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07/09/2010 | FRANCE | N°09BX01221

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 07 septembre 2010, 09BX01221


Vu I°) sous le n°09BX01221, la requête sommaire et le mémoire complémentaire reçus au greffe de la Cour par télécopie respectivement les 27 mai et 17 juillet 2009 et par courrier les 2 juin et 20 juillet 2009 présentés pour le CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE, dont le siège est 13 avenue de l'interne Jacques Loeb à Bayonne (64 100) par Me Le Prado ;

Le CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE demande à la Cour :

1 ) d'annuler le jugement n°0601963 en date du 26 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Pau l'a condamné à verser à l'indivision B-A, ayants-droit de Mme

B épouse A la somme de 300 000 euros, à M. Mikel A et à Mlle Amaya A, agiss...

Vu I°) sous le n°09BX01221, la requête sommaire et le mémoire complémentaire reçus au greffe de la Cour par télécopie respectivement les 27 mai et 17 juillet 2009 et par courrier les 2 juin et 20 juillet 2009 présentés pour le CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE, dont le siège est 13 avenue de l'interne Jacques Loeb à Bayonne (64 100) par Me Le Prado ;

Le CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE demande à la Cour :

1 ) d'annuler le jugement n°0601963 en date du 26 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Pau l'a condamné à verser à l'indivision B-A, ayants-droit de Mme B épouse A la somme de 300 000 euros, à M. Mikel A et à Mlle Amaya A, agissant en leur nom propre, la somme de 18 000 euros chacun, à M. Mikel A et à Mlle Amaya A agissant au nom de leur père, décédé, la somme globale de 16 000 euros, à Mme Jeanine D et à M. Jean-François D la somme de 4 000 euros chacun, à Mme C épouse A la somme de 3 000 euros, à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Bayonne la somme de 1 363 490,15 euros ainsi que l'indemnité forfaitaire de gestion de 941 euros, l'a condamné, également, à supporter les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 900 euros TTC et, enfin, a mis à sa charge au bénéfice de l'indivision B-A, la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2 ) de rejeter la demande présentée par les consorts B A D et par la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne devant le Tribunal administratif de Pau ;

3 ) d'ordonner une nouvelle expertise ;

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Vu II°) sous le n° 09BX01564, la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 6 juillet 2009, présentée pour le centre hospitalier de Bayonne, dont le siège est 13 avenue de l'interne Jacques Loeb à Bayonne (64 100) par Me Le Prado ;

Le CENTRE HOSPITALIER demande à la Cour d'ordonner en application de l'article R. 811-17 du code de justice administrative qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du 26 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Pau l'a condamné à verser à l'indivision B-A, ayants-droit de Mme A, la somme de 300 000 euros, à M. Mikel A et à Mlle Amaya A agissant en leur nom propre la somme de 18 000 euros chacun, à M. Mikel A et à Mlle Amaya A agissant au nom de leur père la somme globale de 16 000 euros, à Mme Jeanine D et à M. Jean-François D la somme de 4 000 euros chacun, à Mme C épouse A la somme de 3 000 euros, à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Bayonne la somme de 1 363 490,15 euros ainsi que l'indemnité forfaitaire de gestion de 941 euros, l'a condamné, également, à supporter les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 900 euros TTC et, enfin, a mis à sa charge au bénéfice de l'indivision B-A, la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code civil ;

Vu le décret n° 98-255 du 31 mars 1998 portant application des dispositions des articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale aux régimes spéciaux mentionnés au titre Ier du livre VII dudit code ;

Vu l'arrêté du 1er décembre 2009 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 juin 2010 ;

- le rapport de M. Cristille, premier conseiller,

- les observations de Me Le Prado pour le CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE,

- et les conclusions de Mme Fabien, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;

Considérant que les deux requêtes susvisées n° 09BX01221 et n° 09BX01564 présentées pour le CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE visent à obtenir, pour la première, l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Pau du 26 mars 2009, pour la seconde, le sursis à l'exécution de ce même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le jugement du Tribunal administratif de Pau a répondu à l'ensemble des moyens dont il était saisi ; qu'il est ainsi suffisamment motivé au regard des exigences de l'article L. 9 du code de justice administrative ;

Sur la demande d'annulation du jugement du 26 mars 2009 :

