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03/11/2011 | FRANCE | N°11BX00289

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 03 novembre 2011, 11BX00289


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 28 janvier 2011 par télécopie et le 31 janvier 2011 en original, pour Mme Awa Aliin Sitooye X épouse Y, demeurant ..., par Me Brel, avocat ;

Mme Awa Aliin Sitooye X épouse Y demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 20 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juin 2010 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai d'un

mois et désigné le Sénégal comme pays de renvoi de cette mesure d'éloignement ;
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Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 28 janvier 2011 par télécopie et le 31 janvier 2011 en original, pour Mme Awa Aliin Sitooye X épouse Y, demeurant ..., par Me Brel, avocat ;

Mme Awa Aliin Sitooye X épouse Y demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 20 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juin 2010 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désigné le Sénégal comme pays de renvoi de cette mesure d'éloignement ;

2°) d'annuler l'arrêté précité du préfet de la Haute-Garonne ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer le titre de séjour temporaire sollicité dans un délai de 15 jours à compter du prononcé de la décision à intervenir sous peine d'astreinte de 100 euros par jour de retard en application de l'article L.911-1 du code de justice administrative ou à tout le moins procéder au réexamen de sa demande ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention franco-sénégalaise relative à la circulation et au séjour des personnes signée à Dakar le 1er août 1995 et le décret n°2002-337 du 5 mars 2002, portant publication de ladite convention ;

Vu l'accord franco-sénégalais relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre la France et le Sénégal signé à Dakar le 23 septembre 2006 en sa rédaction issue de l'avenant du 25 février 2008 entré en vigueur le 1er août 2009 ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades prévus à l'article 7-5 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 septembre 2011:

le rapport de M. Lamarche, président rapporteur;

les conclusions de M. Vié, rapporteur public ;

Considérant que Mme Awa Aliin Sitooye X épouse Y, née le 6 janvier 1979 de nationalité sénégalaise, est entrée en France le 25 novembre 2000 sous couvert d'un visa étudiant ; qu'elle s'est vue délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant qui a été renouvelé depuis le 12 janvier 2001 jusqu'au 5 novembre 2009 ; que le 6 octobre 2009, elle a demandé un titre de séjour en qualité de salariée, puis le 27 octobre 2009 le renouvellement de son titre de séjour portant la mention étudiant ; que par arrêté du 25 juin 2010 le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de délivrance de titre de séjour à quelque titre que ce soit , l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a désigné le Sénégal comme pays de destination de cette mesure d'éloignement ; que Mme Awa Aliin Sitooye X épouse Y interjette régulièrement appel du jugement du 20 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, que Mme X épouse Y soutient que les premiers juges ont omis de se prononcer sur le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions des articles L.313-10 et L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, d'une part, après avoir demandé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention salarié , la requérante a de nouveau sollicité celle d'un titre étudiant ; que, d'autre part, la demande de séjour par le travail présentée le 6 octobre 2009 était expressément motivée par le souhait de travailler en France pour acquérir une expérience et mieux servir son pays plus tard, dans une activité d'ailleurs dépourvue de tout lien avec ses études ; que, comme l'ont relevé les premiers juges, celle-ci ne pouvait donc être regardée comme relevant de considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que cette demande a par suite été examinée dans le cadre des dispositions de l'article L. 313-10 du code précité, les premiers juges écartant d'abord le moyen tiré de l'erreur de droit puis l'incidence sur la vie privée et familiale pour conclure à l'absence d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en second lieu, qu'en indiquant que Mme X épouse Y soutenait sans l'établir que la décision portant obligation de quitter le territoire national entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour sa situation personnelle, les premiers juges ont répondu au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation soulevé à l'encontre de cette décision ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que Mme X épouse Y n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier comme entaché d'omissions à statuer ;

Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, que l'arrêté contesté, qui énonce les éléments de fait et de droit sur lesquels est fondé le refus de séjour, est suffisamment motivé au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ; que si la décision vise l'accord franco-sénégalais et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu d'expliciter dans les motifs de la décision chacune des dispositions appliquées ; que sa motivation n'est pas de nature à révéler que le préfet se serait abstenu de procéder à l'examen de la situation personnelle et familiale de la requérante ;

