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04/10/2010 | FRANCE | N°10BX00120

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 04 octobre 2010, 10BX00120


Vu la requête, enregistrée le 19 janvier 2010, présentée pour M. Thierry X, demeurant ... ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 19 novembre 2009, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 13 mars 2007, par laquelle le conseil municipal de Portets a approuvé la révision du plan local d'urbanisme (P.L.U.) de cette commune ;

2°) d'annuler dans son intégralité la délibération contestée ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Port

ets la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice...

Vu la requête, enregistrée le 19 janvier 2010, présentée pour M. Thierry X, demeurant ... ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 19 novembre 2009, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 13 mars 2007, par laquelle le conseil municipal de Portets a approuvé la révision du plan local d'urbanisme (P.L.U.) de cette commune ;

2°) d'annuler dans son intégralité la délibération contestée ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Portets la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 septembre 2010 :

- le rapport de Mme Boulard, président assesseur ;

- les observations de Me Ferrant de la SELARL Boissy-Ferrant, avocat de M. X ;

- les observations de Me Laveissière, avocat de la commune de Portets ;

- les conclusions de Mme Dupuy, rapporteur public ;

La parole ayant à nouveau été donnée aux parties ;

Considérant que, par délibération du 13 mars 2007, le conseil municipal de Portets (Gironde) a approuvé la révision du plan local d'urbanisme (P.L.U.) de cette commune ; que, saisi par M. X d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre cette délibération, le tribunal administratif de Bordeaux l'a, par un jugement du 19 novembre 2009, annulée en tant qu'elle crée au lieu-dit Labore une zone constructible comprenant trois parcelles cadastrées C 14, C 15 et C 16 ; que M. X fait appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas prononcé l'annulation de la délibération du 13 mars 2007 dans son ensemble ; que, par la voie de l'appel incident, la commune de Portets fait appel du même jugement en tant qu'il a prononcé l'annulation partielle de la délibération en litige ;

Sur l'appel incident de la commune de Portets :

Considérant que, pour prononcer l'annulation partielle de la délibération en litige, le tribunal administratif s'est fondé sur les dispositions de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales aux termes duquel : Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, comme l'ont relevé les premiers juges, M. François Lalande, adjoint à l'urbanisme de la commune de Portets, est propriétaire d'une parcelle cadastrée C 16, initialement classée en zone agricole ; que la révision du PLU a pour effet de classer en secteur constructible cette parcelle ainsi que les deux parcelles C 14 et C 15 immédiatement voisines, plus petites, appartenant à un autre propriétaire ; que ce dernier propriétaire s'était explicitement et à plusieurs reprises opposé à la constructibilité de ses deux parcelles, plantées en vigne, proches d'autres parcelles exploitées par lui, en se plaignant des projets d'urbanisation envisagés par son voisin, M. Lalande, et des gênes occasionnées à sa propre exploitation ; que M. Lalande avait expressément demandé la révision du PLU afin que sa parcelle, dont il avait arraché la vigne, devienne constructible, par une lettre du 25 octobre 2004 dont il a lui-même accusé réception en qualité de maire adjoint responsable de l'urbanisme en précisant qu'elle serait soumise à l'étude lors des opérations de révision du PLU ; que M. Lalande a clôturé le registre d'enquête de la révision du PLU et pris part au vote de la délibération en litige ; que, dans ces conditions et eu égard à la nature de ses fonctions, il doit être regardé, alors même qu'il n'aurait pas été le rapporteur du dossier et que le vote de la délibération a été acquis à une large majorité, comme ayant effectivement influé sur la révision en cause, qui place les trois parcelles précitées en zone constructible et à laquelle il avait un intérêt personnel direct ; que, certes, la commune soutient que cet intérêt se confondait avec l'intérêt général de ses habitants en faisant valoir que les parcelles dont il s'agit formaient une dent creuse du secteur urbanisé et que les avis exprimés tardivement par l'Institut national des appellations d'origine et la chambre d'agriculture, dont la teneur était défavorable à l'urbanisation desdites parcelles, doivent être réputés favorables en raison de cette tardiveté par application des dispositions R. 123-17 du code de l'urbanisme ; que, cependant, ni les caractéristiques des parcelles, essentiellement entourées de terrains agricoles, ni le fait que les avis négatifs précités doivent être réputés favorables en vertu des règles régissant la procédure de révision, ne permettent de tenir l'intérêt particulier de M. Lalande comme se confondant avec l'intérêt général des habitants de la commune ; qu'il suit de là que la commune de Portets n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement qu'elle attaque par la voie de l'appel incident, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la délibération de son conseil municipal du 13 mars 2007 en tant qu'elle crée au lieu-dit Labore une zone constructible comprenant les trois parcelles cadastrées C 14, C 15 et C 16 ;

Sur l'appel principal de M. X :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 123-2 du code de l'urbanisme : Le rapport de présentation : 1º Expose le diagnostic prévu au premier alinéa de l'article L. 123-1 ; 2º Analyse l'état initial de l'environnement ; 3º Explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durable, expose les motifs de la délimitation des zones, des règles qui y sont applicables et des orientations d'aménagement. Il justifie l'institution des secteurs des zones urbaines où les constructions ou installations d'une superficie supérieure à un seuil défini par le règlement sont interdites en application du a de l'article L. 123-2 ; 4º Evalue les incidences des orientations du plan sur l'environnement et expose la manière dont le plan prend en compte le souci de sa préservation et de sa mise en valeur. ;

