La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/06/2011 | FRANCE | N°10BX02565

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 30 juin 2011, 10BX02565


Vu, I, la requête, enregistrée au greffe de la cour en télécopie le 5 octobre 2010 sous le n° 10BX02565 et en original le 8 octobre 2010, présentée pour LA POSTE, dont le siège social est 44, boulevard de Vaugirard à Paris Cedex 15 (75757) ;

LA POSTE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501249 en date du 17 juin 2010, par lequel le tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à verser à Mme Annie X une somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif ; >
........................................................................................

Vu, I, la requête, enregistrée au greffe de la cour en télécopie le 5 octobre 2010 sous le n° 10BX02565 et en original le 8 octobre 2010, présentée pour LA POSTE, dont le siège social est 44, boulevard de Vaugirard à Paris Cedex 15 (75757) ;

LA POSTE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501249 en date du 17 juin 2010, par lequel le tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à verser à Mme Annie X une somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif ;

.....................................................................................................................

Vu, II, la requête, enregistrée le 8 octobre 2010 sous le n° 10BX02575, ainsi que le mémoire en production de pièces, enregistré le 27 décembre 2010, présentés pour Mme Annie X, demeurant ... ;

Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement susvisé n° 0501249 du tribunal administratif de Toulouse en ce qu'il a limité à 5 000 euros le montant de l'indemnité au versement de laquelle il a condamné La Poste au titre du préjudice subi par elle du fait du blocage de sa carrière dans un corps de reclassement ;

2°) d'annuler le rejet implicite de sa réclamation préalable ;

3°) de condamner La Poste à lui verser la somme de 59 400 euros en réparation de l'ensemble de ses préjudices, majorée des intérêts à compter du 28 juillet 2004 ;

4°) d'ordonner la reconstitution de sa carrière ;

5°) de mettre à la charge de La Poste la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu, enregistrée le 14 juin 2011, la note en délibéré présentée pour Mme X ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

Vu la loi n° 2005-516 du 20 mai 2005 ;

Vu le décret n° 72-503 du 23 juin 1972 ;

Vu le décret n° 90-1237 du 31 décembre 1990 ;

Vu le décret n° 92-928 du 7 septembre 1992 ;

Vu le décret n° 2009-1555 du 14 décembre 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 juin 2011 :

- le rapport de Mme F. Rey-Gabriac, premier conseiller ;

- les observations de Me Herrmann, avocat de Mme X ;

- les conclusions de Mme M-P. Dupuy, rapporteur public ;

La parole ayant à nouveau été donnée à Me Herrmann ;

Considérant que, par lettre en date du 28 juillet 2004, Mme X, membre du corps de reclassement des contrôleurs de LA POSTE, a vainement demandé au président de LA POSTE l'indemnisation de préjudices qu'elle estime avoir subis à cause du blocage de sa carrière, faute en particulier qu'aient été établies des listes d'aptitude lui permettant d'accéder à un corps supérieur ; que, saisi par Mme X d'une demande indemnitaire et de conclusions aux fins d'annulation et d'injonction dirigées contre LA POSTE, le tribunal administratif de Toulouse a, par un jugement du 17 juin 2010, condamné LA POSTE à lui verser une indemnité de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi par elle à raison du blocage de sa carrière, mis à la charge de LA POSTE une somme de 900 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus de ses conclusions ; que, par l'instance enregistrée sous le n° 10BX02565, LA POSTE fait appel de ce jugement en tant qu'il la condamne ; que, par l'instance enregistrée sous le numéro 10BX02575, Mme X fait appel de ce jugement en tant que, rejetant le surplus de sa demande, il lui accorde une réparation qu'elle estime insuffisante ; qu'il y a lieu de joindre ces deux instances dirigées contre un même jugement pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la recevabilité de la demande devant le tribunal administratif et la régularité du jugement :

Considérant que la demande préalable de Mme X énonce de manière suffisante, au regard notamment de sa situation personnelle, les moyens présentés à l'appui de cette demande, laquelle était de nature à faire naître une décision de rejet ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par LA POSTE aux conclusions de Mme X et tirée de prétendues carences affectant sa réclamation préalable ne peut être accueillie ;

Considérant que le jugement attaqué vise et analyse les moyens formulés par les parties ; que ce jugement indique les raisons qui lui font tenir le recours et la réclamation préalable de Mme X pour recevables ; que les premiers juges, après avoir écarté l'exception de prescription opposée par LA POSTE retiennent sa responsabilité en exposant de manière suffisante et sans contradiction les motifs pour lesquels ils regardent son comportement comme fautif ; que, par suite, les moyens tenant à une irrégularité du jugement attaqué doivent être écartés ;

Au fond :

En ce qui concerne l'action en responsabilité :

Considérant qu'aux termes de l'article 29 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom : Les personnels de La Poste et de France Télécom sont régis par des statuts particuliers, pris en application de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat (...) ; que l'article 31 de la même loi a permis à LA POSTE d'employer, sous le régime des conventions collectives, des agents contractuels ;

