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15/07/2010 | FRANCE | N°09BX00031

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 15 juillet 2010, 09BX00031


Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 5 janvier 2009, la requête présentée pour la SELARL MALMEZAT-PRAT, en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET, dont le siège est 48 rue Calvé à Bordeaux (33000), par la SELARL Huglo Lepage et associés conseil ; la SELARL MALMEZAT-PRAT, en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602682 du 6 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrê

té du 13 octobre 2006 du préfet de la Charente-Maritime prononçant le...

Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 5 janvier 2009, la requête présentée pour la SELARL MALMEZAT-PRAT, en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET, dont le siège est 48 rue Calvé à Bordeaux (33000), par la SELARL Huglo Lepage et associés conseil ; la SELARL MALMEZAT-PRAT, en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0602682 du 6 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 octobre 2006 du préfet de la Charente-Maritime prononçant le retrait de la consommation humaine et l'enlèvement en vue de leur destruction des produits, portant la marque d'identification 17 077 002, fabriqués, conditionnés ou livrés après le 30 septembre 2006 par l'établissement de la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET sis sur le territoire de la commune de Cercoux ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 juin 2010 :

- le rapport de Mme Viard, président-assesseur ;

- les observations de Me Kounkou, pour le Groupe Comptoir Paysan ;

- les observations de M. Vidal et de la représentante des salariés du Groupe Comptoir Paysan ;

- et les conclusions de M. Lerner, rapporteur public ;

La parole ayant à nouveau été donnée aux parties ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 18 juin 2010, présentée pour la SAS Holding Comptoir Paysan Finances ;

Considérant que la SELARL MALMEZAT-PRAT, en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET, a contesté devant le Tribunal administratif de Poitiers l'arrêté du 13 octobre 2006 par lequel le préfet de la Charente-Maritime a ordonné le retrait de la consommation humaine et l'enlèvement en vue de la destruction des produits fabriqués, conditionnés ou livrés par l'établissement qu'elle exploite dans ce département sur le territoire de la commune de Cercoux portant la marque d'identification 17 077 002 sur les étiquetages ou conditionnements ; qu'elle fait appel du jugement qui a rejeté sa demande ;

Sur l'intervention de la SAS Holding Comptoir Paysan Finances et de la CP Suisse Holding SA :

Considérant que les conclusions présentées par la SAS Holding Comptoir Paysan Finances, actionnaire de la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET, et la CP Suisse Holding SA, qui exploite la marque internationale Comptoir Paysan , tendent à l'annulation du jugement attaqué et de l'arrêté du 14 septembre 2006 ; que si ces sociétés n'ont pas été parties à l'instance devant le Tribunal administratif de Poitiers, elles ont intérêt, en leurs qualités respectives de propriétaire des actions de la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET et d'exploitant de la marque internationale Comptoir Paysan , laquelle est apposée sur les produits fabriqués par l'établissement de la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET sis à Cercoux, à l'annulation de l'arrêté et du jugement attaqué ; qu'il y a lieu, par suite, d'admettre leur intervention au soutien des conclusions de la requête présentée par la SELARL MALMEZAT-PRAT, en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : La décision mentionne que l'audience a été publique, sauf s'il a été fait application des dispositions de l'article L. 731-1. Dans ce dernier cas, il est mentionné que l'audience a eu lieu ou s'est poursuivie hors la présence du public. Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application (...) ; que le jugement indique, contrairement à ce que soutient la requérante, que la SELARL MALMEZAT-PRAT représente la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET, en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire, et non Me Sautarel ; que, par suite, l'irrégularité alléguée manque en fait ;

