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09/02/2010 | FRANCE | N°09BX01640

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 09 février 2010, 09BX01640


Vu, I, sous le n° 09BX01640, la requête enregistrée au greffe de la Cour le 15 juillet 2009, présentée pour le RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN, dont le siège social est situé 31, avenue Beaudin, BP 229, à Limoges (87006) par Me Guitard, avocat ;

Le RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701218, en date du 14 mai 2009, du Tribunal administratif de Limoges, en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

2°) de condamner l'Etablissement français du sang à lui rembourser le montant des

prestations servies à M. Didier A d'un montant de 220 184,66 euros ainsi que l'inde...

Vu, I, sous le n° 09BX01640, la requête enregistrée au greffe de la Cour le 15 juillet 2009, présentée pour le RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN, dont le siège social est situé 31, avenue Beaudin, BP 229, à Limoges (87006) par Me Guitard, avocat ;

Le RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701218, en date du 14 mai 2009, du Tribunal administratif de Limoges, en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

2°) de condamner l'Etablissement français du sang à lui rembourser le montant des prestations servies à M. Didier A d'un montant de 220 184,66 euros ainsi que l'indemnité forfaitaire de 955 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etablissement français du sang la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu, II, sous le n° 09BX01641, la requête enregistrée le 15 juillet 2009, présentée pour M. Didier A et Mme Isabelle A, demeurant ..., par la SCP d'avocats Billy-Boissier-Baudon ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) la réformation du jugement n° 0701218, en date du 14 mai 2009, du Tribunal administratif de Limoges, d'une part, en ce qu'il a limité à 80 000 euros l'indemnité qu'il a condamné l'Etablissement français du sang à verser à M. A en réparation du préjudice que lui a causé la contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C, d'autre part, en ce qu'il a limité à 5 000 euros l'indemnité versée à Mme A en réparation de son préjudice moral ;

2°) la condamnation de l'Etablissement français du sang à payer à M. A les sommes suivantes : 65 347,78 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels, 409 915 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs, 20 000 euros au titre des incidences professionnelles, 5 000 euros au titre des frais divers, 4 500 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, 85 500 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, 50 000 euros au titre des souffrances endurées, 20 000 euros au titre du préjudice esthétique, 40 000 euros au titre du préjudice d'agrément, 30 000 euros au titre du préjudice sexuel, 150 000 euros au titre du préjudice de co-infection et 50 000 euros au titre du préjudice de contamination, soit au total la somme de 930 262,78 euros ;

3°) la condamnation de l'Etablissement français du sang à payer à Mme A la somme de 20 000 euros au titre de son préjudice moral augmentée des intérêts à compter de la saisine du tribunal administratif ;

4°) la mise à la charge de l'Etablissement français du sang de la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité des systèmes de santé ;

Vu la loi n°2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 janvier 2010,

le rapport de M. Valeins, président assesseur ;

les observations de Me Michaud pour l'Etablissement français du sang ;

et les conclusions de Mme Fabien, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;

Considérant que M. et Mme A interjettent appel du jugement en date du 14 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Limoges a limité à 80 000 euros la somme à verser par l'Etablissement français du sang à M. A en réparation du préjudice qui lui a été causé par sa contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C et à 5 000 euros l'indemnisation de Mme A en raison du préjudice moral qu'elle a subi du fait de la contamination de son époux ; que le RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN fait appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etablissement français du sang à lui rembourser les prestations qu'il a servies à M. A ; que ces requêtes étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;

Sur les préjudices subis par M. Didier A et sur les droits du RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN :

Considérant que le RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN exerce sur les réparations dues au titre du préjudice subi par M. A, le recours subrogatoire prévu à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; qu'il y a lieu de statuer poste par poste sur ce préjudice et sur les droits respectifs de la victime et du RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN, en application des dispositions de cet article telles qu'elles ont été modifiées par la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, qui s'appliquent à la réparation des dommages résultant d'évènements antérieurs à la date d'entrée en vigueur de cette loi dès lors que, comme en l'espèce, le montant de l'indemnité due à la victime n'a pas été définitivement fixé avant cette date ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial :

Quant aux dépenses de santé :

Considérant que le RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN justifie, par la production d'une liste détaillée de ses débours accompagnée d'une attestation elle-même précise du médecin-conseil régional certifiant que lesdits débours sont directement imputables à la contamination de M. A par le virus de l'hépatite C, avoir pris en charge des dépenses de santé pour le compte de son assuré d'un montant de 97 554,84 euros ; que les conclusions tendant à la condamnation de l'Etablissement français du sang à payer le surplus de cette somme sont irrecevables dès lors que ledit surplus n'a été demandé devant le tribunal administratif qu'après la clôture de l'instruction en première instance et correspond à des sommes déboursées plusieurs mois avant cette clôture ; que le RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant que statuant sur ce poste de préjudice il a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etablissement français du sang à lui rembourser lesdites dépenses à hauteur de 97 554,84 euros ;

