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09/12/2010 | FRANCE | N°10BX00131

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 09 décembre 2010, 10BX00131


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 20 janvier 2010 sous le n° 10BX00131, présentée pour l'EARL LES ECHOS DE CHIENS , dont le siège est situé à La Sylvine à Montchevrier (36140) et pour M. Gilles , demeurant ..., par Me Liere, avocat ;

L'EARL LES ECHOS DE CHIENS et M. demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900137 du 3 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Montchevrier à réparer les préjudices subis du fait des inondations survenues depuis 2006 d

ans la parcelle cadastrée section E3 n° 520 ;

2°) de condamner la commune d...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 20 janvier 2010 sous le n° 10BX00131, présentée pour l'EARL LES ECHOS DE CHIENS , dont le siège est situé à La Sylvine à Montchevrier (36140) et pour M. Gilles , demeurant ..., par Me Liere, avocat ;

L'EARL LES ECHOS DE CHIENS et M. demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900137 du 3 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Montchevrier à réparer les préjudices subis du fait des inondations survenues depuis 2006 dans la parcelle cadastrée section E3 n° 520 ;

2°) de condamner la commune de Montchevrier, d'une part, à verser à chacun d'eux la somme de 10.000 euros, assortie des intérêts de droit capitalisés à compter du jour de la demande, d'autre part, soit à réaliser l'ensemble des travaux préconisés par l'expert judiciaire dans son rapport du 25 mars 2008, dans un délai de quatre mois à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai, soit à leur verser la somme de 19.500 euros toutes taxes comprises (TTC) correspondant au montant de ces travaux, avec réévaluation en fonction de l'indice du coût de la construction entre la date du dépôt du rapport de l'expert et le jour de leur réalisation, ladite somme étant assortie des intérêts de droit capitalisés à compter du jour de la demande, enfin à leur rembourser la somme de 4.097,41 euros correspondant au coût de l'expertise ;

3°) de les autoriser à réaliser les travaux en cas de carence de la commune ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Montchevrier en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la somme de 3.500 euros au profit de chacun des appelants au titre des frais exposés en première instance et la même somme au titre des frais exposés en cause d'appel ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 novembre 2010 :

- le rapport de M. Péano, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Zupan, rapporteur public ;

Considérant que l'EARL LES ECHOS DE CHIENS et M. relèvent appel du jugement n°0900137 du 3 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Montchevrier à réparer les préjudices subis du fait des inondations survenues depuis 2006 les mettant dans l'impossibilité d'exploiter le pré cadastré section E3 n° 520 pour la pâture des bovins ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que si les requérants reprochent au tribunal administratif de n'avoir pas répondu au moyen tiré, à titre subsidiaire, de la responsabilité sans faute de la commune du fait d'un dommage permanent de travaux publics, il ressort du jugement attaqué que les premiers juges ont estimé que les dispositions de l'article D. 161-20 du code rural faisaient obstacle tant à l'invocation d'un défaut d'entretien normal du fait de l'absence de curage des fossés qu'à celle de l'existence de dommages permanents de travaux publics ; que le moyen manque ainsi en fait ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : Sauf en matière de travaux publics, la juridiction administrative ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ; que le dommage dont l'EARL LES ECHOS DE CHIENS et M. demandent réparation est lié à l'aménagement de chemins ruraux qui constituent, dès lors qu'ils sont affectés à la circulation publique, des ouvrages publics ; qu'il a ainsi le caractère d'un dommage de travaux publics, dont l'indemnisation n'est subordonnée à aucune réclamation susceptible de faire naître une décision préalable ; que la commune de Montchevrier n'est en conséquence pas fondée à soutenir que cette demande serait irrecevable faute d'avoir été précédée d'une telle décision ;

Sur la responsabilité de la commune :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport remis par l'expert judiciaire le 25 mars 2008, que les inondations du pré cadastré section E3 n° 520, propriété de l'indivision dont M. Gilles est co-indivisaire et exploité par l'EARL LES ECHOS DE CHIENS , situé en contrebas du chemin rural du Moulin d'Orsennes à Gâte-Souris, ont été provoquées par le ruissellement des eaux de pluie sur ce chemin qui est dépourvu de fossé et de tout ouvrage d'évacuation des eaux pluviales ;

