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16/11/2010 | FRANCE | N°10BX01070

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 16 novembre 2010, 10BX01070


Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 30 avril 2010 sous le n° 10BX01070, présentée pour M. Jérémy demeurant chez Mlle Y, ... par Me Charlot ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09831 et 09887 du 25 février 2010 du Tribunal administratif de Cayenne en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande dirigées contre la décision du 9 octobre 2009 du président de la commission de discipline du centre pénitentiaire de Guyane lui infligeant la sanction de mise en cellule disciplinaire pendant 45 jours ;

2°) d'annuler ladite décisi

on du 9 octobre 2009 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat sur le fondement des di...

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 30 avril 2010 sous le n° 10BX01070, présentée pour M. Jérémy demeurant chez Mlle Y, ... par Me Charlot ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09831 et 09887 du 25 février 2010 du Tribunal administratif de Cayenne en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande dirigées contre la décision du 9 octobre 2009 du président de la commission de discipline du centre pénitentiaire de Guyane lui infligeant la sanction de mise en cellule disciplinaire pendant 45 jours ;

2°) d'annuler ladite décision du 9 octobre 2009 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la somme de 1 500 euros ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 octobre 2010 ;

le rapport de M. Cristille, premier conseiller ;

et les conclusions de M. Lerner, rapporteur public

Considérant que M. , détenu au centre pénitentiaire de Rémire-Montjoly (Guyane), a été sanctionné par le chef de l'établissement, successivement, le 8 octobre 2009, d'un avertissement pour avoir frappé un co-détenu et, le 9 octobre 2009, de quarante-cinq jours de cellule disciplinaire pour avoir refusé d'obtempérer à une mesure de changement de cellule et pour avoir proféré des menaces de mort puis exercé des violences physiques à l'encontre d'un surveillant ; que M. , qui s'est conformé à l'obligation de recours préalable instituée par les dispositions de l'article D 250-5 du code de procédure pénale susvisé, relève appel du jugement du 25 février 2010 en tant que le Tribunal administratif de Cayenne a rejeté comme irrecevables les conclusions de sa requête dirigée contre la décision du 9 octobre 2009 lui infligeant un placement en cellule disciplinaire pour une durée de quarante-cinq jours ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article D. 250-5 du code de procédure pénale : Le détenu qui entend contester la sanction disciplinaire dont il est l'objet doit, dans le délai de quinze jours à compter du jour de la notification de la décision, la déférer au directeur interrégional des services pénitentiaires préalablement à tout autre recours. Le directeur interrégional dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception du recours pour répondre par décision motivée. L'absence de réponse dans ce délai vaut décision de rejet. ;

Considérant que, s'il est saisi de conclusions tendant à l'annulation d'une décision qui ne peut donner lieu à un recours devant le juge de l'excès de pouvoir qu'après l'exercice d'un recours administratif préalable et si le requérant indique, de sa propre initiative ou le cas échéant à la demande du juge, avoir exercé ce recours et, le cas échéant après que le juge l'y a invité, produit la preuve de l'exercice de ce recours ainsi que, s'il en a été pris une, la décision à laquelle il a donné lieu, le juge de l'excès de pouvoir doit regarder les conclusions dirigées formellement contre la décision initiale comme tendant à l'annulation de la décision, née de l'exercice du recours, qui s'y est substituée ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. a saisi le directeur interrégional des services pénitentiaires de l'outre-mer, d'un recours contre la décision de sanction prise par le chef de l'établissement de détention, comme il en avait l'obligation ; qu'il ressort des pièces du dossier que ce recours a été enregistré le l5 octobre 2009 soit avant que n'expire le délai de 15 jours fixé par les dispositions précitées de l'article D. 250-5 du code de procédure pénale ; que le directeur interrégional des services pénitentiaires de l'outre-mer a rejeté ledit recours administratif et a maintenu la sanction de cellule disciplinaire pendant quarante-cinq jours par une décision du 12 novembre 2009 ; qu'ainsi, la décision prise par le directeur interrégional s'est substituée rétroactivement à celle du chef d'établissement ; que le dossier du premier juge comprenait la lettre par laquelle M. a exercé son recours administratif et la décision de rejet du directeur interrégional des services pénitentiaires en date du 12 novembre 2009 ; que les conclusions à fin d'annulation présentées par le requérant devaient ainsi être regardées comme dirigées contre la décision du 12 novembre 2009 ; qu'il suit de là que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté comme irrecevables les conclusions de M. en ce qu'elles étaient dirigées contre la sanction initiale du chef d'établissement en date du 9 octobre 2009 ; que M. est fondé, pour ce motif, à demander l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer sur la demande présentée par M. devant le Tribunal administratif de Cayenne ;

