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05/01/2012 | FRANCE | N°10BX03136

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 05 janvier 2012, 10BX03136


Vu I°) sous le n° 10BX03136, la requête, enregistrée au greffe de la cour le 22 décembre 2010 par télécopie, régularisée le 24 décembre 2010, et le mémoire complémentaire enregistré le 21 février 2011, présentés pour la COMMUNE DE PESSAC, représentée par son maire en exercice, par Me Dacquin, avocat ;

La COMMUNE DE PESSAC demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800208 du 7 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamnée à verser à la Mutuelle Ociane la somme de 75.321,30 euros, augmentée des intérêts au taux légal

à compter du 3 mars 2005 et de la capitalisation des intérêts échus au 6 octobre 2009 ...

Vu I°) sous le n° 10BX03136, la requête, enregistrée au greffe de la cour le 22 décembre 2010 par télécopie, régularisée le 24 décembre 2010, et le mémoire complémentaire enregistré le 21 février 2011, présentés pour la COMMUNE DE PESSAC, représentée par son maire en exercice, par Me Dacquin, avocat ;

La COMMUNE DE PESSAC demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800208 du 7 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamnée à verser à la Mutuelle Ociane la somme de 75.321,30 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 3 mars 2005 et de la capitalisation des intérêts échus au 6 octobre 2009 et à chaque échéance annuelle ultérieure ;

2°) de rejeter la demande présentée par la Mutuelle Ociane devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de la Mutuelle Ociane une somme de 1.500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu II°) sous le n°11BX01378, la requête enregistrée au greffe de la cour le 17 juin 2011, présentée pour la COMMUNE DE PESSAC, représentée par son maire en exercice, par Me Dacquin, avocat ;

La COMMUNE DE PESSAC demande à la cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 0800208 du 7 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamnée à verser à la Mutuelle Ociane la somme de 75.321,30 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 3 mars 2005 et de la capitalisation des intérêts échus au 6 octobre 2009 et à chaque échéance annuelle ultérieure et, à titre subsidiaire, d'enjoindre à la Mutuelle Ociane de consigner une somme de 75.000 euros en vue de garantir la restitution des sommes mises à la charge de la commune par les premiers juges, si le jugement devait être annulé ;

............................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 2011 :

- le rapport de M. Péano, président-assesseur ;

- les observations de Me Dacquin avocat de la COMMUNE DE PESSAC et de

Me Beauthier avocat de la Mutuelle Ociane ;

- et les conclusions de M. Katz, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Dacquin avocat de la COMMUNE DE PESSAC et à Me Beauthier avocat de la Mutuelle Ociane ;

Considérant que, par deux jugements du 9 février et du 26 octobre 2006, devenus définitifs, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé, pour des motifs tirés de leur illégalité interne, les décisions du 17 décembre 2004 et du 7 mars 2006 par lesquelles le maire de Pessac a refusé de délivrer à la Mutuelle Ociane un permis de construire pour des travaux de rénovation et de modification des façades d'un bâtiment situé au n°1 place de la Vème République, sur le territoire de la commune ; que par jugement n° 0800208 du 7 octobre 2010, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné la COMMUNE DE PESSAC à verser à la Mutuelle Ociane la somme de 75.321,30 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 3 mars 2005 et de la capitalisation des intérêts échus au 6 octobre 2009 et à chaque échéance annuelle ultérieure, en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité des décisions annulées ; que par les requêtes n° 10BX03136 et n° 11BX01378, la COMMUNE DE PESSAC relève appel de ce jugement et demande d'ordonner qu'il soit sursis à son exécution ; que la Mutuelle Ociane, qui conclut au rejet des requêtes, demande, par la voie de l'appel incident, de porter l'indemnité qui lui a été allouée à la somme de 513.939 euros avec intérêts de droit capitalisés ;

Considérant que les requêtes de la COMMUNE DE PESSAC sont relatives au même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en réponse à la fin de non-recevoir soulevée par la Mutuelle Ociane et tirée du défaut d'habilitation du maire de Pessac à défendre au nom de la commune, celle-ci a produit une délibération du conseil municipal du 27 mars 2001, ne pouvant pas être regardée comme habilitant régulièrement le maire en exercice après les élections municipales de 2008 ; que toutefois si de ce fait la commune ne s'est pas trouvée régulièrement représentée devant le tribunal administratif, celui-ci, qui avait été saisi par le maire d'un mémoire marquant son intention de ne pas laisser le jugement intervenir par défaut à l'égard de la commune, aurait dû, dans ces circonstances, la mettre en mesure de rectifier l'erreur qu'elle avait commise par la production de la délibération habilitant son nouveau maire à défendre à l'instance; qu'en omettant de le faire avant d'écarter du dossier le mémoire produit en défense par le maire, le tribunal administratif n'a pas accompli toutes les obligations qui, dans les circonstances de l'espèce, s'imposaient à lui dans la conduite de l'instruction de l'affaire dont il était saisi ; que, dans ces conditions, alors que l'existence de l'habilitation invoquée est établie par la production, en appel, d'une délibération du conseil municipal du 21 mars 2008, la COMMUNE DE PESSAC est fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'une irrégularité et doit être annulé pour ce motif, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens tirés de son irrégularité ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la Mutuelle Ociane devant le tribunal administratif ;

