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16/02/2012 | FRANCE | N°10BX00042

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 16 février 2012, 10BX00042


Vu la requête, enregistrée le 8 janvier 2010 par télécopie, régularisée le 12 janvier 2010, présentée pour la société SPIE SUD-OUEST, dont le siège est 70, chemin de Payssat à Toulouse (31400), représentée par son représentant légal, par Me Salesse, avocat ;

La société SPIE SUD-OUEST demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0603028 du 4 novembre 2009 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il la condamne, solidairement avec la SELARL Bellon, M. X, le cabinet Arsène-Henry et Triaud, la société Jacobs Serete, à garantir

à hauteur de 80 % le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins des condam...

Vu la requête, enregistrée le 8 janvier 2010 par télécopie, régularisée le 12 janvier 2010, présentée pour la société SPIE SUD-OUEST, dont le siège est 70, chemin de Payssat à Toulouse (31400), représentée par son représentant légal, par Me Salesse, avocat ;

La société SPIE SUD-OUEST demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0603028 du 4 novembre 2009 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il la condamne, solidairement avec la SELARL Bellon, M. X, le cabinet Arsène-Henry et Triaud, la société Jacobs Serete, à garantir à hauteur de 80 % le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins des condamnations prononcées à son encontre à la demande de la société des Grands travaux du bassin aquitain, et de rejeter cet appel en garantie ;

2°) à titre subsidiaire, de réformer ledit jugement en ramenant à de plus justes proportions les prétentions indemnitaires de la société des Grands travaux du bassin aquitain ;

3°) en tout état de cause, de mettre à la charge de toute partie qui succombe la somme de 10.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

............................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 janvier 2012 :

- le rapport de M. de La Taille Lolainville, conseiller ;

- les conclusions de M. Katz, rapporteur public ;

- les observations de Me Pentecoste, avocat de la société Grands travaux du bassin aquitain, de Me Czamansky, avocat de M. Arsène-Henry et Triaud et de M. X, et celles de Me Eyquem-Barrière, avocat de la société Jacobs France ;

Considérant qu'au milieu des années 1990, le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins a décidé de procéder à la réhabilitation et à l'extension de ses bâtiments ; qu'il a confié, par un contrat du 20 décembre 1995, une mission de maîtrise d'oeuvre à un groupement composé de M. Bellon, devenu la SELARL Bellon, de M. X, du bureau d'études techniques Jacobs Serete, devenu la société Jacobs France, et du cabinet Arsène-Henry et Triaud ; que le marché de travaux était alloti en vingt-huit lots distincts ; que la société des Grands travaux du bassin aquitain s'est vu confier, le 19 novembre 1997, le lot n° 1 relatif à la démolition, au gros oeuvre et à la maçonnerie ; que le 21 novembre 1997, le lot n° 11 chauffage -ventilation - climatisation a été confié à la société SPIE Trindel, aux droits de laquelle vient la société SPIE SUD-OUEST ; que le marché prévoyait une tranche ferme, correspondant aux travaux d'extension, et notamment deux tranches conditionnelles, la première relative à la réhabilitation de l'aile Sud du bâtiment existant, la seconde relative à celle de l'aile Nord ; que si la tranche ferme et la première tranche conditionnelle ont, malgré des retards conséquents, été menées à bien, la seconde tranche conditionnelle, pourtant affermie par ordre de service du 28 septembre 1999, n'a jamais fait l'objet d'un ordre de démarrage des travaux, et a été finalement résiliée pour motif d'intérêt général le 30 juin 2005 ;

