La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/09/2011 | FRANCE | N°11BX00419

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 13 septembre 2011, 11BX00419


Vu la requête, enregistrée au greffe le 2 février 2011 par télécopie et le 8 février 2011 en original, présentée pour M. Rasul Aboukalidovitch A, demeurant au MRAP, 35 ter rue de la Madeleine à Albi (81000), par Me Dujardin, avocate ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 août 2010 de la préfète du Tarn, lui refusant un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays

de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral précité de la préfète du Ta...

Vu la requête, enregistrée au greffe le 2 février 2011 par télécopie et le 8 février 2011 en original, présentée pour M. Rasul Aboukalidovitch A, demeurant au MRAP, 35 ter rue de la Madeleine à Albi (81000), par Me Dujardin, avocate ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 août 2010 de la préfète du Tarn, lui refusant un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral précité de la préfète du Tarn ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Tarn de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard par application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, et, à défaut, de réexaminer sa demande dans le même délai, assorti de la même astreinte par application de l'article L. 911-3 du même code ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2011 :

- le rapport de M. Lamarche, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Vié, rapporteur public ;

Vu, enregistrée le 19 août 2011, la note en délibéré produite pour M. A ;

Considérant que M. A, né le 4 octobre 1968 de nationalité russe d'origine tchétchène, a sollicité le 11 septembre 2007 son admission au séjour en qualité de réfugié ; que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 12 juin 2008 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 15 juin 2010 ; que par arrêté en date du 6 août 2010, la préfète du Tarn a rejeté sa demande d'admission au séjour, l'a également obligé à quitter le territoire français et a désigné la Russie comme pays de destination de cette mesure d'éloignement ; que M. A interjette régulièrement appel du jugement du 28 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté précité ;

Sur les conclusions en annulation :

Considérant que par arrêté du 9 juillet 2010, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le 12 juillet 2010, la préfète du Tarn a donné à Mme Béatrice Steffan, secrétaire général de la préfecture du Tarn, délégation dépourvue de caractère général pour signer notamment les arrêtés relevant des attributions de l'Etat dans le département et, par voie de conséquence, ceux portant refus des titres de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être rejeté ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète du Tarn n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A ; que le moyen doit donc être écarté comme manquant en fait ;