Considérant que l'article 41 des statuts de la Mutuelle Ociane dispose que le président représente la mutuelle en justice, tant pour décider d'agir pour elle que pour la défendre ; que par suite, la fin de non-recevoir, présentée pour la première fois en appel et tirée de ce que la demande de la Mutuelle Ociane en première instance n'était pas recevable faute pour elle d'avoir produit l'acte habilitant son président à la représenter en justice ne saurait être accueillie ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans le but d'ouvrir une nouvelle agence, la Mutuelle Ociane a déposé le 24 mars 2004 une demande de permis de construire pour des travaux de réaménagement intérieur et de rénovation des façades, sans création de surface hors oeuvre nette, d'un local situé au coin de la place de la mairie ; que par un jugement du 9 février 2006, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé, pour erreur de droit, le refus opposé, le 17 décembre 2004, à cette demande ; que par un deuxième jugement du 26 octobre 2006, le tribunal a également annulé un second refus opposé le 7 mars 2006 à la Mutuelle Ociane, pour erreur de droit et méconnaissance de l'autorité de la chose jugée ; que la commune a accordé à la Mutuelle Ociane le permis de construire qu'elle sollicitait le 4 décembre 2006 ; que la faute résultant de l'illégalité des refus de permis de construire opposés à la Mutuelle Ociane n'est de nature à lui ouvrir droit à réparation que des préjudices qui sont la conséquence directe des décisions illégales et qui sont établis ;

Considérant, en premier lieu, que la Mutuelle Ociane soutient que du fait des refus annulés, elle a réglé inutilement des loyers d'un montant annuel de 10.000 euros et a subi un manque à gagner financier résultant de l'indisponibilité de la somme de 183.000 euros, versée pour l'acquisition le 14 février 2005 du droit au bail, qu'elle aurait pu placer au taux de rendement moyen de 2,5 %, soit un manque à gagner de 9.100 euros ; que du fait du caractère rétroactif des annulations prononcées, le début de la période de responsabilité de la commune doit être fixée à la date du premier refus illégal opposé le 17 décembre 2004 ; que la Mutuelle Ociane admet qu'elle ne pouvait débuter l'exploitation du fonds sans y avoir effectué huit mois de travaux de rénovation extérieure et d'aménagement intérieur et que la nouvelle agence devait ouvrir le 1er août 2005 ; que si la commune soutient que les refus annulés ne lui interdisaient ni d'effectuer des travaux d'aménagement intérieur qui ne relèvent pas du champ du permis de construire ni de débuter l'exploitation commerciale du fonds, il résulte de l'instruction que la réalisation de l'ensemble des travaux, qui n'étaient pas dissociables, était indispensable à l'ouverture de l'agence ; qu'ainsi du fait des refus annulés, la Mutuelle Ociane a dû retarder l'ouverture de sa nouvelle agence au 7 août 2007 ; que, par suite, elle est fondée à demander réparation du préjudice résultant des loyers inutilement versés et de l'indisponibilité de la somme payée pour l'acquisition du droit au bail pendant la période du 1er août 2005 au 7 août 2007 ; que compte tenu des justficiations produites, il sera fait une exacte appréciation de ces chefs de préjudices en lui allouant la somme de 29.100 euros ;

Considérant en deuxième lieu, la Mutuelle Ociane ne produit pas d'éléments de nature à établir qu'elle aurait subi, du fait de la faute commise par la commune en refusant le permis qu'elle avait sollicité, d'une part un préjudice commercial et d'autre part un préjudice financier résultant d'un surcoût des travaux résultant de l'augmentation du coût de la construction pendant la période de responsabilité de la commune ; que les conclusions de la Mutuelle Ociane tendant à l'indemnisation de ces chefs de préjudices ne peuvent qu'être rejetées, sans qu'il y ait lieu d'ordonner l'expertise sollicitée pour en évaluer le montant ;

Considérant en troisième lieu, que la Mutuelle Ociane a déjà obtenu le bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par des jugements, devenus définitifs, annulant les refus de permis de construire qui lui avaient été illégalement opposés ; que, par suite, elle ne saurait obtenir, à l'occasion de la présente instance, l'indemnisation des frais que ces jugements auraient laissés à sa charge ;

Considérant que le présent arrêt rend sans objet la requête n° 11BX01378 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement attaqué ; qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a lieu de faire droit aux conclusions d'aucune des parties tendant au remboursement des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°0800208 du tribunal administratif de Bordeaux en date du 7 octobre 2010 est annulé.

Article 2 : La COMMUNE DE PESSAC est condamnée à verser une somme de 29.100 euros à la Mutuelle Ociane. Cette somme portera intérêts à compter du 3 mars 2005. Les intérêts échus à la date du 6 octobre 2009, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par la Mutuelle Ociane devant le tribunal administratif de Bordeaux est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de la COMMUNE DE PESSAC tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n°11BX01378 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement.

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Nos 10BX03136, 11BX01378


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10BX03136
Date de la décision : 05/01/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Services de l'urbanisme - Permis de construire.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Contentieux de la responsabilité (voir Responsabilité de la puissance publique).


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Didier PEANO
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : DACQUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-01-05;10bx03136 ?
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