Considérant, en second lieu, que si la SAS Holding Comptoir Paysan Finances et la CP Suisse Holding SA soutiennent qu'en ne leur communiquant la procédure et en ne leur notifiant pas le jugement, les premiers juges ont méconnu les articles 3, 5, 6, 7 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'une part, l'arrêté attaqué ordonnait le retrait de la consommation humaine et l'enlèvement en vue de la destruction des produits fabriqués, conditionnés ou livrés par la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET, d'autre part, la mise en cause de ces sociétés n'a pas été demandée par les parties au procès, et enfin celles-ci n'ont pas formé d'intervention spontanée ; que, par suite, les premiers juges n'ont commis aucune irrégularité au regard des stipulations des articles 3, 5, 6, 7 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ne leur communiquant pas la procédure et en ne leur notifiant pas le jugement attaqué ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET n'a soulevé, dans le délai de recours contentieux de deux mois courant à l'encontre de l'arrêté attaqué, que des moyens de légalité interne ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a considéré que les moyens tirés du défaut de motivation de cette décision et du non respect de la procédure contradictoire relevaient d'une cause juridique nouvelle présentée tardivement et les ont écartés comme étant irrecevables ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté attaqué a, en application des dispositions précitées, régulièrement été pris et notifié à l'encontre de la personne morale exploitant l'établissement dont s'agit et non à l'encontre de la SAS Holding Comptoir Paysan Finances et la CP Suisse Holding SA, lesquelles n'exploitent pas cet établissement ;

Considérant, en troisième lieu, que, s'agissant d'une mesure de police administrative, les moyens invoqués tirés de la violation des stipulations des articles 5, 6, 7 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés comme inopérants ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 232-1 du code rural applicable à la date de l'arrêté en litige : Lorsqu'un exploitant du secteur alimentaire ou du secteur de l'alimentation animale n'a pas respecté les obligations qui lui sont faites par les dispositions des articles 19 ou 20 du règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002, l'autorité administrative compétente peut ordonner, en utilisant notamment les informations issues des procédures de traçabilité que l'exploitant est tenu de mettre à sa disposition, la destruction, le retrait, la consignation ou le rappel en un ou plusieurs lieux du ou des lots de produits d'origine animale, de denrées alimentaires en contenant ou d'aliments pour animaux ou toute autre mesure qu'elle juge nécessaire (...) ; qu'aux termes de l'article 19 du règlement européen susmentionné : 4. Les exploitants du secteur alimentaire collaborent avec les autorités compétentes en ce qui concerne les actions engagées pour éviter ou réduire les risques présentés par une denrée alimentaire qu'ils fournissent ou ont fournie ;

Considérant que, par arrêté du 14 septembre 2006, le préfet de la Charente-Maritime a prononcé l'arrêt des activités de fabrication, transformation, découpe, salaison à compter du 30 septembre 2006 de l'établissement exploité par la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET en raison des graves manquements constatés aux règles d'hygiène et du risque patent et aggravé que son fonctionnement présentait pour la santé publique ; que cet arrêté prévoyait que seuls pouvaient être commercialisés jusqu'au 31 octobre 2006, sur demande préalable et après autorisation, les produits confectionnés avant le 30 septembre présentant un contrôle libératoire favorable réalisé sur chaque lot de produit, l'entreprise devant pour cela adresser la liste complète des stocks au 30 septembre 2006, en précisant leur nature, puis soumettre au fur et à mesure les résultats des contrôles bactériologiques de chaque lot ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de deux bordereaux de livraison à la cantine municipale d'Artigues (Gironde) et au collège de Montendre (Charente-Maritime) en date des 3 et 5 octobre 2006, et des procès-verbaux dressés par la gendarmerie nationale, le 6 octobre 2006, lors de la perquisition effectuée à la demande du procureur de la République de Saintes sur des camions sortant de l'établissement exploité par la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET à Cercoux, que les marchandises livrées ne correspondaient pas à celles figurant sur l'état des stocks adressé par l'entreprise au directeur des services vétérinaires de la Charente-Maritime le 30 septembre 2006 ; qu'en outre, les listes des livraisons effectuées après le 30 septembre 2006, transmises par l'entreprise à l'administration, se sont avérées incomplètes ; que, dans ces conditions, la traçabilité des produits commercialisés par l'entreprise ne pouvait être assurée et l'administration n'était pas en mesure de vérifier que les produits portant la marque d'identification 17.077.002 étaient sans risques pour la santé publique ; que, dès lors, et même si des analyses bactériologiques effectuées le 3 octobre 2006, à l'initiative de l'entreprise, concluaient à un résultat satisfaisant et à une bonne qualité bactériologique de certains lots de produits fabriqués avant le 30 septembre 2006, le préfet de la Charente-Maritime n'a commis aucune erreur de droit ou de fait en estimant que les manquements relevés aux prescriptions contenues dans l'arrêté du 14 septembre 2006 précité ainsi qu'aux dispositions du 4 de l'article 19 du règlement n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 constituaient des dangers pour la santé publique justifiant le retrait de la consommation humaine et l'enlèvement en vue de leur destruction de tous les produits portant la marque d'identification 17.077.002, fabriqués, conditionnés ou livrés après le 30 septembre 2006 par l'établissement exploité à Cercoux par la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET ;

