuxième lieu que, dans l'arrêt du 19 février 1998 rendu dans l'affaire C-212/96, Paul Chevassus-Marche, la cour de justice des communautés européennes a jugé que l'imposition des conditions strictes prévues par la décision 89/688/CEE du conseil du 22 décembre 1989, interprétées à la lumière des limites prévues à l'article 226 du traité instituant la communauté européenne, était apte à assurer la compatibilité du système des exonérations précisément déterminées avec les dispositions du traité, dans la mesure où cette décision autorisait un système d'exonération de la taxe dénommée octroi de mer , assorti de conditions strictes soumises au contrôle de la commission européenne ; que la cour de justice a ajouté que la décision 89/688 n'était pas incompatible avec les articles 9, 12 et 13 du traité et que les dérogations temporaires à l'article 95 qu'elle prévoyait étaient justifiées conformément à l'article 227, paragraphe 2 lu en combinaison avec l'article 226 du traité ; que la cour de justice des communautés européennes en a conclu que l'examen de la décision n'avait fait apparaître aucun élément de nature à affecter sa validité, sans mettre en cause le recours à l'article 235 du traité de Rome ; que, par suite, le moyen relatif à l'invalidité de la décision 89/688 au regard des stipulations du traité instituant la communauté européenne doit être écarté ;

Considérant enfin qu'il est constant que les produits en litige de la SOCIETE ANTILLAISE DE PRESSE ET D'IMPRESSION ne peuvent bénéficier d'aucune exonération de droit additionnel à l'octroi de mer ; qu'en tout état de cause, il n'est pas contesté par la SOCIETE ANTILLAISE DE PRESSE ET D'IMPRESSION que, tel qu'il a été mis en oeuvre en application de la décision 89/688/CEE, le régime de l'octroi de mer stricto sensu, et notamment les règles d'exonération qu'il prévoit, répond aux exigences fixées par cette décision ; qu'en application du 3 de l'article 2 de la décision 89/688/CEE, le régime des exonérations retenu en matière d'octroi de mer et de droit additionnel à l'octroi de mer, y compris les délibérations des conseils régionaux instituant le taux du droit additionnel, a d'ailleurs été soumis au contrôle de la commission européenne qui l'a approuvé ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les autorités françaises ont méconnu la portée de la décision 89/688/CEE et institué un droit additionnel à l'octroi de mer incompatible avec cette décision et les stipulations du traité instituant la communauté européenne doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de poser des questions préjudicielles à la cour de justice des communautés européennes, que la SOCIETE ANTILLAISE DE PRESSE ET D'IMPRESSION n'est pas fondée à demander la décharge des rappels de droit additionnel à l'octroi de mer en litige ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la SOCIETE ANTILLAISE DE PRESSE ET D'IMPRESSION la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0300223 du tribunal administratif de Fort-de-France en date du 6 septembre 2007 est annulé.

Article 2 : La demande de la SOCIETE ANTILLAISE DE PRESSE ET D'IMPRESSION présentée devant le tribunal administratif de Fort-de-France est rejetée.

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N° 07BX02034


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 07BX02034
Date de la décision : 09/06/2009
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme FLECHER-BOURJOL
Rapporteur ?: M. Philippe POUZOULET
Rapporteur public ?: M. VIE
Avocat(s) : DAGNON

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2009-06-09;07bx02034 ?
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