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18/10/2011 | FRANCE | N°11BX00584

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 18 octobre 2011, 11BX00584


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour sous le n° 11BX00584 en télécopie le 2 mars 2011 et en original le 7 mars 2011, présentée pour Mme Fatbardha A élisant domicile ... ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001653 du 8 novembre 2010, par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 21 juin 2010 par lequel le préfet du Gers lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé l'Albanie comme pays de destination,

d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Gers, sous astreinte, de...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour sous le n° 11BX00584 en télécopie le 2 mars 2011 et en original le 7 mars 2011, présentée pour Mme Fatbardha A élisant domicile ... ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001653 du 8 novembre 2010, par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 21 juin 2010 par lequel le préfet du Gers lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé l'Albanie comme pays de destination, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Gers, sous astreinte, de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Gers de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de 120 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 septembre 2011 :

- le rapport de Mme D. Boulard, président assesseur ;

- et les conclusions de Mme M-P. Dupuy, rapporteur public ;

Considérant que Mme Fatbardha A, ressortissante albanaise, a fait l'objet d'un arrêté en date du 21 juin 2010 par lequel le préfet du Gers a refusé de l'admettre au séjour et l'a obligée à quitter le territoire français en désignant l'Albanie comme pays de destination ; qu'elle fait appel du jugement du 8 novembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté son recours dirigé contre cet arrêté ainsi que les conclusions aux fins d'injonction dont ce recours était assorti ;

Sur la recevabilité de la demande présentée devant le tribunal administratif :

Considérant que le préfet du Gers a opposé en première instance une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté du recours exercé le 2 septembre 2010 par Mme A contre son arrêté du 21 juin 2010, dont il soutient qu'il a été notifié à cette dernière le 2 juillet suivant ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressée a présenté sa demande d'aide juridictionnelle le 20 juillet 2010 dans le délai de recours contentieux et que cette demande a donné lieu à une décision d'admission totale à l'aide juridictionnelle prise le 22 juillet par le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Pau ; qu'il n'est pas établi que cette décision, qui a fait courir un nouveau délai de recours après sa notification, ait été notifiée à Mme A plus d'un mois avant que celle-ci ne formule son recours enregistré le 2 septembre 2010 ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le préfet du Gers doit être écartée ;

Sur les conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant que le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français reposent sur des considérations de fait et de droit que l'arrêté contesté énonce de manière suffisante ; qu'en tout état de cause, l'obligation de quitter le territoire français n'avait pas à faire l'objet d'une motivation ;

Considérant, en second lieu que Mme A, née en mai 1969 à Shkodër (Albanie), entrée en France en décembre 2008, accompagnée de son époux et de leur fils, a demandé l'asile en janvier 2009 ; que cette demande a été rejetée par une décision du 31 août 2009 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée le 17 mai 2010 par la Cour nationale du droit d'asile ; que les demandes d'asile présentées par son époux et leur fils ont également été rejetées ; qu'il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de la durée du séjour de la requérante en France, de ce que son époux et leur fils ont aussi fait l'objet de refus d'admission au séjour ayant donné lieu à des recours rejetés par le tribunal administratif de Pau confirmés sur ce point par arrêts du même jour de la présente cour, de ce que l'intéressée conserve des attaches fortes en Albanie où résident sa fille et son gendre, les mesures contestées n'ont pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'appréciation portée par le préfet n'est pas non plus entachée d'une erreur manifeste quant aux conséquences de ces mesures sur la situation personnelle de l'intéressée ; que les risques dont elle fait état en cas de retour dans son pays d'origine ne suffisent pas à révéler, pour ce qui est desdites mesures, une telle erreur manifeste d'appréciation non plus que la méconnaissance de l'article 8 de la convention précitée ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision désignant l'Albanie comme pays de renvoi :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ... ; que ce dernier texte stipule que : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de renvoi d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de renvoi ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

Considérant qu'il ressort de la motivation de l'arrêté attaqué et de la défense du préfet du Gers devant le tribunal comme devant la cour que, pour écarter les risques invoqués par l'intéressée qui soutenait être, avec sa famille, sous le coup d'une vengeance au titre de la loi dite du Kanun, le préfet s'est seulement référé aux décisions négatives prises par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile à l'encontre de Mme A en lui reprochant de ne faire état d'aucun élément qui n'ait été déjà soumis à leur examen ; que le préfet du Gers doit donc être regardé comme s'étant cru lié par ces décisions ; qu'il a ainsi méconnu l'étendue de sa compétence ; qu'il a par suite entaché sa décision désignant l'Albanie comme pays de renvoi d'une erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est fondée à demander l'annulation de l'arrêté contesté qu'en tant qu'il porte désignation de l'Albanie comme pays de renvoi ; qu'elle n'est donc fondée à demander l'annulation du jugement attaqué que dans la mesure où il rejette ses conclusions dirigées contre cette décision de désignation ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de Mme A relatives au refus de séjour et à l'obligation de quitter le territoire français, n'implique pas la délivrance du titre de séjour que demande la requérante ; que par suite ses conclusions tendant à la délivrance d'un titre de séjour ne peuvent être accueillies ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros que la requérante demande au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1001653 du tribunal administratif de Pau du 8 novembre 2010 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme Fatbardha A dirigées contre la décision désignant l'Albanie comme pays de destination, contenue dans l'arrêté du préfet du Gers en date du 21 juin 2010.

Article 2 : L'arrêté du préfet du Gers du 21 juin 2010 est annulé en tant qu'il désigne l'Albanie comme pays à destination duquel Mme Fatbardha A sera renvoyée si elle ne satisfait pas à l'obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois.

Article 3 : Le surplus de la requête est rejeté.

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No 11BX00584


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX00584
Date de la décision : 18/10/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Dominique BOULARD
Rapporteur public ?: Mme DUPUY
Avocat(s) : OUDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-10-18;11bx00584 ?
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