Considérant que Mme Martine B épouse A a été hospitalisée le 26 mai 1999 au CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE en raison de fortes migraines et d'un état confusionnel ; que le diagnostic d'encéphalite méningée a été posé par les praticiens du centre hospitalier ; qu'après une phase d'amélioration et alors qu'elle était toujours hospitalisée, Mme A a été victime, le 8 juin 1999, d'une crise comitiale suivie d'un coma en décérébration ; que l'angiographie pratiquée le 1er juillet 1999 a révélé un anévrisme intracérébral rompu ; que les dommages cérébraux irréversibles consécutifs à la rupture de cet anévrisme ont laissé Mme A dans un état de coma végétatif chronique ; que le 9 septembre 1999, Mme A a été transférée au centre de rééducation de l'hôpital de Saint-Jean de Luz où elle est demeurée jusqu'à son décès, survenu le 28 juin 2007 ; que le Tribunal administratif de Pau a jugé que la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE était engagée à raison de l'erreur de diagnostic commise et a condamné le service hospitalier à verser aux consorts A-D la somme de 363 000 euros en réparation de l'ensemble de leurs préjudices, à la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne la somme de 1 363 490,15 euros en remboursement de ses débours ainsi que l'indemnité forfaitaire de gestion de 941 euros et a mis à sa charge les frais de l'expertise ordonnée par le Tribunal administratif de Pau, taxés à la somme de 900 euros ; que le CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE interjette appel de ce jugement ; que s'estimant insuffisamment indemnisés, les consorts B-A-D demandent par la voie de l'appel incident que l'indemnité qui leur a été allouée soit portée à la somme totale de 1 371 145,17 euros ; que, pour sa part, la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne demande la confirmation du jugement attaqué et présente des conclusions incidentes tendant à la revalorisation de l'indemnité forfaitaire prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale qui lui a été accordée en première instance ;

Sur la responsabilité et l'étendue de l'obligation de réparation :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le Tribunal administratif qu'après l'admission de Mme A au CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE, le 26 mai 1999, un diagnostic erroné d'encéphalite herpétique a été porté alors qu'à ce moment Mme A présentait probablement une fissuration d'anévrisme, préalable à la rupture proprement dite intervenue le 8 juin 1999 pendant l'hospitalisation de Mme A ; que s'il est constant que l'hémorragie cérébro-méningée est d'un diagnostic difficile, que l'établissement hospitalier a mis en oeuvre de nombreux moyens d'investigation approfondie, par scanner ou ponction lombaire et, enfin, que l'état de santé de la victime s'est, dans un premier temps au moins, amélioré sous l'effet des traitements administrés, il résulte, toutefois, de l'expertise que les médecins du CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE se sont orientés vers le diagnostic d'encéphalite herpétique sans aucune preuve matérielle et sans tenir compte des discordances qui existaient entre ce diagnostic et des éléments du tableau clinique présenté par Mme A, tel que les résultats de l'examen biologique pratiqué à la suite de la ponction lombaire et que cette erreur a privé la patiente de la possibilité de bénéficier en particulier d'un examen par angiographie qui aurait pu permettre de déceler et de traiter précocement l'anévrisme et d'éviter la survenue de la récidive d'hémorragie cérébrale avec les lésions irréversibles qui en ont résulté ; que l'erreur de diagnostic qui a compromis les chances de Mme A d'échapper aux complications dont elle a été victime constitue une faute de nature à engager la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE ; qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin de procéder à l'expertise complémentaire demandée, l'erreur de diagnostic est, comme l'a jugé à bon droit le Tribunal administratif de Pau, constitutive d'une faute qui engage la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE ;

Considérant, toutefois, que dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu ; que la réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ;

Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise que même décelé à temps rien n'établit que l'anévrisme aurait été curable compte tenu de sa localisation, que l'intervention chirurgicale sur un anévrisme, seul moyen de l'exclure suppose que les conditions artérielles et générales du patient soient satisfaisantes et qu'une telle intervention chirurgicale comporte des risques fonctionnels et vitaux importants ; que, dans ces conditions, l'erreur de diagnostic n'a entraîné pour l'intéressée qu'une perte de chance de guérison et d'échapper aux complications qui se sont produites ; que, par suite, la réparation qui incombe à l'établissement public hospitalier doit être évaluée à une fraction du dommage déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ; qu'il résulte de ce qui précède qu'en l'espèce le préjudice indemnisable doit être évalué à 80 % du dommage ; qu'il y a lieu de réformer le jugement dans cette mesure ;

