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13/10/2011 | FRANCE | N°10BX02101

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 13 octobre 2011, 10BX02101


Vu la requête, enregistrée le 12 août 2010 par télécopie, régularisée le 17 août 2010, présentée pour l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX, DES AFFECTIONS IATROGENES ET DES INFECTIONS NOSOCOMIALES (ONIAM), dont le siège est situé 36, avenue du Général de Gaulle à Bagnolet Cedex (93170), représenté par son directeur, par la SCP Uettwiller Grelon Gout Canat et Associés, société d'avocats ;

L'ONIAM demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601736 du 17 juin 2010 du tribunal administratif de Poitiers, en premier lieu, en tant que ce

jugement l'a condamné à verser à la société Aréas Dommages, subrogée dans les droi...

Vu la requête, enregistrée le 12 août 2010 par télécopie, régularisée le 17 août 2010, présentée pour l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX, DES AFFECTIONS IATROGENES ET DES INFECTIONS NOSOCOMIALES (ONIAM), dont le siège est situé 36, avenue du Général de Gaulle à Bagnolet Cedex (93170), représenté par son directeur, par la SCP Uettwiller Grelon Gout Canat et Associés, société d'avocats ;

L'ONIAM demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601736 du 17 juin 2010 du tribunal administratif de Poitiers, en premier lieu, en tant que ce jugement l'a condamné à verser à la société Aréas Dommages, subrogée dans les droits de M. Ludovic X, de son épouse et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne, la somme de 582.505,02 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 janvier 2010, et en second lieu, en tant que ce jugement l'a condamné à rembourser à la société Aréas Dommages 75 % des sommes qu'elle serait amenée à débourser, au fur et à mesure de ses débours, pour le remplacement du matériel médical de M. X dans la limite d'un capital représentatif annuel de 10.440 euros ;

2°) à titre principal, de rejeter la demande de la société Aréas Dommages en tant qu'elle est dirigée contre lui, à titre subsidiaire, de condamner le centre hospitalier universitaire de Poitiers à indemniser cette société, du fait de la faute que celui-ci a commise, à hauteur de 100 % des préjudices subis ou à tout le moins à hauteur de 75 %, et à titre plus subsidiaire encore, de réduire le montant qu'il a lui-même été condamné à verser à ladite société ;

3°) de mettre à la charge de la société Aréas Dommages une somme de 2.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des assurances ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 septembre 2011 :

- le rapport de M. de La Taille Lolainville, conseiller ;

- les observations de Me Tordjman, avocat de la Compagnie Areas Assurances ;

- et les conclusions de M. Katz, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Tordjman, avocat de la Compagnie Aréas Assurances ;

Considérant qu'à la suite d'un accident de la circulation dont l'un de ses assurés était responsable, la société Aréas Dommages, intervenue sous le nom commercial Aréas Assurances, a versé sur la base de transactions la somme globale de 1.362.182,83 euros à M. Ludovic X, à son épouse ainsi qu'à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne ; qu'estimant que la charge finale de cette indemnité devait incomber pour partie au centre hospitalier universitaire de Poitiers au titre d'une faute commise par lui lors de l'hospitalisation de la victime, une insuffisance de surveillance neurologique postopératoire n'ayant pas permis de détecter à temps un hématome compressif, et ayant entraîné un retard de réintervention à l'origine de la paraplégie dont elle reste atteinte, et pour partie à l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX, DES AFFECTIONS IATROGENES ET DES INFECTIONS NOSOCOMIALES (ONIAM) au titre d'un accident médical non fautif également à l'origine du préjudice subi par la victime, la société Aréas Dommages a saisi le tribunal administratif de Poitiers d'actions subrogatoires dirigées d'abord contre l'hôpital, puis contre l'ONIAM ; que l'ONIAM relève appel du jugement n° 0601736 du 17 juin 2010 en tant que le tribunal administratif de Poitiers, faisant droit partiellement à ces actions, l'a condamné à verser à la société Aréas Dommages la somme de 582.505,02 euros, représentant 75 % du préjudice résultant de la prise en charge hospitalière, au titre des conséquences dommageables de l'accident médical non fautif, outre 75% des frais futurs et des frais d'expertise ; que la société Areas Dommages demande que les sommes que le centre hospitalier universitaire de Poitiers et l'ONIAM ont été condamnés à lui verser soient respectivement portées à 318.553,73 euros et 955.661,20 euros ; que le centre hospitalier universitaire de Poitiers demande que la perte de chance due à la faute relevée contre lui soit limitée à 16,5 % au lieu de 25 %, et que l'évaluation des préjudices soit ramenée à de plus justes proportions ;

Sur l'appel principal de l'ONIAM :

Considérant en premier lieu, que les dispositions de l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, applicables en vertu de l'article 28 de la même loi aux relations entre le tiers payeur et la personne tenue à réparation d'un dommage résultant d'une atteinte à la personne, quelle que soit la nature de l'événement ayant occasionné ce dommage, énumèrent la liste des prestations versées à la victime ouvrant droit à un recours contre la personne tenue à réparation ou son assureur ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les recours des tiers payeurs subrogés dans les droits de la victime d'un dommage, qui sont intégralement régis par ces dispositions sans que puissent y faire obstacle les stipulations d'une transaction, s'exercent exclusivement à l'encontre des auteurs responsables de l'accident survenu à la victime ;

