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26/01/2012 | FRANCE | N°10BX01094

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 26 janvier 2012, 10BX01094


Vu la requête, enregistrée le 4 mai 2010 sous le n° 10BX01094, présentée pour Mme Jeannine X demeurant ..., par Me Brachet ;

Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802404 du 4 mars 2010 du tribunal administratif de Poitiers en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités y afférentes auxquels elle a été assujettie au titre des années 2001 et 2002 ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1

400 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée le 4 mai 2010 sous le n° 10BX01094, présentée pour Mme Jeannine X demeurant ..., par Me Brachet ;

Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802404 du 4 mars 2010 du tribunal administratif de Poitiers en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités y afférentes auxquels elle a été assujettie au titre des années 2001 et 2002 ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 400 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 décembre 2011,

- le rapport de Mme Viard, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Normand, rapporteur public ;

Considérant que Mme X, gérante, depuis le 1er janvier 2001, de l'EURL Anjou Flors, qui a pour activité le négoce de végétaux et de tous produits organiques pour l'horticulture et l'agriculture, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période comprise entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2002 ; qu'à l'issue de ce contrôle, les bénéfices industriels et commerciaux qu'elle a perçus au titre de cette activité ont été évalués d'office à défaut pour Mme X d'avoir déposé les déclarations propres à ses revenus professionnels dans les trente jours d'une première mise en demeure ; qu'elle a contesté les suppléments d'impôt sur le revenu résultant dudit contrôle ; qu'elle fait appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers en tant qu'il a rejeté sa demande en décharge desdites impositions ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par décision du 13 décembre 2010, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de la Charente a prononcé le dégrèvement à concurrence de la somme de 265 euros en droits et pénalités au titre de l'année 2002 ; que, par suite, à concurrence de ladite somme, les conclusions de la requête sont devenues sans objet ;

Sur les impositions restant en litige :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice(...) ; qu'en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; qu'en ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ; que, toutefois, comme il a été dit ci-dessus, les bénéfices industriels et commerciaux de Mme X ont été évalués d'office au titre des années en litige ; que, par suite, en vertu des dispositions de l'article L.193 du livre des procédures fiscales, la requérante supporte la charge de la preuve de l'exagération des impositions dont elle a fait l'objet ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X a procédé à l'achat d'un zoom prima super 100 d'un montant de 149,67 euros hors taxe qui est un objectif photographique spécialement conçu pour prendre des clichés à une distance très rapprochée de l'objet à photographier ; qu'elle soutient utiliser cet appareil pour photographier des plantes et que les photographies prises ont permis d'importer des variétés importantes de lauriers, dès lors que le phénotype de ces lauriers a pu être ainsi rapproché de celui de plantes existant en Charente ; que l'administration ne conteste pas que cette utilisation de l'appareil entre dans le cadre de l'objet social de l'entreprise ; que Mme X doit être dès lors regardée comme justifiant du caractère déductible de ladite charge ;

Considérant qu'au cours de la période vérifiée, Mme X a engagé des frais de location de deux véhicules utilitaires, un camion frigorifique de grande capacité et un fourgon non frigorifique pour les courses de proximité ; qu'au cours de la vérification de comptabilité, ces frais ont été rejetés pour absence de justifications et notamment de production des contrats de location ; qu'en outre, l'administration a relevé que l'entreprise disposait déjà d'un fourgon frigorifique, qu'aucun salarié de l'entreprise n'était affecté à l'activité de commerce de fleurs et que Mme X se servait de son véhicule personnel à des fins professionnelles ; qu'en appel, Mme X produit des certificats de location concernant ces deux véhicules et soutient que le fourgon, propriété de la société, était vétuste et n'était pratiquement plus utilisé ; que, d'une part, la production de la copie de la carte grise du fourgon appartenant à Mme X atteste de la vétusté de ce véhicule mis en circulation pour la première fois en 1989 ; que, d'autre part, il n'est pas contesté que le véhicule frigorifique loué par Mme X depuis janvier 2002, et qui a été acquis par celle- ci en août 2002, est beaucoup plus récent comme en atteste la copie de la carte grise qui fait état d'une première mise en circulation en 1998 ; que, dès lors, Mme X doit être regardée comme justifiant de la réalité et de la nécessité pour son entreprise de la charge litigieuse dont l'administration ne conteste pas le montant ; qu'en revanche, s'agissant du fourgon non frigorifique, les attestations produites ne suffisent pas à démontrer l'utilité de sa location pour l'entreprise ; qu'il s'ensuit que la charge déductible au titre de l'année 2002 concernant ces frais de location doit être limitée à la somme de 16 892,56 euros ;