Sur les droits à réparation de Mme A et le recours subrogatoire de la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant du III de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006 applicable aux évènements ayant occasionné des dommages survenus antérieurement à son entrée en vigueur et n'ayant pas donné lieu à une décision passée en force de la chose jugée : Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droit conserve contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre. / Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l'assuré ou à ses ayants droit les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de l'accident dans les conditions ci-après. / Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel. / Conformément à l'article 1252 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée. / Cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice ;

Considérant qu'en application de ces dispositions le juge, saisi d'un recours de la victime d'un dommage corporel et d'un recours subrogatoire d'un organisme de sécurité sociale doit, pour chacun des postes de préjudices patrimoniaux et personnels, déterminer le montant du préjudice en précisant la part qui a été réparée par des prestations de sécurité sociale et celle qui est demeurée à la charge de la victime ; qu'il lui appartient ensuite de fixer l'indemnité mise à la charge de l'auteur du dommage au titre du poste de préjudice en tenant compte, s'il a été décidé, du partage de responsabilité avec la victime ; que le juge doit allouer cette indemnité à la victime dans la limite de la part du poste de préjudice qui n'a pas été réparée par des prestations, le solde, s'il existe, étant alloué à l'organisme de sécurité sociale ;

Considérant qu'en l'absence de dispositions réglementaires définissant les postes de préjudice, il y a lieu, pour mettre en oeuvre la méthode sus-décrite, de distinguer, parmi les préjudices de nature patrimoniale, les dépenses de santé, les frais liés au handicap, les pertes de revenus, l'incidence professionnelle et scolaire et les autres dépenses liées à ce dommage ; que parmi les préjudices personnels, sur lesquels l'organisme de sécurité sociale ne peut exercer son recours que s'il établit avoir effectivement et préalablement versé à la victime une prestation réparant de manière incontestable un tel préjudice, il y a lieu de distinguer, pour la victime directe, les souffrances physiques et morales, le préjudice esthétique et les troubles dans les conditions d'existence, envisagés indépendamment de leurs conséquences pécuniaires ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial de Mme A :

Quant aux dépenses de santé :

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne justifie avoir supporté des frais d'hospitalisation pour un montant de 1 206 810,12 euros ; que le Centre hospitalier ne conteste pas utilement leur imputation aux dommages qu'il est tenu de réparer ; qu'en revanche, les consorts A-D n'établissent pas, par les pièces qu'ils produisent, qu'une somme de 16 557,17 euros serait restée à la charge de Mme A au titre du forfait hospitalier journalier acquitté pendant les années 2001 à 2005 et pour des frais de pharmacie ; que les conclusions qu'ils présentent au titre de ce chef de préjudice doivent, dès lors, être rejetées ; que, par suite, les dépenses de santé s'établissent à 1 206 810,12 euros ; qu'il résulte de ce qui a été dit que ces frais doivent, à hauteur de 80 % de leur montant, soit 965 448 euros, être mis à la charge de l'établissement public de santé ; que cette indemnité doit être allouée intégralement à la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne ;

Quant aux pertes de revenus :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que Mme A alors âgée de 49 ans et qui était salariée de la société du laboratoire photographique que dirigeait son époux a subi une période d'incapacité temporaire totale du 26 mai 1999 au 20 janvier 2006, date de la consolidation de son état de santé ; qu'elle est restée atteinte d'un incapacité permanente définitive proche de 100 % et n'a ainsi plus été en mesure d'exercer sa profession ; que compte tenu des revenus d'activités qu'elle justifie pour les années 1995 à 1998, il sera fait une juste appréciation de la perte totale de ses revenus occasionnée par son état, en la chiffrant à 195 216 euros ;

