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20/10/2009 | FRANCE | N°09BX00020

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 20 octobre 2009, 09BX00020


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour les 5 janvier 2009 et 25 février 2009, présentés pour le DEPARTEMENT DE L'INDRE, représenté par le président du conseil général en exercice, par Me Vier, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ;

Le DEPARTEMENT DE L'INDRE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0700815 du 30 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Limoges a annulé, à la demande du groupement Martin-Jacquet, la décision de la commission d'appel d'offres en date du 19 décembre 2

006 et l'a condamné à verser au groupement Martin-Jacquet une somme de 72 337 e...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour les 5 janvier 2009 et 25 février 2009, présentés pour le DEPARTEMENT DE L'INDRE, représenté par le président du conseil général en exercice, par Me Vier, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ;

Le DEPARTEMENT DE L'INDRE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0700815 du 30 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Limoges a annulé, à la demande du groupement Martin-Jacquet, la décision de la commission d'appel d'offres en date du 19 décembre 2006 et l'a condamné à verser au groupement Martin-Jacquet une somme de 72 337 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 mars 2007 ;

2°) de rejeter la demande présentée par le groupement Martin-Jacquet devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge du groupement Martin-Jacquet une somme de 3 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le décret n° 2004-15 du 7 janvier 2004 modifié portant code des marchés publics ;

Vu le décret n°2006-975 du 1er août 2006 portant code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 septembre 2009 ;

le rapport de M. Cristille, premier conseiller ;

les observations de Me Liet-Veaux pour le DEPARTEMENT DE L'INDRE et de Me Talbot pour le groupement Martin-Jacquet, pour la société coopérative ouvrière de production (SCOP) Martin Entreprise et pour la société Jacquet ;

et les conclusions de Mme Fabien, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;

Considérant que le DEPARTEMENT DE L'INDRE a conclu le 17 janvier 2007 un marché avec la société ROC visant la restauration des pierres de façade du bâtiment des archives départementales ; que par jugement du 30 octobre 2008, le Tribunal administratif de Limoges, saisi par le groupement Martin-Jacquet dont l'offre avait été rejetée, a d'une part, annulé la délibération du 19 décembre 2006 par laquelle la commission d'appel d'offres a retenu l'offre de la société ROC et d'autre part, condamné le DEPARTEMENT DE L'INDRE à verser au groupement Martin-Jacquet une somme de 72 337 euros en réparation de son préjudice ; que le DEPARTEMENT DE L'INDRE relève appel de ce jugement ; que, par la voie de l'appel incident, le groupement Martin-Jacquet demande que le DEPARTEMENT DE L'INDRE soit condamné à lui verser la somme complémentaire de 12 682,16 euros au titre des frais exposés pour l'établissement de son offre ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le jugement attaqué, qui expose les raisons pour lesquelles le groupement Martin-Jacquet avait une chance sérieuse d'obtenir le marché et précise les modalités de calcul de l'indemnité, est suffisamment motivé ;

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne la décision de la commission d'appel d'offres du 19 décembre 2006 :

Considérant que l'article 5-2 du règlement de consultation du marché dispose que : Les offres qui ne contiendraient pas de certificat de visite, ou qui proposeront des pierres non-conformes aux prescriptions du C.C.T.P, seront jugées irrecevables ; qu'aux termes de l'article B.4.02.2 du cahier des clauses techniques particulières : Pierre de fourniture : pierre d'Ambrault dure ou tendre suivant sa destination ou pierre équivalente en termes de caractéristiques mécaniques et d'aspect visuel (...) A la remise de son offre l'entreprise précisera si elle possède un stock de Pierre d'Ambrault, le cubage disponible, et/ou la pierre de substitution, avec ses caractéristiques. Elle joindra impérativement des P.V de caractérisation des pierres ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des fiches techniques produites à l'appui de leur offre par la société ROC à qui le marché a été attribué et par le groupement Martin-Jacquet, que la pierre de Tervoux proposée à titre de substitution par la société ROC pour les zones tendres de la façade du bâtiment, qui a une capillarité de 12 à 15 g/cm3 et qui est de couleur crème, ne présente pas des caractéristiques mécanique et visuelle équivalentes à celles de la pierre d'Ambrault, qui a une capillarité de 11 g/cm3 et a un aspect de couleur blanchâtre ; qu'ainsi la commission d'appel d'offre n'a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, retenir que la société ROC proposait conformément aux dispositions précitées de l'article B. 4.02.02 du cahier des clauses techniques particulières une pierre de substitution équivalente à la pierre d'Ambrault ; que par suite c'est à bon droit que le Tribunal administratif de Limoges a annulé la décision de la commission d'appel d'offres du 19 décembre 2006 ;