Considérant en deuxième lieu, qu'en vertu de l'article L. 1142-22 du code de la santé publique, l'ONIAM est chargé de l'indemnisation au titre de la solidarité nationale, dans les conditions définies notamment au II de l'article L. 1142-1, des dommages occasionnés par la survenue d'un accident médical, d'une affection iatrogène ou d'une infection nosocomiale ainsi que d'autres indemnisations qui lui incombent en vertu de la loi ; qu'aux termes du II de l'article L. 1142-1 du même code : " Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire. / Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret " ; qu'il ressort de ces dispositions que si l'ONIAM assure, sous certaines conditions, notamment la prise en charge des conséquences des accidents médicaux qui ne peuvent être imputés à la faute d'un établissement de santé, il exécute cette mission au titre de la solidarité nationale sans avoir la qualité d'auteur responsable des dommages ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que l'assureur du responsable d'un dommage, alors même qu'il a indemnisé l'ensemble des préjudices de la victime résultant tant de l'accident initial que de l'aggravation de ses conséquences lors de la prise en charge hospitalière, ne saurait être subrogé dans les droits que la victime, si elle n'avait pas été indemnisée, aurait pu faire valoir à l'égard de l'ONIAM au seul titre de la solidarité nationale ;

Considérant qu'il s'ensuit que la société Aréas Dommages ne peut utilement se prévaloir des termes généraux de la quittance de la victime la subrogeant dans ses droits contre " tous tiers tenus à réparation " ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ONIAM est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers l'a condamné à rembourser à la société Aréas Dommages une partie des sommes que cette société avait versées au titre des préjudices subis par M. et Mme X et au titre des débours de la caisse primaire d'assurance maladie ;

Sur l'appel incident de la société Aréas Dommages :

Considérant qu'au regard de l'accueil de l'appel principal de l'ONIAM, les conclusions que la société Aréas Dommages a présentées par la voie de l'appel incident, tendant à ce que soit augmenté le montant de l'indemnité à laquelle les premiers juges ont condamné l'ONIAM, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les appels provoqués de la société Aréas Dommages et du centre hospitalier universitaire de Poitiers :

Considérant en premier lieu que des conclusions d'appel, présentées par une autre partie que l'appelant principal après l'expiration du délai d'appel, qui soulèvent un litige distinct de celui dont le juge se trouve saisi par l'appel principal, sont irrecevables ; que les conclusions d'appel principal présentées par l'ONIAM contestent sa condamnation à rembourser l'assureur de la victime soutenant être subrogé dans les droits de celle-ci au titre de la solidarité nationale ; que les conclusions, présentées après l'expiration du délai de recours par la société Aréas Dommages, qui ne remettent pas en cause le partage de responsabilité opéré par le tribunal entre le centre hospitalier universitaire au titre de la faute et l'ONIAM au titre de la solidarité nationale, mais se bornent à contester l'évaluation des préjudices mis à la charge du centre hospitalier universitaire de Poitiers, sur le fondement distinct de la faute retenue à son encontre, portent sur un litige distinct de celui soulevé par l'appel de l'ONIAM ; que dès lors, ces conclusions sont irrecevables ;

Considérant en second lieu que l'appel du centre hospitalier universitaire de Poitiers, présenté postérieurement au délai d'appel et tendant à la réduction des sommes qu'il a été condamné à verser à la société Aréas Dommages, présente le caractère d'un appel provoqué ; que le présent arrêt, qui accueille l'appel de l'ONIAM et rejette les appels de la société Aréas Dommages, n'aggrave pas la situation du centre hospitalier ; que par suite, cet appel provoqué doit également être rejeté comme irrecevable ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'ONIAM, qui n'a pas la qualité de partie perdante, le versement à la société Aréas Dommages de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions également présentées à ce titre par la société Aréas Dommages et qui sont dirigées contre le centre hospitalier universitaire de Poitiers ;

Considérant en revanche que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Aréas Dommages la somme de 1.500 euros au titre des frais exposés par l'ONIAM et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0601736 du 17 juin 2010 du tribunal administratif de Poitiers est annulé en tant qu'il fait droit aux demandes de condamnation présentées par la société Aréas Dommages contre l'ONIAM.

Article 2 : Les demandes de la société Aréas Dommages dirigées contre l'ONIAM sont rejetées.

Article 3 : La société Aréas Dommages versera à l'ONIAM la somme de 1.500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

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No 10BX02101


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-05-03-02 RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE. RECOURS OUVERTS AUX DÉBITEURS DE L'INDEMNITÉ, AUX ASSUREURS DE LA VICTIME ET AUX CAISSES DE SÉCURITÉ SOCIALE. SUBROGATION. SUBROGATION DE L'ASSUREUR. - RECOURS OUVERTS AUX ASSUREURS DE LA VICTIME ABSENCE DE SUBROGATION DANS LES DROITS DE LA VICTIME À L'ÉGARD DE L'ONIAM.

60-05-03-02 Il résulte des dispositions combinées des articles 28 et 29 de la loi du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, et des articles L. 1142-22 et L. 1142-1 du code de la santé publique, définissant les conditions dans lesquelles l'ONIAM est chargé, au titre de la solidarité nationale, de l'indemnisation des accidents médicaux, que l'assureur du responsable d'un dommage, alors même qu'il a indemnisé l'ensemble des préjudices de la victime résultant tant de l'accident initial que de l'aggravation de ses conséquences lors de la prise en charge hospitalière, ne saurait être subrogé dans les droits que la victime, si elle n'avait pas été indemnisée, aurait pu faire valoir à l'égard de l'ONIAM au seul titre de la solidarité nationale.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Guillaume de la TAILLE LOLAINVILLE
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS UGGC ASSOCIES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Date de la décision : 13/10/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10BX02101
Numéro NOR : CETATEXT000024698021 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-10-13;10bx02101 ?
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