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24/03/2011 | FRANCE | N°10BX01088

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 24 mars 2011, 10BX01088


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 3 mai 2010, présentée pour M. Mohammed A, demeurant chez M. Mahdi B, ..., par Me Brel ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0905454, 0903661 en date du 6 avril 2010 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 3 novembre 2009 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français à destination du pays dont il a la nat

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 3 mai 2010, présentée pour M. Mohammed A, demeurant chez M. Mahdi B, ..., par Me Brel ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0905454, 0903661 en date du 6 avril 2010 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 3 novembre 2009 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français à destination du pays dont il a la nationalité et à enjoindre audit préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, d'autre part, à l'annulation de la décision du 4 juin 2009 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a refusé de l'admettre provisoirement au séjour et à enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il soit statué définitivement sur sa demande d'asile ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision et de prononcer l'injonction tendant à la délivrance d'un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 54-290 du 17 mars 1954 autorisant le Président de la République à ratifier la convention de Genève relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951, ensemble le décret n° 54-1055 du 14 octobre 1954 qui en porte publication ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 février 2011 :

- le rapport de M. Braud, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Normand, rapporteur public ;

Considérant que M. A, ressortissant algérien, est entré en France en compagnie de son épouse et de l'une de leurs filles le 5 septembre 2006 ; qu'après avoir fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français, il a déposé, le 2 juin 2009, une demande d'asile ; que, toutefois, le préfet de la Haute-Garonne a, le 4 juin 2009, rejeté sa demande d'admission provisoire au séjour au motif que sa demande d'asile n'était présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement ; qu'à la suite du rejet de sa demande par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le préfet de la Haute-Garonne a, par un arrêté en date du 3 novembre 2009, refusé de l'admettre au séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français à destination du pays dont il a la nationalité ; que, par un jugement en date du 6 avril 2010, le Tribunal administratif de Toulouse a joint les demandes de M. A tendant à l'annulation de la décision du 4 juin 2009 et de l'arrêté du 3 novembre suivant et les a rejetées ; que M. A relève appel de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision du préfet de la Haute-Garonne en date du 4 juin 2009 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. Constitue, en particulier, un recours abusif aux procédures d'asile la présentation frauduleuse de plusieurs demandes d'admission au séjour au titre de l'asile sous des identités différentes. Constitue également un recours abusif aux procédures d'asile la demande d'asile présentée dans une collectivité d'outre-mer s'il apparaît qu'une même demande est en cours d'instruction dans un autre Etat membre de l'Union européenne (...) ;

Considérant qu'il ressort des propres écritures de l'intéressé qu'il est entré en France en réponse à la demande de son père qui sollicitait son soutien en raison de son état de santé ; qu'il a d'ailleurs présenté une demande de titre de séjour en ce sens ; qu'il n'est pas contesté qu'à l'appui de cette demande, M. A n'a jamais fait état des risques qu'il encourrait en cas de retour dans son pays d'origine ; que, d'ailleurs, il ressort des pièces du dossier, et notamment de son recours devant la Cour nationale du droit d'asile, que, peu après son arrivée en France, il est retourné en Algérie du 26 septembre au 12 octobre 2006 pour des raisons familiales ; que ce n'est qu'après la notification de l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Bordeaux du 9 avril 2009, rejetant son recours contre le jugement de sa demande dirigée contre l'arrêté du 5 décembre 2007 l'obligeant à quitter le territoire français, qu'il a présenté, le 2 juin 2009, une demande d'asile, soit plus de deux ans après son entrée sur le territoire national ; que dans celle-ci, le requérant ne fait état d'aucun élément postérieur à son entrée sur le territoire national susceptible de motiver le dépôt d'une demande d'asile ; que, dans ces circonstances, il ne peut sérieusement soutenir que sa demande d'asile ne repose pas sur une fraude délibérée, qu'elle ne constitue pas un recours abusif et n'a pas été présentée en vue de faire échec à une mesure d'éloignement au motif que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a instruit sa demande et ne l'a pas rejetée comme étant irrecevable ou abusive ; que, par suite, le préfet de la Haute-Garonne a pu, sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni commettre d'erreur d'appréciation, rejeter sa demande d'admission provisoire au séjour au motif que sa demande d'asile n'avait été présentée qu'afin de faire échec à l'obligation de quitter le territoire français dont il faisait l'objet ;

En ce qui concerne l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne en date du 3 novembre 2009 :

S'agissant du refus de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. A, qui n'a pas établi l'illégalité du refus d'admission provisoire au séjour qui lui a été opposé, n'est, en tout état de cause, pas fondé à l'invoquer, par voie d'exception, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant refus de titre de séjour ;

Considérant, en deuxième lieu, que si M. A fait valoir que le préfet de la Haute-Garonne a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de son père, il ne produit à l'appui de ses allégations aucun élément de nature à établir que sa présence à ses côtés serait, à la date de la décision en litige, requise en raison de son état de santé ; qu'ainsi, l'erreur manifeste d'appréciation alléguée manque en fait ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme A sont en situation irrégulière avec un de leurs enfants et que leurs autres enfants résident en Algérie ; que, d'une part, cette décision n'a ni pour objet ni pour effet de séparer leur fille de ses parents ; que, d'autre part, si M. A soutient que le refus litigieux aura pour effet de perturber l'éducation de sa fille qui est scolarisée en France, cette circonstance ne suffit pas à établir que l'intérêt supérieur des enfants n'ait pas été pris en compte dans la décision en litige ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. A, qui n'a pas établi l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé, n'est pas fondé à l'invoquer, par voie d'exception, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. Le I de l'article L. 511-1 est alors applicable ; que l'article L. 742-6 de ce code dispose toutefois que : L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office (...) ;

Considérant que, faisant ainsi application du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, auquel renvoient les dispositions de l'article L. 742-6 du même code, le préfet de la Haute-Garonne n'était pas tenu, pour édicter la mesure d'éloignement litigieuse, d'attendre l'issue du recours que M. A a formé auprès de la Cour nationale du droit d'asile à l'encontre de la décision de rejet rendue le 31 juillet 2009 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que, par suite, M. A ne peut utilement se prévaloir de la violation des dispositions de l'article L. 742-3 de ce code qui ne lui étaient pas applicables ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants ; qu'il appartient à l'autorité administrative chargée de prendre la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger qui doit faire l'objet d'une mesure d'éloignement de s'assurer, sous le contrôle du juge, que les mesures qu'elle prend n'exposent pas l'étranger à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que M. A soutient qu'il a été soupçonné de s'être livré à des activités terroristes, qu'en raison de cette accusation et du fait que son père est un harki, il a été arrêté et victime de mauvais traitements à plusieurs reprises et qu'il fait l'objet d'une interdiction de quitter le territoire algérien ; que si le certificat médical produit atteste que M. A présente des cicatrices compatibles avec son récit, il ne produit toutefois aucun élément permettant de démontrer qu'il encourt un risque actuel, personnel et réel en cas de retour dans son pays d'origine ; que, d'ailleurs, ainsi qu'il a été dit, M. A, dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, est retourné en Algérie du 26 septembre au 12 octobre 2006 sans qu'il fût exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, la décision fixant le pays à destination duquel M. A serait renvoyé s'il ne se conformait pas à l'obligation de quitter le territoire français ne méconnaît ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M. A, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions du requérant tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font, en tout état de cause, obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. A la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 10BX01088


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme TEXIER
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : BREL

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 24/03/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10BX01088
Numéro NOR : CETATEXT000023885835 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-03-24;10bx01088 ?
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