Considérant que par un jugement n° 060328 du 4 novembre 2009, le tribunal administratif de Bordeaux a notamment condamné le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins à verser au principal à la société des Grands travaux du bassin aquitain la somme de 116.240 euros au titre de l'immobilisation de ses moyens sur le chantier entre le 3 janvier et le 20 août 2003 ; que la société SPIE SUD-OUEST relève appel de ce jugement en tant qu'il la condamne, solidairement avec les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre, à garantir le centre hospitalier à hauteur de 80 % du montant de cette indemnité ; que la société des Grands travaux du bassin aquitain, le cabinet Arsène-Henry et Triaud, M. X et la société Jacobs France forment eux-mêmes, contre le centre hospitalier ou contre d'autres parties, des conclusions incidentes ou provoquées ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'il ressort du dossier de première instance qu'à la suite de la formulation par le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins, défendeur à l'action engagée par la société des Grands travaux du bassin aquitain, de conclusions d'appel en garantie dirigées contre la maîtrise d'oeuvre et la société SPIE SUD-OUEST, le tribunal administratif s'est borné à communiquer ce mémoire aux intéressés, sans leur communiquer la requête introductive d'instance présentée par la société des Grands travaux du bassin aquitain ; qu'ainsi, et alors même qu'elle a fait enregistrer deux mémoires au greffe du tribunal administratif de Bordeaux les 14 novembre 2007 et 26 février 2008, la société SPIE SUD-OUEST, qui n'a pu analyser les implications du litige, n'a pas été mise en mesure de présenter utilement sa défense ; que dès lors, la société SPIE SUD-OUEST est fondée à soutenir que le principe du contradictoire a été méconnu et à demander, pour ce motif d'irrégularité, l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il statue sur l'appel en garantie formé par le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins à son encontre ; qu'il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur cet appel en garantie ;

Sur l'appel en garantie formé par le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins à l'encontre de la société SPIE SUD-OUEST :

Sur la recevabilité :

Considérant que l'action intentée par la société des Grands travaux du bassin aquitain devant le tribunal administratif tendait en particulier à la réparation des conséquences dommageables pour elle de l'inexécution de la deuxième tranche conditionnelle du marché, résiliée par le centre hospitalier à la suite de l'allongement des délais d'exécution des tranches précédentes ; que l'appel en garantie provoqué en première instance par cette action et formé par le centre hospitalier portait sur l'imputation, notamment à la société SPIE SUD-OUEST, desdites conséquences dommageables et ne pouvait dès lors être regardé comme un litige distinct du litige principal ; qu'il s'ensuit que la fin de non-recevoir opposée par la société SPIE SUD-OUEST à la demande de première instance du centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins doit être écartée ;

Au fond :

Considérant en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment d'un rapport de la direction régionale des affaires sanitaires et sociales d'Aquitaine dressé le 28 mars 2000 à la suite d'une inspection réalisée le 7 février précédent, et du rapport d'expertise établi le 24 janvier 2006 sur ordonnance du président du tribunal administratif de Bordeaux, que le nouveau local dédié à la stérilisation du matériel médical, aménagé dans le cadre de la tranche ferme, s'est révélé impropre à sa destination, certes en raison d'erreurs dans sa conception, mais également en raison de défectuosités techniques dans le traitement de l'air ; qu'il résulte dudit rapport d'expertise, non contesté sur ce point, que parmi ces défectuosités, l'absence de schéma et de concept aéraulique assurant des écarts de pression avec les locaux adjacents relevant de classes différentes pour le contrôle de l'atmosphère, et le défaut de définition du taux de renouvellement de l'air en regard des dégagements, de l'occupation interne et des gradients de pression, ont été la conséquence d'études techniques d'exécution insuffisantes ; qu'en vertu du 7 de l'article 1er du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché en cause, les études d'exécution devaient être réalisées en totalité par l'entrepreneur ; qu'ainsi, le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins est fondé à soutenir qu'en exécutant imparfaitement ces études techniques, la société SPIE SUD-OUEST a manqué à ses obligations contractuelles ;

Considérant en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment d'un courrier du préfet de Lot-et-Garonne au centre hospitalier daté du 22 janvier 2003, que le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins a été contraint, eu égard aux exigences de continuité du service public de la santé et à l'impossibilité d'externaliser cette activité, de poursuivre son activité de stérilisation dans des locaux provisoires aménagés dans l'aile Nord de l'hôpital durant le premier semestre 2003 ; que cette circonstance interdisait, durant cette période, le commencement des travaux de la deuxième tranche conditionnelle, lesquels portaient, ainsi qu'il a été dit, sur la réhabilitation de cette aile Nord ; que dès lors, l'indisponibilité des locaux de stérilisation dans l'aile Nord, consécutive notamment aux malfaçons de la société SPIE SUD-OUEST, portait en elle-même le dommage subi par la société des Grands travaux du bassin aquitain du fait de l'immobilisation de ses moyens entre le 3 janvier et le 20 août 2003 ; qu'ainsi, et quand bien même d'autres facteurs ont troublé le déroulement du chantier, le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins est fondé à soutenir qu'il y a un lien de causalité direct et certain entre la faute contractuelle de la société SPIE SUD-OUEST et les préjudices subis par la société des Grands travaux du bassin aquitain qu'il a été condamné à réparer;

