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03/07/2009 | FRANCE | N°08BX00302

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, Juge des reconduites à la frontière, 03 juillet 2009, 08BX00302


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 31 janvier 2008, présentée par le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES ;

Le PREFET demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse du 25 janvier 2008 en ce qu'il a annulé l'arrêté de reconduite à la frontière du 22 janvier 2008 et la décision du même jour décidant le placement de M. X en rétention administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Toulouse ;

3°) d'ordonner le rembo

ursement des frais irrépétibles qu'il a du verser en première instance ;

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Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 31 janvier 2008, présentée par le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES ;

Le PREFET demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse du 25 janvier 2008 en ce qu'il a annulé l'arrêté de reconduite à la frontière du 22 janvier 2008 et la décision du même jour décidant le placement de M. X en rétention administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Toulouse ;

3°) d'ordonner le remboursement des frais irrépétibles qu'il a du verser en première instance ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 signée le 19 juin 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir au cours de l'audience publique du 1er juillet 2009, présenté son rapport et entendu les conclusions de M. Vié, rapporteur public ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté attaqué et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES a prononcé la reconduite à la frontière de M. X, de nationalité moldave , en application du 1° du I de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au motif, que démuni de passeport, il ne pouvait justifier être entré régulièrement sur le territoire français ;

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation de visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; qu'aux termes de l'article L.511-2 du même code : Les dispositions du 1° du II de l'article L.511-1 sont applicables à l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne : a) S'il ne remplit pas les conditions d'entrée prévues à l'article 5 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ; b) Ou si, en provenance directe du territoire d'un Etat partie à cette convention, il ne peut justifier être entré sur le territoire métropolitain en se conformant aux stipulations de ses articles 19, paragraphe 1 ou 2, 20, paragraphe 1, et 21, paragraphe 1 ou 2 ; qu'aux termes de l'article L. 511-3 du même code : Les dispositions du 2º et du 8º du II de l'article L. 511-1 sont applicables à l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne si, en provenance directe du territoire d'un des Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, il s'est maintenu sur le territoire métropolitain sans se conformer aux stipulations de l'article 19, paragraphe 1 ou 2, de l'article 20, paragraphe 1, et de l'article 21, paragraphe 1 ou 2, de ladite convention. ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la convention d'application de l'accord de Schengen signée le 19 juin 1990 : 1. Les frontières intérieures peuvent être franchies en tout lieu sans qu'un contrôle des personnes soit effectué (...) 3. La suppression du contrôle des personnes aux frontières intérieures ne porte atteinte ni aux dispositions de l'article 22, ni à l'exercice des compétences de police par les autorités compétentes en vertu de la législation de chaque Partie contractante sur l'ensemble de son territoire, ni aux obligations de détention, de port et de présentation de titres et documents prévus par sa législation ; qu'aux termes de son article 5 : 1. Pour un séjour n'excédant pas trois mois, l'entrée sur les territoires des Parties contractantes peut être accordée à l'étranger qui remplit les conditions ci-après : (...) a) posséder un document ou des documents valables permettant le franchissement de la frontière, déterminés par le Comité Exécutif ; (...) c) Présenter, le cas échéant, les documents justifiant de l'objet et des conditions du séjour envisagé et disposer des moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays de provenance ou le transit vers un Etat tiers dans lequel son admission est garantie, ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens (...) ; e) ne pas être considéré comme pouvant compromettre l'ordre public, la sécurité nationale ou les relations internationales de l'une des Parties Contractantes. ; qu'aux termes de son article 21 : 1. Les étrangers titulaires d'un titre de séjour délivré par une des Parties Contractantes peuvent, sous le couvert de ce titre ainsi que d'un document de voyage, ces documents étant en cours de validité, circuler librement pendant une période de trois mois au maximum sur le territoire des autres Parties Contractantes, pour autant qu'ils remplissent les conditions d'entrée visées à l'article 5, paragraphe 1, points a), c) et e), et qu'ils ne figurent pas sur la liste de signalement nationale de la Partie Contractante concernée. et, qu'aux termes de son article 23 : 1. L'étranger qui ne remplit pas ou ne remplit plus les conditions de court séjour applicables sur le territoire de l'une des Parties contractantes doit en principe quitter sans délai les territoires des Parties contractantes. 2. L'étranger qui dispose d'un titre de séjour ou d'une autorisation de séjour provisoire en cours de validité délivrés par une autre Partie Contractante, doit se rendre sans délai sur le territoire de cette Partie Contractante. 3. Lorsque le départ volontaire d'un tel étranger n'est pas effectué ou lorsqu'il peut être présumé que ce départ n'aura pas lieu (...), l'étranger doit être éloigné du territoire de la Partie contractante sur lequel il a été appréhendé, dans les conditions prévues par le droit national de cette Partie contractante ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces stipulations et dispositions que peuvent faire l'objet d'une reconduite à la frontière, les étrangers non ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne, en provenance directe d'un Etat partie à la convention d'application de l'accord de Schengen, qui ne peuvent justifier être entrés sur le territoire métropolitain en se conformant aux exigences définies aux articles 5 et 21 de la convention c'est-à-dire être en possession d'un document permettant le franchissement de la frontière et le séjour et d'un document de voyage, en cours de validité ;

