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31/05/2011 | FRANCE | N°10BX02708

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 31 mai 2011, 10BX02708


Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 27 octobre 2010, présentée par le PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES ;

Le PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001233 du 30 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Pau, à la demande de M. Yakub X, a annulé son arrêté en date du 26 mai 2010 en tant qu'il fixe le pays à destination duquel l'intéressé devait être reconduit ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Pau ;

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Vu la convention européenne de ...

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 27 octobre 2010, présentée par le PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES ;

Le PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001233 du 30 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Pau, à la demande de M. Yakub X, a annulé son arrêté en date du 26 mai 2010 en tant qu'il fixe le pays à destination duquel l'intéressé devait être reconduit ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Pau ;

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Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 2000-321 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mai 2011 :

- le rapport de M. Valeins, président assesseur ;

- et les conclusions de M. Lerner, rapporteur public ;

Considérant que le PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES a pris à l'encontre de M. X, le 26 mai 2010, un arrêté lui refusant le titre de séjour qu'il sollicitait, assorti d'une obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il serait reconduit ; que, par un jugement du 30 septembre 2010, le Tribunal administratif de Pau a annulé l'arrêté préfectoral en tant qu'il fixe le pays de destination et a rejeté le surplus de la demande de M. X tendant à l'annulation du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire ; que le PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES interjette appel de ce jugement en tant qu'il annule la décision fixant le pays de renvoi ; que par la voie de l'appel incident, M. X conclut à l'annulation du jugement en tant qu'il rejette le surplus de sa demande ;

Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire :

Considérant qu'aux termes de l'article 20 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'admettre M. X au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

Sur l'appel principal :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par un arrêté du PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES, en date du 16 septembre 2010, Mme Demiguel, secrétaire générale de la préfecture, avait reçu délégation pour signer l'ensemble des décisions et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département à l'exception des mesures de réquisition, des déclinatoires de compétence et des actes pour lesquels délégation de signature avait été donnée à un chef de service de l'Etat dans le département ; qu'ainsi, la requête introductive d'instance présentée pour l'Etat et signée par Mme Demiguel n'est pas entachée d'incompétence ; que, par suite, la fin de non recevoir opposée par M. X et tirée de ce que la requête aurait été présentée par un fonctionnaire n'ayant pas reçu délégation pour ce faire doit être écartée ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L.513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Commission des recours des réfugiés lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile (...) / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; qu'aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que si M. X, ressortissant de la Fédération de Russie et d'origine tchétchène, soutient qu'une grave répression contre les tchétchènes existerait au Daghestan menée par la Russie et qu'en raison des menaces et des faits qu'il y a subis avant de venir en France, sa reconduite au Daghestan lui ferait courir le risque de se voir infliger des traitements inhumains et dégradants, la décision attaquée ne prévoit pas sa reconduite dans cette région de la Fédération de Russie ; que s'il invoque la détention et les sévices qu'il aurait subis au Daghestan en raison de sa fréquentation d'étudiants revendiquant un engagement pour la cause tchéchène ainsi que la circonstance qu'il aurait été convoqué par les autorités de police, ces allégations ne sont appuyées que de copies de documents ainsi dépourvus de toute force probante ; que d'ailleurs les demandes d'asile présentées par M. X, ainsi que la protection subsidiaire, avaient été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 31 juillet 2009, décision confirmée le 19 mars 2010 par la Cour nationale du droit d'asile, puis par une nouvelle décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 11 mai 2010 ; qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la méconnaissance par le PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES des dispositions précitées du 1° de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler la décision fixant le pays à destination duquel l'intéressé devrait être reconduit ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal administratif ;

Considérant qu'il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français et fixe le pays à destination duquel il sera renvoyé ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre de la décision par laquelle le PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES a fixé le pays de renvoi de M. X ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des termes mêmes de l'arrêté attaqué, que le PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES a procédé à l'examen individuel de la situation de M. X et ne s'est pas considéré comme lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile ; que, par suite, la décision fixant le pays à destination duquel l'intéressé devrait être renvoyé n'est pas entachée d'erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Pau a annulé son arrêté du 26 mai 2010 en tant qu'il fixe le pays à destination duquel M. X devrait être renvoyé ;

Sur l'appel incident :

Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif, d'écarter le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du refus de titre de séjour ; que, si M. X entend soutenir que le PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES n'aurait pas procédé à un examen individuel de sa situation, cette allégation est contredite par les pièces du dossier et notamment par les termes mêmes de la décision attaquée ;

Considérant qu'aux termes des dispositions du 1er alinéa de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : I.-L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite d'une décision du 31 juillet 2009 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant la demande d'asile présentée par M. X, confirmée par décision de la Cour nationale du droit d'asile du 19 mars 2010 et après une demande par l'intéressé de réexamen de sa demande d'asile, par arrêté en date du 7 avril 2010, le PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES a refusé d'admettre M. X au séjour pour le motif que sa nouvelle demande d'asile n'avait pour but que de faire échec à une mesure d'éloignement imminente ; que, toutefois, par le même arrêté, l'intéressé a été autorisé à se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la nouvelle décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que, ni les dispositions précitées invoquées par M. X, ni aucune autre disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'interdisait au PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES, qui était toujours saisi d'une demande d'admission au séjour, après une nouvelle décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, en date du 11 mai 2010, rejetant la demande de réexamen présentée par M. X, de prendre comme il l'a fait un nouvel arrêté, en date du 20 mai 2010, abrogeant celui du 7 avril 2010, mais refusant l'admission au séjour en qualité de demandeur d'asile et l'obligeant à quitter le territoire français ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : / (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente (...) ;

Considérant que M. X ne peut utilement soutenir que le refus de titre de séjour attaqué du 26 mai 2010 aurait été pris en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il est constant que ces dispositions ne constituent pas le fondement de cette décision ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Pau a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 26 mai 2010 en tant qu'il porte refus d'admission au séjour et obligation de quitter le territoire français ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette l'appel incident de M. X n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES de réexaminer la situation de M. X doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : M. X est admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Pau du 30 septembre 2010 est annulé en tant qu'il annule l'arrêté du PRÉFET DES HAUTES-PYRÉNÉES en date du 26 mai 2010 en tant qu'il fixe le pays à destination duquel M. X doit être renvoyé.

Article 3 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Pau tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination portée par l'arrêté préfectoral du 26 mai 2010 est rejetée.

Article 4 : L'appel incident et les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

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No 10BX02708


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 10BX02708
Date de la décision : 31/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. DUDEZERT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre VALEINS
Rapporteur public ?: M. LERNER
Avocat(s) : OUDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-05-31;10bx02708 ?
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