Sur la régularité de la procédure menée devant la commission de discipline :

Considérant que la décision susmentionnée du 12 novembre 2009, arrêtant définitivement la position de l'administration pénitentiaire, s'est, ainsi qu'il a été dit, entièrement substituée à la décision initiale du 9 octobre 2009 ; que la demande de M. doit, dès lors, être regardée comme tendant à l'annulation de la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires de l'outre-mer du 12 novembre 2009 ; que cette substitution ne fait, toutefois, pas obstacle à ce que soient invoqués à l'encontre de la décision initiale des moyens tirés de l'irrégularité de la procédure suivie devant la commission de discipline ;

Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 susvisée : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) ; qu'aux termes de l'article D. 250-4 du code de procédure pénale : Lors de sa comparution devant la commission de discipline, le détenu présente, en personne, sous réserve des dispositions du deuxième alinéa ci-dessous et des dispositions prises en application de l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, ses explications écrites ou orales (...). La décision sur la sanction disciplinaire est prononcée en présence du détenu. Elle lui est notifiée par écrit sans délai et doit comporter, outre l'indication de ses motifs, le rappel des dispositions de l'article D. 250-5 ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite du déclenchement de la procédure disciplinaire à son encontre, M. a fait part, le 9 octobre 2009 à 10 heures 45, à l'administration pénitentiaire, de son souhait d'être assisté devant la commission de discipline par un avocat de son choix ou désigné par le bâtonnier de l'ordre des avocats ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. aurait désigné un avocat pour assurer sa défense ; que, malgré sa transmission en télécopie, le 9 octobre 2009 à 10h55, par les services pénitentiaires au bâtonnier de l'ordre des avocats, la demande de l'intéressé n'a pas eu de suite ; que M. qui n'allègue pas avoir sollicité, au moment de sa comparution, le report de la réunion de ladite commission, n'a pas été assisté d'un avocat devant ladite commission ; que si, en application des dispositions susmentionnées de la loi du 12 avril 2000, il appartient à l'administration pénitentiaire de mettre le détenu à même de demander l'assistance d'un avocat, aucune disposition ni aucun principe n'impose, en matière disciplinaire, de faire droit à une demande de désignation d'office à peine d'irrégularité de la procédure ; que M. n'est ainsi pas fondé à soutenir que la procédure était irrégulière, faute de la présence d'un avocat ;

Considérant que les sanctions disciplinaires, décidées selon l'article D. 250 du code de procédure pénale, ne sont pas prononcées par un tribunal ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la condamnation qui lui a été infligée aurait été prononcée dans des conditions qui ne respecteraient pas le principe des droits de la défense tel qu'il est garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant ;

Considérant, enfin, que si le procès-verbal de la réunion de la commission de discipline mentionne par erreur l'intervention d'un avocat, une telle circonstance n'a pas eu d'incidence sur la légalité de la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires dès lors que ledit procès-verbal contenait des précisions suffisantes pour que cette autorité, qui a d'ailleurs reconnu qu'aucun avocat n'avait assisté M. au moment où la commission de discipline a siégé, ait été en mesure d'apprécier le sens exact de la décision initiale ; que le requérant ne s'est pas davantage, du fait de cette erreur, trouvé privé des garanties prévues par les dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires de l'outre-mer en date du 12 novembre 2009 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à M. la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°09-831 et n°09-887 du Tribunal administratif de Cayenne en date du 25 février 2010 est annulé en tant qu'il rejette la demande de M. tendant à l'annulation de la décision du président de la commission de discipline du 9 octobre 2009.

Article 2 : La demande de M. devant le Tribunal administratif de Cayenne est rejetée ainsi que le surplus de ses conclusions devant la Cour.

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10BX01070


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. DUDEZERT
Rapporteur ?: M. Philippe CRISTILLE
Rapporteur public ?: M. LERNER
Avocat(s) : CHARLOT

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 16/11/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10BX01070
Numéro NOR : CETATEXT000023140886 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-11-16;10bx01070 ?
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