La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/04/2011 | FRANCE | N°10BX00375

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 26 avril 2011, 10BX00375


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour, le 12 février 2010 par télécopie et par courrier le 15 février 2010, présentée pour Mlle Sermina A, demeurant ..., par Me Chambaret, avocat ;

La requérante demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904180 du 30 décembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 13 août 2009, par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire franç

ais et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite ;

2°) d'...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour, le 12 février 2010 par télécopie et par courrier le 15 février 2010, présentée pour Mlle Sermina A, demeurant ..., par Me Chambaret, avocat ;

La requérante demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904180 du 30 décembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 13 août 2009, par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite ;

2°) d'annuler ledit arrêté en toutes ses dispositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 300 euros versée à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi nº 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 janvier 2011 :

- le rapport de M. Lamarche, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Vié, rapporteur public ;

Considérant que Mlle A interjette régulièrement appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 30 décembre 2009 rejetant sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 13 août 2009 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation de la destination de cette mesure d'éloignement dans le pays dont elle a la nationalité ou dans lequel elle établit être légalement admissible ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que lorsqu'une partie présente une note en délibéré, il appartient au juge d'en prendre connaissance puis de la viser après l'avoir l'analysée ; que la note en délibéré enregistrée au tribunal administratif le 23 septembre 2009 a été versée au dossier mais n'a pas été visée ; que le jugement est ainsi entaché d'irrégularité ; que Mlle A est dès lors, fondée à en demander l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mlle A devant le tribunal administratif ;

Sur la légalité de la décision du préfet de la Haute-Garonne portant refus de séjour :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000 : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi nº 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) ; qu'il résulte de ces dispositions qu'elles ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour prise sur une demande présentée par la personne intéressée ; qu'il en est notamment ainsi lorsque le préfet refuse la délivrance d'une carte de séjour à un étranger qui a sollicité l'asile, sa décision devant alors être regardée comme prise en réponse à une demande d'admission au séjour en qualité de demandeur d'asile ; que Mlle A a bien présenté une demande d'asile par courrier enregistré le 22 mai 2009 ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de la Haute-Garonne n'aurait pas mis en oeuvre la procédure contradictoire prévue par ces dispositions avant de rejeter la demande de délivrance d'un titre de séjour ne peut être utilement invoqué ;

Considérant que l'arrêté attaqué vise les textes dont il fait application et l'ensemble des motifs de fait à l'origine du rejet de la demande ; que le préfet n'était pas tenu de mentionner tous les éléments invoqués par la requérante ; que si la requérante soutient que l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile afférent au maintien sur le territoire français du demandeur d'asile pendant l'examen de sa demande par les organismes compétents n'a pas été visé, il résulte des pièces du dossier que l'arrêté vise l'article L. 742-7 dudit code aux termes duquel L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre, doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre I du livre V (...) ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation en droit ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ; (...) ; que, pour l'application des dispositions précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ; que, si Mlle A fait valoir que sa mère et ses frères et soeurs résident en France, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, Mlle A, célibataire et sans enfant, est entrée irrégulièrement en France à l'âge de 19 ans ; que l'intéressée soutient que sa mère élève seule ses quatre enfants, que ses deux jeunes frères sont scolarisées en France et qu'elle suit avec sa soeur des cours de français ; que si elle se prévaut également de l'état de santé de sa mère, et de son frère et sa soeur, elle ne justifie pas de la gravité de l'état de santé de sa famille rendant indispensable sa présence en France au soutien de celle-ci ; que sa mère qui se trouve également en situation irrégulière, fait l'objet d'un refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français et elle-même n'établit pas être dépourvue de toutes attaches familiales dans son pays d'origine ; que compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard au caractère récent de son entrée en France et des conditions de son séjour, la décision de refus de titre de séjour n'a pas porté au droit de Mlle A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, cette décision ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur d'appréciation ; qu'enfin si la requérante invoque une atteinte au droit à la vie personnelle distincte de la vie privée et familiale, elle n'assortit ce moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'atteinte à la vie privée et familiale doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle A n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

Sur la légalité de la décision fixant obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : I. L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation ne peut être utilement invoqué à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Considérant qu'il ressort des motifs de l'arrêté attaqué que le préfet de la Haute-Garonne s'est livré à un examen des circonstances de l'espèce et en particulier de la situation personnelle et familiale de la requérante ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés d'une atteinte disproportionnée ou manifestement erronée à la vie privée, familiale et personnelle, de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et de libertés fondamentales et d'une erreur de fait sur les conséquences de la décision sur sa situation personnelle, qui reprennent ceux présentés à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant, en premier lieu, que la décision désignant le pays de renvoi énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle repose ; qu'en tout état de cause, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination n'est pas suffisamment motivée en droit, dès lors que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne s'attachent qu'aux modalités d'exécution de la mesure ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné: 1o A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2o Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3o Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; que la requérante soutient que le préfet de la Haute-Garonne l'a regardée comme de nationalité serbo-monténégrine et a commis une erreur de fait et de droit en désignant la Serbie-Monténégro comme pays de renvoi alors que le Monténégro est un Etat indépendant depuis 2006 ; que, toutefois, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi dès lors que le préfet a prévu que l'intéressée pourrait être reconduite d'office au terme du délai imparti à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout pays dans lequel elle établirait être légalement admissible ; que, par conséquent le moyen doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; que la requérante fait valoir qu'elle encourt des risques en raison de son appartenance à la communauté Rom en cas de retour dans son pays et que sa maison familiale à Mitrovica a été détruite ; qu'elle n'apporte aucun élément précis de nature à donner corps au caractère personnel des risques auxquels elle serait exposée ; qu'ainsi, la décision ne méconnait pas les stipulations précitées ;

Considérant que, par suite, Mlle A n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 13 août 2009 ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le conseil de Mlle A demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 30 décembre 2009 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mlle A devant le tribunal administratif de Toulouse est rejetée.

''

''

''

''

5

No 10BX00375


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 10BX00375
Date de la décision : 26/04/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FLECHER-BOURJOL
Rapporteur ?: M. Frantz LAMARCHE
Rapporteur public ?: M. VIE
Avocat(s) : CHAMBARET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-04-26;10bx00375 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award