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15/07/2010 | FRANCE | N°09BX02171

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 15 juillet 2010, 09BX02171


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 8 septembre 2009, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901566 en date du 3 juillet 2009 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a, d'une part, annulé son arrêté en date du 3 mars 2009 rejetant la demande de titre de séjour de Mme Fatma A et assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français à destination du pays dont elle a la nationalité et, d'autre part, enjoint de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéd

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 8 septembre 2009, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901566 en date du 3 juillet 2009 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a, d'une part, annulé son arrêté en date du 3 mars 2009 rejetant la demande de titre de séjour de Mme Fatma A et assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français à destination du pays dont elle a la nationalité et, d'autre part, enjoint de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation administrative dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement ;

2°) de rejeter la demande de Mme A ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 juin 2010 :

- le rapport de M. Braud, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Lerner, rapporteur public ;

Considérant que Mlle B, ressortissante algérienne, est entrée en France le 20 janvier 2001 à l'âge de 35 ans ; que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE lui a délivré en 2002 un certificat de résidence mention étudiant qui a été régulièrement renouvelé jusqu'au 7 octobre 2008 ; qu'entretemps, Mlle B a épousé en novembre 2004 M. A, ressortissant marocain ; que le 16 octobre 2008, Mme A a adressé au PREFET DE LA HAUTE-GARONNE une demande de changement de statut afin de bénéficier d'un certificat de résidence mention vie privée et familiale l'autorisant à travailler à temps plein ; que, par un jugement en date du 3 juillet 2009, le Tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 3 mars 2009 par lequel le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme A et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français à destination du pays dont elle a la nationalité ; que ce dernier relève appel de ce jugement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5) Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; que, pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

Considérant que si Mme A fait valoir qu'elle a séjourné régulièrement en France de 2002 à 2008, qu'elle y a exercé la profession d'aide-soignante, qu'elle est mariée à un ressortissant marocain, qu'elle est mère de deux enfants nés en France respectivement en 2004 et 2006 et qu'elle dispose de nombreuses attaches familiales en France où résident un frère et une soeur de nationalité française, un frère titulaire d'un certificat de résidence et des membres de sa belle-famille, il ressort des pièces du dossier que Mme A vit séparée de son mari depuis le 28 août 2007 et qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses parents ainsi que l'une de ses soeurs ; que si elle soutient qu'elle s'est fâchée avec sa mère et qu'elle n'a plus de nouvelles de son père depuis 1992, elle ne produit aucun élément à l'appui de ces allégations ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, et notamment eu égard aux conditions de son séjour en France, l'arrêté litigieux n'a pas porté au droit de Mme A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen invoqué par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE, que c'est à tort que le Tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 3 mars 2009 pour violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A devant le Tribunal administratif de Toulouse ;

Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté en date du 13 février 2009, régulièrement publié au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture du même jour, le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE a donné délégation de signature à Mme Françoise Souliman, secrétaire générale de la préfecture de la Haute-Garonne, à l'effet de signer tous actes, arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Haute-Garonne à l'exception des arrêtés de conflit ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué, qui est signé par Mme Souliman, aurait été signé par une autorité incompétente, manque en fait et doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté du 3 mars 2009 vise les textes dont il fait application, et notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les articles 6 et 9 de l'accord franco-algérien, et détaille la situation administrative et familiale de Mme A en indiquant notamment qu'elle ne produit aucun diplôme justifiant du sérieux de ses études, que son mari est en situation irrégulière et qu'elle ne justifie pas être dans l'impossibilité de poursuivre sa vie dans son pays d'origine où elle dispose d'attaches familiales ; qu'ainsi, l'arrêté litigieux mentionne les circonstances de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; que, par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que Mme A fait valoir que les erreurs entachant l'arrêté démontrent que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE n'a pas examiné sa situation avant de refuser de lui délivrer un certificat de résidence ; qu'il ressort cependant des termes de l'arrêté litigieux que, nonobstant certaines inexactitudes, le préfet s'est livré à un examen complet de sa situation ; que, par suite, le moyen tiré du défaut d'instruction de sa demande doit être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, que si, comme le soutient Mme A, l'arrêté du 3 mars 2009 est entaché d'erreurs concernant son âge lors de son arrivée en France, la nature de son visa, la nationalité de son époux et son inscription universitaire au titre de l'année scolaire 2008-2009, ces erreurs ne se rattachent pas aux motifs pour lesquels le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a décidé de l'éloigner à destination du pays dont elle a la nationalité ; que, dans ces conditions, ces erreurs, pour regrettables qu'elles soient, sont sans influence sur la légalité de l'arrêté en litige ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit, Mme A n'a été admise à séjourner en France que sous le couvert d'un certificat de résidence mention étudiant ; qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine et qu'elle vit séparée de son époux qui, par ailleurs, est en situation irrégulière ; qu'elle n'a en outre obtenu aucun diplôme durant ses études en France ; qu'à la date de l'arrêté litigieux, elle était sans emploi alors qu'elle exerçait en Algérie la profession de médecin ; qu'elle n'établit pas que, à la date de l'arrêté litigieux, que son état de santé nécessitait un suivi médical spécialisé ; que, dans ces circonstances, et alors même que ses deux enfants sont nés et scolarisés en France où elle a également des attaches familiales, l'arrêté en litige n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 dans sa rédaction issue du troisième avenant conclu le 11 juillet 2001 : (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 4. Au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins (...) ; qu'il résulte de ces stipulations que le ressortissant algérien qui exerce l'autorité parentale sur son enfant français mineur est en droit de se voir délivrer un certificat de résidence alors même qu'il ne subviendrait pas effectivement aux besoins de celui-ci ;

Considérant que la circonstance que les enfants de Mme A soient nés en France de parents algérien et marocain ne saurait avoir pour effet, à elle seule, de leur conférer la nationalité française ; qu'au contraire, il ressort des pièces du dossier, et notamment des documents de circulation pour étranger mineur des deux enfants, que ces derniers ont la nationalité marocaine ; que Mme A ne peut, par suite, utilement se prévaloir des stipulations précitées de l'article 6-4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté en date du 3 mars 2009 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de Mme A, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au PREFET DE LA HAUTE-GARONNE de lui délivrer un certificat de résidence doivent être rejetées ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que l'application combinée des dispositions de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser au conseil de Mme A la somme qu'elle demande sur le fondement de ces dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Toulouse en date du 3 juillet 2009 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Toulouse est rejetée.

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N° 09BX02171


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 09BX02171
Date de la décision : 15/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TEXIER
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. LERNER
Avocat(s) : ESCUDIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-07-15;09bx02171 ?
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