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04/10/2010 | FRANCE | N°09BX02549

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 04 octobre 2010, 09BX02549


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 6 novembre 2009 par télécopie et le 9 novembre 2009 en original, présentée pour M. Mustapha X demeurant chez M. Nejhi Y ... ; M. Mustapha X demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0901280 du 7 septembre 2009 par laquelle le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 2 avril 2009, par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai

d'un mois à compter de la notification de cet arrêté en désignant le pays ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 6 novembre 2009 par télécopie et le 9 novembre 2009 en original, présentée pour M. Mustapha X demeurant chez M. Nejhi Y ... ; M. Mustapha X demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0901280 du 7 septembre 2009 par laquelle le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 2 avril 2009, par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois à compter de la notification de cet arrêté en désignant le pays de destination comme celui dont il a la nationalité ou de tout autre pays dans lequel il serait légalement admissible, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint sous astreinte au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour ou une autorisation de séjour ;

2°) d'annuler les décisions contenues dans l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour ou subsidiairement, une autorisation de séjour, et ce, sous astreinte de 80 euros par jour de retard, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative et de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat des sommes de 1 794 euros et 8,84 euros, ainsi que de celle, à déterminer, correspondant à des frais de courrier, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance du 14 janvier 2010 fixant la clôture de l'instruction au 4 février 2010 ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 12 octobre 2009, accordant l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 septembre 2010 :

- le rapport de Mme Boulard, président assesseur ;

- et les conclusions de Mme Dupuy, rapporteur public ;

Considérant que M. X, ressortissant marocain, entré en France en 2003, avait demandé un titre de séjour en qualité de salarié, qui lui a été refusé par un arrêté du préfet de la Haute-Vienne en date du 10 août 2007 ; que cet arrêté l'a également obligé à quitter le territoire français et a fixé son pays d'origine comme pays de renvoi ; que, saisie d'un appel dirigé contre le jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 6 décembre 2007 ayant rejeté son recours dirigé contre cet arrêté, la présente cour a, par un arrêt du 9 février 2009, rejeté cet appel en tant qu'il portait sur le refus de séjour opposé à l'intéressé, mais fait droit à ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français, pour défaut de motivation de cette obligation, ainsi que, par voie de conséquence, à celles dirigées contre la détermination du pays de renvoi ; que, par ce même arrêt, la cour a enjoint au préfet de statuer à nouveau sur le droit au séjour de M. X et de lui délivrer en attendant une autorisation provisoire de séjour ; que le préfet, à la suite de cet arrêt et de nouvelles demandes d'admission au séjour faites par M. X en juillet 2008 et février 2009 que son arrêté du 2 avril 2009 vise, a refusé, par ce dernier arrêté, d'admettre l'intéressé au séjour et l'a de nouveau obligé à quitter le territoire français en désignant le pays de destination comme étant celui dont il a la nationalité ou tout autre pays dans lequel il serait légalement admissible ; que, par une ordonnance du 7 septembre 2009 prise en application des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté le recours de M. X dirigé contre l'arrêté du 2 avril 2009 du préfet de la Haute-Vienne ainsi que ses conclusions à fin d'injonction dont ce recours était assorti ; que M. X fait appel de cette ordonnance ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. ;

Considérant que, pour rejeter le recours de M. X, le président du tribunal administratif de Limoges, après avoir rejeté comme manifestement infondé un moyen de légalité externe et écarté comme inopérants deux autres moyens, rappelle que, par l'arrêt précité, la présente cour a écarté le moyen présenté par M. X à l'encontre d'une des précédentes décisions de refus de délivrance d'un titre de séjour opposées à l'intéressé par le préfet de la Haute-Vienne au motif qu'il n'est pas établi que M. X, entré en France en 2003 et marié avec une ressortissante marocaine en situation irrégulière, soit dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-deux ans et que, compte tenu de la durée et des conditions de séjour en France du requérant, et alors même que ce dernier serait entré régulièrement sur le territoire français, l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne n'a pas porté au droit de celui-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris , puis a relevé que le requérant n'invoquait, comme circonstance nouvelle, que celle qu'un de ses enfants est désormais en âge de fréquenter l'école primaire ; qu'il en déduit que le requérant n'apporte manifestement pas, ainsi, de précisions suffisantes pour permettre d'apprécier le bien-fondé de son moyen tiré de l'atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale et de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle et que, par suite, il en va de même du moyen tiré de l'absence de consultation de la commission du titre de séjour ;

