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24/01/2012 | FRANCE | N°11BX01562

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 24 janvier 2012, 11BX01562


Vu la requête, enregistrée le 30 juin 2011, présentée pour M. Viktor X, demeurant ..., par Me Jouteau ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 22 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 octobre 2010 par lequel le préfet de la Gironde a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement ;

2°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ;

3°) de m

ettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au profit de Me Jouteau sur le fondement de...

Vu la requête, enregistrée le 30 juin 2011, présentée pour M. Viktor X, demeurant ..., par Me Jouteau ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 22 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 octobre 2010 par lequel le préfet de la Gironde a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement ;

2°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au profit de Me Jouteau sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 35 et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

.........................................................................................................

Vu la pièce produite pour le requérant à l'audience publique portant traduction de l'extrait du registre des personnes morales par un traducteur assermenté ;

Vu la décision du 30 mai 2011 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 décembre 2011 :

- le rapport de M. Lamarche, président-assesseur ;

- les observations de Me Jouteau pour M. X ;

- les conclusions de M. Vié, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;

Considérant que M. Viktor X, ressortissant russe né le 4 février 1985, est entré irrégulièrement en France le 22 décembre 2008 afin d'y solliciter l'asile, en compagnie de son père et de sa mère ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté cette demande par décision du 4 mars 2009 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 22 juillet 2009 ; que M. X a sollicité le 12 avril 2010 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en qualité d'étranger malade, puis le 6 juillet 2010 sur celui de l'article L. 313-14 du même code au titre de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels ; que M. Viktor X interjette régulièrement appel du jugement du 22 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 octobre 2010 par lequel le préfet de la Gironde a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi de cette mesure d'éloignement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...). Le médecin de l'agence régionale de santé(...) peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 de ce code : Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...). ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X a présenté le 12 février 2010 une demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade dépourvue de tout justificatif et n'a adressé au préfet des certificats médicaux établis par des praticiens privés que lors de la demande présentée le 6 juillet 2010 ; qu'il est constant que le préfet a interrogé le médecin de l'agence régionale de santé qui a répondu le 28 septembre 2010 qu'il n'avait reçu aucun certificat médical de l'intéressé ; qu'à défaut pour le requérant d'avoir adressé à ce médecin un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges auraient entaché leur jugement d'erreur de fait ou de droit ; que, par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. ;

Considérant que M. Viktor X expose qu'il a fait l'objet ainsi que son père et sa mère de menaces, de pressions ou, en ce qui le concerne et alors qu'il était mineur, d'arrestation policière, alors que ses parents avaient signalé sa disparition ; que ces faits l'ont conduit ainsi que toute sa famille à une détention arbitraire pendant six années dans une prison secrète en Ossétie dont ils n'auraient pu s'échapper qu'à l'occasion des troubles consécutifs à la guerre entre la Russie et la Géorgie ; qu'il impute ces agissements aux autorités russes liées à des pratiques mafieuses tendant à déposséder les propriétaires de la banlieue de Moscou de leurs biens immobiliers, contre lesquels ses parents aurait agi en qualité de membres d'une association ayant pour objet la défense des citoyens notamment devant les tribunaux et dont le président, avocat, serait décédé dans l'explosion de son véhicule ; que s'il produit un document portant déclaration le 5 mai 2000 de l'association pour la protection humaine dépourvue d'objet social, et mention de sa radiation du registre national des personnes morales le 24 avril 2002, du fait du décès de son président et de M. Viktor X père, son directeur, ainsi que de son épouse Mme X, cette pièce, dont les premiers juges ont à bon droit relevé que l'authenticité et la vraisemblance n'était pas avérée, n'établit pas l'existence de l'emprisonnement arbitraire allégué ou d'une menace grave et directe contre sa vie, sa personne ou sa famille, alors que sa demande d'asile a été définitivement rejetée par la Cour nationale du droit d'asile ; que les certificats médicaux produits ne sont pas suffisamment circonstanciés pour permettre d'établir un lien entre les syndromes dépressifs identifiés, un risque suicidaire, et les faits allégués ; que, par suite, M. X ne justifie d'aucune circonstance humanitaire ou motif exceptionnel de nature à lui ouvrir droit au séjour sur le fondement des dispositions précitées ;

Considérant, en troisième lieu, que M. X n'est pas fondé à soutenir qu'en opposant l'absence de justification d'une menace actuelle et nouvelle, le préfet aurait ajouté une condition aux dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui relèvent du pouvoir de régularisation exceptionnel conféré au représentant de l'Etat ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'il ressort des pièces du dossier que les parents du requérant tous deux de nationalité russe, font également fait l'objet d'un refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. X, qui a vécu en Russie avec ses parents de sa naissance en 1985 jusqu'en décembre 2008, n'établit pas avoir rompu tout lien personnel ou familial, notamment avec sa soeur ou ses grands-parents ; que, dans ces conditions, la décision du préfet de la Gironde, eu égard à la durée et aux conditions du séjour en France de l'intéressé, n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale par rapport aux buts dans lesquels elle a été prise et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'aux termes de l'article L.511- 4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; ;

Considérant qu'eu égard au rejet des conclusions dirigées contre la décision portant refus de séjour, M. X n'est pas fondé se prévaloir de son illégalité à l'appui de celles tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français ;

Considérant, en tout état de cause, que les certificats médicaux produits, qui font état de dépression post- traumatique, n'établissent pas que le traitement ne serait pas disponible en Russie ou que l'absence de traitement puisse avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;

En ce qui concerne le pays de renvoi :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ;

Considérant que, si M. X soutient qu'il encourrait des risques pour sa vie ou sa liberté en cas de retour dans son pays d'origine, il n'apporte aucun élément probant permettant d'apprécier le bien-fondé de ses allégations ; que la référence à un rapport des Nations Unies, publié en janvier 2010 relevant l'existence de centres de détention secrets dans certains pays comme la Russie, et la production d'une pièce, dont les premiers juges pouvaient relever l'authenticité incertaine sans méconnaître les dispositions de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, relative à l'existence de l'association précitée, radiée du registre national des personnes morales depuis 2002, et dont les parents du requérant auraient été membres, ne sont pas davantage de nature à établir la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour en Russie ; que, par suite, le préfet de la Gironde n'a méconnu, en désignant la Russie comme pays de renvoi, ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations des articles 3 et 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 octobre 2010 par lequel le préfet de la Gironde a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a désigné le pays de renvoi de cette mesure d'éloignement ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions en annulation présentées par M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions précitées ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridictionnelle :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. X demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

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N° 11BX01562


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme FLECHER-BOURJOL
Rapporteur ?: M. Frantz LAMARCHE
Rapporteur public ?: M. VIE
Avocat(s) : JOUTEAU

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 24/01/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 11BX01562
Numéro NOR : CETATEXT000025284043 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-01-24;11bx01562 ?
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