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15/11/2010 | FRANCE | N°10BX00682

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 15 novembre 2010, 10BX00682


Vu, I, sous le n° 10BX00682, le recours sommaire enregistré au greffe de la cour sous forme de télécopie le 8 mars et en original le 11 mars 2010 et le mémoire ampliatif enregistré le 21 avril 2010, présentés par le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER ;

Le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 31 décembre 2009 qui a, sur la demande de l'association Nature environnement 17 et de l'association Actio

n information écologie en Charente-Maritime, annulé l'arrêté du préfet...

Vu, I, sous le n° 10BX00682, le recours sommaire enregistré au greffe de la cour sous forme de télécopie le 8 mars et en original le 11 mars 2010 et le mémoire ampliatif enregistré le 21 avril 2010, présentés par le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER ;

Le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 31 décembre 2009 qui a, sur la demande de l'association Nature environnement 17 et de l'association Action information écologie en Charente-Maritime, annulé l'arrêté du préfet de la Charente-Maritime du 19 mars 2008 portant autorisation de cinq réserves de substitution à usage d'irrigation agricole et de leur remplissage par prélèvement en nappe sur le bassin du Mignon ;

2°) de rejeter la demande présentée par ces associations devant le tribunal administratif ;

..................................................................................................................

Vu, II, sous le n° 10BX01024, le recours sommaire enregistré sous forme de télécopie le 23 avril et en original le 27 avril 2010, présenté par le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER ;

Le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER demande à la cour d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 31 décembre 2009 susvisé ; il invoque les mêmes moyens que ceux soulevés à l'appui du recours n° 10BX00682 ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la directive n° 79/409 CEE du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages ;

Vu la directive n° 92/43/CEE du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que la faune et la flore sauvages ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 octobre 2010 :

- le rapport de Mme Rey-Gabriac, premier conseiller ;

- les observations de M. Picaud, président de l'association Nature environnement 17 ;

- les observations de Me Pique-Vazeille de la SCP Pielberg - Kolenc, avocat de l'ASAI (Association Syndicale Autorisée d'Irrigation) des Roches ;

- les conclusions de Mme Dupuy, rapporteur public ;

La parole ayant à nouveau été donnée aux parties ;

Considérant que l'ASAI (Association Syndicale Autorisée d'Irrigation) des Roches a, le 8 août 2007, déposé une demande en vue d'être autorisée à réaliser, sur le territoire des communes de Cramchaban, La Laigne et La Grève-sur-Mignon, cinq retenues de substitution à usage d'irrigation agricole et à prélever les eaux souterraines du bassin du Mignon en vue de leur remplissage ; qu'une enquête publique s'est déroulée du 8 octobre au 8 novembre 2007, à l'issue de laquelle le commissaire-enquêteur a donné un avis favorable au projet ; qu'un arrêté du préfet de la Charente-Maritime du 19 mars 2008 a délivré l'autorisation sollicitée ; que, par un recours enregistré sous le n° 10BX00682, le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 31 décembre 2009 qui a, sur la demande de l'association Nature environnement 17 et de l'association Action information écologie en Charente-Maritime, annulé cette autorisation ; que, par un recours enregistré sous le n° 10BX01024, le ministre demande à la cour le sursis à exécution de ce même jugement ; qu'il y a lieu de joindre ces deux recours pour y statuer par un seul arrêt ;

Sur la recevabilité de l'intervention de l'ASAI des Roches :

Considérant que l'arrêté en litige a été pris au bénéfice de l'ASAI des Roches, laquelle justifie ainsi de son intérêt à intervenir dans la présente instance à l'appui des conclusions du recours du ministre ; que la délibération du comité syndical en date du 29 mars 2010 doit être regardée comme habilitant le président à agir en justice ; que, par suite, l'intervention de l'ASAI doit être admise ;

Sur le recours n° 10BX00682 :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

