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30/07/2009 | FRANCE | N°08BX02803

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 30 juillet 2009, 08BX02803


Vu la requête, enregistrée le 12 novembre 2008, présentée pour Mlle Delphine X, demeurant ..., par Me Pepin ; Mlle X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802345 du 19 septembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 avril 2008 du préfet de la Haute-Garonne lui opposant un refus de délivrance d'un titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'

enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour mention v...

Vu la requête, enregistrée le 12 novembre 2008, présentée pour Mlle Delphine X, demeurant ..., par Me Pepin ; Mlle X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802345 du 19 septembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 avril 2008 du préfet de la Haute-Garonne lui opposant un refus de délivrance d'un titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour mention vie privée et familiale dans un délai de trente jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juillet 2009 :

- le rapport de Mme Jayat, président assesseur,

- et les conclusions de M. Lerner, rapporteur public ;

Considérant que Mlle X, de nationalité haïtienne, est entrée en France le 20 septembre 2004 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour en vue de poursuivre des études ; que, le 5 novembre 2004, il lui a été délivré un titre de séjour mention étudiant , renouvelé deux fois ; qu'elle a formulé, le 17 septembre 2007, une nouvelle demande de titre de séjour ; que, par arrêté du 25 avril 2008, le préfet de la Haute-Garonne lui a opposé un refus, assorti d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français et fixant Haïti comme pays à destination duquel elle serait éloignée faute d'un départ volontaire dans le délai d'un mois ; que Mlle X fait appel du jugement du 19 septembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 25 avril 2008 ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

Considérant que M. Créze, secrétaire général de la préfecture de la Haute-Garonne, a reçu délégation du préfet, par arrêté du 2 janvier 2008 publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, à l'effet de signer tous actes, arrêtés, décisions et circulaires relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Haute-Garonne, à l'exception des arrêtés de conflit ; que les termes de cet arrêté de délégation ne manquent ni de clarté ni de précision ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée manque en fait ;

Considérant que, lors de la présentation de sa demande de titre de séjour, Mlle X a précisé qu'elle était précédemment titulaire d'un titre de séjour étudiant , a coché une case changement de statut sans préciser quel statut elle souhaitait obtenir, a indiqué qu'elle demandait un titre de séjour pour faire des études et pour circuler légalement , a joint au formulaire de demande une promesse d'embauche en contrat d'apprentissage et n'a pas fait état d'une inscription dans un établissement d'enseignement qui aurait pu lui ouvrir droit au renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiante ; qu'elle ne s'est pas prévalue spécifiquement de ses attaches en France ; que, comme l'a jugé le tribunal, l'administration a pu estimer que l'intéressée demandait la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salariée et non un titre de séjour mention vie privée et familiale ; qu'au demeurant, et ainsi que l'a également relevé le tribunal, le préfet de la Haute-Garonne a examiné la situation de Mlle X au regard de sa vie privée et familiale ; que le préfet ne peut être regardé comme s'étant mépris sur le contenu ou la portée de la demande de l'intéressée ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail (...) ; que ledit article L. 341-2 du code du travail, applicable en l'espèce, dispose que : Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger doit présenter, outre les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur, un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail (...) ; qu'aux termes de l'article R. 341-2 de ce code : L'autorisation de travail peut être constituée par l'un des documents suivants : (...) 3° Le titre de séjour portant la mention étudiant , en application du 3° de l'article L. 121-1 ou de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (...) 6° La carte de séjour temporaire portant la mention salarié , délivrée sur présentation d'un contrat de travail d'une durée égale ou supérieure à douze mois conclu avec un employeur établi en France, en application du 1° de l'article L. 313-10 du même code (...) ; que, selon les dispositions de l'article R. 341-2-3 du même code : Sous réserve des dispositions du cinquième alinéa de l'article L. 341-4, les contrats de travail mentionnés aux articles L. 117-1, L. 322-4-6 à L. 322-4-8, L. 322-4-10, L. 322-4-15, L. 322-4-17-3 et L. 981-1 ne permettent pas la délivrance de l'une des autorisations de travail mentionnées aux 2°, 4°, 5°, 6°, 7°, 8°, 9°, 12° et 13° de l'article R. 341-2 et ne peuvent être conclus par les titulaires de la carte de séjour temporaire mentionnés au 3° du même article (...) ; que l'article L. 117-1 du code du travail vise les contrats d'apprentissage ;

Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à un étranger souhaitant obtenir un titre de séjour salarié de produire un contrat de travail prévoyant une rémunération au moins égale au salaire minimum interprofessionnel de croissance mensuel ; que la circulaire du 22 août 2007 relative aux autorisations de travail, qui rappelle que les conditions d'emploi et de rémunération des travailleurs étrangers doivent être comparables à celles des autres salariés et que le contrat proposé peut être à temps plein ou à temps partiel, n'a pas pour objet et ne saurait avoir légalement pour effet de subordonner la délivrance d'un titre de séjour mention salarié à la condition que l'étranger justifie d'un contrat prévoyant une rémunération au moins égale au salaire minimum interprofessionnel de croissance mensuel correspondant à un emploi à temps plein ; que, par suite, en se fondant, pour rejeter la demande de Mlle X, sur la circonstance que le projet de contrat dont elle se prévalait stipulait une rémunération inférieure au salaire minimum interprofessionnel de croissance mensuel, le préfet a entaché sa décision d'une erreur de droit ;

Considérant, cependant, qu'il résulte des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du code du travail qu'un contrat d'apprentissage n'ouvre pas droit à la délivrance d'une carte de séjour mention salarié ; qu'ainsi que le reconnaît par ailleurs la requérante en appel, il résulte également de ces dispositions que le titre de séjour mention étudiant n'autorise pas un étranger à exercer en France dans le cadre d'un contrat d'apprentissage ; que, dès lors, le préfet de la Haute-Garonne pouvait légalement rejeter la demande de titre de séjour de Mlle X, analysée comme une demande de titre de séjour mention salarié , au motif que l'intéressée ne justifiait ni du contrat de travail ni de l'autorisation de travail prévus par l'article L. 341-2 du code du travail ; que ce motif justifiait à lui seul le refus opposé et qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur ce seul motif ;

Considérant que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ;

Considérant que Mlle X est entrée en France en 2004 à l'âge de 22 ans, qu'elle est célibataire et sans enfant et qu'elle n'a été autorisée à séjourner en France que pour la période durant laquelle elle justifiait y poursuivre des études ; qu'à supposer même qu'elle n'aurait plus de relations avec son père qui vit en Haïti, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait sans attaches personnelles dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à son entrée en France ; que, dans ces conditions, et alors même qu'elle a obtenu en France un certificat d'aptitude professionnelle de coiffure, que sa demi-soeur et son oncle y résident régulièrement depuis, respectivement, 1998 et 1991, que son jeune frère, entré en France quelques mois après elle, a obtenu un titre de séjour mention étudiant et que sa mère est décédée en 1998, le refus de séjour qui lui a été opposé ne peut être regardé comme portant à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés ;

Sur la légalité de la mesure d'obligation de quitter le territoire français :

Considérant que, comme il a été dit, M. Créze, secrétaire général de la préfecture de la Haute-Garonne, a régulièrement reçu délégation de signature ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la mesure contestée manque en fait ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté ;

Considérant qu'eu égard à la situation susrappelée de Mlle X, la mesure d'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, délégation de signature avait été régulièrement donnée au signataire de l'arrêté contesté ; que, par suite, la décision fixant le pays de destination n'est pas signée par une autorité incompétente ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions en injonction :

Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de la requérante tendant à ce qu'il soit ordonné au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer sous astreinte un titre de séjour ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au titre des frais de l'instance non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mlle X est rejetée.

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N° 08BX02803


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 08BX02803
Date de la décision : 30/07/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BRUNET
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: M. LERNER
Avocat(s) : PEPIN

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2009-07-30;08bx02803 ?
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