Considérant qu'à l'appui de son recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'arrêté du 2 avril 2009, le requérant, qui soulignait avoir demandé en dernier lieu son admission au séjour au titre de sa vie privée et familiale, faisait valoir, à l'appui de son moyen tiré de la méconnaissance de son droit au respect de cette vie privée et familiale, outre les offres d'embauche dont il bénéficiait, l'ancienneté de son séjour, la stabilité de sa vie familiale en France, la présence de ses enfants et la scolarisation de l'aîné ainsi que son intégration dans la société française ; que ce moyen, qu'il tirait des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qu'il invoquait, étaient assortis de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que la confirmation par un arrêt de la cour du précédent refus opposé en 2007 à sa demande de titre de séjour faite en qualité de salarié, ne permet pas de regarder le moyen du requérant présenté à l'appui de son recours dirigé contre le refus de 2009 et tenant au respect de sa vie privée et familiale comme dénué de précisions au motif qu'il n'aurait fait valoir qu'une seule circonstance nouvelle ; qu'en outre, le requérant invoquait à l'encontre du refus de 2009 la situation de ses enfants mineurs, en se prévalant de la violation de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, moyen qui, resté sans réponse, n'était pas, lui non plus, dépourvu de précisions ; que, dans ces conditions, en jugeant que les conclusions présentées devant lui pouvaient être rejetées par ordonnance sur le fondement des dispositions précitées du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, au motif que le requérant n'avait pas assorti son moyen de légalité interne de précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé, le président du tribunal administratif de Limoges a fait une inexacte application de ces dispositions ; que M. X est dès lors fondé à demander l'annulation de cette ordonnance ; qu'il convient de statuer par évocation sur sa demande présentée devant ce tribunal ;

Au fond :

Considérant, en premier lieu que l'arrêté attaqué comporte un énoncé suffisant des considérations de droit et de fait, au regard notamment de la situation personnelle et familiale du requérant, sur lesquelles il repose ; que la circonstance qu'il ne vise pas l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 est sans incidence sur sa légalité dès lors que ledit accord ne comporte pas de stipulation spécifique relative aux ressortissants marocains qui, comme le requérant, demandent à bénéficier d'une carte de séjour vie privée et familiale ; qu'ainsi, la décision contestée répond aux exigences de motivation prévues par les dispositions de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. X, qui se prévaut devant la cour de la décision du Conseil d'Etat n° 314397 du 23 octobre 2009, laquelle a censuré la circulaire ministérielle du 7 janvier 2008 prise en application de l'article 40 de la loi du 20 novembre 2007, doit être entendu comme formulant ainsi un moyen tiré de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, il ne peut utilement invoquer la méconnaissance dudit article, dès lors que sa demande, comme il l'a lui-même souligné dans ses écritures, n'a pas été présentée à ce titre ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée / (...) / ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ;

Considérant que M. X fait valoir qu'il est intégré en France, où il réside avec son épouse et leurs deux enfants qui y sont nés, et se prévaut de promesses d'embauche ; que, toutefois, s'il affirme que ses parents sont décédés et qu'une partie de sa famille réside en France, il ne justifie pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 32 ans ; que son épouse de nationalité marocaine est, elle aussi, en situation irrégulière en France ; que les pièces du dossier ne révèlent pas l'existence d'obstacles à la poursuite de la vie familiale hors de France ; que, compte tenu du très jeune âge de leurs enfants et de la scolarisation récente de l'un d'entre eux, rien ne s'oppose à ce que ces derniers regagnent le pays dont leurs parents ont la nationalité ou tout autre pays où ils seraient légalement admissibles ; qu'ainsi, compte tenu de la durée et des conditions de séjour de M. X en France, le préfet de la Haute-Vienne, en prenant l'arrêté contesté, n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 3-1° de la convention de New York relative aux droits de l'enfant ; qu'il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la vie personnelle de l'intéressé ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission du titre de séjour doit être saisie par le préfet seulement lorsque ce dernier envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 du même code ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné à ses articles L. 314-11 et L. 314-12 et le cas échéant à l'article L. 431-3 de ce code ; qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. X n'était pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement du 3° de l'article L. 313-11 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, qu'il entrerait dans les autres cas prévus à l'article 312-2 du code obligeant le préfet à saisir la commission du titre de séjour ; que, dès lors, le préfet n'était pas tenu, en application de cet article, de soumettre le cas de M. X à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté en litige ; que, par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent être accueillies ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente affaire, la somme que le requérant demande à ce titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 0901280 du 7 septembre 2009 du président du tribunal administratif de Limoges est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif et le surplus de sa requête sont rejetés.

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No 09BX02549


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 09BX02549
Date de la décision : 04/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Dominique BOULARD
Rapporteur public ?: Mme DUPUY
Avocat(s) : PREGUIMBEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-10-04;09bx02549 ?
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