Considérant, en cinquième lieu, que l'arrêté en litige ne concerne pas l'ensemble des produits commercialisés par cette société mais seulement ceux qui portent sa marque d'identification, soit ceux qui ont été fabriqués ou conditionnés dans l'établissement dont s'agit ; que compte tenu de ce qui vient d'être dit ainsi que des manquements constatés aux règles d'hygiène et du risque patent et aggravé que le fonctionnement de cet établissement présentait pour la santé publique, à l'origine de sa fermeture à compter du 30 septembre 2006, cette mesure ne présente pas un caractère excessif et ne constitue pas, en tout état de cause, une atteinte aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en sixième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le retrait de la consommation humaine et l'enlèvement en vue de leur destruction de tous les produits portant la marque d'identification 17.077.002, fabriqués, conditionnés ou livrés après le 30 septembre 2006 par l'établissement exploité à Cercoux par la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET ait eu un autre objet que la protection de la santé publique et la sécurité du consommateur ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cette mesure aurait eu pour objet de nuire à l'entreprise ou à son dirigeant et serait ainsi constitutive d'un détournement de pouvoir doit être écarté ;

Considérant, en septième lieu, que la SAS Holding Comptoir Paysan Finances et la CP Suisse Holding SA se prévalent à l'encontre de l'arrêté attaqué, du défaut de motivation de l'arrêté du 14 septembre 2006 prononçant la fermeture de l'établissement de la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que cet arrêté indique précisément les graves manquements aux règles d'hygiène et le risque patent et aggravé que le fonctionnement de l'établissement présente pour la santé publique ; qu'ainsi, le seul moyen de légalité externe soulevé par voie d'exception à l'encontre de cet arrêté ne peut être accueilli ;

Considérant, en dernier lieu, que, par arrêt de ce jour, la Cour a écarté les moyens de légalité interne soulevés par la société requérante, par la SAS Holding Comptoir Paysan Finances et la CP Suisse Holding SA à l'encontre de l'arrêté du 14 septembre 2006 ; que, par suite, ces sociétés ne sont pas fondées à exciper, par les même moyens, de l'illégalité de cet arrêté à l'appui de leurs conclusions dirigées à l'encontre de l'arrêté du 13 octobre 2006 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu d'ordonner à l'administration de produire des analyses établissant le risque que présentaient pour la santé publique les produits concernés par l'arrêté en litige, que la SELARL MALMEZAT-PRAT, en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;

Sur le surplus des conclusions :

Considérant qu'eu égard à leur qualité d'intervenant, la SAS Holding Comptoir Paysan et la CP Suisse Holding SA ne peuvent présenter des conclusions distinctes de celles présentées par la requérante ; qu'ainsi, leurs conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à leur rembourser la totalité de la production saisie doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, les sommes demandées par la SELARL MALMEZAT-PRAT, en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET, et, en tout état de cause, celles demandées par la SAS Holding Comptoir Paysan Finances et la CP Suisse Holding SA au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de la SAS Holding Comptoir Paysan Finances et de la CP Suisse Holding SA est admise.

Article 2 : La requête présentée pour la SELARL MALMEZAT-PRAT, en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la SAS CHARCUTERIE BRILLOUET, et les conclusions présentées par la SAS Holding Comptoir Paysan Finances et la CP Suisse Holding SA sont rejetées.

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N° 09BX00031


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 09BX00031
Date de la décision : 15/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TEXIER
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre VIARD
Rapporteur public ?: M. LERNER
Avocat(s) : SELARL HUGLO LEPAGE ET ASSOCIES CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-07-15;09bx00031 ?
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