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01/07/2010 | FRANCE | N°09BX02524

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, Juge des reconduites à la frontière, 01 juillet 2010, 09BX02524


Vu la requête, enregistrée le 2 novembre 2009, présentée pour M. Shazola X, actuellement retenu au centre de rétention de Cornebarrieu (31700), par Me Bréan ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09/4420 du 28 septembre 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Pas-de-Calais en date du 22 septembre 2009 décidant sa reconduite à la frontière, ainsi que la décision du même jour fixant l'Afghanistan comme pays de destination de la reco

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2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) de lui accorder l'aide juridict...

Vu la requête, enregistrée le 2 novembre 2009, présentée pour M. Shazola X, actuellement retenu au centre de rétention de Cornebarrieu (31700), par Me Bréan ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09/4420 du 28 septembre 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Pas-de-Calais en date du 22 septembre 2009 décidant sa reconduite à la frontière, ainsi que la décision du même jour fixant l'Afghanistan comme pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) de lui accorder l'aide juridictionnelle provisoire ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 600 € en application des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du président de la Cour en date du 1er octobre 2009 portant désignation de Mme Texier, président de chambre, en qualité de juge habilité à statuer en matière d'appel des jugements de reconduite à la frontière ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 signée le 19 juin 1990 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 juin 2010 :

* le rapport de Mme Texier, président de chambre ;

* et les conclusions de M. Lerner, rapporteur public ;

Sur l'aide juridictionnelle provisoire :

Considérant qu'il n'y a pas lieu d'admettre provisoirement le requérant au bénéfice de l'aide juridictionnelle, M. X ne justifiant pas avoir déposé une demande d'aide juridictionnelle auprès du Tribunal de grande instance de Bordeaux, malgré la demande qui lui a été faite par le greffe de la Cour le 16 novembre 2009 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 2 de la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985, signée le 19 juin 1990 : 1. Les frontières intérieures peuvent être franchies en tout lieu sans qu'un contrôle des personnes soit effectué. (...) 3. La suppression du contrôle des personnes aux frontières intérieures ne porte atteinte ni aux dispositions de l'article 22, ni à l'exercice des compétences de police par les autorités compétentes en vertu de la législation de chaque Partie contractante sur l'ensemble de son territoire, ni aux obligations de détention, de port et de présentation de titres et documents prévues par sa législation (...) ; qu'en vertu de l'article 5 de ladite convention d'application : 1. Pour un séjour n'excédant pas trois mois, l'entrée sur les territoires des Parties contractantes peut être accordée à l'étranger qui remplit les conditions ci-après : (...) c) Présenter, le cas échéant, les documents justifiant de l'objet et des conditions du séjour envisagé et disposer des moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays de provenance ou le transit vers un État tiers dans lequel son admission est garantie, ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens (...) ; que selon l'article 19 de ladite convention d'application : 1. Les étrangers titulaires d'un visa uniforme qui sont entrés régulièrement sur le territoire de l'une des Parties contractantes peuvent circuler librement sur le territoire de l'ensemble des Parties contractantes pendant la durée de validité du visa, pour autant qu'ils remplissent les conditions d'entrée visées à l'article 5, paragraphe 1, points a, c, d et e (...) ; qu'enfin, l'article 23 de ladite convention d'application prévoit que : 1. L'étranger qui ne remplit pas ou ne remplit plus les conditions de court séjour applicables sur le territoire de l'une des Parties contractantes doit en principe quitter sans délai les territoires des Parties contractantes. (...) 3. Lorsque le départ volontaire d'un tel étranger n'est pas effectué ou lorsqu'il peut être présumé que ce départ n'aura pas lieu (...), l'étranger doit être éloigné du territoire de la Partie contractante sur lequel il a été appréhendé, dans les conditions prévues par le droit national de cette Partie contractante (...) ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) II. L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ; qu'en vertu de l'article L. 511-2 du même code : Les dispositions du 1° du II de l'article L. 511-1 sont applicables à l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un État membre de l'Union européenne : a) S'il ne remplit pas les conditions d'entrée prévues à l'article 5 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ; b) Ou si, en provenance directe du territoire d'un État partie à cette convention, il ne peut justifier être entré sur le territoire métropolitain en se conformant aux stipulations de ses articles 19, paragraphe 1 ou 2, 20, paragraphe 1, et 21, paragraphe 1 ou 2 ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces stipulations et dispositions que peuvent faire l'objet d'une reconduite à la frontière, sur le fondement des dispositions précitées du b) de l'article L. 511-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les étrangers non ressortissants d'un État membre de la Communauté européenne, en provenance directe du territoire d'un État partie à la convention d'application de l'accord de Schengen, qui ne peuvent justifier être entrés sur le territoire métropolitain en se conformant aux exigences définies à l'article 5 de la convention, notamment celles du c) du paragraphe 1 dudit article relatives à la présentation des documents justificatifs de l'objet et des conditions de séjour ainsi qu'à la disposition de moyens de subsistance suffisants ;

