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27/06/2011 | FRANCE | N°10BX03201

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 27 juin 2011, 10BX03201


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 30 décembre 2010 en télécopie et le 31 décembre 2010 en original, présentée pour M. Oumalt X domicilié chez Mme Idalova Y, ... ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002489 du 2 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 août 2010 du préfet de la Charente-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arr

êté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ou une autor...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 30 décembre 2010 en télécopie et le 31 décembre 2010 en original, présentée pour M. Oumalt X domicilié chez Mme Idalova Y, ... ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002489 du 2 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 août 2010 du préfet de la Charente-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ou une autorisation provisoire dans un délai de cinq jours suivant la notification de l'arrêt, ou de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat au paiement d'une somme de 1 500 euros au conseil du requérant, sur le fondement de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mai 2011 :

- le rapport de M. H. Philip de Laborie, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme M-P. Dupuy, rapporteur public ;

Considérant que M. X, ressortissant russe d'origine tchétchène, entré en France le 17 janvier 2005 selon ses déclarations, a présenté en vain des demandes tendant à obtenir le statut de réfugié ; qu'à la suite du rejet, par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 9 avril 2010, de sa demande de réexamen de sa situation au regard du droit d'asile, il a demandé, le 31 mai 2010, la régularisation de sa situation au regard du droit au séjour en invoquant les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 16 août 2010, le préfet de la Charente-Maritime a rejeté cette demande et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois en fixant son pays d'origine comme pays de destination ; que M. X fait appel du jugement du 2 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté son recours pour excès de pouvoir dirigé contre cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

Considérant que l'article 1 de l'arrêté du préfet de la Charente-Maritime du 27 novembre 2009, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, donne délégation de signature à M. Julien Charles, secrétaire général de la préfecture de la Charente-Maritime, pour signer tous actes, correspondances et décisions, à l'exception de certaines matières qui sont précisément définies, parmi lesquelles ne figurent pas les refus de séjour avec obligation de quitter le territoire national et fixant le pays de renvoi ; que l'étendue de cette délégation est, contrairement à ce que soutient le requérant, suffisamment précisée ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit être écarté ;

Considérant que l'arrêté contesté, qui énonce les éléments de fait et de droit sur lesquels est fondé le refus de séjour, est suffisamment motivé au regard des obligations découlant de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ; que sa motivation n'est pas de nature à révéler que le préfet se serait abstenu de procéder à l'examen de la situation personnelle et familiale du requérant ;

Considérant, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / (...) ;

Considérant que M. X fait valoir qu'il risque de subir dans son pays d'origine des persécutions du fait de son soutien au mouvement tchétchène et des traitements inhumains subis par sa famille, qu'il s'est marié religieusement avec une ressortissante tchétchène, autorisée au séjour en raison de sa demande d'asile et qui vient de mettre au monde leur enfant, qu'il réside depuis cinq ans en France et qu'il dispose d'une promesse d'embauche ; que, toutefois, comme l'a relevé le tribunal administratif, il ne démontre ni qu'il serait exposé dans son pays à des risques de persécutions, ni la durée exacte de sa présence en France, ni son insertion dans la société française, ni son mariage religieux avec une compatriote ; que la naissance de l'enfant né de cette union est postérieure à l'arrêté attaqué ; que si, à l'appui de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, il produit en appel une promesse d'embauche en qualité de maçon dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, cette promesse est postérieure à l'arrêté contesté et, au demeurant, cette profession ne figure pas sur la liste des métiers ouvrant droit, pour la région Poitou-Charentes, à l'octroi du titre de séjour demandé ; que, ne justifiant en définitive d'aucune circonstance humanitaire ou exceptionnelle au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'est pas fondé à se prévaloir de ces dispositions ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant que, pour les motifs exposés ci-dessus, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée doit être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si M. X fait valoir sa relation avec une compatriote, vivant à Rodez, dont la demande d'asile était en cours d'examen à la date de l'arrêté attaqué, avec laquelle il indique s'être marié religieusement et qui était enceinte à la date de cet arrêté, il n'établit pas qu'il avait avec elle, à la date de l'arrêté contesté, une relation stable et durable ; que la reconnaissance de son enfant est postérieure à l'arrêté litigieux ; que, dans ces conditions, eu égard aux conditions du séjour en France de l'intéressé et compte tenu des attaches familiales conservées par M. X dans son pays d'origine, où résident son père, sa soeur et son oncle et où il a vécu jusqu'à l'âge d'au moins trente-deux ans, la décision par laquelle le préfet de la Charente-Maritime l'a obligé à quitter le territoire national n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi, cette décision n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que, toutefois, M. X ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance de ces dispositions dès lors que la naissance de son enfant est postérieure à la décision attaquée ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de la convention relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français contenus dans l'arrêté contesté ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant que le jugement attaqué a omis de répondre au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de ce que le préfet s'est cru lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile et n'a pas examiné sa situation personnelle au regard de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler le jugement sur ce point, d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de M. X tendant à l'annulation de la décision fixant la Russie comme pays de destination ;

Considérant que, pour les motifs exposés plus haut, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision litigieuse doit être écarté ;

Considérant que la décision portant fixation du pays de renvoi, qui énonce les éléments de fait et de droit sur lesquels elle se fonde, est suffisamment motivée ; que si le préfet de la Charente-Maritime se réfère dans son arrêté aux décisions de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, il indique que le requérant ne justifie pas être personnellement menacé en cas de retour en Russie, et que les pièces produites au soutien de cette thèse ne présente aucune garantie d'authenticité ; que cette motivation révèle que le préfet s'est livré à l'examen de la situation personnelle de M. X ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants , et qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ;

Considérant que M. X, dont les demandes tendant à obtenir le statut de réfugié ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, la Commission de recours des réfugiés puis la Cour nationale du droit d'asile, n'a pas fourni, devant le tribunal administratif ou la cour, les avis de recherche dont il s'était prévalu devant ces instances ; que le certificat établi par une psychanalyste, qu'il verse au dossier, se borne à reprendre ses déclarations ; qu'aucun certificat établi par un médecin et concernant M. X lui-même n'a été produit ; que les attestations versées au dossier sont par elles-mêmes insuffisantes pour établir que ce dernier est personnellement exposé à des risques de traitements inhumains en cas de retour en Russie ; que, dans ces conditions, la décision fixant le pays de destination ne peut être regardée comme ayant méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à contester la légalité de la décision fixant le pays de destination contenue dans l'arrêté contesté ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M. X n'appelle lui-même aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions du requérant tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Charente-Maritime de réexaminer sa demande de titre de séjour doivent être rejetées ;

Sur l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que l'Etat n'étant pas la partie perdante, les conclusions présentées au titre du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi sur l'aide juridique du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 2 décembre 2010 est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de M. X dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi contenue dans l'arrêté du préfet de la Charente-Maritime du 16 août 2010.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel, ainsi que les conclusions de M. X devant le tribunal administratif dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi sont rejetés.

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No 10BX03201


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Henri de LABORIE
Rapporteur public ?: Mme DUPUY
Avocat(s) : BREILLAT

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 27/06/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10BX03201
Numéro NOR : CETATEXT000024364256 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-06-27;10bx03201 ?
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