En ce qui concerne l'indemnisation du groupement Martin-Jacquet :

Considérant que lorsqu'une entreprise candidate à l'attribution d'un marché public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce dernier, il appartient au juge de vérifier d'abord si l'entreprise était ou non dépourvue de toute chance de remporter le marché ; que, dans l'affirmative, l'entreprise n'a droit à aucune indemnité ; que, dans la négative, elle a droit en principe au remboursement des frais qu'elle a engagés pour présenter son offre ; qu'il convient ensuite de rechercher si l'entreprise avait des chances sérieuses d'emporter le marché ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société ROC et le groupement Martin-Jacquet ont été les seules entreprises à présenter une offre en réponse à l'avis de publicité lancé par le DEPARTEMENT DE L'INDRE ; que l'offre du groupement Martin-Jacquet a reçu la note de 17 sur 20 pour sa valeur technique alors que l'offre de la société ROC n'a obtenu que 13 sur 20 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le prix proposé par le groupement Martin-Jacquet qui n'excédait pas l'estimation du maître d'oeuvre aurait fait obstacle à ce que son offre puisse être retenue ; que, dès lors, c'est par une exacte appréciation des circonstances de l'espèce que le Tribunal administratif de Limoges a jugé que le groupement Martin-Jacquet avait été privé par la décision irrégulière de la commission d'appel d'offres d'une chance sérieuse d'obtenir le marché et pouvait, par suite, prétendre à être indemnisé de la totalité du manque à gagner qu'il a subi ;

Considérant que, eu égard à la marge bénéficiaire habituelle de ce type d'entreprises pour des travaux de cette nature qui s'établit à 7%, le tribunal administratif a fait une juste appréciation du manque à gagner subi par le groupement Martin-Jacquet en l'évaluant à la somme de 72 337 euros ;

Sur l'appel incident :

Considérant que les frais exposés par le groupement Martin-Jacquet pour l'établissement de son offre, en l'absence de stipulations contractuelles prévoyant leur prise en charge par le maître d'ouvrage, sont au nombre de ceux qui lui incombaient normalement d'engager pour obtenir l'attribution du marché et qui devaient trouver leur contrepartie dans la rémunération afférente à la réalisation de ce dernier ; qu'ainsi le groupement Martin-Jacquet n'est pas fondé à en demander l'indemnisation ; qu'il suit de là que son appel incident doit être rejeté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le DEPARTEMENT DE L'INDRE et le groupement Martin-Jacquet, par la voie de l'appel incident, ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a condamné le DEPARTEMENT DE L'INDRE à verser au groupement Martin-Jacquet la somme de 72 337 euros en réparation du préjudice subi par ce groupement du fait de la décision du DEPARTEMENT DE L'INDRE écartant l'offre qu'il a présentée ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du groupement Martin-Jacquet, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, la somme que le DEPARTEMENT DE L'INDRE demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du DEPARTEMENT DE L'INDRE, le versement au groupement Martin-Jacquet d'une somme de 1 500 euros au titre des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du DEPARTEMENT DE L'INDRE et les conclusions incidentes du groupement Martin-Jacquet sont rejetées.

Article 2 : Le DEPARTEMENT DE L'INDRE versera au groupement Martin-Jacquet une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

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09BX00020


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 09BX00020
Date de la décision : 20/10/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DUDEZERT
Rapporteur ?: M. Philippe CRISTILLE
Rapporteur public ?: Mme FABIEN
Avocat(s) : SCP VIER - BARTHÉLÉMY et MATUCHANSKY

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2009-10-20;09bx00020 ?
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