Considérant que, pour écarter le moyen tiré par M. X de la violation de cet article, le tribunal administratif relève que le rapport de présentation du projet du P.L.U. de la commune de Portets consacre huit pages aux espaces boisés à conserver (E.B.C.), tant existants que nouveaux, que les motifs du classement en E.B.C. des secteurs concernés y sont détaillés, que la tendance au défrichement de certaines parties de forêt au profit de la viticulture y est évoquée ainsi que la question de la cohérence du rapport avec le zonage et le règlement du document d'urbanisme ; qu'il estime alors que, quand bien même la question du classement en E.B.C. de parcelles dont le défrichement a été autorisé n'a pas été expressément abordée dans le rapport de présentation, le requérant n'établit pas la méconnaissance par ledit rapport des dispositions précitées de l'article R. 123-2 du code de l'urbanisme ; qu'il y a lieu, par adoption de cette motivation retenue à juste titre par les premiers juges, d'écarter ce moyen repris en appel par le requérant ;

Considérant, en deuxième lieu, que le tribunal administratif rappelle qu'il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction et que leur appréciation sur ces différents points peut être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts ; qu'il cite les termes de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme : Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies, des plantations d'alignements. / Le classement interdit tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements (...) ; qu'il cite également les termes de l'article R. 123-8 du même code : Les zones naturelles et forestières sont dites zones N . Peuvent être classés en zone naturelle et forestière les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison soit de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique, soit de l'existence d'une exploitation forestière, soit de leur caractère d'espaces naturels (...) ; que les premiers juges relèvent que la commune de Portets est située au coeur du vignoble des Graves ; que les auteurs du P.L.U., ont constaté qu'au cours des dix dernières années, la surface viticole avait fortement progressé, entraînant le défrichement de 63 hectares de forêt, sans compter les dégâts occasionnés par la tempête de 1999, et qu'il ne subsistait plus aujourd'hui que 443 hectares de forêt au sud de la commune, dont environ un tiers relevant de la zone d'appellation d'origine contrôlée (A.O.C.) ; que ces auteurs ont souhaité préserver l'espace forestier existant en étendant la surface des zones naturelles et forestières dites zones N , en maintenant en E.B.C. des espaces humides situés dans la boucle de la Garonne et des châteaux viticoles déjà classés comme tels par l'ancien document d'urbanisme et en classant en espaces boisés un certain nombre de franges boisées, de haies et de bosquets situés dans des paysages à structure bocagère ; que M. Thierry X, propriétaire de 75 hectares de vignoble, répartis en vingt et une parcelles, dont sept incluses dans l'aire A.O.C. Bordeaux, au lieudit Pièce de Lacombe , pour une superficie d'environ huit hectares et cinq en instance de classement A.O.C., au lieudit La Grange Neuve , pour une superficie d'environ douze hectares, conteste le classement en zone N et en E.B.C. d'un certain nombre de ses parcelles, dont notamment celles qui ont fait l'objet d'une autorisation de défrichement par arrêté préfectoral du 10 novembre 2006 et dont certaines sont, à ce jour, déjà défrichées ; que, toutefois, ni la circonstance que des terrains soient inclus dans une aire de production de vins d'appellation contrôlée ni celle que le propriétaire des terrains en cause soit titulaire d'une autorisation de défrichement, ne suffisent à faire regarder comme entaché d'erreur manifeste d'appréciation le classement desdits terrains par le P.L.U. en zone N et en E.B.C., dès lors qu'un tel classement n'est pas subordonné à l'existence d'un boisement et que ce classement s'inscrit dans le cadre d'un parti d'aménagement cohérent tendant à rééquilibrer le territoire de la commune et à lutter contre la réduction, accentuée au cours de la dernière décennie, des espaces forestiers ; qu'ils estiment alors que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dans le classement des parcelles de M. X doit être écarté ;

Considérant qu'en appel, M. X n'apporte pas d'éléments de nature à remettre en cause le contrôle opéré à juste titre par les premiers juges, dont il convient de reprendre la motivation, quant à l'appréciation portée par le conseil municipal lors du classement de ses parcelles, au regard des dispositions précitées du code de l'urbanisme ; qu'il est vrai que le requérant fait valoir devant la cour que la seconde phrase susmentionnée du premier alinéa de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme est contraire aux stipulations de l'article premier du premier protocole de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, toutefois, ces stipulations ne font pas obstacle à l'édiction, par l'autorité compétente, d'une réglementation de l'usage des biens, dans un but d'intérêt général, ayant pour effet d'affecter les conditions d'exercice du droit de propriété ; que la circonstance que le classement des parcelles de M. X dans des espaces boisés à conserver, protéger ou créer compromette son projet tendant à affecter lesdites parcelles à la culture de la vigne n'apparaît pas, dans les circonstances de l'espèce, comme portant à son droit de propriété une atteinte disproportionnée au but d'intérêt général poursuivi par ce classement ;

Considérant, en dernier lieu, que, contrairement à ce que soutient M. X, l'irrégularité de la création au lieu-dit Labore d'une zone constructible comprenant trois parcelles cadastrées C 14, C 15 et C 16 n'est susceptible d'entacher d'illégalité la délibération du 13 mars 2007 que relativement à la création de cette zone, laquelle est divisible de ses autres dispositions ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à demander, à raison de cette illégalité, l'annulation de l'ensemble de la délibération contestée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que ni l'appel principal de M. X ni l'appel incident de la commune de Portets ne sont fondés ; qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et d'allouer aux parties les sommes qu'elles demandent à ce titre ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : L'appel incident de la commune de Portets et ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

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No 10BX00120


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 10BX00120
Date de la décision : 04/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Dominique BOULARD
Rapporteur public ?: Mme DUPUY
Avocat(s) : SELARL BOISSY-FERRANT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-10-04;10bx00120 ?
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