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06/04/2010 | FRANCE | N°09BX01616

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 06 avril 2010, 09BX01616


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour par télécopie le 13 juillet 2009 et en original le 15 juillet 2009 sous le numéro 09BX01616 et le mémoire complémentaire, enregistré par télécopie le 19 octobre 2009 et en original le 21 octobre 2009, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE FORT DE FRANCE représenté par son directeur en exercice, ayant son siège BP 632 à Fort de France cedex (97261) par Me Didier Le Prado ;

Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE FORT DE FRANCE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0300380-070086 du 24 avri

l 2009 par lequel le Tribunal administratif de Fort de France l'a condamné à v...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour par télécopie le 13 juillet 2009 et en original le 15 juillet 2009 sous le numéro 09BX01616 et le mémoire complémentaire, enregistré par télécopie le 19 octobre 2009 et en original le 21 octobre 2009, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE FORT DE FRANCE représenté par son directeur en exercice, ayant son siège BP 632 à Fort de France cedex (97261) par Me Didier Le Prado ;

Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE FORT DE FRANCE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0300380-070086 du 24 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Fort de France l'a condamné à verser diverses indemnités à Mme Marie-Claude X, M. Gérard Y, M. Yann Y et Mme Sylvie Z en réparation du préjudice résultant pour eux du décès, le 31 janvier 2000, du jeune Medhi Y lors de son hospitalisation dans cet établissement hospitalier à la suite d'un accident de scooter des mers ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme Marie-Claude X, M. Gérard Y, M. Yann Y et Mme Sylvie Z ;

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Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 mars 2010,

le rapport de M. Dudézert, président ;

les observations de Me Lambert pour Mme X et M. Yann Y ;

les conclusions de Mme Fabien, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;

Considérant que le jeune Medhi Y, blessé à la suite d'un accident de scooter des mers, a été admis le 30 janvier 2000 au service des urgences du centre hospitalier du Lamentin ; qu'il a été transféré puis opéré au CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE FORT-DE-FRANCE, où il est décédé le 31 janvier 2000 ; que ce centre hospitalier relève appel du jugement n° 0300380-070086 du 24 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Fort-de-France l'a condamné à verser diverses indemnités à Mme Marie-Claude X, M. Gérard Y, Mme Sylvie Z et M. Yann Y, proches du défunt, en réparation de leurs préjudices ; que M. Gérard Y, père du défunt, agissant tant en son personnel qu'au nom de sa fille mineure Cloé, ainsi que sa compagne, Mme Sylvie Z, font appel incident de ce jugement en tant qu'il a limité à, respectivement, 22.000 euros et 4.000 euros, les sommes que le centre hospitalier a été condamné à leur verser, qu'ils estiment insuffisantes ; que Mme X et M. Yann Y forment également un appel incident afin de voir réévaluer leur préjudice ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des rapports d'expertise établis dans le cadre de la procédure pénale que la drépanocytose dont le jeune Medhi était atteint préalablement à son accident rendait nécessaire une surveillance et une prise en charge spécifique de ce patient en unité de soins intensifs ; que l'admission de celui-ci au service de réanimation a été expressément demandée par le médecin anesthésiste au sortir de l'opération de colectomie sigmoïdienne réalisée dans la nuit du 30 au 31 janvier 2000, en raison de la gravité du traumatisme et de l'état drépanocytaire ; que cette admission lui a été refusée en raison de l'absence de place disponible dans le service de réanimation ; qu'il ressort toutefois du procès-verbal d'audition du médecin, chef de ce service qu'une prise en charge en unité de réanimation est possible en toutes circonstances, même en cas d'occupation complète des lits ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, eu égard aux moyens dont disposait le centre hospitalier, c'est à bon droit que le tribunal administratif a considéré que le fait d'avoir privé le patient de la possibilité de bénéficier d'une surveillance et d'une prise en charge par le service de réanimation constituait un défaut dans l'organisation ou le fonctionnement du service qui engage la responsabilité de cet établissement ;

Considérant que dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu ; que la réparation qui incombe à l'établissement public hospitalier doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ; que, dès lors, le CHU DE FORT DE FRANCE est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a procédé à l'indemnisation intégrale du préjudice résultant de cette perte de chance ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des rapports d'expertise établis dans le cadre de la procédure pénale, que la surveillance et la prise en charge du patient dans l'unité de réanimation auraient permis de déceler au plus tôt les premiers signes cliniques et biologiques évocateurs soit d'un choc septique, soit d'un syndrome thoracique aigu et que des mesures de prévention auraient ainsi pu être prises permettant d'éviter soit l'oedème pulmonaire, soit un choc septique, voire les deux associés, qui sont à l'origine du décès du jeune Medhi ; qu'ainsi, la faute commise par le CHU DE FORT DE FRANCE a entraîné pour la victime une importante perte de chance de se soustraire au risque qui s'est finalement réalisé, qui doit être fixée à 80 % ;

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le tribunal administratif aurait fait une inexacte appréciation du préjudice moral subi par Mme Marie-Claude X et M. Gérard Y, parents du défunt, en l'évaluant à 18.000 euros chacun, du préjudice moral subi par Mme Sylvie Z, compagne du père du défunt en l'évaluant à 4.000 euros, du préjudice moral subi par M. Yann Y, frère cadet du défunt qui vivait sous le même toit que lui, en l'évaluant à 12.000 euros et du préjudice moral subi par Mlle Cloé Y, sa soeur en bas âge au moment du décès, en l'évaluant à 4.000 euros ; qu'eu égard à l'ampleur de la perte de chance, le CHU DE FORT DE FRANCE, qui ne conteste pas le montant de l'indemnité allouée à la mère du défunt au titre des frais d'obsèques qu'elle a supportés, doit être condamné à verser les sommes de 16.467,32 euros à Mme Marie-Claude X, 14.400 euros à M. Gérard Y pour son compte personnel et 3.200 euros pour le compte de sa fille mineure Cloé, 3.200 euros à Mme Sylvie Z ainsi que 9.600 euros à M. Yann Y ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le CHU DE FORT DE FRANCE est fondé à demander la réformation du jugement attaqué en tant seulement qu'il a déterminé le montant des indemnités dues à M. Y et autres ; que, par voie de conséquence, les conclusions d'appel incident présentées par ces derniers, tendant à la majoration des indemnités qui leur ont été allouées, doivent être rejetées ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du CHU DE FORT DE FRANCE, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, le versement à M. Y et autres de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Les sommes que le CHU DE FORT DE FRANCE a été condamné par l'article 2 du jugement attaqué à verser à Mme Marie-Claude X, à M. Gérard Y, à Mme Sylvie Z et à M. Yann Y, sont ramenées à, respectivement, 16.467,32 euros, 17.600 euros, 3.200 euros et 9.600 euros.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Fort de France du 24 août 2009 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions du CHU DE FORT DE France est rejeté.

Article 4 : Les conclusions d'appel incident et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, présentées par M. Gérard Y et autres, sont rejetées.

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09BX01616


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 09BX01616
Date de la décision : 06/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DUDEZERT
Rapporteur ?: M. Hervé VERGUET
Rapporteur public ?: Mme FABIEN
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-04-06;09bx01616 ?
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