Considérant qu'aux termes de l'article 26 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : En vue de favoriser la promotion interne, les statuts particuliers fixent une proportion de postes susceptibles d'être proposés au personnel appartenant déjà à l'administration (...), non seulement par voie de concours (...) mais aussi par la nomination de fonctionnaires (...) suivant l'une des modalités ci-après : / 1° Examen professionnel ; / 2° Liste d'aptitude établie après avis de la commission paritaire du corps d'accueil (...) ; qu'en vertu de l'article 58 de la loi du 11 janvier 1984 et des dispositions réglementaires prises pour son application, il appartient à l'autorité administrative, sauf à ce qu'aucun emploi vacant ne soit susceptible d'être occupé par des fonctionnaires à promouvoir, d'établir annuellement des tableaux d'avancement en vue de permettre l'avancement de grade ;

Considérant, d'une part, que la possibilité offerte aux fonctionnaires qui sont demeurés dans les corps dits de reclassement de LA POSTE de bénéficier, au même titre que les fonctionnaires ayant choisi d'intégrer les nouveaux corps dits de reclassification créés en 1993, de mesures de promotion organisées en vue de pourvoir des emplois vacants proposés dans ces corps de reclassification , ne dispensait pas le président de LA POSTE de faire application des dispositions de la loi du 11 janvier 1984 relatives au droit à la promotion interne dans le cadre des corps de reclassement ;

Considérant, d'autre part, que le législateur, par la loi du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales, en permettant à LA POSTE de ne recruter, le cas échéant, que des agents contractuels de droit privé, n'a pas entendu priver d'effet les dispositions de la loi du 11 janvier 1984 relatives au droit à la promotion interne à l'égard des fonctionnaires reclassés ; que, par suite, les décrets régissant les statuts particuliers des corps de reclassement , en ce qu'ils n'organisaient pas de voies de promotion interne autres que celles liées aux titularisations consécutives aux recrutements externes et privaient en conséquence les fonctionnaires reclassés de toute possibilité de promotion interne, étaient entachés d'illégalité ; qu'en faisant application de ces décrets illégaux et en refusant de prendre toute mesure de promotion interne au bénéfice des fonctionnaires reclassés au motif que ces décrets en interdisaient la possibilité, le président de LA POSTE a, de même, commis une illégalité ;

Considérant qu'en s'abstenant illégalement, ainsi qu'il vient d'être dit, de prendre les mesures susceptibles de permettre l'application du droit à la promotion interne garanti aux fonctionnaires reclassés , LA POSTE a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, sans qu'elle puisse utilement se prévaloir de ce qu'il appartenait à l'Etat de veiller au respect de ce droit ; que, toutefois, ce comportement fautif de LA POSTE n'ouvre droit à réparation au profit de Mme X qu'à la condition qu'il soit à l'origine d'un préjudice personnel, direct et certain subi par elle ;

Considérant que Mme X, membre du corps de reclassement des contrôleurs, si elle indique être entrée dans ce corps et ce grade par concours externe en 1981 et y avoir été titularisée en 1982, ne précise pas le corps supérieur de reclassement de LA POSTE auquel elle souhaitait accéder ; qu'elle ne donne pas d'indication quant à la date à laquelle elle aurait rempli les conditions statutaires pour être promue, ce qui ne permet pas au juge de déterminer une période de responsabilité attachée au préjudice de carrière allégué ; que, dans ces conditions et alors même qu'elle verse aux débats des appréciations favorables quant à sa manière de servir, il ne peut être regardé comme établi que l'intéressée aurait perdu une chance sérieuse d'accéder à un corps supérieur si des promotions avaient été organisées au bénéfice des fonctionnaires reclassés après 1993 ; que, par suite, n'est pas non plus établie la réalité du préjudice de carrière invoqué par Mme X, lequel préjudice s'apprécie en fonction de données propres à l'agent dans le cadre des emplois de reclassement et non en fonction d'une comparaison globale entre ces emplois et ceux de reclassification ;

Considérant, cependant, que le comportement fautif relevé plus haut, consistant à priver de manière générale les fonctionnaires reclassés de toute possibilité de promotion interne, est la source d'un préjudice moral et de troubles dans les conditions d'existence subis par Mme X ; qu'elle est en droit d'en obtenir réparation sans qu'il puisse lui être reproché de ne pas avoir emprunté les voies de promotion offertes par les corps de reclassification ; que le tribunal administratif a fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en l'estimant à la somme globale de 5 000 euros tous intérêts échus au jour de son jugement ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que LA POSTE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement dont elle fait appel, le tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à verser à Mme X la somme de 5 000 euros tous intérêts échus au jour de son jugement ; qu'il en résulte également, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à ses conclusions indemnitaires d'appel, que Mme X n'est pas fondée à demander le rehaussement de cette somme ;

En ce qui concerne les autres conclusions de Mme X :

Considérant que ni les prétentions indemnitaires de Mme X ni sa réclamation préalable à visée purement pécuniaire ne permettent d'accueillir ses conclusions tendant à la reconstitution de sa carrière ; qu'en tout état de cause, la seule condamnation de LA POSTE à réparer son préjudice moral ne saurait justifier sa demande à fin d'injonction ; qu'elle n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que ces conclusions ont été rejetées par le tribunal administratif ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de LA POSTE et de Mme X sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, autres que celles formées dans leurs requêtes, sont rejetées.

''

''

''

''

5

Nos 10BX02565, 10BX02575


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme DUPUY
Avocat(s) : HERRMANN

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 30/06/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10BX02565
Numéro NOR : CETATEXT000024364229 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-06-30;10bx02565 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award