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30/09/2010 | FRANCE | N°10BX01078

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 30 septembre 2010, 10BX01078


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour sous le n° 10BX01078 le 30 avril 2010 par télécopie, régularisée le 4 mai 2010, présentée pour Mme Gaïdic X, demeurant ..., par Me Vermot, avocat ;

Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 08789 du 15 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Basse-Terre, saisi par le préfet de la Guadeloupe, l'a condamnée, pour contravention de grande voirie, à payer une amende de 1.500 euros, ainsi qu'une somme de 20 euros au titre des frais du procès-verbal, et lui a enjoint, d'une part, de démolir l'e

nrochement empiétant sur le domaine public maritime édifié devant la villa n° ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour sous le n° 10BX01078 le 30 avril 2010 par télécopie, régularisée le 4 mai 2010, présentée pour Mme Gaïdic X, demeurant ..., par Me Vermot, avocat ;

Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 08789 du 15 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Basse-Terre, saisi par le préfet de la Guadeloupe, l'a condamnée, pour contravention de grande voirie, à payer une amende de 1.500 euros, ainsi qu'une somme de 20 euros au titre des frais du procès-verbal, et lui a enjoint, d'une part, de démolir l'enrochement empiétant sur le domaine public maritime édifié devant la villa n° 000 au droit de la parcelle AW 47 dans le secteur dénommé Les Résidences du Lagon sur le territoire de la commune de Saint-François et d'autre part, d'enlever hors du domaine public les produits du démontage, afin de rétablir les lieux dans leur état initial, dans un délai de 3 mois à compter de la notification du jugement, en autorisant l'administration à procéder d'office à la suppression de cet aménagement à ses frais, risques et périls, en cas d'inexécution passé ce délai ;

2°) à titre principal, de la relaxer des fins de la poursuite engagée à son encontre, ou à titre subsidiaire, de désigner un expert au frais de l'Etat ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5.000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code pénal ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code général des propriétés des personnes publiques ;

Vu le décret n° 2003-172 du 25 février 2003 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 septembre 2010 :

- le rapport de M. Péano, président-assesseur ;

- les observations de Me Cordelier, avocat de Mme X ;

- et les conclusions de M. Zupan, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;

Considérant qu'un procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé le 23 septembre 2007, sur la base de constatations effectuées le 12 juin 2007, à l'encontre de Mme X, notamment pour avoir implanté un enrochement, sans autorisation, sur le domaine public maritime, dans le prolongement du jardin privatif de la villa n° 000 des Résidences du Lagon au droit de la parcelle AW 47, issue de la parcelle AW 41, située au lieu-dit anse du Mancenillier ou anse Champagne sur le territoire de la commune de Saint-François ; que Mme X relève appel du jugement n° 08789 du 15 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Basse-Terre, saisi par le préfet de la Guadeloupe, l'a condamnée, pour contravention de grande voirie, à payer une amende de 1.500 euros, ainsi qu'une somme de 20 euros au titre des frais du procès-verbal, et lui a enjoint, d'une part, de démolir l'enrochement établi sur le domaine public maritime dans le prolongement du jardin privatif de la villa n° 000 et d'autre part, d'enlever hors du domaine public les produits du démontage, afin de rétablir les lieux dans leur état initial, dans un délai de 3 mois à compter de la notification du jugement, en autorisant l'administration à procéder d'office à la suppression de ces aménagements à ses frais, risques et périls, en cas d'inexécution passé ce délai ;

Sur la régularité de la poursuite :

Considérant que le procès-verbal établi le 23 septembre 2007 par un officier de police judiciaire, sur la base des constatations effectuées le 12 juin 2007, contient des indications permettant d'identifier la nature, les circonstances et les auteurs de la contravention et de connaître les motifs de droit et de fait de l'infraction reprochée à Mme X ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ce procès-verbal, dont aucune disposition législative ou réglementaire n'exige qu'il soit dressé contradictoirement en présence des contrevenants à la suite d'une enquête approfondie, comporte des indications de nature à l'induire en erreur et à l'empêcher de produire ses observations en défense ; que la circonstance que le procès-verbal, qui est suffisamment motivé, comporte une date de rédaction erronée ne fait pas légalement obstacle à ce que le préfet de la Guadeloupe défère Mme X au Tribunal administratif de Basse-Terre comme prévenue de la contravention constatée ; qu'avant de saisir le tribunal administratif d'un procès-verbal de contravention de grande voirie, le préfet n'est nullement tenu de procéder à la délimitation des terrains sur lesquels l'infraction a été constatée et à celle du domaine public maritime, en l'absence de demande en ce sens des propriétaires riverains ; qu'ainsi le moyen tiré de l'absence de respect par le préfet de la Guadeloupe de ces formalités doit être écarté ;

