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02/11/2011 | FRANCE | N°10BX01821

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 02 novembre 2011, 10BX01821


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 21 juillet 2010 présentée pour M. Osnel A, demeurant ... ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 10/23 du 10 juin 2010 par laquelle la présidente du tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Guadeloupe en date du 26 juin 2008 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français en fixant un pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) de condam

ner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'artic...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 21 juillet 2010 présentée pour M. Osnel A, demeurant ... ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 10/23 du 10 juin 2010 par laquelle la présidente du tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Guadeloupe en date du 26 juin 2008 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français en fixant un pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2011 :

- le rapport de M. H. Philip de Laborie, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme M-P. Dupuy, rapporteur public ;

Considérant que M. A, ressortissant de nationalité haïtienne, fait appel de l'ordonnance du 10 juin 2010 par laquelle la présidente du tribunal administratif de Saint-Martin, faisant application de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, a rejeté pour tardiveté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Guadeloupe en date du 26 juin 2008 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant, d'une part, que l'article L. 514-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile, écarte l'application, en Guyane et à Saint-Martin, des dispositions de l'article L. 512-1 du même code, par lequel le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions permettant à l'autorité administrative de signifier à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ; qu'il en résulte que ne sont pas applicables en Guyane et à Saint-Martin les dispositions des articles L. 776-1, R. 775-1 à R. 775-10 et R. 776-1 à R. 776-20 du code de justice administrative, mais qu'en revanche y sont applicables les règles de droit commun de la procédure administrative et contentieuse, notamment relatives au délai de recours, éventuellement prolongé par un recours administratif préalable ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a reçu notification de l'arrêté contesté le 7 septembre 2009 ; qu'en vertu de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, le délai de recours contre cet arrêté expirait deux mois après cette notification ; qu'il ressort des pièces versées au dossier que le pli contenant le recours hiérarchique formé par M. A contre cet arrêté a été remis aux services postaux le vendredi 30 octobre 2009, soit, compte tenu du délai normal d'acheminement du courrier et en l'absence de circonstances particulières propres à la période de l'année considérée et de nature à rendre prévisible un allongement de la durée d'acheminement du courrier, en temps utile pour parvenir à l'administration compétente avant l'expiration du délai de recours ; que, par suite, et quand bien même le pli n'a été effectivement reçu par le ministre que le 13 novembre 2009, le recours préalable doit être regardé comme ayant été formé avant l'expiration du délai de recours ; que, si le silence gardé sur ce recours pendant plus de deux mois a fait naître une décision implicite de rejet, l'intervention de cette décision n'a pu faire courir à nouveau de délai dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le recours ait fait l'objet de l'accusé de réception prévu par l'article 19 de la loi 2000-321 du 12 avril 2000 ; que, dès lors, la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Saint-Martin n'est pas entachée de tardiveté ; que le requérant est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, la présidente du tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté pour tardiveté sa demande, et à demander l'annulation de cette ordonnance ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. A ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a été abandonné par sa mère en 1998, alors qu'il avait 12 ans ; qu'il est arrivé à Saint-Martin à l'âge de 14 ans pour vivre auprès de son père, qui est titulaire d'une carte de résident et qui a fondé une famille au sein de laquelle le requérant a vécu depuis son arrivée en France ; qu'il a suivi toute sa scolarité avec sérieux à Saint-Martin durant près de huit ans, obtenant en 2006 un brevet d'études professionnelles et en 2008 un baccalauréat professionnel ; qu'il n'est pas contesté qu'il n'entretient plus aucun contact avec sa mère, seule famille dont il dispose dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, et quand bien même il est célibataire et sans enfant, le refus de séjour qui lui a été opposé porte une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale au regard des motifs du refus, et a été ainsi pris en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313-11 7° ;

Considérant que, dès lors que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi se fondent sur la décision de refus de séjour dont le présent arrêt prononce l'annulation, ces décisions sont désormais infondées en droit et doivent également être annulées ;

En ce qui concerne l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. A la somme de 1 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance de la présidente du tribunal administratif de Saint-Martin en date du 10 juin 2010 est annulée.

Article 2 : L'arrêté du préfet de la Guadeloupe en date du 26 juin 2008 est annulé.

Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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No 10BX01821


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 10BX01821
Date de la décision : 02/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Henri de LABORIE
Rapporteur public ?: Mme DUPUY
Avocat(s) : GODEFROY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-11-02;10bx01821 ?
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