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15/09/2011 | FRANCE | N°10BX02957

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, Juge des reconduites à la frontière, 15 septembre 2011, 10BX02957


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour par télécopie le 6 décembre 2010, régularisée le 9 décembre 2010, sous le n° 10BX02957, présentée pour M. Sadik élisant domicile chez son avocat, 48 avenue des Minimes à Toulouse (31200), par Me Brel, avocat ;

M. demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003984 en date du 8 novembre 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 octobre 2010 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a décidé sa re

conduite à la frontière et fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler ces décisions...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour par télécopie le 6 décembre 2010, régularisée le 9 décembre 2010, sous le n° 10BX02957, présentée pour M. Sadik élisant domicile chez son avocat, 48 avenue des Minimes à Toulouse (31200), par Me Brel, avocat ;

M. demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003984 en date du 8 novembre 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 octobre 2010 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a décidé sa reconduite à la frontière et fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

4°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente d'un réexamen de sa situation dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1.500 euros en application des dispositions combinées des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du président de la Cour en date du 1er septembre 2011 portant désignation de Mme Catherine Girault en qualité de juge d'appel des jugements de reconduite à la frontière ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 septembre 2011 :

- le rapport de Mme Girault ;

- et les conclusions de M. Katz, rapporteur public ;

Considérant que M. , de nationalité turque, relève appel du jugement n° 1003984 du 8 novembre 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 29 octobre 2010 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a décidé sa reconduite à la frontière et fixé le pays de destination ;

Sur l'aide juridictionnelle provisoire :

Considérant que l'avocat de M. n'ayant pas répondu à la lettre du greffe de la cour de céans en date du 15 décembre 2010 lui demandant de justifier du dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Bordeaux, la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle formée par M. ne peut être accueillie ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique et au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; que, pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

Considérant que si M. , de nationalité turque et d'origine kurde, a vu rejeter par trois fois sa demande d'asile en 2005, 2006 et 2010, il ressort des pièces du dossier qu'il a épousé le 29 novembre 2008 une compatriote en situation régulière, titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2017 ; que les époux ont donné naissance en France à une fille le 11 octobre 2009 ; qu'il ressort des pièces du dossier que les attaches familiales de Mme Karakaya sont en France, où elle est arrivée à l'âge de 13 ans par la voie du regroupement familial ; que l'intéressée suivant une formation en CAP de coiffure n'a pas encore les ressources lui permettant de demander un regroupement familial au bénéfice de son époux, alors que celui-ci est titulaire d'une promesse d'embauche dans l'hôtellerie ; que dans ces conditions, la décision du préfet, qui aurait pour effet de séparer durablement la famille, a porté au droit de M. au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, alors même que l'intéressé a conservé des attaches familiales dans son pays d'origine, où vivent notamment ses parents, et qu'il n'a pas été en mesure de justifier ses allégations selon lesquelles il craint pour sa vie et sa sécurité en cas de retour en Turquie ; que cet arrêté méconnaît donc les dispositions précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, M. est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 29 octobre 2010 par lequel le préfet de la Lot-et-Garonne a décidé sa reconduite à la frontière et fixé le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'en vertu de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au titre V du présent livre et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ;

Considérant qu'à la suite de l'annulation de l'arrêté en litige, il incombe au préfet, en application des dispositions précitées de l'article L. 512-4 du code, de délivrer à M. une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours suivant la notification de la présente décision et de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt ; que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. n'ayant pas justifié avoir été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Bordeaux du 8 novembre 2010 et l'arrêté du préfet de Lot-et-Garonne en date du 29 octobre 2010 décidant la reconduite à la frontière de M. sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de Lot-et-Garonne de procéder au réexamen de la situation de M. dans un délai de deux mois suivant la notification de la présente décision et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N°10BX02957


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 10BX02957
Date de la décision : 15/09/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-02-02 Étrangers. Reconduite à la frontière. Légalité interne. Droit au respect de la vie familiale.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine GIRAULT
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : BREL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-09-15;10bx02957 ?
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