Considérant que M. X, ressortissant moldave, a été interpellé le 21 janvier 2008 au cours d'un contrôle d'identité ; que par arrêté du 22 janvier 2008, le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES a décidé sa reconduite à la frontière, au motif tiré de son entrée irrégulière sur le territoire français ; que M. X, qui a présenté, lors de son interpellation, le titre de séjour en cours de validité qui lui a été délivré par les autorités portugaises, n'a pas été en mesure de présenter son passeport ; qu'en se bornant à produire une photocopie peu lisible de ce document qu'il allègue avoir laissé au Portugal, M. X ne justifie pas être entré et avoir séjourné régulièrement en France ; que dès lors contrairement à ce qu'a jugé le juge délégué du tribunal administratif de Toulouse, le PREFET DES PYRENNEES-ATLANTIQUES a pu légalement se fonder sur les dispositions précitées de l'article L. 511-1 II 1er du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour prononcer la mesure de reconduite à la frontière litigieuse ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant que par un arrêté en date du 3 octobre 2007 régulièrement publié au recueil des actes administratifs en date du 18 octobre 2007 le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES a donné délégation à M. Christian Gueydan secrétaire général de la préfecture des Pyrénées-Atlantiques à l'effet de signer notamment les arrêtés de reconduites à la frontière et les décisions fixant le pays d'origine ; que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte manque en fait ;

Considérant que l'arrêté en date du 22 janvier 2008 par lequel le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES a décidé la reconduite à la frontière de M. X, qui n'avait pas à indiquer en détail la situation privée et familiale de l'intéressé, contient les indications de fait et de droit qui en constituent le fondement ; que par suite, le dite arrêté est suffisamment motivé ;

Considérant que M. X soutient que la décision attaquée est entachée d'illégalité interne en ce qu'elle n'indique pas les voies et délais de recours pouvant être exercés à son encontre ; mais, considérant que le défaut d'indication des voies et délais de recours n'est pas de nature à entacher d'illégalité les décisions administratives ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bienêtre économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que M. X établit bénéficier d'un titre de séjour en cours de validité délivré par les autorités portugaises, allègue travailler en Espagne mais vivre au Portugal, marié religieusement à une portugaise avec laquelle il a acheté un bien immobilier et a des enfants de nationalité portugaise ; que toutefois M. X, de nationalité moldave, entré irrégulièrement sur le territoire Français afin de rejoindre l'Espagne, n'établit pas être dépourvu de tout lien familial en Moldavie et n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il a bien une vie privée et familiale au Portugal ; que dès lors, M. X n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué porte une atteinte manifestement disproportionnée à son droit à une vie familiale et privée en ordonnant sa reconduite à la frontière et en fixant la Moldavie comme pays de renvoi ; qu'en tout état de cause, aucune disposition ou stipulation ne faisait obligation de demander aux autorités portugaises de prendre en charge M. X en situation irrégulière en France ;

Sur la légalité de la décision de placement en rétention administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Le placement en rétention d'un étranger dans les locaux de l'administration pénitentiaire peut être ordonné lorsque cet étranger : (...) 3° soit, faisant l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière pris en application des articles L. 511-1 à L. 511-3 et édicté moins d'un an auparavant, (...) ne peut quitter immédiatement le territoire français ;

Considérant, en premier lieu, que la décision du 22 janvier 2008 par laquelle le PREFET DES PYRENNEES-ATLANTIQUES a ordonné le placement en rétention administrative de M. X, précise que l'intéressé a fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière, qu'il se trouve en situation irrégulière sur le territoire français, qu'il ne peut le quitter immédiatement et qu'il n'est pas en possession d'un passeport régulier ; que cet arrêté est par suite suffisamment motivé ;

Considérant, en second lieu, que si M. X a fait valoir devant le juge de première instance qu'il justifiait de garanties de représentation suffisantes étant titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, et d'une photocopie de son passeport notamment, le PREFET a pu valablement, pour estimer que ces garanties de présentations étaient insuffisantes, se fonder sur le fait que M. X n'était pas en mesure de produire un passeport original en cours de validité ; que, dès lors, le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, prononcer le placement en rétention administrative de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 22 janvier 2008 décidant la reconduite à la frontière de M. X et fixant le pays de renvoi et par voie de conséquence, sa décision du même jour ordonnant le placement en rétention de l'intéressé ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions du PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES tendant au remboursement des frais de procès de première instance qu'il a dû verser à M. X en exécution du jugement.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 25 janvier 2008 est annulé.

Article 2 : Les conclusions du PREFET fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La demande de M. X est rejetée.

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N° 08BX00302


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 08BX00302
Date de la décision : 03/07/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Dominique FLECHER-BOURJOL
Rapporteur public ?: M. VIE

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2009-07-03;08bx00302 ?
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