Considérant qu'aucune des stipulations de la convention d'application de l'accord de Schengen ne prive les autorités de l'État où se trouve l'étranger de vérifier la régularité de la situation de celui-ci et de prendre une mesure de reconduite à la frontière à l'égard de celui qui ne remplit pas ou ne remplit plus les conditions de séjour prévues par la convention ; que les stipulations de la convention n'interdisent pas davantage au préfet de décider de reconduire à la frontière un étranger entré depuis moins de trois mois sur le territoire d'un État partie à la convention ;

Considérant que M. X, de nationalité afghane, qui est entré en France en provenance de Grèce et d'Italie avec l'intention de gagner l'Angleterre, sans être muni d'un passeport revêtu d'un visa l'y autorisant, ne justifie pas être entré régulièrement sur le territoire national, ni être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'il relevait ainsi de la situation prévue par les dispositions précitées du 1° du II de l'article L. 511-1 et de l'article L. 511-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant que, par voie de conséquence, le préfet n'était pas tenu, contrairement à ce que soutient M. X, de recourir à la procédure prévue à l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour ordonner sa reconduite à la frontière ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 2 de l'arrêté n° 09-10-09 de délégation du préfet du Pas-de-Calais du 2 février 2009, régulièrement publié au recueil spécial n° 6 des actes administratifs de la préfecture du Pas-de-Calais du 2 février 2009 : Délégation est donnée à M. Cédric Verline, chef du pôle étrangers, à l'effet de signer : (...) arrêtés de reconduite à la frontière des ressortissants étrangers (...) ; que cet article 2 ne subordonne pas l'exercice de la délégation qu'il prévoit à l'absence ou à l'empêchement du délégant ; qu'ainsi, M. Verline, signataire de l'arrêté en litige, était régulièrement habilité pour ce faire, alors même que M. Sudrié, directeur de la citoyenneté et des libertés publiques, n'aurait pas été absent ou empêché ;

Considérant, en troisième lieu, que l'arrêté en litige comporte les éléments de fait et de droit sur lesquels il se fonde ; qu'il est ainsi suffisamment motivé ;

Considérant, en quatrième lieu, que, comme l'a estimé le premier juge, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ne se soit pas livré à un examen particulier de l'ensemble de la situation de M. X ; qu'en effet, l'arrêté en litige fait notamment référence aux déclarations du requérant selon lesquelles il serait marié et père de quatre enfants résidant en Afghanistan ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 4 du protocole additionnel n° 4 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Les expulsions collectives d'étrangers sont interdites ; que, comme il a été dit, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en litige a été pris au vu d'un examen objectif de la situation particulière de M. X ; que, dès lors, il ne saurait utilement se prévaloir de ce que d'autres mesures de reconduite à la frontière auraient été prononcées à l'encontre d'étrangers de nationalité afghane le même jour que celui où a été pris l'arrêté en litige, pour soutenir que les stipulations précitées auraient été méconnues ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, que la décision en litige comporte les éléments de fait et de droit sur lesquels elle se fonde ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; qu'en vertu de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1º À destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Commission des recours des réfugiés lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2º Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3º Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Considérant que M. X ne démontre pas, par la seule évocation de la situation générale en Afghanistan, être personnellement exposé à des risques graves en cas de retour dans son pays d'origine ; que la décision du 22 septembre 2009 fixant le pays de destination ne méconnaît donc pas l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. X n'est pas admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : La requête de M. X est rejetée.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 09BX02524
Date de la décision : 01/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marie-Jeanne TEXIER
Rapporteur public ?: M. LERNER
Avocat(s) : BREAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-07-01;09bx02524 ?
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