Considérant que, pour retenir le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 214-6 du code de l'environnement, le tribunal administratif a relevé que les ouvrages de canalisation et les fossés de vidange qui seront exploités par l'ASAI des Roches et qui sont indissociables du projet de réserves et de stockage d'eau n'ont pas été examinés conformément aux exigences dudit article et que la seule mention concernant le tracé des amenées d'énergie et figurant en page 85 de l'étude d'impact, ne pouvait pallier l'insuffisance sur ce point du dossier soumis à enquête publique ; que le tribunal a ainsi suffisamment exposé les motifs de fait et de droit sur lesquels il s'est fondé pour retenir le moyen ; que, par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'insuffisance de motivation ;

Au fond :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 122-8 du code de l'environnement : I. Ne sont pas soumis à la procédure d'étude d'impact, sous réserve des dispositions de l'article R. 122-9, les aménagements, ouvrages et travaux dont le coût total est inférieur à 1 900 000 euros. En cas de réalisation fractionnée, le montant à retenir est celui du programme général de travaux. Toutefois, la procédure de l'étude d'impact est applicable quel que soit le coût de leur réalisation, aux aménagements, ouvrages et travaux définis ci-après : (...) 7° Réservoirs de stockage d'eau sur tour d'une capacité supérieure à 1 000 m3 et autres réservoirs de stockage d'eau d'une superficie égale ou supérieure à 10 ha ; qu'aux termes de l'article R. 122-3 du même code : I - Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. II. - L'étude d'impact présente successivement : 1° Une analyse de l'état initial du site et de son environnement, portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, affectés par les aménagements ou ouvrages ; 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur la faune et la flore, les sites et paysages, le sol, l'eau, l'air, le climat, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la protection des biens et du patrimoine culturel et, le cas échéant, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l'hygiène, la santé, la sécurité et la salubrité publique ; 3° Les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d'environnement, parmi les partis envisagés qui font l'objet d'une description, le projet présenté a été retenu ; 4° Les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement et la santé, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes ; 5° Une analyse des méthodes utilisées pour évaluer les effets du projet sur l'environnement mentionnant les difficultés éventuelles de nature technique ou scientifique rencontrées pour établir cette évaluation ; (...) IV. - Lorsque la totalité des travaux prévus au programme est réalisée de manière simultanée, l'étude d'impact doit porter sur l'ensemble du programme. Lorsque la réalisation est échelonnée dans le temps, l'étude d'impact de chacune des phases de l'opération doit comporter une appréciation des impacts de l'ensemble du programme (...) ; qu'aux termes de l'article R. 214-6 dudit code : I. - Toute personne souhaitant réaliser une installation, un ouvrage, des travaux ou une activité soumise à autorisation adresse une demande au préfet du département ou des départements où ils doivent être réalisés. II. - Cette demande, remise en sept exemplaires, comprend : (...) 4° Un document : / a) Indiquant les incidences directes et indirectes, temporaires et permanentes, du projet sur la ressource en eau, le milieu aquatique, l'écoulement, le niveau et la qualité des eaux, y compris de ruissellement, en fonction des procédés mis en oeuvre, des modalités d'exécution des travaux ou de l'activité, du fonctionnement des ouvrages ou installations, de la nature, de l'origine et du volume des eaux utilisées ou affectées et compte tenu des variations saisonnières et climatiques ; / b) Comportant, lorsque le projet est de nature à affecter de façon notable un site Natura 2000 au sens de l'article L. 414-4, l'évaluation de ses incidences au regard des objectifs de conservation du site ; / c) Justifiant, le cas échéant, de la compatibilité du projet avec le schéma directeur ou le schéma d'aménagement et de gestion des eaux et de sa contribution à la réalisation des objectifs visés à l'article L. 211-1 ainsi que des objectifs de qualité des eaux prévus par l'article D. 211-10 ; / d) Précisant s'il y a lieu les mesures correctives ou compensatoires envisagées. (...) Lorsqu'une étude d'impact ou une notice d'impact est exigée en application des articles R. 122-5 à R. 122-9, elle est jointe à ce document, qu'elle remplace si elle contient les informations demandées (...) VIII. - Les études et documents prévus au présent article portent sur l'ensemble des installations, ouvrages, travaux ou activités exploités ou projetés par le demandeur qui, par leur proximité ou leur connexité avec l'installation soumise à autorisation, sont de nature à participer aux incidences sur les eaux ou le milieu aquatique. ;