Quant aux pertes de revenus :

Considérant que si, par la production de l'attestation du comptable de la société dont il était le co-gérant, M. A justifie avoir perçu des indemnités journalières durant les années 2004 à 2006, il n'établit pas que ces indemnités, dont le montant est très supérieur à celles dont le RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN demande le remboursement, résulteraient d'arrêts de travail trouvant leur origine dans l'hépatite C dont il est atteint, alors qu'il est constant que l'intéressé est hémophile et également contaminé par le VIH ; que, si M. A fait valoir que son état de santé va se dégrader et qu'il subit un préjudice résultant de la perte future de revenus professionnels, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que l'état de santé de l'intéressé n'est pas consolidé et que dans ces conditions ce chef de préjudice présente à la date du présent arrêt un caractère éventuel ; qu'il ne ressort pas de la reconnaissance d'incapacité au métier établie par le RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN, en date du 1er juillet 2009, produite par M. A que cette incapacité résulterait exclusivement de sa contamination par le virus de l'hépatite C ; que, dans ces conditions, M. A n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il ne l'a pas indemnisé de ce chef de préjudice ;

Considérant qu'au titre des pertes de revenus, le RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN demande la condamnation de l'Etablissement français du sang à lui rembourser les sommes de 3 573,13 euros correspondant aux indemnités journalières qu'il aurait versées à M. A et la somme actualisée à septembre 2009 de 40 401,09 euros ; que le RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN justifie, par la production précitée de la liste de ses débours accompagnée d'une attestation du médecin-conseil régional, du versement de ces sommes ; qu'en conséquence, le RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN est fondé à demander l'annulation du jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions relatives à ce chef de préjudice ;

Quant à l'incidence professionnelle :

Considérant que, si M. A soutient qu'il se trouve dans l'impossibilité de reprendre son travail dans les mêmes conditions que celles qu'il a connues avant sa contamination par le virus de l'hépatite C et que son état de santé entraîne une dévalorisation de ses compétences sur le marché de l'emploi, il n'établit pas que cette situation résulterait de sa seule contamination par le virus de l'hépatite C ;

Quant aux frais liés à la contamination :

Considérant que M. A n'apporte aucun justificatif de la réalité des dépenses de transport qu'il aurait effectuées et qui seraient nécessitées par sa contamination par le virus de l'hépatite C ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère personnel :

Considérant que M.A, aujourd'hui âgé de 55 ans, qui est hémophile et atteint du VIH, a été contaminé par le virus de l'hépatite C lors d'injections de médicaments dérivés du sang ; que cette contamination dont il supporte les conséquences depuis 19 ans, est à l'origine de la transplantation hépatique dont il a fait l'objet et a eu d'importantes répercussions sur sa vie personnelle et familiale du fait des traitements et hospitalisations qu'il a subis ; que l'intéressé est atteint de gynécomastie et d'asthénie à l'origine de troubles sexuels qui trouvent leur origine dans le traitement de l'hépatite C ; qu'eu égard aux troubles dans ses conditions d'existence, à son préjudice d'agrément, au taux d'incapacité permanente de 45 %, à son préjudice esthétique évalué par l'expert à 3/7, aux souffrances physiques qu'il a endurées de 4,5/7, le tribunal administratif n'a pas fait une insuffisante appréciation des préjudices à caractère personnel subis par M. A en les évaluant à 80 000 euros ;

Considérant que les préjudices invoqués par M. A de co-infection et de préjudice de contamination ne sont pas distincts de ceux déjà examinés et qui font l'objet de l'indemnisation ci-dessus ;

Sur le total des indemnités dues par l'Etablissement français du sang :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'Etablissement français du sang doit être condamné à verser au RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN une somme de 141 529,06 euros ;

Sur le préjudice subi par Mme A :

Considérant que le tribunal administratif n'a pas fait une insuffisante appréciation du préjudice moral subi par l'épouse de M. A du fait de la contamination de celui-ci en le fixant à 5 000 euros ;

Sur l'indemnité prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :

Considérant que le RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN a droit à la somme de 955 euros qu'il réclame au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; qu'il y a lieu de mettre cette somme à la charge de l'Etablissement français du sang ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etablissement français du sang, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. et Mme A demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etablissement français du sang la somme de 1 000 euros que demande le RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : L'Etablissement français du sang est condamné à verser au RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN les sommes de 141 529,06 euros et 955 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ainsi que 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 2 : Le jugement du 14 mai 2009 du Tribunal administratif de Limoges est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus de la requête du RÉGIME SOCIAL DES INDÉPENDANTS DU LIMOUSIN est rejeté.

Article 4 : La requête de M. et Mme A est rejetée.

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09BX01640, 09BX01641


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 09BX01640
Date de la décision : 09/02/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DUDEZERT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre VALEINS
Rapporteur public ?: Mme FABIEN
Avocat(s) : GUITARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-02-09;09bx01640 ?
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