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18/10/2010 | FRANCE | N°09BX02954

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 18 octobre 2010, 09BX02954


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 18 décembre 2009, présentée pour la SA ROCHEDIS, ayant son siège social route de Saint-Junien à Rochechouart (87600) ;

La SA ROCHEDIS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 15 octobre 2009 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions, en date du 18 janvier 2008, par lesquelles la commission départementale d'équipement commercial de la Haute-Vienne a autorisé la SARL Créazone à créer à Rochechouart un supermarché d'une surface de vente de 1

990 m² et une station-service annexée au supermarché d'une surface de vente de...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 18 décembre 2009, présentée pour la SA ROCHEDIS, ayant son siège social route de Saint-Junien à Rochechouart (87600) ;

La SA ROCHEDIS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 15 octobre 2009 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions, en date du 18 janvier 2008, par lesquelles la commission départementale d'équipement commercial de la Haute-Vienne a autorisé la SARL Créazone à créer à Rochechouart un supermarché d'une surface de vente de 1 990 m² et une station-service annexée au supermarché d'une surface de vente de 105 m² ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) de condamner la SARL Créazone à lui verser la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu, enregistrée le 21 septembre 2010, la note en délibéré présentée pour la SA ROCHEDIS ;

Vu, enregistrée le 21 septembre 2010, la note en délibéré présentée pour la société Créazone ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté ministériel du 12 décembre 1997 fixant le contenu de la demande d'autorisation d'exploitation de certains commerces de détail ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 septembre 2010 :

- le rapport de M. Philip de Laborie, conseiller ;

- les observations de Me Encinas du cabinet Létang, avocat de la SA ROCHEDIS ;

- les observations de Me Meillard du cabinet Quadrige, avocat de la SARL Créazone ;

- les conclusions de Mme Dupuy, rapporteur public ;

La parole ayant à nouveau été donnée aux parties ;

Considérant que, par deux décisions du 18 janvier 2008, la commission départementale d'équipement commercial de la Haute-Vienne a autorisé la SARL Créazone à créer à Rochechouart un supermarché, sans enseigne définie, d'une surface de vente de vente de 1 990 m² ainsi qu'une station-service annexée à ce supermarché d'une surface de vente de 105 m² ; que la SA ROCHEDIS demande à la cour d'annuler le jugement du 15 octobre 2009 par lequel le tribunal administratif de Limoges, après avoir joint ses demandes à fin d'annulation de ces décisions, les a rejetées ;

Sur la recevabilité de la requête :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SA ROCHEDIS exploite un supermarché à Rochechouart ; que l'enseigne du supermarché dont la création est autorisée, dans la même commune, par la décision litigieuse, n'est pas définie ; que ce supermarché est ainsi susceptible d'entrer en concurrence directe avec celui dont la SA ROCHEDIS assure l'exploitation ; que, dans ces conditions, et alors même que cette société s'est montrée intéressée par la réalisation de ce projet, elle justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation des autorisations contestées ; que, par suite, la fin de non-recevoir invoquée par la société Créazone doit être rejetée ;

Au fond :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens :

Considérant que, pour l'application des dispositions combinées des articles L. 750-1 et L. 752-6 du code de commerce, dans leur rédaction alors en vigueur, il appartient aux commissions d'équipement commercial, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'apprécier si un projet soumis à autorisation est de nature à compromettre, dans la zone de chalandise, l'équilibre recherché par le législateur entre les diverses formes de commerce et, dans l'affirmative, de rechercher si cet inconvénient est compensé par les effets positifs du projet appréciés en tenant compte, d'une part, de sa contribution à l'emploi, à l'aménagement du territoire, à la concurrence, à la modernisation des équipements commerciaux et, plus généralement, à la satisfaction des besoins des consommateurs et en évaluant, d'autre part, son impact sur les conditions de circulation et de stationnement aux abords du site envisagé ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour le secteur alimentaire, la densité des équipements commerciaux de plus de 300 m² est, dans la zone de chalandise, et sans tenir compte du projet litigieux, de 594 m² pour 1 000 habitants alors qu'elle est de 317 m² au niveau national et de 382 m² au niveau départemental ; qu'au surplus, les données démographiques de la zone de chalandise, telles que rapportées par la demande d'autorisation, font apparaître une diminution de la population de 2,63 % entre les recensements de 1990 et de 1999, qui n'a été que très partiellement compensée par l'évolution observée dans le cadre des évaluations provisoires de la période 2004-2006 ; que la réalisation du projet, qui porte sur une surface de vente de 1 990 m², est, dans ces conditions, même si la surdensité d'équipements commerciaux est principalement marquée dans la partie nord-est de la zone de chalandise, de nature à compromettre l'équilibre entre les diverses formes de commerce ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, si le projet s'inscrit dans le cadre du réaménagement du site d'une ancienne usine, en périphérie du centre-ville de Rochechouart, et s'il est de nature à permettre la création d'un supermarché moderne dans une commune où le supermarché existant, d'une surface de vente de 1 145 m², n'a pas évolué depuis plusieurs années, d'une part, une grande surface de discount alimentaire a été autorisée, en octobre 2007, sur le site de cette ancienne usine, d'autre part, les habitants de Rochechouart peuvent accéder, moyennant un trajet en voiture compris entre cinq et dix minutes, à deux supermarchés modernes, et, moyennant un trajet compris entre dix et quinze minutes, à deux hypermarchés également modernes, dont l'un avait récemment été agrandi à la date de l'autorisation litigieuse ; que si le projet litigieux s'accompagne de la création de 39 emplois en équivalents temps plein, il est susceptible d'avoir un impact négatif sur les emplois existants, notamment ceux du supermarché déjà implanté dans la même commune ; que, par suite, et quand bien même le projet dont il s'agit permettrait d'assurer une meilleure répartition des équipements commerciaux à l'intérieur de la zone de chalandise, ses effets positifs apparaissent insuffisants pour compenser le déséquilibre qu'engendrerait sa réalisation entre les différentes formes de commerce dans cette zone ; que l'autorisation de créer ce supermarché est, dès lors, illégale ; que, par voie de conséquence, l'autorisation portant sur la station-service à adjoindre audit supermarché est également illégale ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA ROCHEDIS est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demandes à fin d'annulation des autorisations délivrées le 18 janvier 2008 à la société Créazone par la commission départementale d'équipement commercial de la Haute-Vienne ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que la SA ROCHEDIS n'étant pas la partie perdante, les conclusions de la société Créazone tendant à sa condamnation en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Créazone le versement à la SA ROCHEDIS de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 15 octobre 2009 est annulé.

Article 2 : Les autorisations délivrées le 18 janvier 2008 à la société Créazone par la commission départementale d'équipement commercial de la Haute-Vienne en vue de la création d'un supermarché et d'une station-service à Rochechouart sont annulées.

Article 3 : La société Créazone versera la somme de 1 500 euros à la SA ROCHEDIS en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la société Créazone présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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No 09BX02954


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 09BX02954
Date de la décision : 18/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Henri PHILIP de LABORIE
Rapporteur public ?: Mme DUPUY
Avocat(s) : LETANG

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-10-18;09bx02954 ?
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