Considérant que la juridiction administrative, saisie d'un procès-verbal de contravention de grande voirie, est tenue, même d'office, de rechercher si les faits constatés par le procès-verbal transmis par le préfet constituent une infraction et de reconnaître les limites du domaine public naturel afin de déterminer si les terrains sur lesquels ont été commis les faits en raison desquels le procès-verbal a été dressé se trouvent ou non compris dans ces limites ; qu'aucune règle ni aucun texte législatif ou réglementaire n'impose au tribunal administratif saisi d'ordonner une expertise, avant de statuer sur la demande du préfet ;

Sur le bien-fondé de la poursuite :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2111-4 du code général de la propriété des personnes publiques : Le domaine public maritime naturel de l'État comprend : 1° Le sol et le sous-sol de la mer entre la limite extérieure de la mer territoriale et, côté terre, le rivage de la mer. Le rivage de la mer est constitué par tout ce qu'elle couvre et découvre jusqu'où les plus hautes mers peuvent s'étendre en l'absence de perturbations météorologiques exceptionnelles (...) 3° Les lais et relais de la mer (...) 4° la zone bordant le littoral définie à l'article L. 5111-1 dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion ; qu'aux termes de l'article L. 5111-1 du même code : La zone comprise entre la limite du rivage de la mer et la limite supérieure de la zone dite des cinquante pas géométriques définie à l'article L. 5111-2 fait partie du domaine public maritime de l'Etat ; qu'aux termes de L. 5111-2 de ce code : La réserve domaniale dite des cinquante pas géométriques est constituée par une bande de terrain délimitée dans les départements de la Réunion, de la Guadeloupe et de la Martinique (...) ; qu'aux termes de l'article L. 5111-3 du même code : Les dispositions de l'article L. 5111-1 s'appliquent sous réserve des droits des tiers à la date du 5 janvier 1986 ; les droits des tiers résultent : 1° soit des titres reconnus valides par la commission prévue par les dispositions de l'article 10 du décret n° 55-885 du 30 juin 1955 : 2° soit de ventes ou de promesses de ventes consenties par l'Etat postérieurement à la publication de ce décret et antérieurement à la date du 5 janvier 1986 ; qu'enfin aux termes de l'article L. 5111-4 : Les dispositions de l'article L. 5111-1 ne s'appliquent pas : 1° aux parcelles appartenant en propriété à des personnes publiques ou privées qui peuvent justifier de leur droit ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des photographies versées au dossier et du plan d'état des lieux établi le 27 novembre 2008 par le géomètre-expert intervenu à la demande de l'Agence des cinquante pas géométriques de la Guadeloupe, comparé à l'extrait du cadastre produit, que l'enrochement édifié dans le prolongement du jardin privatif de la villa n° 000 des Résidences du Lagon au droit de la parcelle AW 47, issue de la parcelle AW 41, située au lieu-dit anse du Mancenillier ou anse Champagne sur le territoire de la commune de Saint-François, a été érigé jusqu'à la bordure de l'océan dans un endroit qu'il couvre et découvre naturellement, à l'intérieur des limites atteintes par les plus hauts flots, en l'absence de perturbations météorologiques exceptionnelles ; que cet aménagement a été ainsi édifié sur le rivage de la mer faisant partie du domaine public maritime et non au-delà des limites de ce rivage vers l'intérieur des terres ;

Considérant que la circonstance que le plan d'état des lieux établi le 27 novembre 2008 n'aurait pas été dressé contradictoirement et que le géomètre-expert unilatéralement commis par l'Agence des cinquante pas géométriques de la Guadeloupe ne présentait pas les garanties d'impartialité et d'objectivité auxquelles est tenu tout géomètre-expert dans la réalisation de ses missions ne fait, en tout état de cause, pas obstacle à ce que les données de ce plan, qui a été communiqué aux requérants, soient prises en considération à titre d'élément d'information par la juridiction saisie, en tenant compte des observations présentées par les parties ; que, devant la juridiction, Mme X n'apporte aucun d'élément de nature à remettre en cause les faits établis par ce plan d'état des lieux concernant particulièrement la situation de l'enrochement édifié et le fait qu'il a été implanté sur le rivage de la mer faisant partie du domaine public maritime ; que dès lors, Mme X n'est pas fondée à soutenir que la poursuite engagée à son encontre reposerait sur des faits matériellement inexacts ;

Considérant que la personne qui peut être poursuivie pour contravention de grande voirie est, soit celle qui a commis ou pour le compte de laquelle a été commise l'action qui est à l'origine de l'infraction, soit celle sous la garde de laquelle se trouvait l'objet qui a été la cause de l'infraction ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'à la date d'établissement du procès-verbal, Mme X, qui reconnaît entretenir l'ouvrage, ne disposait pas de la garde effective de l'enrochement édifié au droit de la villa n° 000 dont elle est propriétaire et des pouvoirs lui permettant de prendre toutes dispositions pour faire cesser l'atteinte portée au domaine public alors même qu'elle n'a pas construit cet ouvrage ;

