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17/03/2011 | FRANCE | N°10BX01893

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 17 mars 2011, 10BX01893


Vu I°) la requête, enregistrée au greffe de la cour le 27 juillet 2010 en télécopie, régularisée par courrier le 2 août 2010, sous le n° 10BX01893, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE ;

Le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE demande à la cour d'annuler le jugement n° 0904446 en date du 18 juin 2010 en tant que le Tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté en date du 19 novembre 2009 rejetant la demande de titre de séjour présentée par Mlle Nancy X et les décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays dont elle a la nationalité co

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Vu I°) la requête, enregistrée au greffe de la cour le 27 juillet 2010 en télécopie, régularisée par courrier le 2 août 2010, sous le n° 10BX01893, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE ;

Le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE demande à la cour d'annuler le jugement n° 0904446 en date du 18 juin 2010 en tant que le Tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté en date du 19 novembre 2009 rejetant la demande de titre de séjour présentée par Mlle Nancy X et les décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays dont elle a la nationalité comme pays de destination de la mesure d'éloignement, et lui a fait injonction de délivrer à Mlle X un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;

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Vu II°) la requête, enregistrée le 27 juillet 2010 en télécopie, régularisée par courrier le 2 août 2010, sous le n° 10BX01894, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE ;

Le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE demande à la cour d'ordonner, par application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 0904446 du 18 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 19 novembre 2009 refusant de délivrer un titre de séjour à Mlle X, et les décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays dont elle a la nationalité comme pays de destination de la mesure d'éloignement, et lui a fait injonction de délivrer à Mlle X un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 22 novembre 2010 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux a reconnu le maintien de plein droit de l'aide juridictionnelle au bénéfice de Mlle Nancy X ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République gabonaise relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Paris le 2 décembre 1992 et publiée par le décret n° 2003-963 du 3 octobre 2003 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 février 2011 :

- le rapport de Mme Girault, président ;

- et les conclusions de M. Zupan, rapporteur public ;

Considérant que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE demande à la cour d'annuler le jugement n° 0904446 du 18 juin 2010 en tant que le Tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 19 novembre 2009 refusant de délivrer un titre de séjour à Mlle Nancy X et, par voie de conséquence, les décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le Gabon comme pays de destination de la mesure d'éloignement, et lui a fait injonction de délivrer à Mlle X un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ; que par requête séparée, le PREFET demande le sursis à exécution du jugement précité ;

Considérant que les requêtes enregistrées sous les n° 10BX01893 et 10BX01894 tendent respectivement à l'annulation et au sursis à exécution d'un même jugement, opposent les mêmes parties, et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il convient de les joindre afin de statuer par un seul arrêt ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE fait valoir que la requête de première instance formée par Mlle X était irrecevable dans la mesure où elle était dirigée contre le courrier du 3 août 2009 par lequel il s'est borné à informer la directrice de la Maison du Gabon qu'il n'entendait pas délivrer un titre de séjour à Mlle X ; que cette lettre n'est pas une décision faisant grief à l'intéressée ; que toutefois la circonstance que le jugement a effectivement rejeté ces conclusions comme irrecevables ne faisait pas obstacle à ce qu'il statue, en outre, au fond sur les conclusions présentées en cours d'instance dans un mémoire enregistré le 24 décembre 2009 comme un mémoire complémentaire, et dirigées, dans le délai d'un mois imparti, contre la décision intervenue le 19 novembre 2009 portant expressément refus de séjour assorti d'un obligation de quitter le territoire français, qui n'a été notifiée à l'intéressée que le 4 décembre 2009 ; que contrairement à ce que soutient le préfet, le tribunal n'a pas examiné les moyens présentés contre la décision du 3 août 2009 mais bien ceux présentés contre la décision expresse assortie d'une obligation de quitter le territoire français ; que par suite le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE n'est pas fondé à soutenir que le tribunal aurait entaché son jugement d'irrégularité en admettant la recevabilité des conclusions additionnelles dirigées contre la décision du 19 novembre 2009 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle X, née le 26 septembre 1989, est entrée régulièrement en France le 11 septembre 2003 à l'âge de treize ans munie d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour de quinze jours ; qu'elle a vécu avec son oncle, lequel l'a prise en charge pendant cinq ans et a bénéficié le 8 décembre 2004 d'un jugement portant délégation d'autorité parentale du Tribunal de première instance de Libreville au Gabon ; qu'elle a été scolarisée dès son arrivée en France et jusqu'à l'obtention de son baccalauréat en 2009 ; qu'à sa majorité elle a bénéficié successivement de trois récépissés et de deux autorisations provisoires de séjour pour lui permettre d'achever sa scolarité ; qu'elle ne vit toutefois plus avec son oncle et ne conteste pas que ses parents résident au Gabon ; que si elle soutient, sans au demeurant l'établir, qu'elle poursuit des études de BTS, il est constant que le titre qu'elle a sollicité n'est pas un titre de séjour étudiant mais un titre vie privée et familiale ; que ni la seule durée du séjour en France de Mlle X ni l'existence de relations amicales ne suffisent à regarder l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne comme ayant porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, alors qu'il était notamment loisible à l'intéressée de solliciter un titre de séjour étudiant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Toulouse a retenu une atteinte excessive à la vie privée et familiale pour annuler son arrêté du 19 novembre 2009 ; que par suite, ce jugement doit être annulé en tant qu'il a annulé l'arrêté du 19 novembre 2009 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

Considérant qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens présentés par Mlle X devant le tribunal administratif ;

