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27/04/2010 | FRANCE | N°08BX00116

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 27 avril 2010, 08BX00116


Vu, enregistrée sous le n° 08BX00116 au greffe de la cour, la décision n°s 284899-285506 en date du 28 décembre 2007 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a :

1°) annulé l'article 2 de l'arrêt n° 01BX01207 en date du 28 juin 2005 de la cour administrative d'appel de Bordeaux réduisant les bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés auquel la SA DOMAINE CLARENCE DILLON, société anonyme, a été assujettie au titre des années 1990 et 1991 du montant du redressement sur amortissement des plantations et accordant décharge à la société de l'impôt su

r les sociétés correspondant à cette réduction de bases ;

2°) renvoyé l'aff...

Vu, enregistrée sous le n° 08BX00116 au greffe de la cour, la décision n°s 284899-285506 en date du 28 décembre 2007 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a :

1°) annulé l'article 2 de l'arrêt n° 01BX01207 en date du 28 juin 2005 de la cour administrative d'appel de Bordeaux réduisant les bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés auquel la SA DOMAINE CLARENCE DILLON, société anonyme, a été assujettie au titre des années 1990 et 1991 du montant du redressement sur amortissement des plantations et accordant décharge à la société de l'impôt sur les sociétés correspondant à cette réduction de bases ;

2°) renvoyé l'affaire devant ladite cour ;

Vu l'arrêt en date du 28 avril 2009 par lequel la cour, avant dire droit sur la requête de la SA DOMAINE CLARENCE DILLON dirigée contre le jugement n°s 960978-960979 du tribunal administratif de Bordeaux du 28 décembre 2000 en tant qu'il a rejeté sa demande de réduction des bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés au titre des années 1990 et 1991 du montant du redressement sur amortissement des plantations, a décidé de procéder à un supplément d'instruction à l'effet d'inviter ladite société à fournir à la cour, contradictoirement, tous les éléments de calcul relatifs à la composition et à la valeur de l'actif immobilisé corporel et incorporel amortissable du domaine du Château La Mission Haut-Brion à la date d'acquisition du domaine, autre que la marque viticole elle-même, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mars 2010 :

- le rapport de M. Pouzoulet, président-assesseur ;

- les observations de Me Vallat, pour la SA DOMAINE CLARENCE DILLON ;

- les observations de M. Meynard, pour le ministre du budget, des comptes publics et

de la réforme de l'Etat ;

- et les conclusions de M. Vié, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;

Considérant que la SA DOMAINE CLARENCE DILLON a acquis, en 1983, le domaine viticole du Château La Mission Haut-Brion, comprenant les terres et bâtiments d'exploitation, pour un prix de 57 710 390 F (8 797 892,20 euros) ; qu'elle a comptabilisé cette acquisition à l'actif de son bilan à hauteur de 40 308 090 F (6 144 928,70 euros) pour les immeubles non bâtis, montant qu'elle a réparti entre les plantations amortissables pour 24 549 000 F (3 742 471 euros) et les terrains non amortissables pour le surplus soit une somme de 15 759 090 F (2 402 457,70 euros) ;

Considérant que, par l'arrêt susvisé du 28 décembre 2007, le Conseil d'Etat a dit pour droit qu'une marque viticole acquise en même temps que l'exploitation viticole à laquelle elle est légalement attachée, eu égard au droit d'usage exclusif et sans limitation de durée qu'elle confère à son propriétaire, au haut degré de protection et au gain de parts de marché qu'elle implique, constitue un élément autonome de l'actif incorporel immobilisé qui, n'étant pas cessible par lui-même, ne peut donner lieu à une dotation annuelle sur un compte d'amortissements dès lors qu'il n'est pas possible de déterminer lors de son acquisition que ses effets bénéfiques prendront fin à une date déterminée ; que, le Conseil d'Etat a constaté que l'acquisition du domaine viticole du Château La Mission Haut-Brion comprenait nécessairement la marque viticole attachée audit domaine, élément incorporel non amortissable qui n'a cependant pas été comptabilisé en tant que tel à l'actif de la société ; que le Conseil d'Etat en a déduit qu'en se fondant sur l'absence de cessibilité des marques viticoles attachées à l'exploitation pour juger qu'elles n'étaient pas valorisables en tant qu'éléments incorporels autonomes de l'actif immobilisé de la SA DOMAINE CLARENCE DILLON et en les rattachant, par voie de conséquence, aux plantations de vignes amortissables, la cour avait commis une erreur de droit ; qu'il a annulé l'article 2 de l'arrêt de la cour réduisant les bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés de la SA DOMAINE CLARENCE DILLON au titre des années 1990 et 1991 du montant du redressement relatif à l'amortissement non admis des plantations ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et par l'effet de cette décision du Conseil d'Etat ainsi que par l'effet dévolutif de l'appel dont la cour se trouve saisie derechef, il lui appartient de statuer à nouveau sur le chef de redressement sur amortissement des plantations ;

Considérant qu'à défaut de pouvoir évaluer directement, ainsi qu'en conviennent les parties, la valeur de la marque viticole devant être exclue de la valeur de l'actif amortissable, il y a lieu de la déduire par différence entre le coût total de l'exploitation et celui des autres éléments dont le coût est connu ; qu'aucun élément au dossier ne permettant de remettre en question la valeur, non discutée au demeurant, pour laquelle les autres éléments tels que les immobilisations ont été inscrits au bilan, il y a lieu par conséquent de déduire la valeur de la marque viticole de celle des plantations à raison de laquelle la société est autorisée à déduire des amortissements pour la détermination de son bénéfice net, dès lors, qu'ainsi qu'il a été dit, la société a affecté une somme globale de 24 549 000 F (3 742 491 euros) à l'amortissement des plantations au titre des années 1990 et 1991 qui incluait à tort la valeur de l'élément incorporel que constituait la marque viticole ;