Considérant que la commune de Montchevrier, maître de l'ouvrage public constitué par le chemin rural, ouvert à la circulation publique, dit du Moulin d'Orsennes à Gâte-Souris, est responsable même sans faute des dommages anormaux et spéciaux que ce chemin a occasionné aux riverains qui ont la qualité de tiers par rapport audit ouvrage ; qu'ainsi, la responsabilité de la commune est susceptible d'être engagée à l'égard de M. , propriétaire co-indivisaire du pré et de l'EARL LES ECHOS DE CHIENS qui exploite le terrain, sauf à établir que les dommages résultent d'un cas de force majeure ou d'une faute des victimes ; que la circonstance que la commune n'est pas tenue d'entretenir les chemins ruraux dont elle a la charge et n'a commis aucune faute en n'entretenant pas le chemin rural dit du Moulin d'Orsennes à Gâte-Souris n'est pas de nature à l'exonérer de la responsabilité ainsi encourue ; que, par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Limoges a estimé, pour rejeter la demande de l'EARL LES ECHOS DE CHIENS et de M. , que les dispositions de l'article D. 161-20 du code rural, aux termes desquelles : Les propriétés riveraines situées en contrebas des chemins ruraux sont assujetties à recevoir les eaux qui découlent naturellement de ces chemins. faisaient obstacle à ce que soit retenue la responsabilité de la commune du fait des caractéristiques de l'ouvrage public constitué par le chemin rural ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le pré cadastré section E3 n° 520 est situé en contrebas du chemin rural du Moulin d'Orsennes à Gâte-Souris et exposé, par la situation naturelle des lieux, à des risques d'inondation ; que si la commune fait valoir que les requérants se sont abstenus de prendre les précautions d'usage , elle ne précise pas les dispositions qui auraient pu être prises par les intéressés pour éviter la survenance des dommages ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir qu'ils auraient commis une faute de nature à atténuer sa responsabilité ;

Sur le préjudice indemnisable :

Considérant qu'il n'est pas contesté que du fait des inondations survenues depuis 2006, il a été impossible d'exploiter au moins temporairement le pré cadastré section E3 n° 520 pour la pâture des bovins ; que le préjudice de jouissance en résultant, excédant par sa gravité ceux que tout riverain des ouvrages publics est tenu de supporter sans compensation, présente un caractère anormal et spécial ; que, par suite, l' EARL LES ECHOS DE CHIENS , qui exploite ledit pré dans le cadre d'un bail à ferme, est fondée à en demander réparation ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi à ce titre en l'évaluant à 1.500 euros ; qu'en revanche, M. ne justifie, de par sa qualité de propriétaire co-indivisaire bailleur, d'aucun préjudice de jouissance de nature à lui ouvrir droit à réparation ;

Considérant que les conclusions du rapport remis par l'expert judiciaire le 25 mars 2008 ont été utiles pour le jugement du litige ; que, par suite, la somme de 4.097,41 euros correspondant au coût de cette expertise à la charge des requérants doit être comprise dans l'évaluation du préjudice subi par M. et l' EARL LES ECHOS DE CHIENS ;

Considérant qu'il n'appartient pas à la juridiction administrative de prononcer des injonctions en dehors des cas prévus par les articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ; que, par suite, les conclusions tendant à ce que la commune soit condamnée à exécuter les travaux préconisés par l'expert pour mettre fin aux inondations de la parcelle litigieuse ne peuvent être accueillies ; que les requérants ne sont pas davantage fondés à demander à être autorisés à exécuter eux-mêmes lesdits travaux sur le domaine communal aux frais de la commune ;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

Considérant que M. et l' EARL LES ECHOS DE CHIENS ont droit aux intérêts au taux légal des sommes fixées ci-avant, à compter du 27 janvier 2009, date d'enregistrement de leur demande de première instance ; que la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année ; qu'en ce cas, cette demande ne prend, toutefois, effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 27 janvier 2009 ; qu'à cette date, il n'était pas dû au moins une année d'intérêts ; qu'il y a lieu de faire droit à la demande à compter du 27 janvier 2010, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Montchevrier le versement d'une somme globale de 1.500 euros à M. et l' EARL LES ECHOS DE CHIENS ; qu'il n'y a pas lieu d'accorder le bénéfice de ces mêmes dispositions à la commune de Montchevrier ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0900137 en date du 3 décembre 2009 du Tribunal administratif de Limoges est annulé.

Article 2 : La commune de Montchevrier versera à l' EARL LES ECHOS DE CHIENS une indemnité de 1.500 euros.

Article 3 : La commune de Monchevrier versera à M. et à l' EARL LES ECHOS DE CHIENS une somme de 4.097, 41 euros au titre des frais d'expertise exposés.

Article 4 : Les indemnités visées aux articles 2 et 3 porteront intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2009, ces intérêts étant capitalisés à compter du 27 janvier 2010.

Article 5 : La commune de Montchevrier versera à M. et l'EARL LES ECHOS DE CHIENS une somme globale de 1.500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête ainsi que les conclusions de la commune de Montchevrier tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

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N° 10BX00131


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Didier PEANO
Rapporteur public ?: M. ZUPAN
Avocat(s) : LIERE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Date de la décision : 09/12/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10BX00131
Numéro NOR : CETATEXT000023218682 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-12-09;10bx00131 ?
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