La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/12/2010 | FRANCE | N°10BX01447

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 21 décembre 2010, 10BX01447


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 17 juin 2010, présentée pour M. Bernard , demeurant ...;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800986 du 21 avril 2010 du Tribunal administratif de Poitiers qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 43 426,82 euros en réparation du préjudice qu'il a subi du fait du refus de l'Etat de procéder au versement de cotisations patronales d'assurance vieillesse et de cotisations patronales de retraite complémentaire pour la période allant de 1978 à 1989 ;

2

°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 119 067 euros ;

3°) de mettre à ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 17 juin 2010, présentée pour M. Bernard , demeurant ...;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800986 du 21 avril 2010 du Tribunal administratif de Poitiers qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 43 426,82 euros en réparation du préjudice qu'il a subi du fait du refus de l'Etat de procéder au versement de cotisations patronales d'assurance vieillesse et de cotisations patronales de retraite complémentaire pour la période allant de 1978 à 1989 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 119 067 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code rural ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics

Vu la loi n° 72-1223 du 29 décembre 1972 portant généralisation de la retraite complémentaire au profit des salariés et anciens salariés ;

Vu le décret n° 70-1277 du 23 décembre 1970 portant création d'un régime de retraites complémentaires des assurances sociales en faveur des agents non-titulaires de l'Etat et des collectivités publiques ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 novembre 2010 ;

le rapport de M. Katz, premier conseiller ;

et les conclusions de M. Lerner, rapporteur public ;

Considérant que M. , vétérinaire libéral investi d'un mandat sanitaire, entre le 1er janvier 1978 et le 31 décembre 1989, a procédé à des opérations de prophylaxie collective pour le compte de l'Etat ; que, par lettre en date du 10 décembre 2007, l'intéressé a demandé à la direction départementale des services vétérinaires de la Vienne de procéder au versement, à l'Urssaf et à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques (IRCANTEC), des cotisations dues, selon lui, au titre des opérations de prophylaxie collective qu'il a effectuées ; que cette demande étant restée sans réponse, M. a demandé au Tribunal administratif de Poitiers de condamner l'Etat à lui verser la somme de 43 426,82 euros en réparation du préjudice subi en raison du défaut d'affiliation ; que M. relève appel du jugement du Tribunal administratif de Poitiers en date du 21 avril 2010 qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme précitée et demande à la Cour de condamner l'Etat à lui verser la somme de 119 067 euros ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête par le ministre de l'alimentation de l'agriculture et de la pêche :

Considérant que M. a demandé aux premiers juges de condamner l'Etat à lui verser la somme de 43 426,82 euros en réparation du préjudice qu'il a subi du fait du refus de l'Etat de procéder au versement de cotisations patronales d'assurance vieillesse et de cotisations patronales de retraite complémentaire pour la période allant de 1978 à 1989 ; que dès lors, le ministre de l'alimentation de l'agriculture et de la pêche est fondé à soutenir que la demande présentée à la Cour, en tant qu'elle excède cette somme, constitue une demande nouvelle, irrecevable en appel ;

Sur l'exception de prescription :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968 : La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement ; que M. ne peut être regardé comme ayant connaissance du montant de sa créance qu'à compter de la date de la liquation de sa retraite ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. ait fait valoir ses droits à la retraite ; qu'ainsi, le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche n'est pas fondé à opposer la prescription quadriennale à la demande de M. ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'entre 1978 et 1989, M. , vétérinaire, a procédé à des opérations de prophylaxie collective de la tuberculose bovine, de la fièvre aphteuse et de la brucellose dans le cadre d'un mandat sanitaire ; qu'il résulte de l'instruction qu'eu égard aux conditions dans lesquelles ce vétérinaire exerçait cette activité et au lien de subordination existant à l'égard du service vétérinaire départemental chargé d'organiser la prophylaxie qui faisait appel à ses services, il devait être regardé comme ayant la qualité d'agent public non titulaire de l'Etat ; qu'il relevait, dès lors, du régime général de la sécurité sociale, en application des dispositions de l'article L. 311-2 du code de la sécurité sociale, ainsi que du régime de retraite complémentaire des agents publics non titulaires de l'Etat généralisé par la loi du 29 décembre 1972 ; que l'Etat avait l'obligation, dès la date de sa prise de fonction, d'assurer son immatriculation à la caisse primaire de sécurité sociale ainsi qu'à l'IRCANTEC en application des dispositions d'une part, de l'article R. 312-4 du code de la sécurité sociale, issues de l'article 1er du décret du 29 décembre 1945, et, d'autre part, des articles 3 et 7 du décret du 23 décembre 1970, et de verser les cotisations correspondantes ; qu'il est constant que l'Etat n'a jamais fait procéder à cette immatriculation ni versé les cotisations dont s'agit durant toute la période d'activité de M. ; que ce dernier est, dès lors, fondé à soutenir qu'en ne déclarant pas son activité de 1978 à 1989, notamment auprès des organismes de retraite, l'Etat a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à son égard ;