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code alors en vigueur : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : (...) / 2° Sauf s'ils sont pratiqués par une copropriété de navires, les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation (...) ; qu'aux termes de l'article 38 quinquies de l'annexe III au même code, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend : / Pour les immobilisations acquises à titre onéreux par l'entreprise, du coût d'acquisition c'est-à-dire du prix d'achat majoré des frais accessoires nécessaires à la mise en état d'utilisation du bien (...) ; qu'il appartient au contribuable de justifier tant du montant des amortissements qu'il entend déduire que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, la SA DOMAINE CLARENCE DILLON a comptabilisé les plantations amortissables du domaine acquis en 1983 pour une valeur de 24 549 000 F pour une superficie totale de 27 hectares 21 ares et 57 centiares, soit une valeur moyenne à l'hectare de 902 016 F (137 511,45 euros) à l'hectare ;

Considérant que la valeur amortissable des vignes doit être déterminée en prenant en compte le coût d'acquisition des plantations majoré des coûts de plantation et frais de mise en culture jusqu'à la première déclaration de récolte qui ne saurait être postérieure à la troisième année suivant la plantation, même si les vignes n'atteignent pas encore leur pleine maturité du point de vue quantitatif et qualitatif ; qu'aussi bien la société a pratiqué, comme c'est l'usage dans le secteur viticole, un amortissement au plus tard dans les trois années suivant la plantation ; que, par suite, la société ne saurait, pour déterminer la valeur de l'élément d'actif constitué par les vignes plantées, prétendre intégrer les éléments du prix de revient des récoltes du domaine et les frais d'exploitation exposés, jusqu'à ce que les vins aient atteint leur maturité et soient négociés aux prix conformes au niveau d'excellence attendu, sans introduire un aléa lié au caractère spéculatif du cours des vins du domaine qui n'a pas de rapport avec l'évaluation de l'actif ;

Considérant que les études menées par la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural en Gironde font ressortir une valeur des plantations en appellation Pessac-Léognan s'élevant à 45 512 euros à l'hectare en valeur 1983 si l'on retient le prix maximum à l'hectare des vignes sur la période de 2000 à 2007 et le prix maximum à l'hectare des terres à vignes sur la même période ; qu'en retenant une densité de 10 000 pieds à l'hectare, une étude du Centre de gestion agricole et rural d'Aquitaine publiée en décembre 2008 évalue à 49 665 euros le coût maximum à l'hectare pour des plantations viticoles AOC; que, sur la base des estimations qu'elle a produites, l'administration, en tenant compte de la qualité du domaine en litige, laquelle inclut le recours aux techniques manuelles d'exploitation, admet, dans le dernier état de ses écritures, un coût maximum des plantations arrêté à 50 000 euros à l'hectare, en valeur 1983, intégrant une valeur initiale des plantations ne pouvant excéder 30 000 euros à l'hectare, majorée des coûts de mise en culture qui représentent au plus 60% du coût de la plantation initiale ; que, par les documents qu'elle produit, la SA CLARENCE DILLON ne justifie pas avoir exposé, au cours de la période triennale initiale suivant la plantation, des frais de mise en culture en valeur 1983 excédant cette dernière évaluation ; que si la société conteste les termes de référence choisis par l'administration, elle n'en produit elle-même aucun qui lui soit plus favorable et ne produit aucun élément relatif aux conditions d'exploitation du domaine qui permettrait de valider une estimation supérieure ;

Considérant enfin, qu' il ne résulte de l'instruction du 30 décembre 2005 invoquée par la SA CLARENCE DILLON aucune interprétation différente de la loi fiscale dont elle pourrait se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales pour faire admettre une valorisation des plantations supérieure à celle retenue ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède qu'il y a lieu de retenir une valeur des plantations s'élevant à 50 000 euros à l'hectare ; qu'ainsi, la valeur totale des plantations doit être ramenée à 1 360 785 euros (8 926 164 F) et celle de la marque viticole doit être fixée à 2 381 686 euros (15 622 836 F) ;

Considérant que, par suite, la SA CLARENCE DILLON est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a sous-estimé de 30 000 euros la valeur de l'hectare de vignes plantées pour la détermination de la base de calcul des amortissements qu'elle était en droit de pratiquer au titre des années 1990 et 1991 ;

D E C I D E :

Article 1er : Le bénéfice net de la SA DOMAINE CLARENCE DILLON au titre des années 1990 et 1991 sera calculé après déduction d'un amortissement sur les plantations du domaine du Château La Mission Haut-Brion évaluées à 50 000 euros par hectare. Il est accordé décharge à la SA DOMAINE CLARENCE DILLON de l'impôt sur les sociétés correspondant à la réduction de base ainsi prononcée.

Article 2 : Le jugement du 28 décembre 2000 du tribunal administratif de Bordeaux est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessous.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande de la SA DOMAINE CLARENCE DILLON relatif au chef de redressement mentionné à l'article 1er ci-dessus est rejeté.

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N° 08BX00116


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 08BX00116
Date de la décision : 27/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : Mme FLECHER-BOURJOL
Rapporteur ?: M. Philippe POUZOULET
Rapporteur public ?: M. VIE
Avocat(s) : LINDNER - JAMIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-04-27;08bx00116 ?
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