Considérant en troisième lieu, que le jugement attaqué, et partiellement annulé, a condamné par ailleurs les membres de la maîtrise d'oeuvre, solidairement, à garantir le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins à hauteur de 80 % des condamnations prononcées à son encontre ; qu'eu égard à ce qui précède, il sera fait une juste appréciation de la part de responsabilité de la société SPIE SUD-OUEST en la condamnant également à garantir à hauteur de 80 % le centre hospitalier des condamnations prononcées à son encontre, solidairement avec les quatre membres de la maîtrise d'oeuvre ; que la société n'ayant pas présenté d'appel en garantie à l'encontre des architectes et bureaux d'études, elle ne peut utilement se prévaloir de leurs fautes, qui ont concouru avec les siennes au retard de lancement de la deuxième tranche conditionnelle, pour s'exonérer de sa responsabilité ;

Considérant en quatrième et dernier lieu que la société des Grands travaux du bassin aquitain a produit dans son mémoire de réclamation puis en première instance de nombreuses pièces qui établissent suffisamment, tant dans son existence que dans son montant, le préjudice qu'elle a subi du fait de l'immobilisation improductive de ses moyens entre le 3 janvier et le 20 août 2003 ; que dès lors, et contrairement à ce que soutient la société SPIE SUD-OUEST, le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins est fondé à soutenir que les garanties prononcées à son bénéfice doivent être calculées sur la base de l'indemnité accordée à la société des Grands travaux du bassin aquitain, soit 116.240 euros ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins est fondé à demander la condamnation de la société SPIE SUD-OUEST à le garantir à hauteur de 80 % de la somme de 116.240 euros, solidairement avec la SELARL Bellon , le cabinet Arsène-Henry et Triaud, M. X et la société Jacobs France ;

Sur les conclusions d'appel du cabinet Arsène-Henry et Triaud, de M. X, de la société des Grands travaux du bassin aquitain et de la société Jacobs France :

Considérant en premier lieu, que des conclusions d'appel provoqué ne sont recevables que si la situation de leur auteur est aggravée par l'admission de l'appel principal ; que d'une part, les conclusions d'appel du cabinet Arsène-Henry et Triaud et de M. X, de la société des Grands travaux du bassin aquitain et de la société Jacobs France, intimés, contre le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins, également intimé, ont été enregistrées au greffe de la cour respectivement le 19 novembre 2010, le 23 novembre 2010 et le 11 mars 2011 ; que les conclusions du cabinet Arsène-Henry et Triaud et de M. X contre la société Jacobs France ont été enregistrées le 29 mars 2011 ; que ces dates d'enregistrement sont postérieures à l'expiration du délai d'appel ; que l'ensemble de ces conclusions d'appel présentent donc le caractère d'appels provoqués ; que d'autre part, le présent arrêt n'aggrave pas la situation du cabinet Arsène-Henry et Triaud, de M. X, de la société des Grands travaux du bassin aquitain et de la société Jacobs France ; que dès lors, lesdites conclusions d'appel provoqué sont irrecevables et doivent être rejetées ;

Considérant en second lieu que les conclusions d'appel incident formées par le cabinet Arsène-Henry et Triaud et M. X contre la société SPIE SUD-OUEST, et qui tendent à ce que cette société les garantisse des condamnations prononcées à leur encontre, présentent le caractère d'une demande nouvelle en appel, et sont à ce titre irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a lieu de faire droit aux conclusions d'aucune des parties tendant au remboursement des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0603028 du 4 novembre 2009 du tribunal administratif de Bordeaux est annulé en tant qu'il condamne la société SPIE SUD-OUEST, solidairement avec la SELARL Bellon, M. X, le cabinet Arsène-Henry et Triaud, et la société Jacobs Serete, à garantir à hauteur de 80 % le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins des condamnations prononcées à son encontre à la demande de la société des Grands travaux du bassin aquitain.

Article 2 : La société SPIE SUD-OUEST est condamnée à garantir le centre hospitalier intercommunal de Marmande-Tonneins à hauteur de 80 % de la somme de 116.240 euros, solidairement avec la SELARL Bellon, M. X, le cabinet Arsène-Henry et Triaud, et la société Jacobs Serete.

Article 3: Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

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N° 10BX00042


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10BX00042
Date de la décision : 16/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

39-06-01-06 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Actions en garantie.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Guillaume de la TAILLE LOLAINVILLE
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : SALESSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-02-16;10bx00042 ?
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