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01/03/2011 | FRANCE | N°10BX00397

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 01 mars 2011, 10BX00397


Vu le recours, enregistré au greffe de la cour le 15 février 2010, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION ;

Le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 16 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a annulé la décision du 10 novembre 2008 du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION et lui a enjoint de restituer à M. Y son permis de condu

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2°) de rejeter la demande présentée par M. Y devant le Tribuna...

Vu le recours, enregistré au greffe de la cour le 15 février 2010, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION ;

Le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 16 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a annulé la décision du 10 novembre 2008 du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION et lui a enjoint de restituer à M. Y son permis de conduire ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Y devant le Tribunal administratif de Poitiers ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er février 2011 :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Gosselin, rapporteur public ;

Considérant que le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION fait appel du jugement du 16 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a annulé la décision en date du 10 novembre 2008 par laquelle le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION a notifié divers retraits de son permis de conduire, lui a interdit de conduire et lui a enjoint de restituer ledit titre de conduite ;

Considérant que par décision du 12 juin 2008 régulièrement publiée au journal officiel, le chef du service national des permis de conduire avait reçu délégation lui permettant de signer tous actes dans la limite de ses attributions ; que la décision litigieuse mentionne le nom, le prénom et la fonction du signataire, et répond ainsi aux exigences de la loi du 12 avril 2000 ; que la circonstance que la signature de cette décision apparaisse sous la forme d'un fac-similé ne l'entache pas d'irrégularité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Poitiers a annulé la décision 48 SI du 10 novembre 2008, et les retraits de points qui la fondent, au motif de l'incompétence de l'auteur de l'acte ;

Considérant qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. Z devant le Tribunal administratif de Poitiers ;

Considérant que M. Z ne saurait utilement se prévaloir du stage de reconstitution de points effectué en 2005, dès lors que les retraits de points litigieux concernent des infractions sanctionnées postérieurement à ce stage ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, à laquelle renvoie le préambule de la Constitution : La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ; qu'il résulte de ces dispositions qui s'appliquent à toute sanction ayant le caractère de punition, comme des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, qu'une peine ne peut être infligée qu'à la condition que soient respectés le principe de légalité des délits et des peines, le principe de nécessité des peines, le principe de non-rétroactivité de la loi répressive d'incrimination plus sévère ainsi que le principe du respect des droits de la défense ;

Considérant que la sanction de la perte de validité du permis de conduire instituée par les dispositions contestées de l'article L. 223-1 du code de la route procède de l'ensemble des décisions de retrait de points ayant conduit au solde nul, lesquelles ne peuvent légalement intervenir qu'à condition que l'information requise par les dispositions de l'article L. 223-3 du même code ait été délivrée à l'intéressé et qu'en cas de reconnaissance de sa responsabilité pénale, après appréciation éventuelle, à sa demande, de la réalité de l'infraction et de son imputabilité par le juge judiciaire ; qu'en outre, la régularité de la procédure de retrait de points peut être contestée devant la juridiction administrative ; que ces garanties assurent ainsi le respect des droits de la défense ;

Considérant que la loi précise les conditions dans lesquelles les pertes de points, directement liées à un comportement délictuel ou contraventionnel portant atteinte aux règles de la circulation routière, peuvent se cumuler et quantifie cette perte de façon variable en fonction de la gravité des infractions qui peuvent l'entraîner, ainsi que le Conseil constitutionnel l'a relevé dans la même décision ; que la reconstitution du capital de points prévue par la loi est également directement liée au comportement du titulaire du permis ; qu'eu égard à la nature des infractions concernées, à l'ampleur des pertes de points qui leur sont attachées et à la durée limitée de l'interdiction de solliciter un nouveau permis entraînée par la perte de validité, l'application des règles de perte et de reconstitution de points suffit à garantir que la sanction de la perte de validité du permis ne soit pas infligée alors qu'elle serait manifestement hors de proportion avec les manquements reprochés à l'intéressé ; qu'eu égard à ces garanties, cette sanction ne porte pas atteinte à la liberté d'aller et venir ;

Considérant, dès lors, que par l'ensemble des dispositions relatives au permis à points, le législateur a institué un régime de sanction où la peine est individualisée sans qu'une autorité judiciaire ou administrative ait à en assurer la modulation dans chaque cas d'espèce, et qui répond à l'objectif d'intérêt général de la lutte contre des atteintes à la sécurité routière dont la nature et la fréquence rendraient matériellement impossible la répression effective si une telle modulation était permise ; que compte tenu des garanties dont est entouré ce régime, le moyen tiré de ce que la sanction de la perte de validité du permis de conduire prévue au troisième alinéa de l'article L. 223-1 du code de la route constituerait une sanction automatique contraire au principe de nécessité et de proportionnalité des peines doit être écarté;

Considérant qu' il résulte des mêmes dispositions, éclairées notamment par les travaux préparatoires de la loi du 10 juillet 1989, que si le nombre de points affecté au permis de conduire est réduit de plein droit lorsqu'est établie, par le paiement d'une amende forfaitaire ou par une condamnation devenue définitive, la réalité de l'infraction donnant lieu à retrait de points, la perte de points doit être portée à la connaissance de l'intéressé par lettre simple du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION ; que, dès lors, en vertu des dispositions de l'article 8 de la loi du 17 juillet 1978 fixant les relations entre l'administration et le public, et auxquelles les auteurs de la loi du 10 juillet 1989 n'ont pas entendu déroger, la décision constatant la perte de points n'est opposable à l'intéressé qu'à compter de la date où cette décision a été portée à sa connaissance par l'administration, cette date constituant le point de départ du délai de recours dont dispose l'intéressé à l'encontre de la décision ; que, toutefois, s'il appartient au MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION de porter à la connaissance des intéressés la décision les concernant dans ses délais les plus brefs, la durée de ce délai est sans influence sur la légalité de la décision elle-même ;