Considérant que l'administration a rejeté comme non déductibles des dépenses afférentes à une armoire ancienne, de la vaisselle et des voilages au motif que ces dépenses ont un caractère personnel ; que si Mme X soutient que l'armoire ancienne serait utilisée à son domicile pour le stockage d'archives et de documents professionnels, que la vaisselle achetée serait à destination du public de l'arboretum situé à proximité de son domicile et que les voilages auraient été posés dans les bureaux du siège de l'entreprise à La Tâtre, ces éléments qui ne sont accompagnés d'aucun justificatif probant, ne permettent pas d'établir que ces dépenses auraient été engagées dans l'intérêt de l'entreprise ;

Considérant que Mme X soutient, s'agissant d'une facture de fioul domestique de 388, 05 euros livrée à son domicile, que ce fioul était destiné au chauffage d'une serre et non à son habitation, chauffée à l'électricité ; que l'administration fait valoir, toutefois, sans être contredite, que la serre était encore en cours de construction au moment de la livraison du carburant ; qu'ainsi, et alors que Mme X n'établit pas que son habitation était chauffée à l'électricité, elle ne peut être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe que cette charge avait un caractère professionnel ;

Considérant que Mme X fait valoir que les créances s'élevant à un montant global de 6 241 euros ont un caractère irrécouvrable à la date du 31 décembre 2002, ce qui justifie leur inscription en charges exceptionnelles à cette date ; que, toutefois, la circonstance que ces créances n'aient pu être recouvrées ne saurait, à elle seule, établir que leur perte présentait au sens des dispositions précitées de l'article 39 du code général des impôts un caractère certain et définitif au 31 décembre de l'année 2002 ; que, par suite, l'administration a pu légalement réintégrer lesdites créances dans les bases d'imposition de la requérante au titre de l'année 2002 ;

Considérant en second lieu, qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. ; qu'aux termes de l'article 38 quinquies de l'annexe II au code général des impôts : Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. Cette valeur d'origine s'entend : Pour les immobilisations acquises à titre onéreux par l'entreprise, du coût d'acquisition, c'est-à-dire du prix d'achat majoré des frais accessoires nécessaires à la mise en état d'utilisation du bien ; Pour les immobilisations acquises à titre gratuit, de la valeur vénale (...) ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que Mme X n'a pas comptabilisé à l'actif de son bilan l'achat en août 2002 du camion frigorifique pris auparavant en location ; que la circonstance alléguée que cette acquisition n'aurait donné lieu à aucune transaction financière n'est pas de nature à l'exonérer de cette obligation dans la mesure où les dispositions précitées prévoient qu'en cas d'acquisition à titre gratuit, l'immobilisation doit être inscrite pour la valeur vénale du bien ; qu'il n'est pas contesté qu'en l'espèce, la cotation argus du véhicule s'élevait à 8000 euros ; que, par suite, l'administration a pu légalement réintégrer dans l'actif du bilan cette somme égale à la valeur vénale dudit véhicule ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que Mme X a acquis deux tunnels horticoles en 2001 pour 8 640 euros ; qu'elle a ensuite revendu ces tunnels au même fournisseur le 31 décembre 2002 pour 1300 euros ; que si elle allègue que cette dépréciation est justifiée au regard de l'état de ce matériel détérioré par la chute d'un cerisier, les photos et le devis de réparation qu'elle apporte au soutien de cette allégation ne permettent pas d'en établir la réalité ; qu'il s'ensuit que l'administration a pu à juste titre considérer que la cession de ces tunnels horticoles pour cette valeur constituait un acte anormal de gestion et réévaluer le produit de cette vente après avoir tenu compte de l'amortissement de ces matériels et pratiqué une déduction de 10% sur leur prix d'acquisition ;

Sur les pénalités de mauvaise foi :

Considérant qu'en faisant valoir que compte tenu de la nature des redressements litigieux qui portent notamment sur la prise en charge par l'entreprise de Mme X de dépenses personnelles, sur la minoration de l'actif de l'entreprise et sur l'existence d'un acte anormal de gestion et d'un passif injustifié, l'administration établit l'intention de la requérante d'éluder l'impôt ; que, par suite, le moyen tiré du caractère non fondé des pénalités de mauvaise foi dont les redressements litigieux ont été assortis doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui n'est entaché d'aucune omission à statuer, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions résultant de la réintégration dans ses bases d'imposition de l'année 2002 de la dépense relative à l'achat d'un zoom prima super 100 et des frais afférents à la location d'un véhicule frigorifique ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par Mme X en remboursement des frais exposés non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête à concurrence de la somme de 265 euros.

Article 2 : La base de l'impôt sur le revenu assigné à Mme X au titre de l'année 2002 est réduite d'une somme de 17 042,23 euros.

Article 3 : Mme X est déchargée des droits et pénalités correspondant à la réduction de base d'imposition définie à l'article 2.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.

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No10BX01094


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