Considérant qu'il incombait à l'Etat, en sa qualité d'employeur, d'entreprendre les démarches nécessaires à l'affiliation de ses agents au régime général de la sécurité sociale et au régime complémentaire des agents non titulaires ; que, dès lors, M. , qui n'avait pas par ailleurs connaissance de l'absence de paiement par l'Etat des cotisations patronales, n'a pas contribué au préjudice qu'il invoque en n'ayant pas accompli de démarche en vue de son affiliation ; que, par suite, l'Etat est entièrement responsable des conséquences dommageables qui résultent du défaut d'affiliation et de paiement des cotisations patronales ;

Sur le préjudice :

Considérant que M. demande une indemnité correspondant au montant du versement de cotisations patronales dues par l'Etat, son employeur, pendant la période allant du 1er janvier 1978 au 31 décembre 1989, qu'il aura à effectuer à titre de régularisation, afin de percevoir une pension de retraite complète ; que si le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche fait valoir que le requérant aurait déjà inclus le montant des rémunérations reçues de l'Etat au titre de l'exercice du mandat sanitaire, dans l'assiette des rémunérations déclarées au titre de son activité libérale et ayant donné lieu au versement de cotisations d'assurance vieillesse et à l'acquisition de droits à pension, il ne produit aucun élément permettant d'apprécier le bien-fondé de ses allégations ; qu'il résulte de l'article R. 351-11 du code de la sécurité sociale qu'il est tenu compte, pour l'ouverture du droit et le calcul des pensions de vieillesse, de toutes les cotisations d'assurance vieillesse versées pour les périodes antérieures à l'entrée en jouissance de la pension, quelle que soit la date de leur versement, que le versement des cotisations afférentes à une période d'activité de plus de trois ans doit porter sur l'intégralité de la période d'activité pendant laquelle les cotisations dues n'ont pas été versées et que l'assuré est admis à procéder lui-même au versement des cotisations dues par l'employeur lorsque celui-ci refuse d'effectuer le versement ; qu'il résulte de l'instruction que le silence gardé par le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la demande du 10 décembre 2007 dont il a été saisi par M. , tendant au versement des cotisations patronales arriérées, a fait naître une décision de refus ; que, dès lors, M. est admis à procéder lui-même au versement des cotisations dues par son employeur en vertu des dispositions précitées ; qu'il résulte des calculs établis à la demande de M. par l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) et par l'IRCANTEC, auxquels l'administration n'oppose aucun élément de nature à les infirmer, que le requérant aura à verser, à titre de régularisation, des cotisations patronales d'assurance vieillesse d'un montant de 36 479,59 euros et des cotisations patronales de retraite complémentaire d'un montant de 6 947,20 euros, auprès de la caisse chargée de la liquidation des droits à prestations de vieillesse territorialement compétente ; qu'ainsi, le préjudice direct et certain subi par M. du fait du refus de l'Etat de procéder au versement des cotisations susmentionnées s'élève à 43 426,79 euros ; que par suite c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande indemnitaire de M. ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué, ainsi que la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 43 426,79 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative au titre des frais exposés par M. , non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Poitiers en date du 21 avril 2010 est annulé.

Article 2 : L'Etat versera à M. la somme de 43 426,79 euros en remboursement de son préjudice et la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. est rejeté.

''

''

''

''

4

N° 10BX01447


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. DUDEZERT
Rapporteur ?: M. David KATZ
Rapporteur public ?: M. LERNER
Avocat(s) : DOURY

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 21/12/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10BX01447
Numéro NOR : CETATEXT000023494069 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-12-21;10bx01447 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award