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement d'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'étranger peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; qu'en l'espèce, il a présenté une demande d'admission au séjour en qualité de réfugié mais n'a pas fait état, à l'appui de cette demande, de circonstances relatives à son état de santé ; qu'il n'est donc pas fondé à soutenir que la préfète aurait dû examiner la possibilité de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et recueillir préalablement l'avis du médecin inspecteur de santé publique ; que, par ailleurs le moyen tiré par M. A de ce que le préfet aurait dû examiner la possibilité de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être retenu dès lors qu'elle n'avait présenté aucune demande en ce sens ; qu'enfin, si les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettent à l'administration de délivrer une carte de séjour portant la mention "vie privée et familiale" à un étranger pour des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant, qui n'a demandé son admission au séjour qu'en qualité de réfugié, aurait fait valoir des motifs exceptionnels justifiant que lui soit octroyé le titre prévu par les dispositions précitées ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation sur la portée de la demande de M. A doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant que M. A, alors âgé de 39 ans, est entré irrégulièrement en France en juillet 2007 accompagné de son épouse et de leurs deux enfants nés les 16 juin 1999 et 11 mars 2003 ; qu'un troisième enfant est né sur le territoire français le 30 mai 2009 ; que l'aînée et la puînée sont scolarisées à l'école primaire où elles se rendent avec assiduité ; que le requérant soutient en outre qu'il a suivi une formation en français, et que bénévole à la Croix-Rouge française, il est titulaire d'un certificat de compétences de citoyen de sécurité civile et qu'il a tissé des liens personnels importants avec la France ; que si un certificat médical du 20 mai 2010 rédigé par un psychiatre d'un centre hospitalier spécialisé d'Albi justifie du fait qu'il est suivi pour un stress post-traumatique en lien selon ses dires avec une agression au cours d'une arrestation policière, stress accompagné de symptômes d'irritabilité, insomnies et réaction de sursaut au bruit et lors de la reviviscence de l'événement traumatique, soigné par prescription de psychotropes dans un contexte de névrose, ce document ne fournit d'indication, ni sur la gravité de la maladie ni sur son évolution dans le temps, sauf à laisser suspecter une possible aggravation en cas de retour dans son pays, ni sur la faculté de suivre un traitement approprié en Russie ; qu'eu égard au caractère récent du séjour de l'intéressé en France, de son épouse et de deux de ses enfants encore dans un cycle d'apprentissage et au fait qu'il n'établit pas être dépourvu de tous liens dans son pays d'origine, M. A n'est pas fondé à soutenir qu'en lui refusant le titre de séjour sollicité, la préfète du Tarn aurait porté une atteinte à sa vie privée et familiale excessive par rapport aux buts dans lesquels la décision attaquée est intervenue ; que, pour les mêmes motifs, l'arrêté querellé n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; que, par suite, ces moyens doivent être écartés ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; que c'est à bon droit que les premiers juges ont relevé que " la seule circonstance que les enfants du requérant, nés le 19 juin 1999 et 11 mars 2003 sont scolarisés en France depuis trois ans ne suffit pas à établir que leur intérêt supérieur n'aurait pas été pris en compte " ; que, de plus, ceux-ci ne seront pas séparés de leurs parents qui font tous deux l'objet d'un refus de séjour ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la violation de l'article 3-1 précité de la convention des droits de l'enfant précité doit être écarté ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la décision portant refus d'admission au séjour n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré par voie d'exception de l'illégalité de la décision faisant obligation à M. A de quitter le territoire français ne peut être qu'écarté ;

Considérant que par les mêmes motifs ci-dessus exposés, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, et de l'erreur manifeste d'appréciation, doivent être écartés ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

Considérant, d'une part, que si l'autorité administrative n'est pas liée par les appréciations qui ont pu être portées, au regard de la convention de Genève du 28 juillet 1951, par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile, pour rejeter une demande de reconnaissance de la qualité de réfugié politique, rien ne lui interdit d'en tenir compte ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète du Tarn se serait estimée liée par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile en méconnaissance des dispositions précitées ;

Considérant que M. A soutient qu'il craint pour sa vie en cas de retour en Russie, dans la mesure où il est d'origine tchétchène et a résidé au Daghestan dans un contexte politique particulièrement difficile où il aurait été arrêté faisant l'objet de menaces, puis victime de tortures, qu'il aurait été a été à nouveau convoqué par le ministère des affaires intérieures de la République du Daghestan le 6 juin 2010 ; que les forces de l'ordre ont arrêté son frère afin qu'il se présente à ladite convocation ; que, toutefois, s'agissant d'une simple convocation et alors que sa demande d'admission au statut de réfugié politique a été rejetée, le requérant ne justifie pas d'éléments nouveaux suffisamment probants, s'agissant de copies de facsimile, et de nature à établir la réalité des risques auxquels lui-même ou son épouse ou ses enfants seraient personnellement exposés en cas de retour dans leur pays d'origine ; que la demande de réexamen présentée par M. A a d'ailleurs été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 11 octobre 2010 ; que le moyen doit, dès lors, être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande aux fins d'annulation de l'arrêté susvisé ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions susvisées ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions aux fins d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique :

Considérant que les présentes dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, le versement au conseil de M. A de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

''

''

''

''

2

N° 11BX00419


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX00419
Date de la décision : 13/09/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAMARCHE
Rapporteur ?: M. Frantz LAMARCHE
Rapporteur public ?: M. VIE
Avocat(s) : DUJARDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-09-13;11bx00419 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award