Considérant qu'en faisant état de titres de propriété sur le terrain cadastré sous le n° AW 47, issue de la parcelle AW 41, sur lequel est construite sa villa, Mme X ne conteste pas utilement le bien-fondé de la poursuite engagée à son encontre dès lors qu'il résulte de l'instruction que l'enrochement en raison duquel elle a été poursuivie ne se situe pas sur cette parcelle mais sur le rivage de la mer faisant partie du domaine public maritime ; qu'en tout état de cause, en produisant un ordre de service datant de 1973 et concernant, non l'édification d'un enrochement mais des opérations de déroctage dont la localisation n'est pas précisée, Mme X n'établit pas que la construction de cet ouvrage aurait été autorisée au titre de la législation relative au domaine public maritime ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 2132-3 du code général de la propriété des personnes publiques : Nul ne peut bâtir sur le domaine public maritime ou y réaliser quelque aménagement ou quelque ouvrage que ce soit sous peine de leur démolition, de confiscation des matériaux et d'amende. / Nul ne peut en outre, sur ce domaine, procéder à des dépôts ou à des extractions, ni se livrer à des dégradations ; qu'aux termes de l'article L. 3132-6 du même code : Sous réserve des textes spéciaux édictant des amendes d'un montant plus élevé, l'amende prononcée pour les contraventions de grande voirie ne peut excéder le montant prévu par le 5° de l'article 131-13 du code pénal. Dans tous les textes qui prévoient des peines d'amendes d'un montant inférieur ou ne fixent pas le montant de ces peines, le montant maximum des amendes encourues est celui prévu par le 5° de l'article 131-13. Dans tous les textes qui ne prévoient pas d'amende, il est institué une peine d'amende dont le montant maximum est celui prévu par le 5° de l'article 131-13. ; qu'aux termes de l'article L. 2132-27 du même code : Les contraventions définies par les textes mentionnés à l'article L. 2132-2, qui sanctionnent les occupants sans titre d'une dépendance du domaine public, se commettent chaque journée et peuvent donner lieu au prononcé d'une amende pour chaque jour où l'occupation est constatée, lorsque cette occupation sans titre compromet l'accès à cette dépendance, son exploitation ou sa sécurité ; qu'enfin aux termes de l'article 1er du décret n° 2003-172 du 25 février 2003 : Toute infraction en matière de grande voirie commise sur le domaine public maritime en dehors des ports (...) est punie de la peine d'amende prévue par l'article L. 131-3 du code pénal pour les contraventions de 5ème classe ; qu'en vertu de l'article 313-3 du code pénal, le montant de l'amende est de 1.500 euros au plus pour les contraventions de 5ème classe ;

Considérant que le maintien sans autorisation de l'enrochement édifié sur le rivage de la mer et faisant obstacle au libre passage des piétons, ainsi que l'occupation du domaine public en résultant, constituent la contravention de grande voirie prévue par l'article L. 2132-3 du code général de la propriété des personnes publiques ; que ce seul motif justifie légalement l'engagement de la poursuite intentée à l'encontre de Mme X devant le tribunal administratif à qui il appartenait de rechercher, même d'office, si les faits constatés par le procès-verbal constituaient une contravention à d'autres dispositions que celles qui y étaient expressément mentionnées ; que, dès lors, Mme X ne saurait utilement contester le bien-fondé de l'autre motif surabondant relevé dans le procès-verbal dressé le 23 septembre 2007 et tiré de la méconnaissance de l'article L. 160-1 du code de l'urbanisme ;

Considérant que la circonstance que l'ouvrage aurait contribué à l'aménagement du site et à sa protection contre l'action des flots est sans incidence sur la contravention de grande voirie ainsi établie ; qu'il en est de même de la circonstance que des aménagements comparables auraient été également édifiés ailleurs en Guadeloupe sans pour autant donner lieu à des poursuites ;

Considérant qu'eu égard notamment au barème prévu pour les contraventions de cinquième classe, le tribunal administratif n'a pas fait, dans les circonstances de l'espèce, une appréciation excessive du montant de l'amende infligée à Mme X ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'instruction sollicitée, Mme X n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, qui ne comporte aucune insuffisance dans ses motifs pour lui avoir enjoint de remettre les lieux dans l'état initial antérieur à l'édification de l'enrochement sur le domaine public maritime, le tribunal administratif de Basse-Terre l'a condamnée pour contravention de grande voirie ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à Mme X de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.

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No 10BX01078


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. LEDUCQ
Rapporteur ?: M. Didier PEANO
Rapporteur public ?: M. ZUPAN
Avocat(s) : VERMOT

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Date de la décision : 30/09/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10BX01078
Numéro NOR : CETATEXT000022900582 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-09-30;10bx01078 ?
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