Considérant que, lorsqu'il n'est pas fait application des procédures d'amende forfaitaire ou de composition pénale, l'information due à l'auteur de l'infraction est celle que prévoit l'alinéa premier de l'article L. 223-3 du code de la route ; qu'en application de cet alinéa, l'intéressé doit, dans le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur, être informé qu'il encourt, en cas de condamnation par le juge pénal, un retrait de points de son permis de conduire, dans les limites prévues par l'article L. 223-2, dont les dispositions doivent être portées à sa connaissance ; que l'existence d'un traitement automatisé de ces points et la possibilité d'exercer un droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9 du code de la route doivent également être mentionnées ; que, lorsqu'il est fait application de la procédure d'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'information remise ou adressée par le service verbalisateur doit porter, en vertu du deuxième alinéa de l'article L. 223-3, d'une part, sur l'existence d'un traitement automatisé des points et la possibilité d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9 du code de la route et, d'autre part, sur le fait que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale établit la réalité de l'infraction, dont la qualification est précisée, et entraîne un retrait de points correspondant à cette infraction ; que ni l'article L. 223-3, ni l'article R. 223-3 n'exigent que le conducteur soit informé du nombre exact de points susceptibles de lui être retirés, dès lors que la qualification de l'infraction qui lui est reprochée est dûment portée à sa connaissance ; que l'information selon laquelle un retrait de points est encouru, due dans tous les cas au contrevenant, est suffisamment donnée par la mention oui figurant dans une case retrait de points du document remis au contrevenant lors de la constatation d'une infraction ;

Considérant que si M. Z soutient que les documents transmis ne l'informaient pas de l'existence de stages et des modalités de retrait de points, il n'apporte pas, en s'abstenant de produire les documents en cause, d'élément permettant d'apprécier le bien-fondé de ses allégations ;

Considérant que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire, à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues aux articles L. 223-3 et R. 223-3 susvisés du code de la route, lesquelles constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tout moyen, qu'elle a satisfait à cette obligation d'information ; qu'en outre, les dispositions de l'article 537 du code de procédure pénale, selon lesquelles les procès-verbaux établis par les officiers ou agents de police judiciaire font foi jusqu'à preuve contraire, ne trouvent à s'appliquer qu'en ce qui concerne la constatation des faits constitutifs de l'infraction ; qu'elles ne s'appliquent pas à la mention portée sur ces procès-verbaux, selon laquelle le contrevenant a reçu les informations prévues par le code de la route ; que, néanmoins, même contredite par le contrevenant, cette indication peut emporter la conviction du juge si elle est corroborée par d'autres éléments ;

Considérant que s'agissant de l'infraction constatée le 21 novembre 2002, de nature à entraîner la perte de 4 points, le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION a produit la copie du procès-verbal de contravention dressé le jour même de l'infraction, comportant la mention 4 dans la case relative au retrait de points du permis de conduire ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve que, pour cette infraction, M. Y a reçu l'information prévue par les dispositions précitées ;

Considérant que, s'agissant de l'infraction constatée le 6 mai 2007, de nature à entraîner la perte de 3 points, le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION a produit la copie du procès-verbal de contravention dressé le jour même de l'infraction, comportant la mention signée par M. Y de reconnaissance par l'intéressé de la contravention et de la réception de la carte de paiement de l'avis de contravention ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve que, pour cette infraction, M. Y a reçu l'information prévue par les dispositions précitées ;

Considérant que, s'agissant de l'infraction, constatée le 26 mars 2007, de nature à entraîner la perte de 3 points, le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION a produit la copie du procès-verbal de contravention dressé le jour même de l'infraction, comportant la mention oui dans la case relative au retrait de points du permis de conduire ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve que, pour cette infraction, M. Y a reçu l'information prévue par les dispositions précitées ;

Considérant que, s'agissant de l'infraction constatée le 23 juin 2005, de nature à entraîner la perte d'un point, le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION a produit la quittance du paiement de l'amende sur laquelle figure la mention du retrait de point et la signature de l'intéressé ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve que, pour cette infraction, M. Y a reçu l'information prévue par les dispositions précitées ;

Considérant en revanche que, s'agissant de l'infraction constatée le 30 juillet 2007, de nature à entraîner la perte de deux points, le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION ne produit aucun document permettant de regarder l'administration comme apportant la preuve que M. Y ait reçu l'information prévue par les dispositions précitées ;

Considérant par suite que, le permis de conduire de M. Y n'avait pas perdu sa validité à la date de la décision litigieuse ; qu'ainsi, la décision 48 S du 10 novembre 2008 par laquelle le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION a notifié divers retraits de points du permis de conduire de M. Y, lui a interdit de conduire et lui a enjoint de restituer ledit titre de conduite, est entachée d'illégalité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé sa décision du 10 novembre 2008 ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, DE L'IMMIGRATION est rejeté.

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No 10BX00397


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 10BX00397
Date de la décision : 01/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BEC
Rapporteur ?: M. Jean-Emmanuel RICHARD
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-03-01;10bx00397 ?
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