Considérant que l'autorisation litigieuse autorise la création de cinq retenues d'eau d'un volume global de 1,578 million de mètres cubes et d'une superficie cumulée de 33 hectares ; que le projet ainsi autorisé comprend la construction de réservoirs d'eau, mais aussi la réalisation de digues, de clôtures, de fossés de vidange, d'installations de pompage et d'alimentation en énergie électrique, ainsi que de canalisations, aériennes ou souterraines, d'amenée d'eau et d'irrigation ; que les réserves projetées se situent à proximité de la zone Natura 2000 du Marais Poitevin ; que l'une d'elles se trouve dans le périmètre de la ZNIEFF de la forêt de Benon ;

Considérant que si, en ce qui concerne l'état initial du site d'implantation du projet, l'étude d'impact comporte, en pages 38 à 40, des indications relatives à la flore et au milieu aquatique, elle ne contient, en revanche, en ce qui concerne la faune autre que piscicole, que de très rares indications éparses, alors qu'un constat d'huissier, effectué à la demande de l'association Nature environnement 17 et de l'association Action information écologie en Charente-Maritime deux mois après l'édiction de l'arrêté attaqué, révèle la présence, sur le site, d'espèces protégées au titre des directives européennes Oiseaux et Habitats dont l'étude ne fait aucune mention ; que cette carence n'est pas compensée par le fait qu'était jointe à l'étude d'impact une évaluation de la compatibilité du projet avec la zone Natura 2000 du Marais Poitevin dans laquelle étaient mentionnées les espèces protégées présentes dans cette zone, dès lors que le site d'implantation du projet n'est pas situé à l'intérieur de celle-ci ; que l'étude d'impact ne comporte pas, s'agissant des effets prévisibles du projet, lesquels doivent être appréciés en tenant compte des réserves proprement dites mais aussi des ouvrages et installations connexes, une analyse suffisante de ces effets sur la faune autre que piscicole située sur le site du projet, notamment les espèces protégées qui s'y trouvent ; que, dans ces conditions, l'étude d'impact dont il s'agit ne peut être regardée comme répondant sur ces points aux exigences de l'article R. 122-3 précité du code de l'environnement ; que cette insuffisance, qui entache la procédure d'irrégularité substantielle, suffit à justifier l'annulation prononcée par les premiers juges, même si ceux-ci ont cité à tort l'article R. 512-8 du code de l'environnement au lieu de l'article R. 122-3 ; qu'il ne résulte pas en revanche de l'instruction que les réseaux d'irrigation et fossés de vidange auraient dû faire l'objet, dans l'étude d'impact, d'une analyse spécifique de leur incidence sur les eaux et le milieu aquatique ;

Considérant qu'il résulte de tout de qui précède que le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a annulé l'arrêté du préfet de la Charente-Maritime en date du 19 mars 2008 ;

Sur le recours n°10BX01024 :

Considérant que le présent arrêt rejette le recours du MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER ; que, par suite, ses conclusions à fin de sursis à exécution du jugement du 31 décembre 2009 sont devenues sans objet ;

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de la somme de 1 000 euros à l'association Nature environnement 17 et de la même somme à l'association Action information écologie en Charente-Maritime ;

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de l'ASAI des Roches est admise.

Article 2 : Le recours n° 10BX00682 du MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER est rejeté.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur le recours n° 10BX01024.

Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à l'association Nature environnement 17 et la même somme à l'association Action information écologie en Charente-Maritime au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Nos 10BX00682, 10BX01024


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 10BX00682
Date de la décision : 15/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme DUPUY
Avocat(s) : SCP PIELBERG - KOLENC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-11-15;10bx00682 ?
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