Considérant, en second lieu, que la caisse primaire d'assurance maladie n'a pas justifié du capital invalidité 2006 dont elle a demandé le remboursement pour une somme de 48 261,08 euros ; que les sommes que la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne justifie avoir versées à Mme A au titre des indemnités journalières et des arrérages échus de la rente d'invalidité, laquelle doit être regardée comme réparant les conséquences économiques de l'invalidité et est donc imputable sur la part d'indemnités réparant la perte de revenus, s'élèvent à 108 418,32 euros, laissant par suite à la charge de Mme A un préjudice complémentaire de 86 797,68 euros ; que le poste de préjudice correspondant aux pertes de revenus s'élève donc à la somme 195 216 euros ; que, la perte de chance de subir le préjudice étant fixée à 80 %, le préjudice indemnisable s'élève à 156 172,80 euros ; que, cette somme devant être attribuée par préférence à la victime, il y a lieu d'accorder à Mme A, au titre de l'ensemble des pertes de revenus, une somme de 86 797,68 euros et d'allouer le reliquat de la somme réparant la perte de revenus, soit 69 375,12 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne;

En ce qui concerne les préjudices à caractère personnel de Mme A :

Considérant que la circonstance qu'un patient se trouve placé dans un état végétatif chronique ne conduit, par elle-même, à exclure aucun chef d'indemnisation ni ne fait obstacle à ce que le préjudice subi par la victime soit réparé en tous ses éléments ; que par suite c'est à tort que le Tribunal administratif de Pau a jugé que Mme A ne pouvait prétendre à être indemnisée ni au titre des souffrances physiques ni au titre de son préjudice esthétique ni au titre de son préjudice d'agrément et familial au seul motif qu'elle se trouvait dans un état de coma ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que Mme A a subi d'importantes souffrances physiques ainsi qu'un préjudice esthétique, d'agrément et familial que l'expert qualifie de majeurs ; qu'eu égard à son état chronique irréversible, entraînant une incapacité permanente proche de 100 % survenue alors qu'elle était âgée de 49 ans et qui a duré huit ans, il sera fait une juste appréciation des préjudices subis par Mme A à ces titres en les évaluant à la somme de 80 000 euros venant s'ajouter à la somme de 300 000 euros accordée par le tribunal au titre des troubles qu'elle a endurés dans ses conditions d'existence incluant le préjudice sexuel ; que compte tenu de la fraction de 80% retenue ci-dessus, le centre hospitalier de Bayonne doit, par suite, être condamné à verser à l'indivision B-A constituée par les ayants droit de Mme A une somme de 304 000 euros ; qu'il y a lieu de porter à ce montant l'indemnité déjà mise à ce titre à la charge du centre hospitalier par le tribunal administratif ;

En ce qui concerne le préjudice de l'époux de Mme A :

Considérant que le droit à la réparation d'un dommage, quelle que soit sa nature, s'ouvre à la date à laquelle se produit le fait qui en est directement la cause ; que si la victime du dommage décède avant d'avoir elle-même introduit une action en réparation, son droit, entré dans son patrimoine avant son décès, est transmis à ses héritiers ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que le Tribunal a jugé que le droit à réparation du préjudice moral subi par M. A en raison de l'état de santé de son épouse était entré dans le patrimoine de ses héritiers alors même que M. A n'avait, avant son décès, introduit aucune action tendant à la réparation de ce préjudice ; que le tribunal a fait une juste évaluation de ce préjudice en le fixant à 16 000 euros ; qu'eu égard à l'ampleur de la perte de chance de subir ce préjudice, le CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE versera solidairement à M. Mickel A et à Mlle Amaya A, la somme de 12 800 euros au titre du préjudice moral supporté par leur père ;

En ce qui concerne les enfants et la mère de Mme A :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le Tribunal administratif n'a pas fait une appréciation excessive ni insuffisante du préjudice moral supporté par les enfants de Mme A, M. Mickel et Mlle Amaya A ainsi que par Mme Janine D, mère de Mme A en les évaluant respectivement à 18 000 euros pour chacun des deux enfants et à 4 000 euros pour la mère ; qu'il y a ainsi lieu, compte tenu de la fraction de 80 % définie plus haut, de condamner le centre hospitalier à verser, respectivement, 14 400 euros à chaque enfant et 3 200 euros à Mme D ;

En ce qui concerne les autres membres de la famille de Mme A :

Considérant que contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, aucun principe jurisprudentiel ne réserve la réparation du préjudice moral aux seuls ayants droit de la victime ; qu'eu égard à l'intensité des liens affectifs qu'ils entretenaient avec Mme A, en accordant une indemnisation d'un montant de 4 000 euros à M. Jean-François D, demi-frère de Mme A désigné comme son tuteur après la disparition de l'époux de cette dernière et une indemnisation d'un montant de 3 000 euros à Mme C, sa belle-mère, au titre du préjudice moral qu'ils ont subi, le Tribunal administratif n'a pas fait une évaluation excessive ou insuffisante de la réparation que justifiait ce chef de préjudice ; que compte tenu de la fraction du préjudice mis à la charge de l'hôpital, la somme qu'il a été condamné en première instance à verser à M. D et à Mme C doit être ramenée respectivement à 3 200 euros et à 2 400 euros ;