Considérant que Mme Françoise Souliman, secrétaire général de la préfecture de Haute-Garonne, avait reçu délégation pour signer les décisions afférentes au séjour des étrangers par un arrêté du préfet du 13 février 2009, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs ; que par suite le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision litigieuse manque en fait ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient Mlle X, l'arrêté du 19 novembre 2009 est motivé par un examen détaillé et précis de sa situation et comporte les éléments de fait et de droit qui en constituent le fondement ; que le moyen tiré d'un défaut de motivation ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 2° A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui justifie par tout moyen avoir résidé habituellement en France avec au moins un de ses parents légitimes, naturels ou adoptifs depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans, la filiation étant établie dans les conditions prévues à l'article L. 314-11 ; la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigée ; que Mlle X est entrée en France après avoir atteint l'âge de treize ans et n'y a résidé qu'avec son oncle, qui ne l'a pas adoptée ; qu'elle ne remplissait donc pas les conditions prévues par l'article L. 313-11 2° du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile pour obtenir de plein droit un titre de séjour ;

Considérant enfin que l'intéressée soutient pour la première fois en appel qu'elle pouvait bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en qualité d'étudiante ;

Considérant qu'aux termes de l'article 9 de la convention conclue le 2 décembre 1992 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République gabonaise, relative à la circulation et au séjour des personnes, publiée par le décret n° 2003-963 du 3 octobre 2003 : Les ressortissants de chacune des Parties contractantes désireux de poursuivre des études supérieures ou d'effectuer un stage de formation de niveau supérieur sur le territoire de l'autre doivent, outre le visa de long séjour prévu à l'article 4, justifier d'une attestation d'inscription ou de préinscription dans l'établissement d'enseignement où s'effectue le stage, ainsi que, dans tous les cas, de moyens d'existence suffisants (...) ; qu'aux termes de l'article 10 de la même convention : Pour tout séjour sur le territoire français devant excéder trois mois, les ressortissants gabonais doivent posséder un titre de séjour. (...) Ces titres de séjour sont délivrés conformément à la législation de l'Etat d'accueil. ; qu'aux termes de l'article 12 de ladite convention : Les dispositions de la présente convention ne font pas obstacle à l'application des législations respectives des deux Parties contractantes sur l'entrée et le séjour des étrangers sur tous les points non traités par la convention. et qu'enfin aux termes de l'article 14 : La présente convention abroge toutes dispositions antérieures contraires ; que par suite Mlle X ne peut en tout état de cause utilement se prévaloir des dispositions de l'accord-cadre en matière d'enseignement supérieur signé à Libreville le 30 avril 1971 ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention étudiant. En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France. / (...) II. - Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte mentionnée au I est accordée de plein droit : / (...) 5° A l'étranger ressortissant d'un pays ayant signé avec la France un accord de réciprocité relatif à l'admission au séjour des étudiants. (...) ; qu'il ressort de ces dernières dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 dont elles sont issues, que, lorsqu'un accord de réciprocité a été conclu entre la France et un pays tiers, les ressortissants de ce pays ont vocation à obtenir de plein droit une carte de séjour temporaire à l'occasion de la première délivrance de celle-ci ;

Considérant que ces dispositions doivent toutefois être appliquées sous réserve du contenu des accords bilatéraux eux-mêmes ; qu'au regard des dispositions précitées de la convention franco-gabonaise, cet accord n'a pas entendu dispenser les étudiants gabonais du visa de long séjour ; que par suite, Mlle X, qui ne conteste pas n'avoir jamais été bénéficiaire d'un tel visa, ne pouvait donc prétendre au bénéfice de plein droit d'une carte de séjour en qualité d'étudiante ; que si elle soutient en outre que sa scolarisation dans les deux années précédant sa majorité pouvait permettre au préfet de la dispenser de la présentation de ce visa, il est constant qu'elle n'a pas sollicité une carte de séjour en qualité d'étudiante ni le bénéfice des dispositions dérogatoires du I de l'article L. 313-7 précité, lequel est au demeurant soumis par le 2° de l'article R. 313-10 à la justification du caractère réel et sérieux des études poursuivies ; qu'enfin, Mlle X ne justifie pas de son inscription dans un établissement d'enseignement supérieur ; que par suite, elle n'est pas fondée à soutenir qu'elle devait bénéficier de plein droit d'une carte de séjour mention étudiant ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle X n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du préfet de la Haute-Garonne en date du 19 novembre 2009 ;

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

Considérant que le présent arrêt statuant sur les conclusions à fin d'annulation du jugement du Tribunal administratif de Toulouse présentées par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE, les conclusions à fin de sursis à exécution de ce jugement deviennent sans objet ;

Sur les conclusions de Mlle X :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la demande présentée par Mlle X devant le Tribunal administratif de Toulouse, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint au PREFET de LA HAUTE-GARONNE de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement au conseil de Mlle X de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Toulouse est annulé en tant qu'il a annulé l'arrêté du 19 novembre 2009 portant refus de séjour à Mlle X et lui faisant obligation de quitter le territoire français, et qu'il a enjoint au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du PREFET DE LA HAUTE-GARONNE à fin de sursis à exécution du jugement en date du 18 juin 2010.

Article 3 : Les conclusions de Mlle X sont rejetées.

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N°10BX01893-10BX01894


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10BX01893
Date de la décision : 17/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Catherine GIRAULT
Rapporteur public ?: M. ZUPAN
Avocat(s) : TERCERO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-03-17;10bx01893 ?
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