Considérant que c'est à bon droit que les premiers juges ont indiqué qu'aucune disposition législative ou règlementaire ne prévoit l'obligation pour le préfet de transmettre, pour avis, aux services de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, préalablement à sa décision, la demande d'un ressortissant étranger sollicitant son changement de statut d'étudiant à statut de salarié ; qu'au surplus, il ressort des pièces du dossier que le préfet a transmis le dossier de la demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salariée le 8 octobre 2009 et que le directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de la Haute-Garonne a émis un avis défavorable le 10 novembre 2009 produit au dossier de première instance ; que le moyen tiré du défaut de consultation des services du ministère chargé de l'emploi ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne le titre de séjour portant la mention étudiant :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-7 du même code : I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention étudiant. En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, de la rentrée universitaire 2000 à la fin de l'année universitaire 2004, la requérante a obtenu un DEUG de sociologie économie ; qu'a la suite de son inscription en Master d'économie sociale et solidaire, Mme X épouse Y s'est inscrite dans cette discipline durant trois années consécutives de 2006 à 2009, obtenant seulement un diplôme pour l'année universitaire 2005-2006, puis aucun autre pour le deux années suivantes ; que Mme X épouse Y soutient que ses échecs sont imputables à son état de santé, liés en particulier à une intervention chirurgicale avec ablation du rein et de la glande surrénale gauche en 2007, les arrêts de travail et journées d'hospitalisations sont essentiellement intervenus au cours de l'année 2007 et ne suffisent pas à justifier l'absence d'obtention du diplôme en deux ans même si elle a validé certaines unités de valeur ; qu'en outre le long cursus universitaire suivi ne s'avère pas d'une totale cohérence ; que par suite le préfet de la Haute-Garonne a pu, sans une erreur d'appréciation estimer que la requérante ne pouvait être regardée comme ayant fait preuve de sérieux et surtout de suivi dans les études entreprises ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

Considérant enfin que le moyen tiré de l'atteinte à la vie privée et familiale et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être rejeté comme inopérant à l'appui d'une demande de titre de séjour portant la mention étudiant ;

En ce qui concerne le refus de titre de séjour portant la mention salariée :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du même code : La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. La carte porte la mention salarié lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois. Elle porte la mention travailleur temporaire lorsque l'activité est exercée pour une durée déterminée inférieure à douze mois. Si la rupture du contrat de travail du fait de l'employeur intervient dans les trois mois précédant le renouvellement de la carte portant la mention salarié , une nouvelle carte lui est délivrée pour une durée d'un an (...). ; qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail, qui s'est substitué à l'article L. 341-2 de ce code : Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. ;

Considérant, qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressée n'a pas présenté de demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne justifie, en tout état de cause, d'aucun motif humanitaire ou exceptionnel de nature à la faire admettre au séjour ; qu'elle n'établit ni même n'allègue que les emplois qu'elle occupe, qui ne sont pas en adéquation avec le niveau des études poursuivies, relèveraient d'une secteur caractérisé par des difficultés de recrutement ; qu'ainsi c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que cette décision n'était entachée, ni d'erreur de droit ni d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française, ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme X épouse Y établisse entretenir des relations avec les membres de son père et ses deux frères qui résident sur le territoire national ; que si elle a épousé un ressortissant français le 30 juillet 2010, son mariage, intervenu postérieurement à l'arrêté attaqué, s'avère sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué ; que dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que séjournant en France pour suivre des études Mme X épouse Y n'avait pas vocation à y rester ; que la décision attaquée n'est donc pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale par rapport aux buts dans lesquels elle a été prise ; que le moyen doit par conséquent être écarté ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :

Considérant, qu'il résulte de ce qui précède que la décision de refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français par voie de conséquence de l'illégalité du refus de renouvellement du titre de séjour doit être écarté ;

Considérant que par les mêmes motifs ci-dessus exposés, cette décision, qui n'est pas soumise à l'obligation de motivation par application des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant au degré de gravité qu'elle entraînerait sur la situation personnelle de la requérante ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X épouse Y n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande aux fins d'annulation ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme X épouse Y, n'appelle aucune mesure d'exécution; que, dès lors, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par le requérant ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser au requérant la somme qu'il demande sur le fondement de ces dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme X épouse Y est rejetée.

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N° 11BX00289


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. LAMARCHE
Rapporteur ?: M. Frantz LAMARCHE
Rapporteur public ?: M. VIE
Avocat(s) : BACHET

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 03/11/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 11BX00289
Numéro NOR : CETATEXT000024802604 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2011-11-03;11bx00289 ?
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