Considérant que les consorts A-D demandent réparation du préjudice résultant des obstacles et de la mauvaise volonté persistante que le centre hospitalier a opposés à leur demande de communication de pièces médicales ; qu'à les supposer établis ces griefs qui ne se rattachent pas à la faute à l'origine du préjudice dont la réparation est recherchée ne peuvent, en tout état de cause, ouvrir droit à indemnité ;

Sur le total des indemnités dues par le CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE :

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la somme que le CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE a été condamné à verser aux consorts A-D par le jugement attaqué doit être portée de 363 000 euros à 441 197,68 euros ; que la somme que l'établissement hospitalier a été condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne doit être ramenée de 1 363 490,15 euros à 1 034 823,12 euros ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise que le CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE est fondé à soutenir que les premiers juges ont mis à sa charge le paiement d'indemnités d'un montant excessif ; qu'en revanche, les consorts A-D ne sont pas fondés à demander que les indemnités qui leur ont été accordées par le Tribunal administratif de Pau soient rehaussées à la somme totale de 1 371 145,17 euros qu'ils réclament ; que la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne n'est pas davantage fondée à demander le maintien des indemnités allouées par le jugement attaqué ;

Sur l'indemnité forfaitaire due à la caisse de sécurité sociale :

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne a droit à l'indemnité forfaitaire régie par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, pour le montant de 966 euros auquel elle est fixée, à la date du présent arrêt, par l'arrêté interministériel du 1er décembre 2009 ; qu'il y a lieu de porter à ce montant l'indemnité de 941 euros allouée à ce titre en première instance et de mettre la somme de 966 euros à la charge du centre hospitalier de Bayonne ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstance de l'espèce, de laisser les frais de l'expertise ordonnée par le Tribunal administratif de Pau , taxés et liquidés à la somme de 900 euros, à la charge du centre hospitalier de Bayonne ;

Sur la demande de sursis à exécution du jugement du 26 mars 2009 :

Considérant que, par le présent arrêt, la Cour statue sur le recours en annulation du jugement du Tribunal administratif de Pau du 26 mars 2009 ; que, par suite, la requête du CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE tendant au sursis à exécution de ce jugement est devenue sans objet ; qu'il n'y a pas lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge du CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE, lequel n'est pas la partie perdante pour l'essentiel dans la présente instance, les sommes que demandent les consorts A-D et la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne au titre des frais exposés par eux devant la Cour et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Les sommes que le CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE a été condamné à verser à l'indivision B-A sont portées à 390 797,68 euros, celles qu'il a été condamné à verser à M. Mikel et Mlle Amaya A agissant en leur nom propre sont ramenées à 14 400 euros chacun, celle qu'il a été condamné à verser à Mme Jeanine D est ramenée à 3 200 euros, et celles qu'il a été condamné à verser à M. Jean-François D et à Mme C sont ramenées respectivement à 3 200 euros et à 2 400 euros. Le CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE est condamné à payer à M. Mikel et Mlle Amaya A agissant au nom de leur père décédé, la somme globale de 12 800 euros.

Article 2 : La somme que le CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE est condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne est ramenée à 1 034 823,12 euros au titre du remboursement des frais. La somme de 941 euros que le CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE a été condamné à verser par le jugement attaqué à la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale est portée à 966 euros.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel du CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE est rejeté.

Article 4 : Le surplus des conclusions d'appel incident des consorts A-D et leurs conclusions tendant à application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne et ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 6 : Le jugement du Tribunal administratif de Pau n° 0601963 en date du 26 mars 2009 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 7 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande du CENTRE HOSPITALIER DE BAYONNE tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du Tribunal administratif de Pau du 26 mars 2009.

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09BX01221, 09BX01564


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 09BX01221
Date de la décision : 07/09/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DUDEZERT
Rapporteur ?: M. Philippe CRISTILLE
Rapporteur public ?: Mme FABIEN
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-09-07;09bx01221 ?
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