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12/05/2011 | FRANCE | N°10BX02805

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, Juge des reconduites à la frontière, 12 mai 2011, 10BX02805


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour par télécopie le 10 novembre 2010, régularisée le 16 novembre 2010, sous le n° 10BX02805, présentée pour M. Nabil A demeurant ..., par Me Canadas, avocat ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004164 en date du 7 octobre 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 octobre 2010 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a décidé sa reconduite à la frontière, ensemble les décisions du m

me jour fixant le pays de renvoi et portant placement en rétention administrative ;
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Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour par télécopie le 10 novembre 2010, régularisée le 16 novembre 2010, sous le n° 10BX02805, présentée pour M. Nabil A demeurant ..., par Me Canadas, avocat ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004164 en date du 7 octobre 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 octobre 2010 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a décidé sa reconduite à la frontière, ensemble les décisions du même jour fixant le pays de renvoi et portant placement en rétention administrative ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente d'un réexamen de sa situation dans un délai de deux mois, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, en application des dispositions combinées des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, de la somme de 1.500 euros ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du président de la Cour en date du 7 février 2011 portant désignation de Mme Catherine Girault, président de chambre, en qualité de juge d'appel des jugements de reconduite à la frontière ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 avril 2011:

- le rapport de Mme Girault ;

- les observations de Me Canadas, avocat de M. A ;

- et les conclusions de M. Zupan, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Canadas, avocat de M. A ;

Considérant que M. A, de nationalité marocaine, relève appel du jugement n° 1004164 en date du 7 octobre 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 4 octobre 2010 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a décidé sa reconduite à la frontière, ensemble les décisions du même jour fixant le pays à destination duquel il sera reconduit et ordonnant son placement en rétention administrative ;

En ce qui concerne le refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique et au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; que, pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

Considérant que M. A, s'il a vécu jusqu'à l'âge de 26 ans au Maroc, est entré en France en mars 2009 pour y rejoindre son père, résidant régulièrement dans ce pays depuis 1993 ; qu'en juillet 2009, M. A a fait la connaissance de Mlle Virginie B avec laquelle il a construit le projet de se marier ; qu'en septembre 2010, les concubins ont commencé à constituer un dossier administratif à cette fin ; que si l'interpellation de M. A par les services de police le 4 octobre 2010 a momentanément empêché la constitution de ce dossier, il ressort des pièces du dossier que le projet de mariage était établi avant la date de la décision attaquée ; que, dans ces conditions, les liens tissés à la date de la décision attaquée par M. A et sa compagne en France, qui se sont au demeurant confirmés postérieurement par la célébration de leur mariage le 26 novembre 2010 à Lyon, doivent être regardés comme tels que cette décision a porté au respect de la vie privée et familiale du requérant une atteinte excessive ; que cet arrêté méconnaît donc les dispositions précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 4 octobre 2010 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a décidé sa reconduite à la frontière, ensemble la décision du même jour fixant le pays à destination duquel il sera reconduit ;

En ce qui concerne la mesure de placement en rétention :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision de placement en rétention a été exécutée ; que par suite, c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Toulouse a jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur sa légalité ; que le jugement doit être annulé sur ce point ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. A ; qu'il résulte de ce qui précède que la décision de placement en rétention doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la reconduite à la frontière qui la fonde ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'en vertu de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au titre V du présent livre et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ;

Considérant qu'à la suite de l'annulation de l'arrêté en litige, il incombe au préfet, en application des dispositions précitées de l'article L. 512-4 du code, de délivrer à M. A une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours suivant la notification de la présente décision et de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt ; que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que par décision du 7 mars 2011 le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Bordeaux a rejeté la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. A ; que par suite son conseil n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Toulouse du 7 octobre 2010, l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne en date du 4 octobre 2010 décidant la reconduite à la frontière de M. A et la décision du même jour le plaçant en rétention sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Garonne de procéder au réexamen de la situation de M. A dans un délai de deux mois suivant la notification de la présente décision et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 10BX02805


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 10BX02805
Date de la décision : 12/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-02-02 Étrangers. Reconduite à la frontière. Légalité interne. Droit au respect de la vie familiale.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine GIRAULT
Rapporteur public ?: M. ZUPAN
Avocat(s) : CANADAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-05-12;10bx02805 ?
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